C’était une fin de journée douce et chaude, comme tant d’autres réflexions faites, et petit à petit les civils comme les shinobis prenaient leur position. Certains dans leur maisonnée, d’autres dans les bars, d’autres sur le mur, d’autres dans les rues … Les soirs glaciaux de Suna n’étaient guère des soirées propices à des flâneries nocturnes de plusieurs heures.

Pour sa part, elle n’avait opté pour aucune des solutions citées. Elle s’était rendue au Quartier Général de l’organisation de Kibo. Un bâtiment autrefois « banal » à ses yeux, et maintenant source de nostalgie et de tristesse. Elle n’avait pas pu s’empêcher de frôler les parois sablées, tantôt douces, tantôt rugueuses.

Elle avait tout construit. Elle avait été capable de cette « prouesse » à une époque où ses capacités ne s’étaient limitées qu’à manipuler le sable environnant. Aujourd’hui … elle était apte à « créer » du sable à partir de son chakra et pourtant, plus que jamais, elle était bridée. Elle était incapable de maîtriser cet élément qui avait été jadis son meilleur allié.

Un allié qui l’effrayait plus qu’autre chose maintenant.

Posant ses mains le long de son corps, elle se dirigeait doucement mais sûrement sur un terrain d’entraînement. Profitant qu’il n’y ait personne, elle commençait à s’entrainer sur un tout nouvel art – et temporaire, elle l’espérait. Bandant l’arc, elle tenta de viser une première cible avec sa flèche. Sans surprise, elle la rata royalement.

"Peu de force, à côté..." soupira-t-elle.

Sans perdre du temps à penser encore, elle retenta encore. Elle rata.
Elle tenta encore et encore … jusqu’à s’arrêter. Quelqu’un l’observait. Elle n’avait pas besoin d’être senseur exceptionnel pour le sentir. Elle pivota sa tête pour plonger son regard bleu glacial et vide de toute expression à l’inconnu. A peine avait-elle reconnu son visage, qu’un petit sourire s’étira sur ses lèvres.

C’était lui qu’elle voulait voir.

Toshiro Ogami, Genin, utilisateur Shoton, manieur de Katana – à en voir la forme de l’arme sur son dos – et également le « garçon » qui allait accompagner monsieur Kibo dans son périple. Toutes les informations recrutées de-ci de-là ou donner par ce dernier consciemment ou inconsciemment. Pour le caractère, que pouvait-elle dire ? Il semblait des plus professionnels ? Efficace ? C’était l’heure d’en déterminer.

Allait-il accepter le service – ou la mission- que la demoiselle allait lui confier ? Une tâche qui ne plairait guère à un certain homme aux cheveux blancs.

- Bonsoir Ogami.

Elle remit son arc sur le dos et se dirigea droit vers le garçon.

- Je me suis permis de venir ici pour revoir mes œuvres passées, voir qui y vit, qui l’utilise. Savais-tu que j’ai construit ce bâtiment ? , demanda-t-elle avec un sourire chaleureux.

Un sourire de façade mais voilà une chose que personne – hormis Kioshi – ne pouvait desceller. Elle était habituée à toujours sourire, quand tout allait bien comme quand tout allait mal. A ce point, c’était plus une maladie qu’autre chose.

- Est-ce que vous vous y plaisez ? Manquez-vous de quelque chose en particulier … ou avez vous besoin de quelques réparations ?

Tsukiko était une bâtisseuse dans l’âme. Elle n’était en rien une destructrice. Même aujourd’hui, elle ne comprenait pas pourquoi avoir choisi la vie de Shinobi. Pourquoi devenir une arme détruisant des êtres humaidu[/i]rs travails d’une famille ?

« Pour maintenir mes bâtiments » se répondait-elle à chaque fois. Suna, ses habitants, ses connaissances … tant de choses qu’elle avait « construit » et qu’elle souhaitait « préserver ». Cependant, ces derniers temps, il semblerait qu’elle n’ait guère besoin d’ennemis pour détruire ce qu’elle avait tenté de construire désespérément.

