Le dragon se déplace sur le champ de bataille et rencontre la solide défense d’un mur de lances. Riposte alors les archers de la tour postée plus loin. Le général arrête son geste et se caresse le menton, cherchant à présent le meilleur mouvement à adopter pour gagner. Mais Sagi était un piètre général et son adversaire un vieil homme bien expérimenté. Certes le Genin ne lui faisait pas un redoutable adversaire mais il n’était pas là pour en être un. Il était juste là dans le cadre d’une mission, vous vous en douterez. Du rang D, rien de bien excitant. Une mission quotidienne dont il s’occupait parfois et qui visait à tenir compagnie à des personnes âgées dont les familles ou les enfants n’étaient plus là pour les accompagner durant leurs dernières années. Et il y avait plus que l’on pouvait le croire. Sagi n’aimait pas ces missions, soyons honnête, mais il les effectuait du mieux qu’il le pouvait car il savait que si lui-même arrivait un jour à un âge aussi avancé… il souhaiterait que l’on fasse la même chose pour lui. Que sa fille soit là pour lui. Penser à cela le rendait nostalgique et le déconcentrait irrémédiablement, offrant à son adversaire attentif la victoire sur un plateau –de Shogi !-.

Allons jeune homme, vous aviez encore ce regard songeur, à quoi pensiez-vous donc ? Devant l’air las de Sagi il insista. Allez, parlez général, vous avez été vaincu je vous le rappel !

Je pensais à ma fille, et à ma fiancée.

Cela mit immédiatement fin à la discussion. Le vieil homme n’insista pas et rangea paisiblement les pièces du jeu qu’il tentait de lui enseigner jour après jour. L’avantage avec ces personnes âgées, c’était qu’elles avaient déjà beaucoup vécu, et connaissaient donc les affres de la vie qui attendaient les jeunes comme le Kadoria.
Il congédia d’ailleurs le Shinobi, prétextant qu’il n’avait plus besoin de ses services pour la journée. Sagi obtempéra avec plaisir, peu désireux de rester dans cet état face à un client. Les mains dans les poches de son manteau rouge, il ajusta son bandeau autour de son cou et avança d’un pas lent à travers les ruelles de Kumogakure no Sato.

Il était tellement absorbé dans ses pensées qu’il ne vit même pas un passant dans lequel il buta. Surprit sous l’impact, il recula en titubant mais retrouver son équilibre. Mais qui diable marchait donc sans regarder où il allait ?! Enfin, à part lui je veux dire. Secouant la tête, le géant tendit la main à la personne qu’il avait renversée.

Excusez-moi, vous n’avez rien ?

• Cheveux aux vents, Namiko se tenait face à la stèle élevée en hommage aux ninjas décédés durant la guerre. Il était seul sous la fine bruine qui s’abattait sur le pays de la Foudre. Tombant depuis quelques heures, les chemins terreux qui zigzaguaient entre les tombes commençaient à devenir glissant à cause de l’humidité. Au loin, des nuages noirs menaçaient le calme plat qui régnait sur le cimetière. Hormis le genin, il n’y avait personne. Seuls quelques corbeaux boiteux, sûrement des habitués des lieux, osaient s’aventurer dans l’enceinte. Ceux-là ils devaient vivre ici depuis bien plus longtemps que tout le monde. C’était un temps pour se recueillir. Un temps où l’on n’a rien envie de faire, juste penser. L’atmosphère lourde vous donnait l’impression d’avoir perdu toute sa force. Namiko venait ici quand il cherchait des réponses. Ce n’était pas un orphelin comme beaucoup d’enfants de la guerre, il avait cette chance. Cependant, il avait été adopté. Sa famille adoptive qu’il considérait comme ses parents s’était toujours bien occupée de lui et il leur devait tout. Sans eux, il serait mort, c’était certain. Mais l’espoir de savoir ses origines un jour était en lui. Au vu de ses capacités, il était persuadé que ses parents biologiques devaient être des ninjas. Ainsi, il venait de temps en temps se recueillir sur la stèle en pensant à eux.
  
