Dépasser ses propres peurs, et devenir quelqu'un de sûr [Solo]

Automne année 13 - Terrains d'entrainements de Konoha

Nozomi était rentrée depuis quelques heures de Ki no kuni, accompagnée de son équipe créée pour l'occasion. Un Nara ainsi qu'un anbu. Et même si elle avait pu sauver des vies, cette escapade lui avait laissé un goût amer. Elle était restée plutôt silencieuse durant le voyage de retour. Elle les avait quittés avant de revenir à son logement. Cette auberge réservée aux nouveaux arrivants et aux étrangers de passage. Il était peut-être temps pour elle de se trouver un vrai logement, une petite maison à elle. Un endroit qu'elle aurait choisit et qui signifierait qu'elle se sentait bien à Konoha et décidait de s'y installer. Mais pour le moment elle n'avait pas la tête à ça.

Arrivée dans la chambre louée de l'auberge, elle déposa Haru pour qu'il puisse aller se reposer. Puis elle-même prit une douche et se changea, revêtant ses vêtements habituels. Elle délaissa ceux de mission ainsi que la chambre. Mais avant d'en sortir, la jeune femme s'empara du bâton de son clan. Elle avait besoin de marcher et de réfléchir. Elle sortit donc apprécier la fraîcheur du soir et se promena sans but dans le village.

Malgré sa tenue ainsi que son bâton de marche, les gens la saluaient. Personne ne lui avait jamais fait de remarques désobligeantes sur cela, ou sur le fait qu'elle avait fait partie du Shôraizen. Il y avait bien de temps en temps quelques regards suspicieux, mais ça n'allait pas plus loin. Et pourtant, elle se trouvait dans un village shinobi. Un village peuplé de gens qu'elle avait toujours détestés. Elle les avait rendus responsables des guerres, de la décimation de son clan et de bien d'autres choses encore. Elle s'était toujours méfiée d'eux et pourtant l'inverse n'était pas vrai. Ils lui faisaient rapidement confiance, et étaient chaleureux et avenants envers elle. Et la jeune femme se sentait coupable.

Accoudée sur un pont, elle observa sans vraiment la voir l'eau qui coulait en dessous. Jamais elle n'aurait cru un jour faire partie d'un village shinobi, et côtoyer ceux qu'elle haïssait depuis si longtemps. Son propre bandeau était glissé dans une de ses sacoches et la jeune femme ne le portait jamais. Ils avaient tant semé la destruction... Elle se refusait à penser qu'elle était comme eux. Pour sa part, elle avait passé sa vie à soigner les gens, à aider, sans jamais rien demander en retour. A réparer ce que les conflits avaient créés. Alors qu'eux, à ses yeux, n'avaient jamais rien fait d'autre que semer la mort et la destruction. Et pourtant, elle n'avait rien vu de tout cela ici. Certes, il y avait des exceptions. Comme cet homme à Ki qui en avait tué un autre. Car il avait eu peur, car il avait tout perdu et qu'il lui fallait un coupable.

Tout comme elle.

La Myouga avait perdu tout son clan durant la grande guerre. Elle était la seule rescapée. La seule personne avec qui elle avait encore des liens de sang était perdue dans une quête de vengeance. Même sa famille adoptive avait perdu la vie. Son frère dans un énième conflit, ses parents par un groupe de shinobis qu'elle avait combattus avec le Shôraizen. Organisation détruite, dont il ne restait plus rien. Elle avait perdu aussi son petit ami, tué par le kage du village où elle résidait. Femme qui était aussi en partie responsable du démantèlement de ce qu'elle avait considéré comme sa nouvelle famille. Peut-être qu'elle aurait dû la haïr elle aussi. Tout comme Milly la haïssait. Après tout, elle était une shinobi elle aussi. Mais Nozomi n'y parvenait pas. Parce qu'elle lui avait sauvé la vie, et avait apprit à l'apprécier. Tout comme elle commençait à apprécier ce village, son village qu'elle avait sous sa protection. Un Konohajin passa à côté de la jeune femme, projetant en marchant un petit caillou dans l'eau. Celui-ci vint perturber son reflet.

Un petit caillou... Et la jeune femme parti dans ses souvenirs. Elle se rappela cette conversation qu'elle avait eue avec Goren. A propos de la haine et de la vengeance,qu'il avait représentées par une pierre gênant sous le pied. Elle s'était laissée envahir par ces sentiments, troublant son cœur tout comme son reflet l'était actuellement. Durant toutes ces années, elle avait jugé les shinobis responsables de tous ses maux. Elle les avait condamnés sans chercher à les comprendre. Et depuis qu'elle était arrivée à Konoha, elle avait apprit à les apprécier. Non, c'était arrivé avant, petit à petit. Ça avait commencé avec les déserteurs de ce village avec qui elle s'était liée d'amitié, et même d'amour. Puis, perdue, elle était même venue ici car elle avait fait confiance à Miko.