Elle détruisait elle-même.

Une pensée qui l’attristait, et qui fanait ce sourire. Un fait rare il y a quelques semaines, mais qui ne cessait de se répéter très récemment. Elle n’était que perdue dans tous ces repères. Qui était-elle ? Que ressentait-elle ? Elle ne savait plus rien.

Sauf une chose : elle tenait encore à ses amis, ou « anciens » amis.

- Oh, avant que je n’oublie. Je m’appelle Tsukiko, au cas où tu l’aurais oublié.

Sa voix était douce, son aura n’était que pacifique et son regard – même si vide d’expression – n’exprimait aucune animosité ou autorité. Mine de rien, les bracelets semblaient la calmer drastiquement mais les sauts d’humeur restaient, allant et venant sans crier garde.

Musique:

Un long voyage m'attendait aux côtés de mon maître, j'étais assez content d'en faire parti pour devenir plus fort. Seulement cette expédition était étroitement liée à sa défunte fiancé, une nouvelle qui pour tout dire m'avait fait un peu de peine. Je ne suis pas du genre à compatir pour autrui, je n'aspire pas à avoir pitié du sort des autres. Cette fois-ci c'était tout de même de mon maître dont on parlait donc oui, je n'en étais pas des plus heureux. Je pouvais essayer de le comprendre mais cela était impossible, je n'avais jamais forgé un lien du genre avec une femme, je ne savais pas ce que ça pouvait provoquer de perdre une personne de cette « classification ». Il y avait bien quelques personnes que j'affectionnais, à commencer par la buveuse de sang que je considérais comme ma sœur et un poivrot comme un ami si je peux dire. Le maître n'était pas à oublier, il m'avait amené à changer et il prenait une place particulièrement importante dans mon entourage.

Je partais pour un moment et l'entraînement allait sûrement être plus intensif mais pour les quelques jurs restants je n'étais pas résolu à faire comme tout bon Shinobi s'apprêtent à plier bagage. Je ne sais pas si ça fait de moi un monstre mais j'avais préféré ne prévenir personne de mon départ. Ma famille adoptive n'en savait rien comme ceux dit un peu avant, je n'étais déjà pas très fort avec les humains alors si en plus je devais faire des adieux... Des adieux je ne sais pas si le mot est suffisant, je risquais après tout ma vie en dehors de mon village natal. Accompagné d'un très grand et puissant homme ne veut pas dire être invincible, il fallait que j'y pense. Il me semblait alors nécessaire de ne pas relâcher mes efforts, cela était impossible pour moi.

Azura dans mon dos, je me dirigeais alors au sous-sol où se trouvait le centre d'entraînement des Midorhato. Chaque fois que je me rendais en ce lieux, je pensais à mon examen et à la technique apprise par le rêveur. Enfin, cette fois-ci ce n'était pas mon dirigeant que je trouvais en train de s'occuper mais une toute autre personne.

Même de dos et en voyant sa chevelure je replaçais un nom sur cette personne, elle ne faisait pas partie de Midorhato mais avait présidé une réunion très importante il y a quelques mois. Elle devait être une personne importante au sein du village pour obtenir une chance comme celle-ci. Un événement d'ailleurs réussi, la damoiselle avait fait cela avec brillât. Personne ne pouvait dire le contraire et même si je n'adorais pas faire des éloges au sujet d'une personne, cette jeune femme était spéciale.

Elle s'entraînait à l'arc, j'observais chacun de ses tirs, ils ne vinrent pas à toucher la cible présente. Elle devait sûrement débuter ou alors elle n'était simplement pas faite pour cela, peut-être qu'elle devait envisager de trouver une autre arme pour combattre. Mais sans être mauvaise langue, je pensais tout de même à un manque d'expérience. Je ne pouvais être utile, j'étais moins même en apprentissage pour maîtriser correctement Azura. La Kawaguchi se tourna alors vers moi, d'après son visage je compris qu'elle se souvenait de ma personne.

