Une cérémonie Kawaguchi en l’honneur des nouveaux gradés … Elle avait espéré échapper à la cérémonie tantôt en trainant à l’hôpital avec son épaule déboitée ou tantôt en acceptant une mission qui promettait d’être longue avec maître Kioshi, mais peine perdue. Son séjour dans le centre de soin n’avait pas dépassé la journée, les medic-non s’étant montré trop efficaces, et sa mission avait été très vite « expédiée » due au niveau et aux facilités de son maître pour éviter des obstacles o les détruire.

En moins d’une semaine, elle avait été de retour. Un retour mouvementé entre plusieurs rencontres ou aventures. Cependant, elle préférait ne pas rentrer dans les détails, se contentant plutôt de maugréer et de se plaindre sur sa soirée qui promettait d’être mortellement ennuyeuse ou humiliante. Le quartier des Kawaguchi se dessinait au loin, davantage une ombre menaçante qu’une maison accueillante. Elle l’avait quitté pour emménager ailleurs, tantôt pour respirer, tantôt pour s’éloigner de la pression familiale … malheureusement cette dernière savait la rappeler sans cesse et la tourmenter en travers des cérémonies où certaines personnes avaient à montrer leur compétence en travers de quelques élégants ou agressifs mouvements.

La résidence principale, celle du chef de clan, brillait de mille feux. La cour avait été préparée pour les trois nouveaux promus chunins … une célébration qu’elle n’avait cessé de regarder encore et encore depuis ces cinq dernières années, à mille lieux d’imaginer qu’elle en serait un jour une participante et non une spectatrice.

Elle était la dernière à arriver. Certes, elle n’était pas en retard mais du fait de venir « en dernière » et d’être une des participantes attendues avait le don de donner l’impression d’être en retard. Toujours est-il que certains regards se tournaient vers elle. Certains l’ignoraient aussitôt, d’autres lui lançaient des regards noirs dégoutés, d’autres étaient curieux et d’autres – une très petite minorité se limitant à deux ou trois personnes – semblaient ravies de sa présence. Bref, elle était habituée.

Le chef de clan récita son traditionnel discours, félicitant, prévenant … Bref, un discours de « vieux ». Il termina en indiquant à chaque participant de réaliser le mouvement qui leur « plaisait » le plus et qui les caractérisait. Certains optés pour des figures immobiles, d’autres pour des techniques défensives…. Des trois, elle était la seule fille et la plus chétive aussi.

- Kawaguchi Tsukiko, s’annonça-t-elle.

Elle réfléchissait un court instant, passant en revue ses multiples techniques en tête. Le choix n’était guère compliqué. Elle savait ce qu’elle appréciait avec le Sunaton.

Créer.

Elle mêla une technique support et une technique offensive, n’hésitant pas à faire appel à deux clones supplémentaires. Le ciel se couvrit rapidement d’une trentaine d’oiseaux de sable. Cependant, ce n’était pas ses sculptures lourdes habituelles empêchant des mouvements fluides mais des formes légères, portées au grés du vent, virevoltant parmi tout le monde, frôlant les joues, la main ou les jambes. Elle assembla ensuite tous ses oiseaux et clones pour une nouvelle forme soit une colonne de rose de sable. Elle s’arrêta là, attendant les traditionnels, hypocrites et classiques applaudissements. Elle n’en entendit que certains, ce qui lui fit arquer les sourcils.

Les regards avaient changé. Ce n’était plus l’indifférence de la majorité et l’intérêt d’une minorité, mais les soupçons de la majorité et de l’inquiétude de la minorité. Que se passait-il ?

- Bien … Nouveaux Chunins. Vous aurez droit à un présent familial de vos proches, et du clan, annonça le vieil homme.

Tsukiko cacha son malaise comme sa déception. Son père n’aura rien à lui donner, étant une « demi-sang » ou une « bâtarde ». Elle allait en subir une honte. Une autre. Les cadeaux de chacun furent donnés et c’était au tour de Tsukiko. Sans surprise, son père ne lui offrit rien. Il semblerait que la pression exercée par le clan ou par sa femme soit plus forte que la pression faite par le devoir paternel. Elle ne dit rien, ravalant sa rancune.

- Approche jeune fille, fit le chef de clan.

Elle le fit. Ce dernier fit signe à quelqu’un d’approcher et murmura des mots. Après quelques longues minutes, on apporta un coffre assez grand et long.

- Un cadeau à ton intention pour que tu saches qui sont les Kawaguchi … vraiment, dit-il en parlant très bas de sorte que seul lui, Tsukiko et le plus proche entourage puisse entendre. Je ne doute pas que tu sauras en faire bon usage.

Elle récupéra ce fameux coffre … trop lourd. Elle lança un regard interrogateur.

- Il sera porté chez toi. Ne t’inquiète pas. Au pire … le sable s’en chargera.

Il avait raison.
Cependant, avant qu’elle ne puisse poser davantage de question, elle fut aussitôt attiré dans une salle isolée où une plus petite comité était réunie. Il y avait le chef de clan, quelques vieils hommes et un ou deux « jeunes » de la trentaine. On donnait rapidement un cours « d’histoire » du clan puis on les congédia sauf …

- Tsukiko, peux-tu rester ?
- Euh … oui, répondit-elle, incertaine. Effrayée.
- J’ai entendu dire que tu allais t’occuper d’un projet de développement de Suna , économiquement et militairement.
- Effectivement … , répondit-elle sur ses gardes.
- Quelle sera la place des Kawaguchi dans ce projet ?

Mauvaise question. Elle se tut, incapable de répondre.

Ce n'était pas le chef de famille qui parlait. Il restait silencieux, observant chacun, en retrait.