Oui elle avait haï les shinobis durant toutes ces années alors qu'ils n'y étaient pour rien. Car plus elle les avait côtoyés, et plus elle s'était rendue compte qu'ils s’efforçaient eux aussi de protéger les leurs. De faire ce qu'il leur semblait le plus juste. De la même façon que Miko avait tué l'homme de sa vie, car elle le croyait mauvais. Et Nozomi, malgré tout l'amour qu'elle lui avait porté, savait qu'elle avait eu raison. Il sombrait. Comment haïr quelqu'un qui protégeait ceux qu'elle aimait ? Comment pouvait-elle continuer des les condamner tous pour les gestes de quelques uns ? A Ki no kuni, un homme avait été tué sous ses yeux. Par un shinobi. Car il avait eu peur et avait eu besoin de déverser sa peur et sa colère sur quelqu'un. Et elle en avait fait de même. Durant tout ce temps, elle avait eu besoin d'un coupable.

Alors que la seule fautive, la seule personne à haïr, c'était elle-même.

Oui, quelques shinobis avaient été responsables de la mort des siens. Parce qu'elle avait été faible, et n'avait pas su les protéger. Elle avait sans cesse agit après les événements, soignant les gens une fois qu'ils avaient été blessés. Constatant les dégâts et fermant les yeux des morts. Pendant que les shinobis, eux, protégeaient les gens qu'ils aimaient et leur évitaient d'avoir à subir cela. Car ils s'étaient entraînés, et étaient forts. Tandis qu'elle-même, aveuglée par la haine qu'elle leur portait, s'était refusée à se croire l'une de leurs semblables. Elle s'était toujours considérée comme une civile, avec un peu plus de moyens. Et s'était contentée de subir, d'agir après coup. D'intervenir une fois que tout était terminé. Crachant sur les shinobis responsables à ses yeux de tout cela.

Alors que si elle s'était d'avantage entraînée, si elle avait su les protéger, peut-être que les siens seraient encore là aujourd’hui. A ses côtés. Au lieu de ça, elle était seule. Ils étaient tous morts, à cause de sa propre faiblesse. Et il était trop tard désormais, elle ne pouvait pas revenir en arrière. Par contre, elle pouvait décider de changer. De protéger ceux qu'elle avait détestés injustement. Ceux qu’elle avait commencé à apprécier, à aimer. Les ondes sur l'eau s'estompèrent peu à peu, jusqu'à totalement disparaître. Elle observa alors son reflet calme et serein, tout comme son cœur. A elle de veiller à ce que plus aucun caillou ne vienne troubler son jugement.

La jeune femme releva la tête, et un léger sourire sur le visage elle se dirigea d'un pas assuré vers les terrains d’entraînements. Elle savait ce qui lui restait à faire. Elle aurait pu demander à ce qu'on l’entraîne, ça aurait certainement été plus rapide et elle aurait pu mieux assimiler les choses. Mais elle prenait cela à cœur, et de façon personnelle. C'était quelque chose qu'elle désirait, et devait, accomplir seule. D'autant plus qu'elle devait commencer par affronter ses propres peurs, ancrées au plus profond d'elle même.

Le feu. Cet élément qui la terrorisait depuis toute petite. Elle en avait longtemps fait des cauchemars, toutes les nuits. Sans en connaître l'origine, ni même la signification. Puis ils s’étaient estompés. Et il y avait eu l'île, qui avait ravivé des souvenirs enfuis de sa plus petite enfance. Alors elle s'était rappelée de tout ce qu'il s'était déroulé ce jour là. De sa mère et ce qui lui avait été fait. De son père, emmené ailleurs tandis qu'on lui faisait croire que les deux femmes de sa vie étaient mortes. De ces hommes mettant le feu à cette cabane qui avait été leur foyer, avec elles deux à l'intérieur. De ses propres cris et larmes, cette chaleur étouffante. Ces flammes qui lui avaient léché la peau et lui avaient laissé des cicatrices à vie.