Tsukiko avait aussi un lien avec mon maître, elle faisait partie d'une équipe et ces deux s'y trouvaient. La reine des sables devait être particulière et forte pour être aux côtés de Kibo. Elle me salua avant de se diriger vers ma direction, je plantais mes yeux dans les siens avant de m'abaisser légèrement en signe de respect. Un visage neutre voir vide, c'était ma façon de faire. A contrario elle semblait me sourire, il fallait peut-être que je fasse un effort pour une fois, avec plaisir alors j'esquissais un sourire au coin de mes lèvres. Elle me parlait alors de l'architecture du bâtiment, je savais qu'elle l'avait édifié en effet. Un très bel établissement et bien réalisé, je ne pouvais que être honnête à ce sujet.

« Oui, je le savais. L'organisation entière réside dans votre ouvrage, vous devez être en quelque sorte fière de cela. »

Je pouvais peut-être comprendre, moi j'adorais créer des sculptures Shôton alors voir une de ses belles créations si utile ça devait faire quelque chose.

« Personnellement je m'y plais, je dispose de tout ce dont j'ai besoin. Pour les réparations, il faut voir à l'accueil je ne m'occupe pas de cela. »

Je marchais alors au milieu du terrain pour commencer à m'étirer, je voulais m'échauffer naturellement avec mon petit entraînement. Elle me répétait alors son prénom, je le connaissais après plusieurs rencontres. Et puis même sans rencontre, j'aurais ouïe son prénom qui porte désormais une certaine réputation dans le village. Je n'étais pas à l'écoute des portes mais les choses allaient très vites à Suna. D'un ton sec, je répondais à la damoiselle.

«  Je m'en souviens. »

J'enlevais la veste de mon survêtement noir pour la poser sur un banc derrière moi avant de lancer un regard à mon interlocutrice.

«  Si vous souhaitez vous entraîner, on peut le faire ensemble ça ne me dérange pas. Voulez-vous vous battre ? »

Je n'étais pas dérangé par le fait de combattre, après tout la blonde s'entraînait avant mon arrivée. Elle pouvait alors bien avoir envie de faire un un contre un dans les règles de l'art.

Fière, elle l’était mais c’était davantage la Nostalgie qui s’emparait d’elle à chaque fois qu’elle posait un regard quelque part. Chaque pan de mur avait été un travail de longue haleine, certains avaient été sujettes à une petite dispute entre le Rêveur et la Bâtisseuse – désir et architecture s’étant opposé à plus d’une reprise – et d’autres à de vrais fou-rires. Aujourd’hui, cette complicité avait disparu. Tout cela à cause de l’arrivée d’une femme dans sa vie ? Tout cela pour une femme qui avait fini par mourir ? Certes, Tsukiko n’avait cessé de dire qu’elle ne serait que source d’ennuis et de désespoirs pour Kibo mais jamais, ô grand jamais, elle n’aurait imaginé à une telle fin … brutale.

Des pensées des plus sombres et cyniques qu’elle ne pouvait retenir. C’était ces pensées même qui l’avaient retenu de rejoindre Kibo dans son deuil. Elle était sûrement la dernière qu’il souhaiterait voir et surtout, elle risquait fortement de recréer une tension inutile et stupide. Elle ne voulait pas regretter ses actes. Plus jamais.

Le jeune homme tira la demoiselle de ses pensées en lui demandant si elle souhaitait se battre. Un court instant, une seule seconde à vrai dire, elle s’était figée. Elle ne savait pas pourquoi mais la notion de la battre l’avait totalement paralysé… Ravalant sa salive, elle reprit contenance et se contenta de secouer la tête.