  Le temps commençait à se gâter, Namiko décida de rentrer. Les mains dans les poches de sa parka noire, il quitta le cimetière. Sa demeure était à quelques minutes de marche. En chemin, il croisa quelques connaissances qu’il salua d’un signe de la tête. Toujours perdu dans ses pensées, il s’imaginait déjà quel genre de péripéties il allait lui arriver ce soir. Oui, le médecin était de garde à l’hôpital. Kumo avait mis en place en système de roulement pour les eisei-nins. Pendant une période ils partaient en mission et pendant une autre ils étaient assignés au soin dans le village. Namiko préférait les missions mais bon, on ne choisit pas toujours ce qu’on veut faire. En fait ce qui l’agaçait le plus, c’était la fatigue accumulée. Les médecins n’étaient pas très nombreux encore mais on les sollicitait énormément. Entre ses périodes de services et son temps de sommeil, il ne lui restait pas beaucoup de moment pour lui. Si bien que lorsqu’il tentait de raccourcir ses siestes pour vaquer à ses occupations il lui arrivait parfois de déconnecter de la réalité pour entrer dans sa bulle comme à cet instant où il percuta un passant dans la rue.
  Arraché de son sommeil éveillé, il tomba au sol. Un homme faisant bien deux têtes de plus que lui venait de lui rentrer dedans. Déboussolé, il ne comprit pas tout de suite ce qui lui était arrivé. C’est en voyant une main se tendre vers lui qu’il retrouva ses esprits. Là, il leva la tête et accepta l’aide pour se remettre debout.
  
  - Non je n’ai rien ça ira.
  
  Un peu gêné, il se passa la main dans les cheveux pour se gratter l’arrière de la tête en posant son regard dans le vide.
  
  - Je suis désolé, je suis très fatigué et je ne vous ai pas vu venir.
  
  Cet homme ne lui disait absolument rien. Pourtant il était dans le village depuis quelques temps et il aperçut le bandeau shinobi autour de cou mais rien à faire il eut beau chercher dans sa mémoire, c’était le néant. De toute évidence il était plus âgé que lui et était peut-être plus gradé. Habituellement peu bavard, il ne put s’empêcher de vouloir en savoir plus.
  
  - On ne s'est jamais rencontré, non ? Je suis eisei-nin et pourtant je croise beaucoup de ninja du village. Et même s’ils sont parfois dans un sale état, je me souviens de tout le monde. Vous semblez ne jamais être passé par l'hôpital du village.
  

Un jeune homme aux cheveux sombres se relevait avec son aide. Des piercings aux lèvres et des yeux bleus. L’air tout aussi paumé que Sagi sans aucun doute. Par chance il n’avait rien. Heureusement que le Kadoria le dépassait d’une bonne tête -et plus !- car dans le cas contraire ils se seraient tous deux violement télescopés ! Et s’il y avait bien une chose que n’aimait pas le Shinobi aux cheveux blancs, c’était souffrir de migraines et autres mal de crâne du même genre.
Comme lui, l’inconnu était perdu dans ses pensées, mais à cause de la fatigue et non d’une nostalgie bien mal trouvée. Enfin, « inconnu », ce n’était pas dit. En effet le Kumojin se souvenait avoir déjà aperçu cette tête là en accompagnant un collègue blessé de retour de mission à l’unité de soin. Enfin, tout ça pour dire qu’après les formules de civilités, il n’y avait plus grand-chose à étranger entre eux qu’un « Bon ben salut et à la prochaine, et surtout regardez bien où vous allez ! ». Qu’est-ce que tu veux dire de plus ? Et bien justement, le supposé Eisei-nin avait quelque chose à dire.

