Encore aujourd’hui l’aube se profilait sur l’horizon lointain du pays du vent. Et moi je me retrouvai là, une fois de plus, dans la voie illusionnée, adossée contre ma moto, défiant l’immensité du monde du regard. Il faisait chaud comme toujours, le vent commençait lentement à se lever et à secouer les dunes de sable. Le désert répétait inlassablement son cycle tandis que moi je peinais à suivre son rythme n’ayant pas réussi à fermer l’œil de la nuit. Mon esprit était obstrué par les mots de Kioshi et à plus forte raison de ceux de Zanshi. C’était donc le cœur lourd, chargé de doute, que je m’apprêtai une nouvelle fois à partir pour Kawa. J’avais conscience de tous ceux que je laissai derrière-moi. Malgré que mon départ soit dû à un ordre de mission, je ne pouvais m’empêcher de penser que je les abandonnai, notamment Yami, une fois de plus. Elle qui se trouvait encore à l’hôpital. J’aurai souhaité rester là pour elle, mais j’estimai être de trop dans cet entourage qui lentement se formait autour d’elle. Toutes ces personnes qui veillaient sur elle. Je savais que je pouvais leur faire confiance.

Une fois que j’eus terminé ma cigarette, je m’équipai de mes lunettes de soleil ainsi que de mon capuchon pour affronter le désert avant d’enfourcher ma moto et de partir. Cette-fois-ci je ne me retournai pas pour voir le village s’éloigner dans mon dos, sans doute, peut-être parce que j’aurai été capable de céder et de faire demi-tour. Durant plus d’une heure je poursuivis ma route dans la même direction, toujours vers l’est. Seul résonnait dans mes oreilles le son du moteur mugissant de mon véhicule qui, durant sa course, laissait derrière lui d’imposants sillons sur le sable. J’aurai pu continuer ainsi longtemps, jusqu’à finalement quitter le désert, mais ce fut sans compter sur l’apparition de cette étrange silhouette entachant le paysage. Je l’avais brièvement aperçu du coin de l’œil, pensant rêver un instant, avant de braquer brutalement sur la droite pour m’en assurer. Je me plaçai entre elle et la route de sorte à l’interrompre dans son périple.

Il se tenait là devant moi, cet imposant et majestueux tigre au pelage zébré. Un tel spectacle était assez incongru dans le désert. Pourtant, ce n’était pas la première fois que j’y avais affaire. Une créature similaire avait jadis frappée aux portes de Suna . A croire que le désert semblait attirer les Gekei. Plus le temps passait et plus j’apprenais à connaître ces êtres étranges. A mon sens, la plupart n’étaient que des monstres dominés par leurs instincts. Ce fut donc avec une grande méfiance que j’avisais ce nouvel arrivant.

-Qui êtes-vous et que faites-vous sur ces terres ? Le questionnais-je d’un ton impérial du haut de mon véhicule.

J’ouvris le compartiment latéral de ce dernier pour sortir mon fusil ainsi que mes pistolets que j’attachai à ma bandoulière avant de descendre, m’approchant de la bête en faisant preuve de toujours autant de prudence.

-Répondez-moi, je sais que vous pouvez m’entendre.

Fis-je toujours plus autoritaire. J’ignorai quel pouvait être le but de cette créature, mais avant de quitter Kaze, je voulais m’assurer qu’aucun mal n’y rentre.

Au départ, le tigre avait voulu éviter les questions. Il fallait avouer que rencontrer une Sunajin sur le départ, c'est-à-dire dans le sens contraire au sien, n’était déjà pas prévu ni une chance en soi. En fait, cette rencontre s’annonçait à double tranchant. Car oui, il y allait forcément y avoir une vraie « rencontre » car si la jeune inconnue avait formulé une interrogation tout à fait honorable, elle avait insisté, comportement typique chez quelqu’un qui connaissant un minimum les Gekei. Mais cet « avantage » d’information était d’ores et déjà comblé : qui d’autre qu’un Saibogu pouvait se balader à cette allure sur un engin pareil ? Intriguant, intéressant, fascinant presque !

