Une chaleur écrasante m’accueillit alors que je venais tout juste d’ouvrir les yeux, sentant ma peau déjà moite par toute la sueur de la nuit. Cette journée s’annonçait pour être des plus chaudes, si j’étais déjà trempé alors que je n’étais même pas encore sorti de mon lit. Peu importe ce que j’avais prévu faire aujourd’hui, je le remettrais à demain. Lentement, je sortis de mon lit et la première chose que je fis fut d’aller passer un bon cinq minutes sous une douche froide. Non seulement cela baissait ma température, mais je me lavai et j’en ressortis complètement réveillé. Bon d’accord, les premières secondes furent éprouvantes tant la différence de température fut importante, mais je ne regrettais en rien ce petit arrêt avant d’aller déjeuner.

Malheureusement pour moi, la température n’alla qu’en augmentant, même avec toutes les fenêtres grandes ouvertes. Au bout d’une heure c’était comme si je n’étais jamais allé sous la douche. La peau moite, le front trempé, j’étais prisonnier de la lassitude que causent les trop hautes températures. Affalé dans mon sofa, sous la brise intermittente de mon ventilateur, j’essayais de survivre à cette journée. C’est alors que je décidai que cela ne servait à rien de rester ici à cuire dans mon appartement et que je trouverais bien un coin dans tout ce village où on pouvait être un minimum à l’aise.

- Allez, Aka, j’en ai assez de cuire ici.

Ce dernier devait avoir eu la même idée que moi – ou bien l’acceptait avec gratitude – puisqu’il était déjà devant la porte avant même que je n’ai fini de me hisser hors de mon fauteuil. Ouvrant la porte, je fus aussitôt accueilli par une bourrasque bienfaitrice et me félicitai de mon idée. Sortant dehors, je fus toutefois surpris de voir qu’il n’y avait pas d’autres bourrasques qui suivirent. Sûrement la première avait-elle été causée par la porte s’ouvrant subitement, mais même s’il n’y avait pas de vent au moins je n’écrasais pas sous la chaleur comme dans mon appartement. Sans me presser, le moins je me pressais le mieux c’était, je fis le tour de mes coins de détentes favoris à la recherche du coin idéal. Parmi tous les endroits où j’ai pu faire un somme dans les dernières années, il y en aurait certainement un qui m’aiderait à supporter cette chaleur.

Je disais cela, mais mes premiers essais ne furent pas très fructueux. Soit l’endroit se retrouvait plombé de soleil à cause de la position de ce dernier dans le ciel, soit il était déjà achalandé par ceux ayant déjà eu la même idée que moi ou il y avait une autre raison quelconque. Je commençais à penser que j’avais eu cette idée trop tard et que je ne trouverais jamais un coin tranquille lorsque je vis un petit coin qui pourrait très bien être l’oasis que je cherchais, dans les quartiers résidentiels – même si je n’avais aucune idée dans quel quartier je me trouvais précisément. Logé entre deux immeubles, on aurait dit un parc miniature, avec simplement un ou deux arbres, quelques fleurs et, le plus important, un banc à l’ombre d’un des arbres. Marchant plus rapidement malgré moi tant j’avais hâte d’y être arrivé, je me glissai sous l’ombre des arbres avec un léger soupir. C’est que ça faisait du bien de ne plus avoir le soleil qui nous tapait sur la tête! Sans plus attendre, j’allais m’asseoir sur le banc et étirai les jambes.

- Eh bien, j’en ai fait du chemin pour te trouver…, dis-je à l’intention de mon nouvel oasis. Un aboiement retentit à côté de moi et je tournai la tête vers mon ninken, qui avait de toute évidence quelque chose à rajouter. Quoi? Je n’ai pas le droit de parler à mon oasis?

Un grognement plaintif vint de la part d’Aka, exaspéré par mon attitude. Cela m’amena un sourire aux lèvres alors que je fermais les yeux et profitais de l’ombre de l’arbre. Même s’il ne ventait pas, le simple fait d’être à l’ombre rendait la chaleur supportable. Après tout, l’été était ma saison préféré, je n’allais pas chigner sur un peu de chaleur, sauf lorsqu’elle était insupportable comme aujourd’hui – comme on disait, trop c’était comme pas assez.

Je venais tout juste de m’installer, heureux de ma trouvaille, et discutais avec mon ninken lorsque, tout d’un coup, l’arbre sous lequel je m’étais installé commença à me parler. Dès que j’entendis la voix, je sursautai et mon regard se riva sur l’arbre, incrédule. Était-ce mon imagination ou cet arbre venait de me parler? Serait-ce la chaleur qui commence à me monter à la tête et me faire halluciner des voix? J'eu finalement réponse à mes interrogations et non, ce n’était pas l’arbre qui venait de me parler, mais bien celui qui était camouflé dans son feuillage. Sautant de son perchoir pour retomber devant nous, ce dernier se plaint alors de notre arrivée, comme quoi il avait eu le même problème que moi. Je savais que je m’y étais pris trop tard; tous les bons coins sont déjà pris! Mais au lieu de me chasser, comme je l’aurais pensé – il n’avait pas l’air très enthousiaste à l’idée de partager son coin – il me demanda si c’était bien un chien-ninja que je trainais avec moi. Mon visage s’illumina aussitôt.

- En effet, c’est bien un chien-ninja qui est en train de dormir à mes pieds; il s’appelle Akamori. Et ne t’inquiètes pas, il ne va pas te manger. Au contraire, malgré ce que sa grosseur laisse penser, ce dernier est très amical… sauf quand tu marques ton territoire, ajoutai-je à la blague avec un clin d’œil, en référence à ce qu’il avait suggéré plus tôt.

Et là, juste pour me contredire, Akamori leva un œil vers ce qui pouvait bien le déranger et dès qu’il vit le jeune homme il laissa échapper un bruit étrange, à mi-chemin entre le soupir et le grognement, avant de refermer les yeux.

- Euh… peut-être qu’aujourd’hui n’est pas la meilleure journée pour lui, mais quand il ne fait pas aussi chaud il est super sociable!