Il confirma donc le souvenir de Sagi d’être un médecin Ninja du village travaillant à l’hôpital. Un bien beau métier. Il fallait une concentration hors-norme pour être médecin, concentration que l’atteindrait jamais le héron. Ce qui le faisait redoubler d’admiration pour ces hommes et femmes grâce à qui on sauvait bien des vies, et pas seulement celles des Ninjas. En tout cas le médecin ne se souvenait pas avoir déjà vu Sagi, et c’était bien normal. Il n’avait pas encore eu à effectuer des missions durant lesquelles des blessures avaient pu être reçues. Pas qu’il soit plus fort que la moyenne non loin de là. Au contraire peut être… Sagi savait juste parfaitement bien évaluer ses forces et n’effectuait que les missions de son niveau -et que son grade lui permettait d’effectuer-. Et depuis son arrivée au village, il y a de cela plus d’un an maintenant, il s’était borné à aider les vieillards, les chats perchés, les bourgeois désireux de retrouver leurs animaux de compagnie, et parfois de quelques voleurs à l’arrachée. Vous voyez ? Rien de bien dangereux en somme !

Je sais m’arrêter quand il le faut pour éviter d’être blessé stupidement, répondit-il simplement à l’Eisei-nin. Mais viendra bien un jour où je devrais passer moi aussi par vos soins doc’, alors autant faire les présentations en prévision ? Joignant le geste à la parole, il lui tendit de nouveau la main, pour un salut cette fois. Kadoria Sagi, Genin.

Une fois les présentations effectuées, Sagi remarqua le teint un peu livide du médecin. Clignant des paupières, il fixa ses pupilles quelques secondes avant de finalement se racler la gorge et ajouter d’un air un peu gêné.

Vous n’avez vraiment pas l’air bien. Voulez-vous que je vous accompagne jusqu’à chez vous ? Ce sera ma manière de me faire pardonner pour vous avoir bousculé.

Ryukuu Namiko… Je m’en souviendrais, pensa-t-il en souriant d’un air sincèrement désolé de savoir l’Eisei-nin si prit par son travail. Le pauvre, malgré son teint si blanc et sa fatigue devait malgré tout commencer son service à l’hôpital dans moins d’une heure maintenant. Pas vraiment le temps de faire une sieste dans ces conditions. Mais assez pour boire un café, comme il le proposa lui-même. Sagi ne buvait pas grand-chose, et n’avait de préférence pour rien sinon de l’eau tout simplement. Un café ne dérogeait pas à la règle de l’inintérêt et le Shinobi accepta donc l’offre du doc d’aller en boire un.

Avec plaisir, lança-t-il avec le sourire en lui emboîtant le pas.

Ils n’eurent pas à aller bien loin puisqu’ils prirent la direction d’un salon de thé et café dans lequel Sagi donnait rendez-vous à son client joueur de Shogi lorsque celui-ci se sentait assez en forme pour sortir voir du monde. C’était une façon de continuer de l’entretenir, qu’il ait au moins la volonté de se mouvoir pour ce qu’il aime. Car d’après son expérience personnelle, lorsqu’un homme cessait de bouger, même pour ce qu’il aimait, c’était que son heure avant sans aucun doute sonné. Bien loin de ces pensées macabres, Sagi salua de la tête quelques habitués qui conversaient tranquillement autour d’une tasse. Certains fumaient dans un coin chaud, d’autres plus robustes étaient au petit bar et parlaient avec le barman, qui comme sa clientèle était un homme calme, mais avec la poigne d’un commerçant aimant la paix à l’animosité et étant bien décidé à faire respecter cette loi dans son établissement. Namiko aussi semblait être un habitué. Sans doute ne s’étaient-ils jamais vu ici parce qu’ils n’y avaient pas les mêmes horaires de passage.

Une fois installée ils commandèrent, deux cafés donc. Après quoi le médecin l’interrogea d’un air songeur, intrigué par quelque chose dont se doutait un peu Sagi. Enfin, ça aurait pu être un problème de goûts vestimentaires aussi hein !