- Je ne souhaite pas me battre. Kibo risque de m’en vouloir si je blesse ou fatigue ses élèves la veille d’un départ. D’ailleurs … J’ai entendu dire que tu allais l’accompagner. Il doit vraiment avoir confiance en toi, ou alors tu as un grand potentiel, dit-elle en laissant quelques secondes cette dernière phrase en suspens.

Elle s’éloigna un tantinet, laissant donc toute la place au jeune homme. Si elle paraissait sûre d’elle et des plus sereines, au fond d’elle, elle était « paniquée ». Elle espérait que le jeune homme ne fera pas preuve d’insistance ou de zèle car elle était tout bonnement inapte à parer la moindre attaque. A cet instant, s’il le désirait, il pourrait découper la Kawaguchi. Elle tentera de se défendre mais elle restera bien faible comparée à un Ninja en pleine possession de son chakra.

Elle prétendait s’entrainer à son arc pendant qu’il s’amusait à manier son épée. Cependant, très vite, elle abandonna ses flèches pour contempler l’entrainement du garçon. Il avait de la grâce et il semblait vraiment maîtriser cette épée des plus étranges. Une simple lame, de A à Z, sans garde ou pommeau.

- C’est la première fois que je vois une telle épée, se permit-elle de dire, interrompant par la même occasion le jeune homme.

En effet, les gestes de ce dernier devenaient de plus en plus précis, de plus en plus « fort » et sa crainte d’un excès de zèle persistait. Elle préférait y mettre terme avant de se retrouver à avouer qu’elle était sans défense. Faible. Vulnérable.

- Est-ce Kibo qui te l’a appris ou toi-même ? J’ai un doute pour ton professeur, il n’est pas vraiment un expert d’armes.

Par contre les sceaux ou encore les téléportations, il adorait. Il faudrait d’ailleurs qu’elle trouve un contre-effet à cette dernière capacité. Elle n’appréciait pas d’avoir des points « faibles ». Le jour où elle récupérera toutes ses capacités et compétences, elle devrait sérieusement s’y pencher … M’enfin, d’ici là, retrouver tout cela serait déjà bien.

- Comment trouves-tu Kibo ? Est-ce un bon professeur et un bon homme à tes yeux ?

Elle voulait voir la valeur de son coéquipier aux yeux d’Ogami, savoir si Kibo avait bien eu raison de le prendre à ses côtés pour un voyage des plus dangereux à son sens. Il venait de perdre sa dulcinée.. ne devrait-il pas rester auprès de Kioshi ou de ses amis au lieu de déambuler dans le monde ? Etait-il pris d’une envie de vengeance ? Tant de questions …

- Et gare à toi, je saurais si tu mens, dit-elle avec un sourire taquin, indiquant par là qu’elle ne souhaitait pas vraiment le piéger.

Sa sensorialité s’était bien trop vite développée – et c’était entre autre pour cette raison que la dame s’était vue entravée de chakra – mais malgré tout, elle ressentait encore les émotions d’autrui. Par contre, elle ne pourrait affirmer à cent pour cent s’il mentait ou non, peut-être même ne le saurait-elle pas. En somme, elle ne mentait pas … mais elle n’était pas une experte comme Kioshi ou encore le chat à Yami.

Musique:

J'avais proposé un duel dans les règles de l'art comme on dit, un duel qu'elle réfuta en prétextant ne pas vouloir me blesser ou même me fatiguer. Une explication qui tenait la route sauf que j'étais au même endroit qu'elle, pour m'entraîner. Elle semblait tout aussi bien renseignée sur le départ du maître et donc de son coéquipier. En plus de cela, elle savait que j'étais de la partie. J'esquissais un sourire face à une femme ayant des informations bien précises, en ce qui concerne la confiance je n'en savais trop rien. Il devait m'apprécier pour m'autoriser à être à ses côtés mais est-ce que vraiment il me faisait confiance ? Je pensais plutôt être un choix en dépit, me connaissant il savait sûrement que je n'allais pas le déranger pendant ce voyage. N'étant pas de nature à parler ou même à exprimer mes sentiments, il était bien tranquille à mes côtés. Le potentiel j’espérais l'avoir, j’espérais surtout ne pas approcher de ma limite. Chaque homme avait sa limite après tout et je réfléchissais déjà un moyen de la transcender pour être honnête..