Le tigra inclina la tête, et se transforma rapidement en un être humain aussitôt rhabillé. Howaito n’accordant pas réellement d’importance à ce détail mais préférant si possible ne pas être nu après chaque transformation s’était adonné à mettre au point des astuces pour palier à cela. Le tigre blanc avait donc laissé place à l’ancien moine blanc. Ses traits fins soulignaient à peine ses yeux qui avaient d’ores et déjà scruté la jeune femme.

« Bonjour, jeune Saibogu et enchanté, je me nomme Howaito et je suis en route dans l’espoir qu’on me laisse entrer à Suna. »

Il s’approcha de cette dernière, tenta de lui prendre la main pour la baiser tout en s’inclinant. Une politesse nécessaire et non forcée. Mais il savait que certaines femmes, surtout des kunoïchis, n’aimaient pas forcément cela. Qu’importe.

En parlant de femme d’ailleurs, cette Sunajin avait bien choisi son moment. Daini, le bras droit du moine, était partie un peu plus tôt dans l’espoir de trouver une oasis pour faire le plein d’eau. Mais ce n’était pas si grave, les choses n’allaient probablement pas dégénérer ici et quand bien même, le Gekei saurait se défendre.

« Apparemment, ce n’est pas la première fois que vous voyez un Gekei. »

Il avait rajouté cette question dissimulée derrière une affirmation car si cette rencontre pouvait aussi bien lui attirer des problèmes que des bénéfices, il préférait être optimiste… et entreprenant. Après tout, c’était presque accoutumé.

Alors l'animal fit exactement ce que j'attendais. A savoir retrouver sa forme humaine pour daigner me répondre. D'une certaine façon cela jouait en sa faveur car je n'aurais pas hésité à le cribler de balles s'il avait fait preuve d'indocilité. Un beau jeune homme vêtu de blanc se tenait désormais face à moi. J'avouai ne pas m'être attendu à rencontrer quelqu'un de si courtois au milieu du désert et notamment lorsqu'il mit un genou à terre pour me saisir la main afin d'y déposer un baiser. Ces fantaisies mondanistes qui avaient jadis sillonnées ma vie remontèrent dans mon esprit. Me ramenant à une époque antérieur qui me semblait si lointaine. En outre temps et en outre circonstance, j'aurai pus trouver son geste comme son attitude des plus charmantes.

Malheureusement, nous n'y étions guère et en cet instant précis, j’endossais mon rôle de Kunoichi. Ce fut donc pour cette raison, et poussée par un instinct quasi viscéral que ce fameux Howaito se retrouvait avec le canon de mon fusil à pompe pointé sous sa gorge. L'inconnu ne broncha pas, visiblement peu alerté quand à la situation. Je fronçai des sourcils tout en retirant ma main de la sienne dans un geste qui sonnait presque d'un autre monde que celui du désert.

-Vous n'avez toujours pas répondu à ma question Monsieur.Howaito.

J'avais prononcé ces premiers mots d'un ton sévère tandis que les derniers se teintaient d'une pointe d'autorité. Aussi enfonçais-je davantage mon arme dans le creux de son cou dans le veine espoir de faire pression sur lui. Cet inconnu demeurait désespérément imperturbable.

-Qui êtes-vous ?

Répétais-je d'un ton plus sec, laissant clairement sous-entendre que je n'attendais aucune autre réponse que la pure et direct vérité. Cela me fit repenser à sa précédente remarque concernant la race qu'il incarnait.

-J'ai dû connaître une douzaine de Gekei durant ma vie. Tous sont morts à présent. Je vous conseil de me faire part de bons arguments si vous ne tenez pas à les rejoindre...

Évidemment le nombre cité s'avérait légèrement exagéré. Il n'était en réalité question de moins de la moitié de ce qui avait été dit. Cependant j'étais la seul à le savoir. Ainsi demeurais-je statique, droite et impérial, plongeant mon regard d’ocre dans le sien, à le dévisager longuement, tout en maintenant mon fusil pressé contre lui.

