Music ♫:

A quoi bon ? Quel jour étions nous ? Quelle année ? Le temps n'avait-il plus d'emprise sur moi ou au contraire défilait-il bien trop lentement ? Je n'étais plus qu'une âme errante, faisant face à la mort rapprochée de mes coéquipiers, amants, et amis... Pourquoi ? Pourquoi me les avaient-on arraché ? Etait-ce ma punition pour avoir choisi de découvrir l'humanité ? Etais-je vouée à souffrir constamment sans grand répit pour me retirer le bonheur que je connaissais et dont lequel je m'étais éprit ?

Je déambulais dans les couloirs de l'hôpital après avoir été renvoyée chez moi. J'étais venue pour prêter assistance à tous ces blessés, tous ces morts mais mes pensées convergeaient ailleurs et je n'avais plus la volonté d'aider quelqu'un, pas même moi... La foule à mes côtés qui hurlaient ou pleuraient tantôt de joie ou de désespoir : je ne la voyais plus. Elle était comme une présence fantomatique qui ne parvenait plus à m'atteindre dans le monde obscure et froid dans lequel je m'étais terrée. Pas même la chaleur du soleil ne parvenait à me sortir de ma torpeur : je n'avais plus la force de lutter.

Une nouvelle quinte de toux, une nouvelle gerbe de sang. Mon corps était parcouru de spasmes imperceptibles tandis que l'affliction me pliait en deux. Je toussais, pleurant des larmes écarlates sans même m'en rendre compte : tant par la douleur de la maladie me gangrenant que par le fardeau de leurs trépas... Pourquoi m'avaient-ils abandonné ?
Entre deux sanglots je déglutissais, serrant les poings en laissant mes cheveux de jais retomber sur mon visage déformé par la tristesse. Je perdais pieds.

L'immortalité pour me guérir ? A quoi bon me débarrasser de ma maladie si c'était pour souffrir éternellement de leurs disparitions ? Ils étaient partis mais les autres aussi finiraient par s'en aller : me laissant seule face à mon désespoir. Non. La mort serait bien plus douce, bien plus plaisante que ce sentiment d'impuissance et cette perte d'envie de continuer...Je ne voulais plus souffrir.

Mes pas résonnaient étrangement sur le sol, comme si chacun émettait une mélodie hasardeuse et saccadée. Tout semblait vide dans ce monde dévasté où j'étais totalement inhibée par la souffrance. Je ne ressentais plus rien : comme autrefois. Etait-ce la solution ? Je ne le savais pas... En existait-il seulement une ? Je me rattachais à ce que je pouvais et parfois ne plus rien éprouver s'avérait bien plus facile que de faire face à la réalité. Je me terrais dans cette atmosphère où rien ne prévalait, seulement moi existait et avait de l'intérêt. J'étais seule, je ne l'étais plus puis je l'étais à nouveau : tout cela était bien éphémère...

Je perdais la raison. Je sacrifiais mes idéaux et mes efforts accomplis ardemment qui m'avaient permis d'être celle que j'étais hier mais aujourd'hui tout basculait de nouveau : je n'avais plus la force de me battre contre la situation et je préférais m'enfermer loin de tout où plus rien n'avait de sens excepté pour moi.

Oniri... Toi ma première amie... Toi qui m'a conduite sur le chemin de l'humanité : te targuant de pouvoir m'inculquer la notion d'amitié... Tout n'était que défiance et prise de pouvoir sur l'autre entre nous mais peu à peu les choses avaient changé. Nous ne sommes pas si différentes toi et moi. Petite colombe immaculée qui s'en est allée loin de moi, déchue et tourmenté par ton envol... Pourrais-tu revenir jusqu'à moi ? Il est trop tôt pour t'endormir. Réveilles-toi petit ange ! Ne laisse pas la faux t'emporter loin de moi... Tu n'as pas le droit de laisser Yami seule tu le sais ? Toi qui a toujours été mon équilibre et mon pilier pour m'accrocher et me rattraper dans ce monde apocalyptique que devrais-je faire maintenant que tu es partie ? Je ne veux plus suivre tes conseils et l'humanité que tu m'as apprise : non ! Je veux simplement mourir...