«  Je ne sais pas comment il conçoit notre relation, il m'a dit jadis être de ma famille. Il doit avoir un minimum confiance en moi oui, je suppose aussi. »

Je laissais en suspens la réponse sur le sujet du potentiel, je n'allais pas m'avancer sur la chose n'étant pas sûr moi même de la réponse au final. Elle me laissa la possibilité de prendre place et donc de débuter mon petit entraînement, je fis quelques minutes d'échauffements avant d'empoigner mon arme. Azura, un Katana sans garde, du tissu me permettait de la tenir correctement. Une arme atypique qui me correspondait totalement, elle n'attendait que moi et c'était réciproque.

Je m'essayais alors à faire quelques gestes des plus concis, j'avais réussi à m'habituer à elle mais j'étais loin d'approcher à une maîtrise parfaite. Il n'était pas aisé pour moi d'entreprendre le maniement d'une arme, je devais en plus m'améliorer au Taïjutsu, tout ceci n'était pas des plus simples. Cette fois-ci, c'était moi qui était observé, je sentais son regard sur moi. Je continuais tout de même mon activité jusqu'à qu'elle m'interrompe en me disant n'avoir jamais vu une telle lame. Je tournais alors mon corps pour être face à elle, je regardais mon arme avant de planter mes yeux dans les siens.

«  Elle se nomme Azura, elle est très belle et j'ai plaisir à la manier. »

Azura, quelque chose qui m'était venu comme ça, simplement. Un rapport avec mes yeux peut-être, ma glace tout autant, juste une envie de nommer quelque chose, ça faisait plaisir. Le maître utilisait aussi un Katana mais il ne m'avait jamais initié à cet art. Je ne lui avais jamais demandé non plus, il devait aussi être très occupé. La Kawaguchi me posait quelques questions, je commençais à me demander la raison de sa venue dans le repère. Tantôt elle me parlait de voyage et maintenant de mes armes, ses questions s'appuyaient aussi sur la relation avec le dirigeant des Midorhato. Je ne savais que penser à son sujet.

« Kibo maîtrise aussi cet art, je le sais mais je ne l'ai jamais vu à l’œuvre. Par contre il ne m'a pas initié ni même entraîné à ce sujet jusqu'à présent. J'ai préféré d'abord m'habituer à mon arme avant même de demander un enseignant. Le moment venu je pense lui demander son aide. »

Je n'étais pas gêné par le fait de demander de l'aide à cet homme, il m'avait tant apporté et le faisait à chaque fois avec plaisir. Je ne pouvais que être incité à aller le voir même si j'avais du mal à quémander de l'assistance. En principe je préfère régler les choses moi même, mais cela était bien trop difficile parfois et je devais me reposer sur quelqu'un. Le prénom revenait alors encore à la charge, cette fois-ci j'avais vraiment envie de comprendre la raison de ces questions. Elle me demandait mon avis sur Kibo et savait même si je lui mentais. Je devais alors être des plus honnête, comme je le faisais habituellement. Je rengainais mon arme avant de m'avancer un peu plus vers elle, mon regard froid et une expression sérieuse j'étais décidé à répondre pour cette fois seulement.

«  C'est un homme bon et droit, un des piliers du village à mon avis. Kibo a aussi des intentions louables mais peut-être un peu utopiques si vous voyez ce que je veux dire. Je suis différent sur certains points, je pense différemment..

Mais il reste un très bon professeur, il m'a beaucoup appris depuis mon arrivée au sein de l'organisation. Je n’espère pas l'égaler mais plutôt le dépasser, je ne pourrais prétendre réussir mes projets sans l'avoir battu dans un combat régulier. »

J'approchais mon visage vers celle de la reine des sables en regardant toujours le même air.