Je me grattai l’arrière de la tête, un peu mal à l’aise. Évidemment, il fallait qu’Aka fasse exactement le contraire de ce que je venais de dire. J’avais l’air de quoi, moi? Du pire imbécile, voilà de quoi j’avais l’air. J’allais m’en rappeler de celle-là, Aka. Enfin, maintenant que le jeune homme était devant moi et que je savais que je n’étais pas le seul à avoir trouvé ce petit coin tranquille, j’espérais pouvoir rester quand même parce que si ce n’était pas ici je ne trouverais pas d’autres coins et serait forcé de retourner à la maison, ce que je voulais éviter à tout prix. J’avais déjà fait le tour du village au complet sans trouer de coin paisible, avant celui-ci évidemment; c’était mon dernier espoir, ma bouée de sauvetage. J’eus alors une brillante idée qui risquait peut-être de plaire à mon compagnon d’oasis.

- Écoutes, j’ai une proposition à te faire. Il fait ridiculement chaud aujourd’hui et aucun de nous deux ne veut être sous le soleil. D’un autre côté, je ne veux pas que ça devienne un forum et que nous n’ayons plus de place pour respirer. Ce que je propose, c’est tout simplement… un chien de garde. Tout en disant cela, je posai mon regard sur mon ninken, qui comme s’il savait qu’on parlait de lui releva la tête. - Qu’en penses-tu, Aka? Serais-tu capable de faire en sorte que nous ne soyons pas dérangés?

Ce dernier me fixa quelques secondes, puis reposa sa tête sur ses pattes et referma ses yeux. Cela ne voulait peut-être rien dire pour celui avec qui je partageais cette oasis, mais pour ma part j’avais compris. Même si cela n’avait pas paru lorsque je lui avais demandé son opinion – parce que même l’opinion d’un ninken est importante – je savais que ce dernier ferait en sorte qu’on ne nous importune pas. Après tout, lui autant que nous voulait profiter d’une journée paisible à l’ombre. Je me tournai alors vers mon nouvel ami pour lui expliquer la situation.

- Excellent, c’est réglé alors! On n’aurait pas dit, mais il veut rester tranquille tout quant que nous; je crois que nous ne serons pas achalés aujourd’hui. Donc… marché conclu? Moi c’est Takeo en passant.

En même temps que je tendais la main devant moi, pour officialiser le tout, j’en profitai pour également me présenter. Après tout, si nous étions pour passer la journée en compagnie de l’autre, valait mieux au moins savoir son nom. Même si sa réponse se faisait attendre, peut-être pesait-il le pour et le contre, j’étais assez fier de mon idée. Après tout, si lui avait été intimidé pas mon ninken, n’importe qui qui voudrait squatter notre coin le serait également ce qui nous apportait la paix assurée.

Sacré Akamori, pire qu’une femme je vous dis! Mais n’allez pas le lui dire, il m’en voudrait pendant je ne sais combien de temps et je n’aurais pas fini d’en entendre parler. Par contre, moi j’allais bien m’en rappeler de cette fois… Enfin bref, même si Aka avait fait preuve de peu d’amabilité depuis que nous avions fait la rencontre avec le jeune homme, ma blague semblait l’avoir convaincu du bon comportement de mon ninken. En tout cas, ce n’était pas aujourd’hui qu’il aurait des problèmes, il faisait tellement chaud que tout cela était bien le dernier de ces soucis. Ce dernier ajouta que les ceux contrôlant le Suiton devait faire fortune et juste penser à de l’eau et j’eu une légère faiblesse à l’intérieur. C’était bien ce qui manquait à cette chaleur extrême!

Ce qu’il ne manquait pas par contre, ou plus, c’était un peu d’ombre. Maintenant que j’avais trouvé ce coin qui était, on va se le dire, idéal pour aujourd’hui, j’avais beaucoup de mal à le quitter sachant que quelqu’un était arrivé avant moi, alias celui devant moi. C’était pourquoi, sous l’inspiration du moment – et la nécessité – je trouvai finalement l’idée de génie qui risquait de plaire à tous. L’idée était simple, mais ô combien efficace. Dès que quelqu’un s’approcherait de notre coin, un simple grognement de la part de mon ninken, peut-être même un regard de sa part, et n’importe qui tournerait de bord. Heureusement pour moi qu’Aka consentit à mon plan, sinon LÀ j’aurais vraiment eu l’air d’un idiot. Mais je connaissais mon ninken; il voudrait tout autant que nous garder cet endroit tranquille. Le petit sourire en coin que j’eu en réponse m’indiqua qu’il ne semblait pas déprécier ma proposition et quelques secondes plus tard ses mots le confirmaient. Puis, à ma surprise, le jeune homme s’approcha de mon ninken et tendit la main. Quand vint le moment critique, je retins mon souffle, ignorant moi-même comment il allait réagir.

Voyez-vous, quand il est importuné, mon ninken devient parfois imprévisible. Nul besoin de vous dire que cette chaleur importunait beaucoup Aka, je ne savais donc pas comment il allait réagir. Des fois tout se passait bien, mais d’autres fois il était vraiment désagréable. Pourtant, rien encore ne m’avait laissé croire qu’il était particulièrement de mauvaise humeur. Après tout, il pouvait rester en paix pour le restant de notre passage ici. Comme de fait, ce dernier se laissa flatter le dessus de la tête – un de ses point en plus, il avait eu de la chance sur ce point-là – et resta silencieux, n’émettant aucune plainte. Cela semblait avoir convaincu le jeune homme, qui se releva et accepta la main que je lui tendais. Ce dernier se présenta comme étant du clan Nara, Kakugyô de son prénom. Cependant, il préférait qu’on l’appelle Kaku, ce que je préférais également. Il me fit alors remarquer que Aka n’avait pas eu l’air des plus enthousiaste à notre idée, bien qu’il y ait consentit. À ça, j’agitai simplement la main avec un léger « Pff » afin qu’il ne s’en fasse pas outre mesure, ne voulant pas non plus l’interrompre que pour ça. Malgré ses airs de je-m’en-foutisme, ce dernier était tout content que nous que cet endroit n’était pas bondé et ferait lui aussi en sorte que cela reste ainsi. C’était aussi profitable pour lui que pour nous. Il me posa alors une question sur comment nous nous étions rencontrés et je commençais aussitôt mon récit.