« Et voilà, je me doutais que les bonnes manières ne m’aideraient pas à calmer le jeu… »

C’était peu dire ! Alors que la jeune kunoïchi avait consenti à se laisser baiser la main, l’autre avait directement saisi une arme de pointe qui s’était directement collé au cou du moine. Peut-être aurait-il pu agir avant, mais étant assuré qu’un Sunajin ne tuerait pas un inconnu sans motif, sa flegme lui avait à peine permis de respirer et il était déjà trop tard.

Désormais dans une position plus que délicate, Howaito se savait à la fois en danger et la cible d’un contrôle de routine assez agressif. Qu’un shinobi protège sa patrie au vu des récents évènements, c’était normal. Mais que ce comportement soit à ce point rigide… Que faire ? L’habilité et la rapidité des mouvements du moine animal étaient des arguments solides pour un désarmement, mais cela finirait forcément mal. Il y avait des risques qu’il faudrait éviter, surtout que le Gekei n’était pas venu en ennemi. Espérer une entrevue avec le Kazekage après avoir combattu une de ses kunoïchis serait une tentative courageuse mais ayant peu de chances d’aboutir. Il fallait trouver autre chose.

« Et moi j’ai croisé ô combien de Saibogu. Toutes étaient bien moins charmantes que vous. »

L’humour charmeur était un bon remède, mais il ne fallait pas perdre de temps. Même si elle semblait uniquement à cheval sur la sécurité, cette inconnue pouvait très bien perdre son sang-froid.

« Je vous l’ai dit, je me nomme Howaito. Je viens pour rencontrer votre Kazekage ainsi qu’une amie. Si vos voulez m’escorter, je n’y vois aucun problème bien au contraire, néanmoins je vous prierai d’abaisser votre arme. »

D’ailleurs, il avait presque oublié Daini. Un détail important à communiquer à la Sunajin.

« Oh et tant que j’y suis, quelqu’un m’accompagne durant ce voyage. Actuellement partie chercher de l’eau, je pense que si cette dernière revient et vous voit me menacer ainsi, elle sera bien moins… douce que je ne le suis avec vous. »

Ce n’était que la vérité et en aucun cas une menace. Mais comme la Saibogu allait prendre la nouvelle ?

Je haussai un sourcil circonspect à son encontre. Plusieurs hypothèse pouvait justifier son comportement. La première étant qu'il cherchait à sauver sa peau, la seconde à réellement me draguer et la troisième au fait qu'il s'agisse d'un véritable demeuré. J'exécutai mentalement la dernière possibilités pour conserver les deux autres qui me semblaient plus probables. Au moins avait-il le mérite de savoir parler aux femmes. Tout du moins, cela venait de lui éviter un tire à blanc non loin des oreilles pour le rappeler à l'ordre et le rendre accessoirement sourd. Néanmoins je commençai lentement à perdre patience. Il n'hésitai pas à se montrer directe en ce qui concernait les compliments, mais pour ce qui était des informations je pouvais toujours repasser.

-Bel argument mon cher, vous venez de gagner cinq minutes d'espérance de vie. Malheureusement pour vous j'ai une assez mauvaise notion du temps, et nous ne sommes guère plus avancés. Lançais-je d'un ton tellement ironique qu'il en devenait presque affable. Votre nom m'importe peu. Je tiens à savoir qui ou ce que vous représentez. Pour quelle raison souhaitez-vous vous entretenir avec la Kazekage ?

Ce dernier m'avait également expliqué qu'une amie à lui se trouvait dans les parages et que cette dernière n'hésiterai probablement pas à s'en prendre à moi si elle trouvait son compagnon dans une telle posture. Décidément je ne comprenais pas du tout ce que cet homme cherchait à faire. J'avais la sincère impression qu'il se moquait de moi. Ce faisant je retirai ma capuche, laissant courir ma longue chevelure d'opale sur mon dos, puis retirai mes lunettes de soleil pour les ranger dans le bâillement de mon corset. J'attrapais ensuite mon Scouter Sayen que j'accrochai à mon œil gauche. Activant ce dernier, il pourrait détecter la présence de tout chakra environnant.

-Soit, que votre amie approche. J'ai à moi suffisamment d'armes pour tenir en joug une armée. Peut-être sera-t-elle davantage en mesure de répondre à mes questions.

