Je regardais le réveil posé sur ma table de nuit. Il indiquait 1h26. Cela faisait plus de deux heures que je me retournais dans mon lit à la recherche du sommeil, en vain. Il faisait trop chaud. Malgré la chaleur cuisante la journée, Suna redevenait plus fraîche à la nuit tombée. Mais cette nuit, la chaleur m'étouffait. J'avais ouvert en grand la fenêtre de ma chambre, laissant entrer les rayons pâles de la Lune. Mais je ne trouvais toujours pas le sommeil.

Je décidais alors d'aller faire un tour. C'était peut-être la maison qui m'étouffait, ou alors j'avais de la fièvre. Quoi qu'il en soit, je me glissais hors de mon lit et de ses draps moites, me laissant tomber sur le parquet sombre. J'enfilais mes habits, tout en laissant mes chaussures à leur place. J'avais maintenant le droit de sortir quand je voulais, mais je ne tenais pas pour autant à réveiller toute la maison.

C'est donc mes pieds nus qui rencontrèrent les pavés froids des ruelles de Suna. Ce froid remonta jusqu'à la racine de mes cheveux et me donna la chair de poule. J'avais la tête qui tournait. Oui, j'avais sûrement de la fièvre. Et ce n'était sûrement pas se balader pieds nus dans Suna la nuit qui allait arranger mon cas.

Néanmoins, je continuais mon périple. Ma tête tournait et j'errais dans les ruelles au hasard. Je n'avais pas peur. Dans tous les cas, les gens que je croisais ne me voyaient pas. La Lune était pleine, et éclairait chacun de mes pas. J'avais hésité à continuer ma balade sur les toits ; mais il était inutile d'affoler la population.

Je regardais un papillon de nuit qui tournait autour d'un lampadaire. Les papillons faisaient partie de mes insectes préférés, surtout les nocturnes. Son triste sort était scellé : il allait finir par se brûler les ailes. J'éprouvais presque de la peine pour cette minuscule créature. Même si je le libérais de cette emprise, il allait immédiatement retourner vers cette lumière, comme drogué. Alors je le laissais faire.

Quand soudain, je sentis une présence au tournant de la ruelle. Une présence malveillante. Il ne m'en fallait pas moins pour reprendre mes esprits. Je me tapis dans l'ombre, et invoqua ma marionnette. Prête au combat.

Comme souvent depuis quelque temps, lorsque la nuit tombe, je me retrouve à me balader hors de ma maison pour contempler la beauté de la nuit. J'apprécie énormément la nuit, froide, noire et surtout calme. Peu de monde dans les rues, si ce n'est personne. Je peux me retrouver seul avec moi-même et me poser toutes les questions que je veux sans être interrompu sans cesse par des passants trop nerveux et trop, excusez-moi du terme, con pour s'excuser où demander gentiment de se pousser. Les marchands qui n'ont aucun scrupule à presque t'agresser pour te vendre leurs babioles de mauvaise qualité et contre faite. Enfin, c'est comme ça pour la plupart des gens et pour moi aussi, jusqu'à ce qu'on découvre qui je suis. Dès que ce moment arrive les gens sont plus calmes et m'évite, pas par respect, mais par crainte. Je me retrouve donc, à nouveau seul. Mais la nuit à cette chose que la journée n'a pas, le vrai calme.

Je me retrouve donc comme d'habitude à errer sans but précis dans Suna, à la recherche de mon moi intérieur et d'un meilleur endroit que le précédent pour contempler la lune ainsi que les étoiles. Généralement ces nuits sont calmes, sauf il y a quelques jours, lorsque ce Kumojin nommé Hachi s'est entre tuer avant d'exploser. C'est l'une des choses la plus bizarre que j'ai eu la chance de voir. Aujourd'hui il ne m'est encore rien arrivé, mais je ne me doute pas pendant une seconde que je vais faire une rencontre qui risque de bouleverser le restant de mon existence et surtout me bouleverser moi.

En effet, au détour d'une ruelle, tapis dans l'ombre, une marionnettiste. J'en ai entendu parler de cette nouvelle genin, en général les marionnettistes ne passent pas inaperçu et sont aimés dans le village. J'en arrive presque à jalouser ma camarade. Mais ce que je vois surtout, c'est qu'elle a sorti sa marionnette et est prête à l'attaque. Ah oui c'est vrai, j'en avais presque oublié mon aura et la très bonne entente qu'il y a entre nos deux clans. Je ne veux pas me battre, je ne veux pas que mon clan me fasse encore plus souffrir qu'il ne le fait déjà. Je suis bien sûr prêt à me défendre, mais pour rien au monde je souhaite me battre contre cette genin. Je n'y veux rien, ni à elle, ni à ceux de son clan. Ce qui s'est passé dans notre histoire est de l'histoire justement. De plus, je ne veux pas y être rattaché, car à part le nom, le physique, l'aura, le pouvoir et d'être mal-aimé, toutes des choses qu'on ne peut pas choisir, je n'ai rien à voir avec les Ketsueki. Oui j'essaye de m'accepter, mais ce n'est pas pour autant que je veux y être rattaché. M'accepter, mon physique et mon pouvoir c'est une chose. Accepter d'être vu comme un vrai Ketsueki une autre. Et je ne veux pas accepter ça. J'espère que cette fille sera compréhensible et qu'elle va m'écouter.