- Cela remonte à bien des années. J’étais encore qu’un gamin, je devais avoir quatre ou cinq ans. C’est à peu près toujours à cet âge-là que les Inuzuka rencontrent leur premier compagnon quand ce n’est pas le seul, ce qui n’est pas tous les cas. J’avais donc cet âge-là quand j’ai rencontré Akamori et nous ne nous sommes pas quittés depuis!

Pour la première fois de la journée, Akamori eut finalement une réaction qui était autre qu’un grognepir (J’aimais trop l’expression). En effet, ce dernier semblait de toute évidence écouter notre conversation d’une oreille discrète puisqu’il réagit aussitôt à la mention de notre rencontre, lançant un aboiement heureux comme s’il voulait rajouter quelque chose. Évidemment, j’avais compris ce qu’il avait voulu dire – il se rappelait également de cette journée – mais je doutais que Kaku-san n’y ait compris quelque chose.

- Il s’en rappelle aussi, ajoutai-je simplement en guise d’interprète.

Je me remémorai quelques secondes la grande famille de mon ninken, lui-même étant le treizième de la famille, et ma promenade en forêt où je les avais rencontrés. Je serais resté plus longtemps dans mes souvenirs, mais mes yeux interceptèrent un mouvement devant moi et vis alors que c’était simplement une bouteille d’eau que le Nara me tendait. Comme tout bon Nara qui se respectait, il avait pensé à tout. Je le remerciai d’un signe de tête et en pris une autre pour Aka, que je le lui lançai. La bouteille fit une belle courbe et atterrit directement dans sa gueule, qu’il retint avec juste assez de force pour ne pas qu’elle éclate dans sa bouche. Ça pouvait être puissant une mâchoire de ninken!

J’avais tout de suite vu avec ses mouvements, comment il était descendu de l’arbre, qu’il était entraîné pour être shinobis, qu’il soit du fameux clan manieur d’ombre aidait aussi. Ce que j’ignorais par contre, et que j’appris peu après, était qu’il était chûnin pour le village, mentionnant par le fait même que cela lui importait peu. Tout de même, c’était bien à savoir si jamais le destin venait à nous mettre ensemble lors d’une mission ou d’une autre affection au nom de Konoha. Je décapsulai ma bouteille et pris immédiatement une gorgée dont je rêvais depuis un moment.

- Jônin ici, quoique je ne porte pas plus d’importance que toi au rang. Après tout, le rang n’est pas nécessairement symbole de puissance…

Sur ce point, j’étais d’accord avec Kaku-san. Oui, généralement ceux de rangs supérieurs étaient plus forts, sans quoi ils ne se seraient pas rendus-là, mais il arrivait toujours que des shinobis de rangs inférieurs trouvaient le moyen de mettre à profit des faiblesses de shinobis de rangs supérieurs et prenaient la victoire. Ne voulant pas me troubler l’esprit avec ce genre de chose avec une journée aussi accablante physiquement, je me dirigeai vers l’arbre et m’assis à son pied et m’accotai sur le tronc. Quelques secondes plus tard, Aka se levait paresseusement et venait jusqu’à moi, se roulant à côté de moi et déposant sa tête sur ma cuisse. Je jetai un regard sur Kaku-san.

- Tu viens t’asseoir, ou tu peux retourner te cacher dans les feuilles; c’est toi qui vois.

Ceci dit, je penchai la tête par l’arrière jusqu’à ce qu’elle repose à son tour sur le tronc et fermai les yeux. Je pris une grande inspiration expirai lentement. Maintenant que ce marché était conclu et que nous n’avions tous les trois plus aucune raison de s’en faire j’avais bien l’intention de profiter de ce coin pour tout le temps qu’il serait nécessaire.

Pas une seule égratignure. J'avais longuement hésité à apposer ma main sur sa tête pour le caresser. Qui sait, comment pouvait-il réagir ? Son grognepir en aurait fait reculer plus d'un, mais j'avais envie de prendre le risque. Est-ce que mon membre allait y rester ? Pas du tout. L'animal s'en fichait un peu. C'était comme si je n'avais pas agis. Je me dépêchais tout de même de retirer ma main avant qu'il change d'attitude. Même si je croyais à ce que Takeo m'avait dit sur Akamori, je n'en restais pas moins méfiant. Un jour, on m'avait dit que ce type d'animal pouvait sentir si on avait peur d'eux. Espérons que cela ne soit pas vrai, car il n'aurait pas mis longtemps à comprendre mon ressenti.
Comme je le pensais, l'Inuzuka et son Ninken se rencontrent durant leur enfance. Mais il m'apporte de nouveaux éléments sur cette tradition que je n'avais pas eu l'occasion de lire dans les plusieurs livres sur eux à la bibliothèque du village. Dès lors qu'il avait cinq ans, on lui faisait rencontrer celui qui deviendrait son compagnon. Il était possible qu'un Inuzuka puisse avoir plus d'un animal, en tout cas c'était ce qu'il avait laissé sous-entendre. Je n'en avais encore jamais croisé de ce type là au sein du village, mais je voulais bien le croire. Finalement, les clans n'étaient pas si différents. Chez les Nara, c'est vers cet âge là que l'on est initié au Shogi et aux autres jeux de plateaux et de stratégies. Akamori réagit aux mots de son maître, mais cette fois on était très loin du grognepir. Ne parlant pas la langue de l'aboiement, Takeo fut obligé de me traduire ce que l'animal voulait dire par son jappement.

« Hum je vois, vous êtes des amis d'enfance. Il doit y avoir un important lien entre vous, une connexion. J'imagine que c'est un peu comme un lien entre frères et sœurs ? En tout cas après tant d'années, votre travail d'équipe doit être impressionnant. »

J'espérais être amené à collaborer avec eux dans le futur. On s'entendait très bien, et j'avais hâte de voir ce qu'ils pouvaient donner en combat. Je n'avais jamais eu l'occasion de voir un Inuzuka et son Ninken en action, cela devait être sublime à voir une telle synergie. Pour sceller cette nouvelle amitié, je sortis la plupart des bouteilles d'eau que j'avais pris en réserve pour survivre en cette chaleur invivable. L'Inuzuka n'hésita pas à se servir et à en envoyer une sur Akamori qui la réceptionna avec aisance dans sa mâchoire, sans même l'abîmer. Un tel contrôle de sa force, car au vu de sa carrure il était fort probable que sa morsure pouvait causer d'importants dégâts.
Complètement sur la même longueur que moi, le grade n'était pas non plus une valeur sûre pour lui. Certes il était Jônin, et donc logiquement plus fort que moi, on partageait la même vision pour ce qui est de la puissance d'un ninja. Il est fort probable que je finisse sous son commandement lors d'une mission, mais cela ne me dérangerait pas de recevoir des ordres d'une personne comme lui qui semblait concevoir chaque ninja à sa juste valeur.