Évidemment il s'agissait que de fieffés fanfaronnades. Toujours fut-il que mes menaces prévalaient sur le reste.

-Sachez que je n'ai guère de temps à perdre avec vous. Et que le fait d'être honnête avec moi pourrait considérablement augmenter vos chances de survies. Si vous tenez à ce point à parvenir jusqu'à Suna, il vous faudra faire des concessions...

Peut-être que ces paroles pourraient davantage le pousser au derrière, l'obligeant ainsi à me répondre. Je ne tenais nullement à le tailler en pièce. Cela aurait été du gâchis d'amocher un si jolie visage. Mais le mots « gâchis » sonnait plutôt bien dans ma tête avec le mot « gâchette » celle-là même qui commençait à sévèrement me démanger. Je commençai à penser que je devais avoir un sérieux problème à ce sujet à toujours vouloir tirer sur tout ce qui me tapait sur le système...

Cinq minutes d’espérance de vie ? La jeune femme adoptait un ton tellement ironique qu’il en devenait presque… drôle. Etait-elle vraiment sur les nerfs ou est-ce que le jeu de charme initié par Howaito venait de faire mouche ? Peut-être, voire sûrement un peu des deux. Les Saibogu n’étaient pas aussi coléreux et primaires que celle qu’il avait en face de lui, mais néanmoins ils n’étaient pas connus pour être… ordinaires. Une Saibogu qui est excessive c’était presque normal, clanique, et celle-ci semblait l’être avec les étrangers. Et pour ça, les Furyous n’y étaient pas pour rien.

A l’écoute de ce que le moine avait à dire sur son acolyte, la Sunajin ne sourcilla pas, mais remplaça ses lunettes par un dispositif aussi étrange qu’à première vue complexe. Une mesure pour voir Daini arriver ? Sûrement. Et c’était tant mieux.

« Oh mais je ne vous ai pas parlé de mon bras droit pour vous menacer… mais pour vous protéger. »

Eh oui. D ne faisant pas dans la finesse, il aurait suffit qu’elle arrive maintenant pour que la Saibogu rencontre de gros problèmes. Mais maintenant que la Sunajin était au courant et qu’elle avait agi en conséquence, elle sentirait probablement Daini arriver. Et ainsi, c’est un bain de sang rapide qui serait évité. C’était préférable pour tout le monde, pensait le Gekei qui affichait un rictus qui se voulut séduisant.

« Je viens uniquement en mon nom, je suis un… solitaire, dirons-nous. Quant au sujet que je veux évoquer avec le Kazekage, c’est justement… L’homme avait fait une pause. Il était temps que le manège cesse. C’est justement parce que je veux l’évoquer avec elle que je ne peux pas vous en parler. »

Son sourire avait disparu. Toujours aucun signe de Daini, elle ne reviendrait pas avant un petit moment. Il faudrait composer sans.

« La teneur de votre zèle est aussi surprenante que votre beauté. Néanmoins je vous ai dis tout ce que je pouvais vous dire. Alors si cela ne vous convient pas, pressez sur la détente, je ne serai que le treizième Gekei que vous tuerez, n’est-ce pas ? Mais prenez garde. »

Ses yeux fixaient ceux de la jeune femme, alors qu’un léger sourire se dessinait à nouveau sur les lèvres de l’ancien Kiezan.

« Si vous pensez que mes compliments étaient un stratagème, vous faites une erreur. Et penser que je ne peux pas me défendre dans cette position, inconfortable je vous l’accorde, en est une plus grosse encore. »

Un si beau visage. Un tempérament si intéressant. Si seulement ça pouvait amener à autre chose qu’à des coulées de sang…

Finalement, mes paroles parvinrent à faire poids, ou peut-être devais-je cela au canon de mon fusil à pompe flanqué sur sa jugulaire ? Toujours était-il qu'il concéda cette fois-ci, tout du moins à sa façon, à me dire la vérité. Au final je n'étais guère plus avancée. Cependant je devinais aisément qu'il ne pouvait être n'importe quel homme : ce dernier faisant preuve d'un calme à toute épreuve, il ne semblait nullement déterminer à se battre. Sa menace dissimulée ne m'impressionna guère, je ne comptais plus le nombre de situations plus ou moins similaires où un individu avait tenté de se dérober à mon joug.