"Ecoute, je ne veux pas me battre je veux rien. J'y suis pour rien si je suis un Ketsueki moi merde ! On peut pas me voir pour la personne que je suis et non pour un monstre pour une fois ?"

Si on ne se bat pas, cette interruption dans mon trajet ne me dérange absolument pas et encore moins si cette fille comprend et accepte le fait que je ne veuilles pas être rattaché à mon clan.

"Et que tu sois Chikamatsu je m'en contre-fiche ! On est en l'an quatorze maintenant on ne va pas ressortir de vieilles querelles. Surtout que je suis en rien lié à mon clan par des choix personnel. Tout ce qui me vient des Ketsueki, je n'y ai pas eu le choix, je suis né avec ces choses. Je sais qu'aujourd'hui beaucoup de choses se passent comme ça mais j'en ai marre. Moi tout ce que je veux c'est pouvoir discuter calmement et que les personnes que je croise la nuit ne veuillent pas me tuer, mais au contraire, discuter et essayer de devenir ami avec moi. Alors, je te pose une question ; est-ce que tu acceptes, malgré nos différents claniques, de faire un bout de chemin avec moi pour discuter ? Où monter sur les toits regarder les étoiles je m'en fous."

Dans tous les cas je ne me battrais pas, elle peut m'attaquer je ne ferais rien pour me défendre et alors là ce ne sera pas ses différents claniques qui seront testé mais uniquement son humanité. Etant donné qu'à mon avis, tabasser quelqu'un qui ne se défend pas et se laisse faire, je n'appelle pas cela un différent de clans.

Devant mes yeux apparu un homme. Ses traits étaient assez flous, éclairés par le lampadaire. Il était grand, beaucoup plus grand que moi. Tant mieux, pensais-je, je serai plus rapide. Ses cheveux longs cachaient un de ses yeux. Je ne voyais pas leur couleur dans l'obscurité mais je devinais qu'ils étaient rouges. Il portait dans le dos une arme, qui avait l'air assez massive vu la poignée qui dépasse au-dessus de sa tête.

Il m'avait vue. Il s'avançait vers moi. J'attendais un mouvement offensif pour attaquer, mais il vint calmement. Sans se presser, sans gestes brusques, sans mouvements que je pourrais prendre pour une agression. Est-ce qu'il me sous-estime ?

Alors que je trouvais la distance entre nous deux beaucoup trop faible et que j'allais lancer la première offensive, celui-ci m'adressa la parole. Même s'il avait l'air un peu irrité, sa voix resta posée et calme. J'en étais bouche bée. Il ne voulait pas se battre.

La suite de son discours me surpris encore plus. Comment savait-il que j'étais une Chikamatsu ? Me connaissait-il ou en avait-il déduit en voyant la marionnette ? Tous les Marionnettistes ne font pas partie de la famille Chikamatsu. Encore était-il qu'il avait touché juste. De plus, il rejetait son clan. Intéressant...

Je ne comprenais pas comment on pouvait rejeter son clan, mais après tout, être né Ketsueki est plus une malédiction qu'autre chose. Même après tout ce que j'avais subi, je ne pouvais pas rejeter mon clan et surtout ma famille, mes ancêtres.

Rien dans son attitude n'indiquait que c'était un piège. Je pensais même que, si je venais à l'attaquer immédiatement, il ne pourrait pas se défendre. J'hésitais. Mon esprit était embrumé par la fièvre. Je n'allais quand même pas attaquer une personne pacifique... Mais au moindre geste hostile, je n'aurais pas de pitié. Après tout, c'était un Ketsueki, nous étions ennemis.

Voyant qu'il attendait ma réponse, je lui fis un signe de la tête. C'était le plus que je pouvais faire, mais il ne paraissait pas s'en formaliser. C'est comme ça que j'en suis arrivée, moi, une Chikamatsu, à marcher côte à côte avec un Ketsueki.