Après cette brève discussion, il retourna contre l'arbre pour s'assoir. Akamori le suivit, s'allongeant à ses côtés et posant sa tête sur les jambes de son maître. Ce dernier m'invita à les rejoindre avant de fermer les yeux et s'évader totalement. Je me mis à sourire, ressentant un étrange sentiment au fond de moi. C'était donc ça, d'avoir un ami ? C'était si apaisant, si bon. J'avançais lentement vers l'arbre à mon tour, m'asseyant contre celui-ci aux côtés de Takeo. Je fermais à présent les yeux, me laissant moi aussi me porter par la brise qu'il y avait à l'ombre bien que la chaleur n'en restait pas moins pesante.
J'arrivais presque à m'endormir dans ce calme et cette légère fraîcheur. Il n'y avait pas un bruit pour nous déranger. Du moins, c'était ce que je pensais. Mais je me fis bien vite extirper cette idée là lorsque je fus poussé à ouvrir les yeux à cause d'un son dérangeant.

« Hey, t'as entendu ça ou bien c'est la chaleur qui m'a trop tapé dessus ? Aka' a senti quelque chose ? »

Quelqu'un essayait d'envahir notre territoire ? Ou étais-je entrain de devenir fou ?

Comme à chaque fois que l’on nous posait la question, je racontai avec beaucoup de détails la première rencontre avec Aka et moi. Peu importe ce qui m’arrivait, aussi vieux que je deviendrais, je me rappellerai toujours de ce moment magique, surtout vue des yeux d’un jeune garçon de cinq ans. Peut-être aujourd’hui cela aurait-il perdu un peu de son aura de mystère, mais mon souvenir resterait inchangé, lui. Akamori se permit d’intervenir à un moment donné dans mon récit pour ajouter quelque chose, mais je fus le seul à comprendre ce qu’il avait voulu dire je dus donc faire office d’interprète pour Kaku-san, qui n’avait sûrement pas compris un traître mot de ce qu’il avait dit. Enfin mot c’était vite dit, les ninken ne parlait pas nécessairement avec des mots, mais c’était quelque chose de bien trop compliqué à penser avec cette atmosphère. Cela amena un sourire au Nara, qui compara de façon assez juste notre relation à celle qu’on a lorsqu’on a un frère ou une sœur. J’hochai de la tête.

- C’est exactement ça! Une fois que que le ninken et le shinobi se sont choisis, ils deviennent un membre de la famille.

Je souris au Nara, content qu’il ait rapidement compris. Décidemment, il faisait honneur à son clan puisqu’il avait très rapidement captés les subtilités du lien entre l’Inuzuka et son ninken. Si jamais j’avais à être sur le champ de bataille avec lui, je n’avais aucune misère à croire qu’il serait un allié de taille. Non seulement avait-il un esprit d’analyse exacerbé – pour pallier au mien – mais une chimie s’était très rapidement créer entre nous deux. En guise d’amitié, ce dernier nous envoya quelques bouteilles d’eau qui furent largement appréciés, que je partageai avec mon ninken. Alors que Kaku-san et moi débouchions notre bouteille, Aka arracha son bouchon en le tenant entre ses dents et tirant. Je pris une bonne gorgée d’eau, tout en m’en gardant pour plus tard. Nous discutâmes ensuite brièvement de notre rôle au sein du village, qu’est-ce qu’on faisait pour occuper notre temps, ce genre de choses. J’appris sans grande surprise qu’il était shinobi pour le village et, cette fois-ci avec un peu plus de surprise, que tout comme moi le rang n’était pas la première chose qu’il regardait chez ses compatriotes. Après tout, la meilleure façon de jauger quelqu’un était de le voir en action.

Peu de temps après, j’allai m’installer sous l’ombre fraîche de l’arbre et m’accotai sur ce dernier. Quelques secondes plus tard, Aka me rejoignait et j’invitai également le jeune Nara à venir nous rejoindre. Il pouvait bien s’installer où il voulait, mais ça briserait l’ambiance s’il retournait seul dans son arbre, quoi que je pourrais bien aller le rejoindre sur une branche si jamais cela en arrivait là. Nous ne nous rendîmes pas jusque-là puisqu’il vint me rejoindre quelques instants plus tard en s’adossant lui aussi sur le tronc. Les yeux fermés, je laissai mon esprit vagabonder alors qu’une brise chaude me donnait un petit frisson. Vraiment, à nous trois nous avions vraiment le coin idéal pour relaxer aujourd’hui!

Je dus m’assoupir sous l’ombre des feuilles, car je me réveillai à la voix de Kaku-san qui me demandait si j’avais entendu quoi que ce soit. Étant endormi jusqu’à il y avait quelques secondes, je n’avais rien entendu, mais s’il croyait que des gens venaient dans notre direction cela valait la peine de faire un tour. Levant la tête et rouvrant les yeux, je respirai longuement, laissant toutes les odeurs emplirent mes narines, et cherchai n’importe quelle trace qui signifierait que n’allions plus être seuls. Au début, rien ne paraissait perturber notre tranquillité, mais finalement une imperceptible odeur humaine parvint jusqu’à mon nez.

- Je ne sais pas pour toi, Aka, mais je crois sentir quelque chose venir au loin… Ce dernier confirma mes paroles d’un aboiement et m’informa qu’il pouvait même dire qu’ils étaient trois. Je retransmis les informations à Kaku-san. Il dit sentir trois personnes venir dans notre direction. On s’y prend comment pour leur dire qu’ils ne sont pas les bienvenus?