«  Vous ne trouvez pas que ça fait beaucoup de questions mademoiselle Kawaguchi, pourquoi ne pas en venir directement au but ? Ça facilitera les choses, vous ne croyez pas ? .»

J'étais pressé d'entendre sa réponse.

Un sourire s’étira sur ses lèvres rosées. Cet homme avait exactement la même vision que Tsukiko. Effectivement, Kibo était un homme bon, chaleureux et de confiance. Elle savait que si le village avait besoin de lui un jour, il répondrait présent. Cependant … il n’en restait pas moins un homme utopiste aimant prétendre qu’il y avait, et qu’il y aura toujours, une troisième solution.

Suite aux derniers événements personnels, la demoiselle ne rejoignait plus cet avis. La paix ne pouvait pas s’obtenir sans effrayer le voisin avec une force de frappe conséquente ou encore en le rendant dépendant en travers d’alliances militaires, commerciales ou technologiques. Il fallait avoir autre chose que de bons sentiments pour empêcher autrui d’envahir. La nature humaine était sordide, et imprévisible. L’amitié était aussi fragile que la vie. Dès l’instant où les intérêts étaient menacés ou qu’un groupuscule dont on avait la charge l’était, il fallait faire des choix.

Une troisième solution ne pouvait pas exister.

- Je voulais savoir si nous partagions la même vision au sujet de Kibo. Comme tu l’as dit, malgré qu’il soit le ninja le plus fidèle du village et l’un des plus puissants de surcroît, il n’en reste pas moins un homme aux idées surréalistes.

Elle se tut quelques instants pour tenter de trouver ses mots pour la suite. Il fallait choisir attentivement pour ne pas circuler le mauvais message. C’était de son coéquipier dont il était question et non un quelconque ninja inconnu dont elle se contrefichait à cet instant.

- Des idées que je partageais jadis. Nos divergences de point de vue a conduit à un véritable malaise entre lui et moi, mettant à froid notre complicité passée. Il a perdu sa fiancée très récemment, et je n’ai même pas pu le voir pour partager sa douleur.

La fissure était trop profonde pour qu’elle puisse se permettre de lui faire face.

- Je respecte son point de vue malgré nos récents désaccords. Et je continue à m’inquiéter pour lui, en tant que coéquipière mais également et surtout, en tant qu’amie. Au lieu de tenir un deuil et de chercher du soutien auprès de ses amis, tel notre maître d’équipe par exemple, il va parcourir le monde. Je crains sur ses intentions, sur ce qu’il va faire, sur ce qui peut lui arriver. J’ai peur qu’il se blesse ... d’une manière ou d’une autre.

Elle aurait voulu l’accompagner, en froid ou non, mais elle était elle-même blessée et déchue. Elle avait un mal fou à reprendre contrôle sur sa propre existence alors veillé sur un autre constamment – en sachant qu’il la rejettera sans ménagement -, c’était hors de portée. Pour l’instant.

- Je ne peux pas l’accompagner pour plusieurs raisons. Et je ne pourrais pas savoir ce qu’il lui arrive dans tout le Yuukan. Mais j’en ai besoin. Vois-tu où je veux en venir jeune Ogami ?

Comprenait-il ? Acceptera-t-il la mission qu’elle allait lui confier ? Ou plutôt, la faveur qu’elle allait lui demander ?

- Tu auras à surveiller Kibo, et m’envoyer régulièrement une lettre sur votre périple, les rencontres faites, bonnes comme mauvaises …

Espionner. Voilà ce qu’elle voulait. Cependant, contrairement à toutes ses missions « d’espionnage » dont le but n’avait été qu’une récolte d’informations à des fins douteuses, dans ce cas-ci, ce n’était que pour se rassurer qu’il allait bien.