Fais donc, répondit-il à la demande de Namiko de le tutoyer, lui-même l’aurait de toute façon fait maintenant qu’ils s’étaient présentés l’un à l’autre. Pour répondre à tes questions, je ne suis pas proche du Raïkage autrement que par le sang et ce en simple cousin. Je n’ai pas participé à la construction du village et ne l’ai rejoint qu’il y a un peu plus d’un an. Les choses étaient déjà bien posées à cette époque, dit-il comme en parlant d’une époque lointaine.

Il faut dire que pour lui, tout ceci semblait s’être écoulé une éternité auparavant. La demande de sa fiancée, l’annonce de l’arrivée prochaine de leur enfant, puis son départ morose de la ferme pour rejoindre le village déjà formé… Il avait vécu dans le flou à ce moment-là, obéissant simplement aux ordres sans jamais se poser la poindre question, persuadé qu’il finirait par redevenir la pire des armes entre les mains de son nouveau « chef », son cousin Uriô. Mais finalement, devant la façon d’agir justement déplorablement déprimante de Sagi, ses chefs ne lui en avaient pas plus demandé que ça, reléguant ce cousin étrange à l’arrière-plan et le jugeant du niveau à peine plus élevé que celui d’un Genin. Il aurait pu s’en sentir insulté. Mais bien au contraire, cela le réconforta de savoir qu’il n’aurait pas à tuer à nouveau. Du moins, pas pour le moment… Aujourd’hui et après une année longue et pénible à remonter la pente, il était ce garçon tantôt souriant, tantôt cynique que les gens pouvaient croiser au détour d’une ruelle par le plus grand des hasards.
Le garçon apporta leurs cafés.

Et toi, reprit-il en entourant sa tasse de ses mains pour réchauffer celles-ci. Que faisais-tu avant d’être médecin à Kumogakure no Sato ?

• La famille, un sujet parfois très complexe. Ainsi Sagi était le cousin du Kage. D’après ses dires il n’était pas très proche de lui. C’était sûrement mieux après tout, cela lui évitait beaucoup de problèmes. Au moins, il pouvait être fier de ce qu’il était et deviendra, il ne sera jamais pistonné. Etait-ce un choix ? Il ne savait pas. Peut-être qu’il préférait voler de ses propres ailes et faire son bout de chemin sans l’aide de personne. C’était tout à son honneur de ne pas avoir choisi la facilité.
  Dans le ton de sa voix, on sentait l’âme d’un solitaire. Un tempo lent, aucune variance, des paroles calmes et réfléchis. On devinait aussi que malgré son âge de jeune adulte, il avait un lourd passé. Quand il prononça le mot « époque » le poids du temps le laissait songeur. Namiko connaissait bien cette époque justement, la construction du village. Agé de quatorze, il découvrait pour la première les prémices de ce qui allait être son foyer, sa patrie. Le retour de l’espoir donnait du baume au cœur et les futurs villageois travaillaient main dans la main à la construction de Kumo. Après les souffrances de la guerre, le soulagement général donna naissance à un engouement fédérateur étonnant. Chaque jour, on voyait un bâtiment se terminer, une nouvelle famille logée, de nouveaux renforts arriver. Namiko pourrait se laisser penser que c’était la belle époque mais non ce n’était pas, c’est la belle époque. Son passé à lui aussi était sombre et tout ce qui lui arrivait aujourd’hui était une bénédiction.
  
  D’ailleurs, c’est sur ce sujet que Sagi l’interrogea. Namiko touilla lentement son café et en but une gorgée. Le liquide était chaud, avec ce temps annonçant l’hiver cela faisait du bien.
  
  - Je fuyais la guerre avec ma famille adoptive. Dit-il avant de laisser un court silence suivi d'un léger sourire en coin avant d’enchainer. Pour faire original, je suis un orphelin de la guerre. Mes parents étaient originaires du pays de la Foudre alors en entendant les rumeurs concernant la création du village nous sommes revenus il y a deux ans. Je suis allé à l’académie et me voici médecin.
  