Habituellement, je n’étais pas aussi associable, mais aujourd’hui était un cas à part. La chaleur écrasante qu’il faisait et la difficulté que j’avais eue à trouver un coin me transformait en un être cherchant la fraîcheur et le calme, pas les nouveaux amis. Enfin, à part Kaku-san, lui j’avais été heureux de le rencontrer. Selon toute logique, cela serait Aka qui s’occuperait de cette tâche ingrate, puisque cela avait bien fait partie du marché que j’avais passé avec le Nara. De toute façon, avec la taille qu’il avait, cela n’en prendrait certainement pas beaucoup pour faire reculer qui que ce soit.

Amitié entre Ninken et Inuzuka. Un beau lien. Je comprenais mieux l'appréhension de certains Inuzuka à participer à la vie en société, quand je vois le comportement de quelques personnes il est clairement préférable pour eux de rester auprès des leurs. Est-ce qu'ils comprenaient mieux les chiens que les humains, en dehors de leur clan ? Une bonne question, que je n'osais pas poser à Takeo. Peut-être que cela serait déplacé de ma part. D'ailleurs, les Inuzuka avaient-ils un lien avec les Dôbutsu ? À la bibliothèque nous avions reçu un arrivage de nouveaux livres et l'un d'eux comptait les histoires du clan Dôbutsu qui, à l'image des Inuzuka, pouvait communiquer avec tout autre animal. J'avais même entendu dire qu'on avait un membre de ce clan à Konoha, les rumeurs parlaient d'un ours dans le village. Ce n'était que mon hypothèse, mais ces deux clans devaient sûrement avoir les mêmes ancêtres. Ou alors c'était une coïncidence. Mais revenons à nos moutons. Chacun se délecta de l'eau que j'avais apportée. J'admirais l'aisance d'Aka à ouvrir la bouteille sans la déchirer entre ses griffes et sa mâchoire. Une habilité affolante, qui pouvait devenir destructrice. Peu de temps après nous être hydraté, nous retournions au pied de l'arbre pour se reposer, profiter de l'ombre et du calme de cet endroit.

Mais cela aurait été trop beau pour être vrai si rien ne c'était passé. J'étais à la frontière de la réalité et du rêve, quand il semblait avoir perçu un bruit. Mon imagination ? La chaleur ? Dans le doute, je réveillais Takeo qui lui-même réveilla son Ninken. Quelle honte aurais-je s'il s'avérait que tout ceci n'était qu'une hallucination. Mais je préférais qu'ils vérifient s'il n'y avait personne. C'était peut-être égoïste de garder cet endroit pour nous, avec tout l'espace et toute l'ombre qu'il y avait. Mais on ne voulait pas que cela devienne une foule de personne, car qui dit attroupement dit encore plus de chaleur. Certes il devait y avoir tout de même de la place pour deux ou trois personnes de plus sans que cela dérange énormément. Mais que voulez-vous, ils n'avaient qu'à trouver ce territoire avant. Maintenant, il était à nous trois. Du moins pour l'après-midi. Demain et les autres jours, ça sera une autre histoire.
J'observais Takeo se servir de ses sens d'Inuzuka pour renifler les odeurs présentes dans l'air. Il demanda confirmation à Akamori. Le Ninken lui répondit, bien évidemment pour moi c'était incompréhensible. Takeo dut une nouvelle fois me traduire ses dires. Mes soupçons étaient donc fondés : trois personnes venaient vers nous. Je ne pus m'empêcher de soupirer. C'est bien ce que je craignais...

« Raaaah, c'est chiant...Faudrait voir ce que c'est. Des enfants ? Des ninjas ? Si ce sont des gamins je nous vois mal les refouler...Vous pouvez sentir ça, où va falloir qu'on se bouge les fesses ? En tout cas, je vais déjà sécuriser l'endroit. »

J'enchaînais quelques mudras avant d'apposer mes mains sur le sol. Plusieurs murs se dressèrent, bloquant les seules rues qui menaient à notre havre de paix. De cette façon, les gens pourraient croire à une impasse. Et pour les habitués de ce quartier, ils sauront qu'il y a un petit parc ici. Mais pour l'atteindre, il faudra escalader. De quoi dissuader les plus fainéants et les moins téméraires. Mais comme je l'avais fait remarquer à Takeo, je ne pouvais refuser l'entrée à des enfants. Même s'il était clair que dans ce cas-là le parc deviendrait totalement chaotique avec les cris et les amusements. Raaah...Quelle situation de merde. Je me relevais lentement tout en m'étirant.

« Bon, je crois bien qu'on va se dégourdir un peu les jambes. Peut-être que les murs les feront faire demi-tour, mais dans le cas où ils connaissent déjà l'endroit...Comme je t'ai dit ça dépendra de qui ils sont. On va les voir ? Aka' peut rester ici, non ? »

Je marchais vers un des immeubles, accélérant mon allure pour au final avoir assez d'élan et grimper à la verticale. De là-haut on pourra avoir une vue d'ensemble. Mais déjà, est-ce que c'était la bonne direction ? Je n'aurais pas l'air con si c'était de l'autre côté...

Je savais bien que j’avais senti quelque chose, mais, évidemment, mon nez était loin d’être aussi affiné que celui d’Aka. Partageant mes doutes au Nara, je consultai Akamori afin d’avoir confirmation et confirmation il me donna. Selon ce qu’il avait senti, trois personnes étaient en train de marcher dans notre direction. Étaient-ils seulement de passage ou bien voulaient-ils un peu de notre paradis, du moins pour l’espace d’un après-midi? Il était trop tôt pour en être certain, mais je ne voulais pas non plus m’en rendre trop tard. Confirmant à Kaku-san qu’il ne devenait pas fou et que nous allions effectivement avoir des visiteurs d’ici peu, ce dernier soupira d’exaspération, sentiment que je partageais. C’était trop beau pour être vrai, nous ne pouvions pas simplement avoir un après-midi tranquille dans un petit coin que, j’étais certain, presque personne ne connaissait. Dès qu’il sut qu’un potentiel dérangement était imminent, l’esprit d’analyse propre à son clan prit le dessus et me demanda indirectement de savoir à qui nous avions à faire. Si son fort était l’élaboration de plans, le mien était le repérage.