Elle caressa malgré elle ses bras recouverts de tatouages factices, ayant pour seul but de cacher ces anciennes brûlures. Cette peur du feu lui gâchait la vie depuis longtemps. Elle risquait de mettre en danger son village si elle restait paralysée de peur face à une attaque katon de grande envergure. Et toutes ses bonnes résolutions n'auraient alors servit à rien. Alors, ce qu'elle devait faire c'était de combattre cette peur, jusqu'à la dompter et qu'elle ne devienne qu'un lointain souvenir. Peut-être aurait-elle pu demander à un Yamanaka de l'aider pour cela. Mais elle avait déjà assez demandé d'aide, c'était à elle d'agir désormais. Et pour cela elle ne voyait qu'un seul moyen : faire directement face à cet élément, quitte à se mettre en danger.

Ses pas l'avaient menée devant les terrains d’entraînements. Elle en choisit un empli d'arbres, le plus loin possible des habitations et des différents bâtiments. Là, elle serait tranquille et pourrait mener à bien ce qu'elle avait décidé de faire. D'autant plus que la nuit tombait et que les gens commençaient à aller se coucher. Les terrains étaient vides, la jeune femme était visiblement seule ce soir là. Ce qui l'arrangeait bien. Elle prit une grande inspiration et forma quelques mudras. Un éclair vint frapper la branche d'un arbre, la faisant tomber à terre. Celle ci s'embrasa rapidement. Nozomi s'en approcha, le sourire aux lèvres.

La jeune femme s'accroupit aux côtés de la branche qui brûlait. Doucement, elle approcha ses doigts de cet élément qu'elle redoutait tant. De plus en plus près, jusqu'à ce que les flammes lui lèchent la peau. Son sourire avait disparu, son visage était désormais crispé. Elle se força à laisser sa main ainsi, jusqu'à ce que la douleur lui force à l'enlever. Puis elle l'observa et se soigna. La brûlure s'estompait petit à petit, jusqu'à ce qu'elle n'ait plus rien. Elle avait mit sa main dans le feu, et en était ressortie indemne. Elle venait de se prouver qu'elle pouvait combattre cette peur, même si la sueur coulant dans son dos disait le contraire.

Mais ça ne suffisait pas. Si jamais un jour le village prenait feu, ce n'était pas ainsi qu'elle parviendrait à le sauver. Car avec des flammes plus hautes qu'un homme elle resterait certainement clouée sur place. Alors elle se releva, et éteignit la branche à l'aide de sa maîtrise du suiton. A elle seule, elle avait la capacité de faire prendre feu à des objets et de les éteindre. Elle pouvait contrôler sa phobie. Ce qui n'était pas le cas de tous le monde. Quelque part, elle avait de la chance et pouvait s'en réjouir.

Et il était temps pour elle se se débarrasser de cette phobie qui lui venait de sa plus tendre enfance. Elle était adulte désormais. La jeune femme ferma les yeux et se concentra. Elle se concentra sur son propre corps, sur la nature de son chakra. Sur cette affinité qui s'était révélée à elle quant elle avait dû se sauver la vie seule. La foudre faisait partie d'elle depuis sa naissance. Puis grâce à l'héritage de son clan, elle se concentra ensuite sur son environnement. Elle ressentit ainsi tout ce qui l'entourait, tous les arbres situés autour d'elle. Et enfin, elle rouvrit les yeux. Puis elle laissa son élément primaire la parcourir toute entière.

Un véritable orage s'abattit sur toute la végétation du terrain, l'embrasant rapidement. Au bout de quelques secondes, Nozomi baissa les bras et reprit son souffle, observant le résultat de son attaque. C'était la première fois qu'elle en faisait une de cette ampleur. Il fallait dire aussi qu'elle n'avait jamais prit le temps de se concentrer ainsi, la maîtrise du raiton s'était toujours faite chez elle de façon instinctive.

Le feu s'était propagé rapidement, peut-être plus vite que ce qu'elle avait prévu. Les flammes mangeaient tout ce qu'elles pouvaient, avançant dangereusement vers elle. Les arbres se faisaient littéralement consumer. Le feu se reflétait dans les yeux de la jeune femme, grands ouverts. Son cœur battait la chamade, des sueurs froides coulaient tout le long de son corps. Le souffle court, elle tentait de combattre sa peur, sa phobie. Elle baissa alors les yeux vers sa main, soignée quelques instants plus tôt. Elle était intacte.

Alors elle releva les yeux vers le feu. Elle pouvait le faire ! Elle pouvait le combattre et l'éteindre ! Du moins, c'est ce qu'elle se disait en tentant de se rassurer. Un arbre craqua, et s'effondra non loin d'elle. Des étincelles sautèrent à ses pieds, embrasant l'herbe. Des branches tombèrent d'autres arbres, faisant prendre feu à leur tour à ce qu'il restait du terrain d’entraînement. Si elle ne faisait rien, il serait bientôt ravagé.