-Et vous feriez également une grosse erreur en pensant que mes aptitudes reposent sur cette arme seule. Lui expliquais-je d'une voix devenue beaucoup plus sérieuse.

Nous nous toisâmes longuement du regard, cherchant mutuellement à nous jauger. Si ce Gekei aurait présenté la moindre once d'agressivité depuis le départ, je n'aurai sans doute pas hésité à tirer. Néanmoins, sa courtoisie et sa retenue avait fini par jouer en sa faveur. Il cherchait à éviter un affrontement inutile : tout comme moi également. Je n'étais pas là pour cela. Une mission m'attendait, et je ne tenais pas à perdre davantage de temps.

J'eus un sourire malicieux avant de finalement décider d'abaisser mon arme. Il venait de gagner, tout du moins pour l'instant, mais je n'en avais guère terminé car, malheureusement pour lui, j'étais assez têtue, et je ne tenais pas à quitter ma nation en laissant un potentiel danger derrière-moi.

-Je veux bien comprendre les raisons qui vous poussent à garder le secret sur les raisons de votre présence sur ces terres. Malheureusement, je ne pourrais vous laisser passer tant que vous ne m'aurez pas tout raconter.

Eh oui, on ne pouvait aborder Kaze comme s'il s'agissait d'un vulgaire moulin. S'il tenait vraiment à rencontrer ma Sensei, il faudrait qu'il me le prouve d'une quelconque façon. En attendant, il était hors de question qu'il aille plus loin.

-Vous ne semblez pas chercher la confrontation et il en va de même pour moi. Malgré-cela vous n'irez pas plus loin. Dites-moi la vérité et peut-être pourrais-je concéder à vous autoriser à vous rapprocher de Suna. Auquel cas vous n'aurez d'autre choix que de rebrousser chemin, ou bien de me passer sur le corps. Il serait cependant assez fâcheux d'en arriver-là...

Je me montrais plus provocatrice de sorte à lui laisser comprendre dans quel genre de jeu j'étais en train de l'enchevêtré. Dès lors, tout dépendrait de sa prochaine réaction. Il pourrait tout aussi bien continuer à faire tourner en rond la conversation, usant de ses belles paroles pour tenter vainement de m'amadouer, mais cela ne le mènerait nul part.

Elle n’avait pas l’intention de le laisser passer sans avoir une bonne raison. Expliquer en détails ce qu’il voulait à Suna, à Habashi Zanshi, à Kawaguchi Tsukiko… C’était trop complexe, trop long. Mais pourtant, cette Saibogu avait rengainé son arme aussi lentement qu’elle avait insisté pour avoir des détails. On ne pouvait pas approcher le Kazekage comme ça, c’était une évidence. Mais la jeune femme semblait quelque-peu… en train de faire du zèle. Néanmoins, une logique et certains raisonnements s’étaient accélérés et même terminés depuis le début de cette discussion. Et il était temps de mettre en place l’un d’entre eux.

« Bon, je vais vous raconter… »

Mais il s’arrêta et laissa sa phrase dans un suspend qui, surprise, se changea en fin. Après un soupir…

« En fait non, je n’ai pas envie de vous mentir. J’aurais pu vous raconter une belle histoire que vous auriez gobée sans souci, mais si je ne peux pas vous donner la vérité… je peux au moins vous éviter de vous servir un mensonge. »

Il esquissa un sourire, puis leva un peu les mains. Il s’assit en croisant les jambes. Une pause de moine. Une tranquillité à peine dérangée par la chaleur du sable sur lequel il avait pris place.

« A cette distance, il n’y a quasiment aucun poste d’avant-garde. Vous êtes probablement sur le chemin de l’aller, ou – même si j’en doute vu le sens contraire que vous aviez par rapport à moi – du retour. Vous êtes envoyée en mission, n’est-ce pas ? »

L’homme se tapota les genoux avec ses mains, ne lâchant pas son interlocutrice des yeux.