J’allais prendre de nouvelles respirations afin d’en savoir plus sur les futurs arrivants lorsque le sol se mit à trembler en-dessous de moi. Je rouvris aussitôt les yeux, un peu paniqué. Qu’est-ce qui se passait? Était-ce une attaque? Avec cette température? Je m’en faisais toutefois pour rien, car regardant autour de moi je remarquai Kaku-sanà mes côtés tenant un mudra alors que des murs de terre sortait du sol en terre battue pour couvrir toutes les entrées possible vers notre oasis. La surprise passée, je me remis à ma tâche et maintenant que j’avais un peu plus d’informations sur eux – mais aussi parce qu’entre-temps ils s’étaient rapprochés – j’étais plus à même d’en apprendre sur eux. Je pus ainsi apprendre qu’ils ne s’agissaient pas d’enfants, ni de ninjas, mais bien de simple villageois ordinaire. Cela ne les rendait pas moins dangereux pour notre havre. Nos protections établies, il était temps d’aller voir ces civils. Le Nara me proposa ainsi d’aller faire un tour sur le haut de nos remparts afin d’aller guetter l’ennemi. Je me levai, m’étirant, et lui appris ce que j’avais senti.

- Ouais, je ne crois pas qu’il est besoin de venir. De toute façon, il est beaucoup plus confortable là, ce ne sont pas de simples civils qui vont le faire lever. De ce que j’ai pu sentir, ils ont passé la puberté donc nous pouvons rayer la possibilité des enfants, comme celle des ninjas par le fait même. J’ignore toutefois s’ils sont familiers avec le coin par contre.

Quand même, il y a une limite à ce que je peux sentir. Contrairement à ce que certaines personnes semblaient croire – même si je doutais que le Nara fasse partie de cette catégorie – mon odorat ne me permettait pas de passer les gens au peigne fin. Certes, j’étais capable de sentir les émotions qui les habitaient ou bien de savoir où ils étaient, mais je ne pouvais pas sentir ce qu’ils voulaient ou encore moins leur couleur préférée. Une fois levé, j’allais sur un autre mur que le Nara, histoire de les voir arrivé peu importe d’où ils venaient. Je courus vers le mur, mais sautai sur un immeuble et l’utilisai comme appui pour sauter une deuxième fois et me rendre au rebord du mur. Je me hissai ensuite sur le dessus et, m’accroupissant pour ne pas être la première chose qu’ils voient, je regardai des deux côtés de la rue qui s’étendait devant moi. De cette hauteur, je voyais bien plus loin et je pus facilement repérer les trois silhouettes qui s’en venaient.

- Kaku-san, ici! Ils sont de ce côté.

Je me retournai afin de regarder le Nara et lui pointai vers la droite de la rue. Ce dernier vint rapidement me rejoindre et vit qu’ils étaient effectivement en direction d’ici. Maintenant que l’on savait à qui nous avions affaire et d’où ils venaient, il fallait décider ce que nous faisions avec eux. Devrait-on faire comme si rien n’était en espérant qu’ils ne soient pas familiers avec les lieux ou bien devrait-on les confronter et les convaincre de ne pas venir? Après tout, avec un mur comme celui-ci sur lequel nous étions, il n’y avait pas grand monde pour être capable de monter. De ma connaissance, seuls les shinobis ont suivis l’entraînement capable de leur permettre de monter une telle hauteur, mais parfois nous pouvions être surpris par les civils. Si nous regardions les chasseurs expérimentés, par exemple, beaucoup d’entre eux valent mieux que certains membres de nos corps. Tout ça pour dire que ce n’était pas parce qu’ils étaient de simples civils qu’il fallait les sous-estimer.

Comme je l'avais supposé, Akamori allait rester ici. Déjà cela pourra permettre de protéger l'endroit si des personnes non désirées réussissaient à parvenir jusqu'ici, mais surtout parce que comme Takeo l'a précisé : il ne se lèvera pas pour des civils maintenant qu'il était si bien installé. Je le comprenais, je me serais bien passé de ces évènements. Mais rien ne se passe comme on le souhaite. Il fallait toujours qu'il y ait un problème, plus ou moins gros. Dans notre cas la menace était relativement faible, pas de quoi s'inquiéter. En revanche, le seuil de « cassage de couilles » était à sa limite. Heureusement Takeo dissipa mes inquiétudes quant à la nature de nos visiteurs : ce n'était pas des enfants. Et cette fois ce fut un soupir de soulagement qui s'échappa de ma bouche. Déjà que j'avais du mal avec les adultes, alors avec les gamins : une véritable catastrophe. La seule avec qui j'y arrive se nomme Heishi et elle est ma sœur. En revanche, l'Inuzuka sembla affirmer qu'ils n'étaient point des ninjas. Voilà un autre imprévu auquel je n'avais pas réellement prêté attention. Il ne serait pas tellement loyal de se battre contre eux, surtout qu'il était peu probable qu'ils puissent escalader les murs s'ils ne sont pas capables de maîtriser le chakra. En tout cas, je préférais les voir avant de prendre une décision. Ainsi, je partis de mon côté au sommet d'un des immeubles. Takeo fit de même, mais à l'opposé de moi. Quel moment de solitude quand il m'appelle pour me dire que je ne suis pas au bon endroit...Un classique, je me précipite sans même savoir la bonne direction. Je faisais un pitoyable Nara parfois.
Je m'empressais de le rejoindre bien que légèrement gêné par la situation. Il pointa une des rues adjacentes au parc où nous étions. On pouvait apercevoir d'ici les fameux civils qui arrivaient. Cela ne m'avançait pas plus qu'auparavant à vrai dire. Je m'accroupissais pour réfléchir à la situation plus calmement. Que faire...Déjà je pouvais rayer de la liste le combat. Mon éthique ne me le permettait pas. Je ne savais pas pour Takeo, mais s'il choisissait cette option ça sera seul. Après, on pouvait toujours laisser cela au destin et ne rien faire. Ou alors leur mettre des bâtons dans les roues, mais cela impliquait de se bouger le cul. Je me laissais alors tomber en arrière, finissant totalement allongé sur le sol.