Apparemment, on ne va pas se battre. Elle se referme un peu sur elle-même, mais au moins ne souhaite plus se battre autant qu'avant. Elle accepte même de m'accompagner dans ma promenade nocturne. Jamais je n'aurais pensé qu'elle accepterait ma proposition. Elle a l'air très rattachée à son clan et ses principes. La seule réponse que j'ai eu a été un signe de tête. Peut-être qu'elle a envie de venir, mais que son instinct de clan lui dit le contraire et que du coup, elle s'en mord les lèvres. Bref, je ne le sais pas et je m'en fous, moi tout ce que m'importe c'est qu'elle ne m'attaque pas et qu'elle accepte de venir se promener un petit coup avec moi. J'ai une petite idée, je vais la faire monter sur les toits et de là on pourra discuter.

"Suis-moi !"

J'espère qu'elle ne va pas croire que c'est un piège. Ni une ni deux, je concentre mon chakra dans mes pieds et escalade le mur à ma droite. Arrivé en haut je me fais discret, les gardes risquent toujours de nous tomber dessus et ce n'est jamais bon de devoir expliquer ce que tu fais sur les toits à une heure si tardive. D'après l'avancement de la lune dans le ciel il devait être deux heures du matin. Ma lubie des chiffres et du temps m'aura donné une chose, je peux très facilement savoir l'heure qu'il est à l'aide des astres, qui illumine cette nuit sombre. Après deux minutes, je trouve enfin l'endroit parfait. Je me suis assuré environ tous les dix pas que la Chikamatsu me suivait. Elle gardait sa marionnette activée mais n'en était pas moins discrète. Soit elle ne me fait absolument pas confiance, soit elle ne peut pas ranger sa marionnette. Dans tous les cas ça ne me pose aucun problème. Du doigt je lui montre un toit, deux mètres plus haut qu'où on se trouve. Etant souvent sur les toits du village je les connais. Je sais que sur ce toit, il y a un petit muret qui fait que si on est couché, on est invisible pour les gardes. Je m'assure en regardant partout qu'aucun shinobis du village du sable ne regarde dans notre direction. Je profite ensuite d'un court moment de répit pour donner le signal. La jeune genin est une militaire ce qui implique qu'elle connait les codes de déplacement en territoire hostile lorsque nous ne sommes pas repérés. D'un geste, clair, net et précis je fais signe d'y aller. Nous ne sommes pas loin de notre cible, il va nous falloir moins de trois secondes pour être couché.

Nous y sommes, la nuit est parfaite aujourd'hui. Aucun nuage, un petit vent frais qui vient du désert et surtout, le calme. Le seul bruit que l'on peut parfois entendre c'est les gardes qui marchent ou rigolent un coup. Sinon il y a moi, une marionnettiste avec sa marionnette, le vent, la lune et les étoiles. De plus, la personne qui m'accompagne ne veut pas me tuer, qu'est-ce que je peux demander de plus ?

"Tiens en fait, on ne sait pas présenté. Ketsueki Kazushi. Je pense que tu l'avais remarqué... Je sais que tu es une Chikamatsu, j'ai entendu parler de toi, tu sais une marionnettiste ça ne passe jamais inaperçu. Un Ketsueki aussi tu vas me dire, mais toi tu as la chance d'être attendue et pas crainte... Tout ça pour te demander ton prénom, si tu veux bien me le donner." Lui dis-je en souriant.

"Et si tu veux, je peux t'apprendre le nom des étoiles ainsi que certaines de leurs significations et dans quelle constellation elle se trouve. Je me retrouve très souvent ici, avec un livre ou sans à contempler les étoiles et apprendre leurs noms. Je m'amuse à les compter aussi, mais c'est très compliqué."

J'espère réellement pouvoir créer un lien avec cette fille. Je savais que ne pas avoir d'ami faisait mal, mais depuis que je pense m'en être fait quelques-uns, ça me fait encore plus mal de me rendre compte à quel point je suis seul.

La rencontre improbable avec le Ketsueki m'avait emmenée à me poser plusieurs questions. Ces temps-ci, les gens que je rencontrais m'obligeaient toujours à remettre en question ma façon de penser. Façon de penser qui n'était pas propre à moi-même, mais due à mon éducation.

D'abord, mon sensei m'avait demandé si j'avais des rêves. Et la réalité m'avait frappée de plein fouet. Non, je n'avais pas de rêves, seulement un devoir imposé par ma naissance. Je n'avais pas d'aspirations qui sortaient du contexte du clan ou de la famille. Je ne rêvais pas de voyager, de fonder une famille ou de d'être autre chose que Shinobi.

Puis arrivait ce Manieur de Sang, qui m'annonçait le plus tranquillement du monde qu'il avait toujours rejeté son clan. Rejeter son clan, ne plus vivre selon leurs lois et leur influence. Choisir sa destinée soi-même, sans se préoccuper de l'avis général.