- Si tu acceptes, ta mission serait de surveiller Kibo pour moi. Non …. Pas une mission, mais plutôt une faveur. Acceptes-tu de prendre soin de mon coéquipier et de me tenir au courant sur ... tout ce qui peut se passer de bien comme de mal?

Son regard si dur avait changé pour le coup. Il était … implorant. Elle y tenait à ce petit bonhomme aux cheveux argentés et Ogami pouvait le voir. N’importe qui pourrait le voir. Pour quelques secondes, la dame des Sables avait laissé tomber ce masque dont tout le monde ne cessait de s’en plaindre.

Pour quelques secondes, elle était Tsukiko et non la Kunoichi.

- S'il te plaît.

J’avais face à moi une jeune femme un peu plus petite que moi et peut-être un peu plus vieille, je n’en savais trop rien. Si je n’avais pas de doute sur ses premières paroles si ce n’est pour dire la raison de sa vue, j’en avais dés à présent. Les questions se suivaient et il me semblait être indiqué que celles-ci avaient un but précis. Le son de sa voix, sa façon de procéder j’avais imaginé un réel objectif à sa venue. Je n’avais peut-être pas tort du tout.

Elle était d’accord avec moi, il était un peu trop « rêveur » et cela personne ne pouvait le nier. Il était sûrement connu dans le village à cause ou grâce à cela. Je trouvais ça exemplaire de penser de la sorte tout de même, on avait peu de spécimen du genre de nos jours. Elle continua alors sur sa lancée en précisant la relation avec mon maître, elle disait être en froid avec lui. Sur ces mots, je fermais les yeux quelques secondes. Si c’était pour faire le médiateur, elle pouvait abandonner, je n’étais surtout pas fait pour cela.

Cependant je ressentais son inquiétude vis-à-vis de mon dirigeant et donc de son coéquipier, je sentais comme un malaise et ça n’avait pas l’air facile pour elle de m’en parler. Je ne compatissais pas non, je n’avais pas non plus pitié mais d’un côté j’essayais de me mettre à sa place. Si cette situation venait à être mienne, peut-être que j’aurais fait comme elle, qui sait. Il ne se reposait sur personne, il préférait même fuir les problèmes et parcourir le monde. Je ne le jugeais pas, je respectais même ce choix mais ça avait l’air de faire du mal à ses plus proches amis; J’avais récemment connu tout ça, l’amitié et tout. Je me demandais pourquoi je m’étais embarqué dans ces histoires, cela n’amenait que problème sur problème et il était difficile de résoudre ce type de problème.

Tsukiko voulait suivre de prêt la situation et elle ne pouvait le faire d’elle-même, c’était moi l’accompagnateur et non elle. Je comprenais alors la raison de sa visite, je comprenais pourquoi elle était venue me voir moi particulièrement. En plus d’être si bien renseignée elle avait eu de la chance de tomber directement sur moi. Elle attendait ma réponse, je laissais un temps de latence entre sa question et mes mots. Je n’avais pas à réfléchir à cela, il fallait que j’approuve ou que je réfute. Une décision ne nécessitant pas des heures de réflexion.

«  Je vois où vous voulez en venir. » Dis-je en hochant la tête.

Elle exprimait alors avec plus de précision son envie elle voulait que je lui envoie des lettres pendant notre voyage pour la tenir informer de la situation. Des sortes de rapports, c’était ce qu’elle souhaitait apparemment. Est-ce que c’était vraiment bien d’agir de la sorte, est-ce que je pouvais impunément espionner mon maître et en référer à la Kawaguchi? Je ne savais pas si c’était une manière de se comporter par rapport à ses amis, j’ignorais tout des codes sociaux. Cependant, je trouvais que cela était une bonne idée. En plus ça semblait tenir à cœur à la damoiselle, un s’il te plaît des plus marquants était dit comme conclusion. Elle attendait mon retour, ma réaction.