« Pensez-vous que je sois une menace pour Suna ? Si oui, quel genre d’homme pensez-vous que je sois ? Une brute, un shinobi ayant de grandes qualités au combat ? Dans ce cas, ne pensez-vous pas que si je représentais un danger pour votre village ou votre Kazekage, vous éliminer ne serait qu’une tâche parmi tant d’autres pour moi ? A moins que vous voyiez en moi un stratège des plus intelligents, dans ce cas comment pouvez-vous croire que quelqu’un d’aussi malin ne vous aurait pas semé dans la discussion et servi ce que vous vouliez entendre ? »

Toujours aucune trace de Daini. Il n’y avait que la Saibogu, le moine et le bruit d’un moteur qui accompagnaient ce paysage.

« Je pense que c’est à Habashi Zanshi seule qu’il revient le droit de décider d’une entrevue entre elle et moi. Et je ne dirai rien de ce que je veux lui dire à elle, hormis à elle-même. Ce n’est ni contre vous, ni une sorte de provocation. Vous ne voulez pas que je passe ? Je ne veux pas me battre avec vous. Alors je vais attendre que vous vous en alliez ou que vous changiez d’avis. Mais n’oubliez pas, contrairement à vous, je ne suis pas pressé. »

Je crus un instant avoir remporté la victoire, avant de constater, dépitée, qu'il n'avait visiblement pas renoncé. Au contraire la situation semblait l'amuser ou, à défaut de cela, le laisser totalement indifférent. Il n'avait réagit à aucune de mes provocations et ne s'était pas adonné à un combat sans but ni raison. En somme, lorsqu'il plia les genoux pour adopter une posture méditative, je ne fus qu'à moitié surprise. Sans doute n'y avait-il pas meilleur réaction à avoir au vu des circonstances et je n'en attendais guère davantage, sauf peut-être la vérité qui, elle, ne me serait visiblement point servie sur un plateau.

Nous aurions pus partir très loin dans ce qui semblait se transformer en véritable charade, néanmoins et comme il l'avait si bien souligné, je n'avais en aucun cas mon temps devant moi contrairement à lui. Le pays des rivières m'attendait et je ne pouvais en aucun cas me permettre de faire patienter ma mission. Si les circonstances avaient été différente, sans doute aurais-je été assez butées pour m'asseoir en tailleur en face de lui et nous aurions sans doute passé le restant de la journée et de la nuit à nous fixer du regard tels deux imbéciles bornés que nous étions.

Car, je ne pouvais que l'admettre. Il semblait aussi têtu que moi, en plus d'être mignon et intelligent. En soit, cet homme s'avérait délicieusement détestable. Lui qui était parvenu à retourner mon propre jeu contre moi. Je ne pus alors réprimer un soupir las. Je détestai perdre, purement et simplement.

-Visiblement je n'ai d'autre choix que de m'admettre vaincue. En effet, vous semblez être un individu honorable et probablement un honnête homme, mais comme vous l'avez si bien dit, ce ne sera point à moi d'en décider...

Sur ces paroles, je rengainai mon fusil dans mon dos en le fixant à ma bandoulière. J'avais assez perdu de temps ainsi, à présent, il me fallait reprendre ma route.

-Encore vous restera-t-il à convaincre tous les autres au village, mais je ne me fais pas de soucis, vous semblez être un beau parleur...

Je rangeai mon Scouter Sayen, ainsi que mon arme dans le compartiment de ma moto, avant de enfourcher cette dernière, faisant crisser le moteur, qui ébranla la plénitude du désert dans un son vrombissant. Je replaçai mes lunettes de soleil sur mon nez, puis avançait pour commencer à contourner le beau tigre blanc, mais m'arrêtai après être passé quelques mètres derrière lui. Ce faisant je tournai la tête, lui adressant un sourire des plus hautains.

-Bienvenue à Kaze Monsieur Howaito.... Dis-je dans une parfaite ironie avant de faire hurler le moteur de mon véhicule, filant à vive allure vers l'horizon lointaine. Ainsi laissais-je ce curieux étranger à la charge de mes compatriotes.