Cela ne servait à rien d'y penser. Je me ferais tuer par mon père avant d'avoir franchi la porte de Suna. S'il savait qu'en ce moment même, je me promenais avec un Ketsueki... Cette pensée m'arracha un sourire. C'était quelque chose que j'avais décidé.

Pourquoi devrais-je haïr ce type ? Il ne m'avait rien fait. Il n'avait même sûrement jamais fait de mal à un marionnettiste. Peut-être même n'avait-il jamais fait de mal à personne. Et je devrais le haïr pour une naissance qu'il n'avait pas choisie. C'était stupide. Tellement stupide qu'un autre sourire vint sur mon visage. Heureusement qu'il faisait nuit, il m'aurait prise pour une malade mentale, à sourire toute seule dans le noir.

Peut-être aussi qu'il faisait finalement partie des méchants. Peut-être qu'il m'attirait en ce moment même dans Vampire's Land.

Ses paroles m'arrachèrent à mes pensées. Ah, finalement j'allais bien marcher sur les toits de Suna. Arrivés sur un toit qui lui convenait, le Ketsueki s'allongea sur le dos. Moi, j'étais assise en tailleur. Je n'avais pas rangé ma marionnette, mais je pensais que le moment était venu. Après tout, si je devais finir dévorée par ces vampires, je ne pourrais pas voir mon père marmonner sur ma tombe "Je te l'avais bien dit."

Vint le moment des présentations. Mon interlocuteur s'appelait Kazushi. Il avait l'air de beaucoup souffrir de la réputation de son clan. Lorsqu'il finit sa phrase en souriant, la lumière de la pleine lune se refléta sur ses dents. Ses canines étaient un peu plus longues que la moyenne, mais ce n'était pas extrêmement flagrant. Pouvait-il vraiment transpercer la peau, les muscles avec ça ? En fait, je ne voulais pas le savoir.

Puis ce fut mon tour de me présenter. Aïe, voilà que ça posait de nouveau problème. La lune éclairait pas mal, mais pas assez tout de même pour lire. Puis une idée me vint. J'avais heureusement pensé à prendre mon téléphone portable.

J'ouvris donc un nouveau Mémo, et tapait le maigre résumé de ma vie.

« Je m'appelle Ruri. Chikamatsu Ruri, comme tu as pu le remarquer aussi. Je ne peux pas parler, je suis désolée, ce n'est pas de la mauvaise volonté contre toi. »

J'avais acquiescé pour sa proposition sur les étoiles. Je n'en connaissais presque pas, ou du moins les plus célèbres, mais je trouvais ça intéressant. Nous avons discuté pendant encore un moment, quelques heures sûrement, de tout et de rien. J'appris qu'il participait à l'Examen, et je lui souhaitais bonne chance. Mais déjà le jour se levait.

Oh, elle ne parle donc pas parce qu'elle est muette. Étrange. Ce n'est pas tous les jours qu'on peut rencontrer une personne muette et pour elle, kunoichi cela doit être très compliqué. Ne pas pouvoir adresser la parole à ses partenaires doit être une sensation bien étrange.

On peut voir le soleil se faire sa place à l'est, il va gentiment être temps de rentrer. La troisième épreuve de l'examen débute dans deux jours et oui je dois me détendre et m'entraîner, moi je dois aussi me reposer. Je ne peux me permettre d'envisager un combat après une nuit blanche. Nous avons énormément discuté pendant cette nuit, de tout et de rien. J'ai pu montrer une partie de l'étendue de mes connaissances en astronomie, raconter l'examen et pleins de choses. Vu son mutisme, la jeune Chikamatsu a beaucoup plus écouté ce que j'avais à lui dire qu'elle n'a parlé. Je ne peux pas lui en vouloir et c'est tout à fait compréhensif. J'aimerais réellement la rencontrer à nouveau et tisser des liens avec elle, mais je pense bien que sa famille et la vie s'oppose au caractère de ces choses. Il va bientôt être l'heure de se quitter. J'ai appris son prénom durant la nuit, Ruri. J'aime beaucoup je trouve ce prénom simple et très poétique. Il est l'heure des au revoir.

"Au revoir Ruri, j'ai fortement apprécié ces quelques heures en ta compagnie. J'espère qu'on aura la chance de se revoir." Lui dis-je en souriant.

Je me lève et ramasse mon sabre, il faut que j'aille dormir, car cet après-midi je vais devoir m'entraîner et pour cela je dois être en pleine forme. Lors de mon retour à la maison j'ai pu voir les premières étales de Suna ouvrir. De la fumée sort des cheminées du forgeron et on peut déjà l'entendre battre le fer. L'odeur du pain de la boulangerie du coin rempli mes narines, je décide d'y faire un arrêt pour grignoter un petit pain sur le chemin du retour.