« Raaaaaaaah...Je sais vraiment pas quoi faire dans cette situation. Pas question d'affronter des civils...On peut toujours attendre et voir ce qu'il se passe, ou bien faire tout pour qu'ils ne prennent pas notre direction. J'vois pas d'autres options à part ces trois, ou plutôt ces deux. T'en dis quoi ? »

Après tout, la décision ne m'appartenait pas. Nous étions deux, même trois. Et le fait que je porte le nom Nara ne faisait pas de moi la personne prenant les résolutions comme beaucoup le pensait à tord. C'était aberrant comment un simple patronyme pouvait changer la perception que les gens ont de vous. Et en réfléchissant d'un peu plus près, cela me fit penser à l'Inuzuka et son imposant animal. Un énorme chien doté d'une crête rouge. Voyez-vous où je veux en venir ? Fort probable qu'à sa vue, les trois civils déguerpissent. Même si ce n'était pas loyal de se servir d'Akamori contre de simples villageois. Surtout que ça pourrait les traumatiser, ou les amener à contacter les autorités...Finalement, ce n'était pas une si bonne idée que ça. Avec cette chaleur, impossible de faire marcher mes méninges. Déjà que j'ai du mal la plupart du temps, là c'était une catastrophe.
Je me redressais, jetant un coup d'œil aux trois inconnus. Ils avaient stoppé leur progression au niveau d'une intersection. S'ils continuaient, ils arriveraient jusqu'ici. Mais d'autres chemins s'offraient à eux et leur arrêt signifiait peut-être qu'ils emprunteraient un de cela. L'espoir commençait à naître. Avaient-ils remarqués le mur qui bloquait le passage depuis leur position ? Ou se dirigeaient-ils autre part ? La tension était palpable. Je n'en pouvais plus et je suais encore plus. Je croisais le regard de Takeo :

« T'es croyant ? On a plus qu'à prier là...Et puis même s'ils viennent par là, il y aura toujours le cul de sac que j'ai mis en place. Putain j'espère tellement qu'ils vont tourner. »

Mon nez ayant fait son travail, je partageai avec Kaku-san les résultats de mes rechercher et ce dernier sembla aussitôt rassuré lorsque je lui appris que des enfants ne seraient pas impliqués dans cette histoire. Je devais dire que moi aussi je n’étais pas fâché que nous n’ayons pas affaire avec des gosses, nous n’aurions pas eu le choix de les laisser entrer et ce malgré la cacophonie qu’ils auraient créée. C’était Aka qui n’aurait pas été content… Ensuite, après l’avoir rassuré, l’inquiétude revint à nouveau peindre son visage à la prochaine nouvelle, soit que ce n’étaient pas non plus des shinobis. De mon côté, je ne m’inquiétais pas pour cela, j’avais connu des civils bien pires que n’importe quel shinobi; il ne fallait pas s’arrêter à cette étiquette. Bon, maintenant que nous avions une meilleure idée à qui nous nous frottions, il était temps de les trouver avant que ceux-ci ne nous trouvent. Prenant chacun notre côté, nous grimpâmes sur les murs de terre et attendîmes qu’ils se pointent à l’horizon.

Je n’étais pas là depuis longtemps que je remarquai trois silhouettes se diriger dans notre direction. J’appelai aussitôt le Nara afin qu’il vienne me rejoindre de mon côté. À peine quelques secondes après l’avoir appelé, il fut à mes côtés et je lui pointai du doigt la direction où les personnes s’en venaient. Ils étaient encore loin, mais se rapprochaient à chaque seconde. Il nous fallait trouver une solution et vite. Comme s’il avait lu dans mes pensées, Kaku-san s’assit au sol et se plongea dans une réflexion quasi-méditative. L’esprit Nara était maintenant à l’œuvre. Allait-il trouver la solution miracle à notre problème? Pendant qu’il essayait de trouver une façon de régler notre problème, je n’allais certainement pas rester là à me tourner les pouces alors tant qu’à rien faire je me mis aussi à chercher un quelconque moyen de les empêcher de venir. Toutefois, la réflexion n’était pas vraiment mon fort; j’étais plus du genre à agir sur le moment, avec ses avantages comme ses désavantages. C’est pourquoi je finis par abandonner l’idée de trouver une idée et m’étalai au sol, laissant le Nara dans ses pensées. Ce dernier en ressortit quelques minutes après moi sans avoir l’air plus avancé que moi. Me proposant deux options – attendre et voir ou bien s’assurer qu’ils ne passent pas ici. Il avait d’emblée rayer l’option de les combattre, ce à quoi je n’avais rien à redire, pour laisser les deux autres.

- Hum… Il est effectivement hors de question de s’en prendre à de simples civils, mais les deux options sont viables… Tant qu’à se donner autant de troubles, attendons voir s’ils viennent vraiment par ici; j’aurais horreur d’avoir fait tout un travail pour rien.

Maintenant que c’était décidé, nous n’avions plus qu’à attendre afin de vérifier si oui ou non nous aurions besoin d’intervenir afin de garder notre oasis intact. Sans quitter les villageois des yeux, je laissai mon esprit vagabonder n’ayant rien d’autre de mieux à faire en attendant. Ah oui, je pris une gorgée d’eau que j’avais eu la bonne idée d’amener avec moi. Du haut de ce mur, nous n’étions plus tant à l’ombre et la chaleur revenait rapidement nous harceler maintenant que l’arbre ne nous couvrait plus. Un mouvement à mes côtés me tira de mes pensées et je réalisai que si mes yeux étaient sur les civils, ils n’étaient pas nécessairement alertes, car ces derniers venaient tout juste de s’arrêter à une intersection. Retenant mon souffle, j’attendis que le Destin fasse son œuvre et choisisse le chemin qu’ils allaient prendre. À mes côtés, Kaku-san espérait qu’ils tournent au lieu de continuer vers nous, allant même jusqu’à s’en remettre au Seigneur et à la prière. Je ne souhaitais pas aussi ardemment le changement d’itinéraire de nos visiteurs, mais je voulais tout comme lui que nous n’ayons pas à nous occuper de cela.