« Il me semble que mon maître est important à vos yeux, j’essaie de comprendre certaines choses même si elles me dépassent. »

Je reprenais alors mon échauffement qui n’avait que trop traîné. Je bougeais mes bras de droite à gauche avant de reprendre la conversation.

« Je vais faire ce que vous me demandez, je vous enverrai régulièrement des lettres sur la situation. Cependant ne me remerciez pas, je le fais car je trouve ça honorable et non pas pour un remerciement ni même pour combler une faveur. »

Ces mots, je les avais déjà prononcé à une personne dans le passé, je n’acceptais pas de rendre des services pour attendre quelque chose en retour. Je n’étais pas de ce genre de personne, non. Je n’attendais rien de la damoiselle en acceptant sa demande.

« Aussi, vous ne m’êtes pas redevable, imaginez que cela soit de mon initiative. »

Je me tournais une dernière fois pour la regarder.

« Maintenant je vais reprendre mon entraînement si vous n’y voyez aucun inconvénient. »

« Quel homme étrange » ne put-elle s’empêcher de penser.

Kibo était l’homme toujours juste et bon – un brin de trop si on lui demandait son avis personnel – le rendant tantôt impuissant, tantôt puissant. Par exemple, si elle avait demandé une tâche similaire à son coéquipier, il aurait hurlé au scandale ou encore aurait assumé toute la responsabilité de futurs événements désirables ou indésirables. Une attitude des plus « ridicules » à son sens. En effet, s’il arrivait quelque chose dans le voyage, comptait-il ruminer seul ? Mieux, s’il faisait une rencontre malhonnête, aura-t-il assez de recul ?

Heureusement, Ogami n’était pas de la même trempe utopiste que Kibo. Elle le comprit dès l’instant où elle vit qu’il n’était pas particulièrement choqué d’avoir à « espionner » ou « balancer » le maître. Il en comprenait les raisons, soit une inquiétude en tant que ninja mais aussi en tant qu’amie, et acceptait de rendre ce service sans « retour ».

- Je vais vous laisser à votre entrainement, dit-elle en passant au vouvoiement, indiquant d’une manière ou d’une autre qu’une relation des plus professionnelles s’était mise en place.

Ce poids lourd en moins, elle put mieux respirer – chose qu’elle fit en prenant une longue inspiration - et en silence, elle se leva pour quitter le bâtiment qu’elle avait jadis construit. Elle ne disait rien et n’insistait pas plus. A quoi bon discuter avec un garçon qui semblait déjà arrêté sur deux ou trois idées et mode de fonctionnement ? Cependant, rien ne l’empêchait d’ajouter ce dernier petit détail.

- J’apprécie les initiatives. Et je pense qu’elle devrait être récompensée. Je n’oublierai de récompenser comme il se doit le moment venue. De ma propre initiative, sans obligation.

Sur ces doux mots, elle quitta définitivement la salle d’entraînement pour se diriger tout droit vers la sortie. Entre temps, elle rencontra une ou deux figures. Elle se contentait un petit signe de tête de salue, ne désirant guère s’attarder dans le Quartier Général d’un certain Rêveur. De tous les hommes de Suna, c’était pour l emoment celui qu’elle ne voulait pas rencontrer.

Elle l’appréciait mais la rancune et la colère étaient toujours présentes. Sûrement pour lui aussi. Il fallait que le temps efface ou assouplisse les esprits.

A l’heure actuelle, il était encore trop tôt.
Et elle avait une toute autre histoire à régler. Celle de Kioshi.

« Et également mes bracelets … » soupira-t-elle.

Les sujets de réflexion étaient nombreuses et les problématiques tout autant. Elle se devait de les régler avant de partir à son tour. Elle souhaiterait revenir pour un départ prometteur et non remettre les pieds dans ce passé, ou présent, des plus « chaotiques ».

Sur ces pensées, la demoiselle disparut dans les ruelles de Suna.