L'arbre tombait, mais ce qu'elle vit c'était la poutre de sa cabane s’effondrant au sol. Le toit prenait feu, tout comme les murs et leurs meubles. La chaleur atteignait sa peau. L'enfant recroquevillée pleurait sa mère gisant à quelques mètres de là, tandis qu'elle-même se faisait brûler vivante. Sa gorge et ses poumons pris par la fumée lui faisaient mal. Prise entre souvenirs et réalité, la jeune femme tomba sur les genoux, les joues ruisselant de larmes et tremblant de tout son être.

Combien de temps était-elle restée ainsi ? Elle n'en avait aucune idée. Oscillant entre la vie et la mort, entre souvenirs et réalité, elle ne pouvait détacher ses yeux du spectacle qu'elle voyait. De ces sensations familières qu'elle avait ressenties quasiment chaque nuit depuis celle là. Et puis elle entendit une voix, et sentit des présences non loin. Nozomi cligna des yeux plusieurs fois, et essaya de revenir à la réalité. Tout comme autrefois, on venait la sauver, incapable qu'elle était de le faire seule. Pourtant, elle n'était plus cette enfant.

Elle se rendit compte de l'état pitoyable dans lequel elle se trouvait. Était-elle restée la même à ce point ? Cette petite fille sans défense ? Elle avait grandit, mûrit. Elle avait apprit à maîtriser ses pouvoirs et ses émotions. Alors pourquoi se laissait-elle envahir de cette façon ? Honteuse, elle tenta tant bien que mal de se relever. Les flammes avaient quasiment eu raison d'elle car elle s'était laissée faire. Même ses vêtements commençaient à prendre feu. « Laissée faire », c'était bien cela.

- « Non, ne m'aidez pas ! »

Pas cette fois-ci, pas encore. Qu'il y ait vraiment des gens ou non, elle désirait s'en sortir seule. Elle toussa pour éclaircir sa voix et prendre un peu plus d'assurance, puis reprit d'une voix plus forte :

- « C'est à moi de le faire ! »

Debout sur ses jambes encore tremblantes, elle défia le feu du regard. Ce feu qui l'avait durant si longtemps brûlée de l'intérieur. Ce n'était pas de cette façon qu'elle pourrait sauver ceux qu'elle aimait. Sa mère, son grand père, sa tante, son cousin et sa cousine du clan Myouga... Ses parents et son frère du clan Joki qui l'avaient recueillie... Elle les revit l'espace d'un instant devant elle. Ils étaient morts et ne pouvait plus rien pour eux. Ils étaient morts car c'était eux qui l'avaient protégée. Ils avaient donné leurs vies pour elle. Plus jamais ça.

Nozomi mit une main dans sa sacoche, et en sortit le bandeau de Konoha qu'elle accrocha fièrement sur son front. L'aubergiste, la boulangère de la rue, les enfants qu'elle avait croisés. Tous les shinobis de Konoha et surtout Miko. Celle qui portait ce village sur ces épaules. C'était à son tour de tout donner, de les protéger et ce n'était pas en restant sur un échec qu'elle y parviendrait.

Les flammes brûlaient sa peau mais cette fois ci elle n'en avait cure. Elle se concentra de nouveau, attirant à elle toute l'eau environnante. Cet élément bienfaiteur qu'elle avait apprit à maîtriser pour combattre celui dont elle avait peur. Il était temps d'apprendre à le contrôler de manière adéquate. Elle s'était toujours refusée à se croire shinobi, car elle ne se considérait pas comme telle. Mais elle l'était, qu'elle le veuille ou non. Alors autant l'assumer. Et un raz de marée s'abattit cette fois ci sur tout le terrain, éteignant le feu ravageur en quelques secondes. Elle tourna ensuite sur elle-même, jetant quelques jets d'eau sur les foyers encore fumants pour les éteindre complètement.

Elle l'avait fait. Elle avait réussi. Mais à quel prix ? Elle avait complètement ravagé tout un terrain. Même si les Hayashi le remettraient certainement en état rapidement, elle se demandait quelle pourrait bien être la réaction de Miko. Mais au fond, elle s'en fichait un peu. Elle avait combattu ses peurs. Celle des shinobis, celle du feu.

Elle n'était plus Nozomi, médecin itinérant unique rescapée du clan Myouga.

Elle était désormais Myouga Nozomi, fière shinobi de Konoha.

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