Malheureusement pour nous, après quelques secondes d’hésitation où nous crûmes l’espace d’un instant qu’ils allaient bel et bien changer de direction, ils continuèrent leur chemin vers nous. En même temps, nous lâchâmes tous deux un soupir d’exaspération et me mis aussitôt à la recherche d’une histoire afin de dissuader les civils de passer par ici, si jamais cela en venait là. Ça, par contre, j’étais bon pour ça; j’avais une imagination parfois débordante. Je me gardai néanmoins d’en parler avec le Nara, ignorant ce qu’il penserait de mon idée. Tout de même, je gardais un petit espoir que nous n’aurions rien besoin de faire et qu’ils passeraient sans même se rendre compte qu’un immense mur de terre bloquait l’accès à l’une des ruelles. Cet espoir fut rapidement brisé quand je le vis ralentir la cadence en approchant de la ruelle. Et merde, les voilà qui arrivaient. Avant même que les villageois ni Kaku-san ne puisse dire quoi que ce soit, j’embarquai dans mon subterfuge qui, je l’espérai, allais avoir raison d’eux.

- Hop hop, une minute là! hélai-je au trois civils qui arrivaient. J’espère que vous ne comptiez pas passer par ici, sinon il va vous falloir trouver un autre chemin. La ruelle est présentement en construction – rénovation plutôt – et ce pour la journée. Désolé du contretemps que cela peut vous causer.

Je leur offris en même temps un sourire désolé afin de rajouter de la crédibilité à mon histoire. Évidemment, avant qu’ils n’arrivent j’avais pris soin d’enlever mon bandeau du village qui m’aurait aussitôt identifié comme un shinobi du village. Je me demandai comment Kaku-san allait réagir à ma petite improvisation, s’il allait suivre et s’il avait lui aussi enlevé son bandeau du village. Je croisai les doigts que oui, sinon j’aurais l’air d’une belle andouille. Au pire, je trouverais bien quelque chose à leur répondre en temps et lieu.

J’y étais allé avec l’inspiration du moment, ce que m’évoquait les grosses pierres sur le coup. Des travaux. Des rénovations, pour être plus exact. J’ignorais d’où m’était venue cette idée, mais j’espérais être assez convaincant pour que seules mes paroles suffisent à les faire prendre un autre chemin. Toujours accroupi, Kaku-san était encore invisible pour ceux en bas du mur et pouvait donc rester silencieux et laisser la scène se dérouler. Mais la réalité était qu’aucun bruit ne venait de l’autre côté qui pouvait trahir une quelconque activité. Comme s’il avait lu dans mes pensées, le Nara posa ses mains au sol et commença à faire trembler légèrement le mur sur lequel nous nous tenions. Même si je m’attendais à la secousse je fus quand même déséquilibré pendant quelques secondes avant que je ne retrouve mes sens et plante mes pieds au sol. Quelques secondes plus tard, c’est l’entrée en scène de Kaku-san qui mit la cause de ce malentendu sur de fictifs stagiaires. Non seulement cela rendait l’erreur plus crédible, mais cela nous enlevait tout responsabilités. Pour avoir improvisé, il s’était rapidement adapté à la situation.

Kaku-san sort.

Ses répliques sorties, ce dernier se penche de nouveau et quitte la scène, me laissant avec les civils qui avaient maintenant les yeux ronds suite à cette démonstration des travaux. S’ils n’étaient pas convaincus plus tôt, les secousses dont ils avaient été témoins avaient terminé de les convaincre. J’avais comme l’impression qu’ils ne se feraient pas prier pour continuer leur chemin.

- Encore une fois, désolé pour le contretemps; nous vous invitons à faire un petit détour de long de la rue puis de tourner à droite à la première intersection. Continuez un peu sur celle-ci et vous serez sur la rue que vous désiriez rejoindre.

Je leur souhaitai ensuite une bonne journée pour leur signifier que la conversation était terminée et qu’ils pouvaient reprendre leur chemin. Heureusement pour nous, ces derniers ne dirent de plus et continuèrent leur chemin. À peine avaient-ils fait quelques mètres que Kaku-san se lança dans une danse sans doute pour fêter notre victoire et je l’accompagnai aussi de quelques mouvements de danse improvisé. Nous devions avoir l’air de deux débiles à danser sur un bloc de pierre c’est pourquoi tout cela ne dura à peine quelques secondes. Ensuite, une fois que les villageois étaient vraiment hors de notre champ d’écoute, mon compagnon se retourna vers moi et me félicita pour l’idée tout en statuant qu’avec un peu d’éloquence on pouvait aller bien loin. Je devais avouer que cela avait rudement bien fonctionné comme histoire et j’avais tout lancé avec un naturel qui me déconcertait moi-même un peu.

- C’est vrai, mais il faut aussi de l’imagination et de la vivacité d’esprit, disais-je alors que moi-même j’ignorais que je possédais ce savoir.

[i]Je suivis ensuite le Nara en direction de l’arbre et d’Aka, qui n’avait pas bougé d’un poil. C’était à croire que les petites secousses ne s’étaient même pas rendues jusqu’à lui. S’étaient-elles rendues jusqu’à l’arbre? Dans tous les cas, elles ne semblaient pas l’avoir perturbé. J’allai m’asseoir à ses côtés en compagnie de Kaku-san et repris la bouteille que j’avais laissée là avant de partir. Je n’avais jamais autant mérité une gorgée aujourd’hui! Je la pris avec délectation et soupirai de satisfaction. C’étaient que j’avais eu peur pendant quelques minutes que tout mon temps dépensé à chercher ce petit coin pour nous ne soit gâché par des importuns.

- J’espère que les murs de pierre seront suffisants pour les prochaines fois. Penses-tu qu’on aurait dû laisser un panneau?

Je brisai le silence après quelques minutes et laissai sortir un rire court qui aurait presque pu passer pour un aboiement. C’était une blague, mais je voulais vraiment être certain de ne pas être dérangé. Cela paraissait peut-être égoïste, mais si c’était juste pour cette fois-ci cela ne devrait pas déranger personne. Qui plus est, personne ne savait ce que nous faisions entre ces murs et ce qu’ils ne savaient pas ne pouvait pas leur faire de mal. Je profiterais donc de cette journée – de cet instant – jusqu’à la fin.