  C’était un assez bon résumé. Il ne s’était pas étendu sur son enfance. Bien qu’il n’en ait pas honte, ce n’était pas forcément ce que son interlocuteur voulait entendre. Le temps pourri était assez déprimant pour qu’il en rajoute une couche. Et puis, il n’allait pas étaler toute sa vie privée à un inconnu, aussi sympathique soit-il. A nouveau, il prit une gorgée de café. La pluie se faisait de plus en plus forte et venait taper sur les carreaux de la fenêtre. Les tapotis des gouttes accompagnaient la mélodie du pianiste. Le garçon jeta un œil sur sa montre pour être sûr de ne pas être en retard. C’était bon, la discussion pouvait poursuivre.
  
  - Tu faisais quoi avant de venir à Kumo ? Si je peux me permettre.
  
  La guerre avait frappé tout le monde et Namiko aurait été étonné qu’il ait échappé à celle-ci. A moins qu’il ait vécu en ermite pendant de longues années au fond d’une caverne, et encore. Le médecin ne connaissait rien du passé de la famille Kadoria. En y pensant, il se fit la réflexion que c’était un peu honteux de ne pas savoir l’histoire du créateur de son propre village. M’enfin, peut-être n’avait-il vraiment aucun lien avec lui hormis le mot « cousin ».
  

Entendre un bout de l’histoire de quelqu’un était toujours un moment étrange. Surtout lorsque l’on était soi-même plongé dans les images de son propre passé. Les dires de son interlocuteur prenaient alors vie aux yeux de celui-ci qui regardait derrière lui et apparaissaient sous la forme de souvenirs vécus. Et il y avait bien des souvenirs dans le cœur et l’esprit de Sagi-le-héron, l’un des bras armé du clan Kadoria. Quelle époque étrange cela avait été. Ce qui le faisait le plus frémir quand il y repensait, c’était que l’état de rage quasi permanent dans lequel il s’entretenait lui-même, il aurait très bien été capable de faire du mal à des personnes comme celles qui l’avaient par la suite recueillis, soignés et même aimés. Jamais il ne redeviendrait une arme sans cervelle et sans volonté. Touillant en huit son café, Sagi répondit à son interlocuteur en regardant son reflet dans la liqueur sombre de sa tasse.

Avant de venir à Kumo, je me remettais de mes blessures et d’un poids trop lourd à porter. J’étais une arme de ma famille, entrainée à détruire, incapable de penser clairement, enragé. Puis mon clan a subit les représailles de sa propre politique, ce qui l’a fait se disperser à travers le pays jusqu’à ce qu’Uriô nous retrouve et nous propose de le rejoindre dans son projet de coalition au sein d’un village Shinobi. Sagi secoua la tête et but une gorgée de café avant de se rappeler à qui il parlait et de sourire en reposant sa tasse, gêné. Je sais pas pourquoi je te raconte ça, désolé.

Beaucoup de mal avait été fait pendant cette période trouble qui avait précédé la création du village Ninja. Celui-ci avait été un réel espoir pour beaucoup dans cette brume de guerre sans espoir dans laquelle ils évoluaient depuis si longtemps. Sagi respectait le choix de ceux qui croyaient à cette paix, mais celle-ci ne pouvait être obtenue par la création d’un village fonctionnant sur une économie de guerre ! Mais par où commencer pour changer les choses et atteindre une véritable paix ? Sagi l’ignorait totalement. Namiko avait lui aussi l’histoire d’une victime de cette guerre. Une histoire classique, mais qui n’enlevait en rien le drame qu’elle représentait.

Ça n’a pas dû être facile de perdre tes parents. Au moins la vie t’a-t-elle donné une seconde chance d’avoir une vraie famille.

Chance qu’il avait lui aussi eu, et cela le fit sourire bien plus sincèrement qu’à aucun autre moment de la conversation. Même s’il se plaignait souvent de sa vie au village, il ne pouvait pas lui retirer que celle-ci lui permettait de protéger cette famille. Combien de fous dangereux étaient traqués et arrêtés chaque semaine par les meilleurs Ninjas de Kumo ? C’était autant de dangers potentiels pour sa fiancée et sa fille d’écartés. Et lorsqu’il serait lui aussi assez fort, alors il irait les protéger lui-même.
Dehors il pleuvait : sale temps.

• La guerre, il l’avait bien connue lui aussi. Il était même au centre. Namiko avait connaissance de certains clans barbares dont le seul but était de se battre, il ne savait pas que les Kadoria étaient passés par cette période sombre. Mais comme il l’a dit, tout règne se termine. Celui de son clan avait pris fin mais n’avait pas complètement disparu, puisque de l’ambition de leur chef naquit Kumo. Sagi lui, avait pris un peu plus de temps pour se remettre des cicatrices de la guerre. On ne vit pas tous de la même façon les aléas de la vie. Peut-être avait-il perdu des proches ? Sa famille ? Lorsque Namiko fut interrogé sur la perte de ses parents il ne put s’empêcher de sourire. Sagi faisait erreur, il ne les avait pas connus.
  
  - Je ne les ai pas connus. J’étais encore un bébé quand j’ai été recueilli. Peut-être qu’ils fuyaient quelque chose je ne sais pas, on m’a retrouvé tout seul sur une plage. Dit-il sur un ton un peu blasé comme s’il s’interrogeait lui-même sur la raison de geste.
  
  Le garçon porta sa tasse à ses lèvres et prit une autre gorgée, terminant son breuvage. C’était plaisant de discuter un peu de tout et de rien avec quelqu’un qu’on ne connaissait pas. Il n’y avait pas d’à priori, pas de sujets interdits. D’autant plus que le hasard lui avait fait rencontrer une personne plutôt agréable. Lui qui s’apprêtait à aller se reposer sur son lit, il se retrouvait à partager un café en bonne compagnie. La dernière fois que ça lui était arrivé, c’était avec un patient en période de convalescence. Le pauvre s’était cassé gravement blessé en mission et n’avait pas le droit de s’éloigner de l’hôpital. Par compassion et parce qu’il adorait entendre ses péripéties, Namiko restait avec lui de temps à autre quand arrivait la fin de ses journées. D’ailleurs, la fin de la journée approchait et en regardant l’heure, il s’aperçut qu’il était temps de quitter les lieux. Son devoir l’appelait. Il déposa quelques ryôs sur la table.
  
  - C’est déjà l’heure pour moi. Ravi de t’avoir rencontré Sagi. J’espère qu’on se recroisera. Ailleurs qu’à l’hôpital par contre. Dit-il en souriant.
  

Spoiler:

Namiko le détrompa au sujet de ses parents, lui apprenant qu’il avait été recueilli en bas-âge par ses parents adoptifs, ne conservant du même coup aucun souvenir de ses véritables géniteurs. Malgré l’air qu’il prit en lui disant ça, Sagi ne put s’empêcher de se dire que le médecin devait être, bon pas forcément triste mais tout du moins curieux de savoir ce qui était arrivé aux siens. Sagi ne l’était pas de son côté, mais il se doutait que ses parent avaient trouvé la mort comme tant d’autres durant l’attaque de leur domaine familiale. Vu le peu, voir l’absence de membres Kadoria au sein de Kumogakure, cela paraissait plus que probable. Il n’y avait aucune raison que le reste de la famille siège à l’extérieur du village alors que celui-ci était dirigé par l’un des leurs !

Quoiqu’il en soit, l’Eisei-nin termina son café avant le garçon à l’œil rouge, prit par le début de son service à l’hôpital. Ce n’était pas facile de sauver des vies comme il le faisait. Sagi se leva pour le saluer, n’ayant lui-même pas terminé sa décoction.

Le plaisir était partagé doc’, j’espère n’avoir pas besoin de tes services avant encore quelques temps.

Sagi inclina la tête en direction du médecin qui sortit pour s’en aller travailler à deux pâtés de maison de là.
Lentement, le Genin au manteau rouge se rassit de son côté, continuant de boire, lampée après lampée, ce café dont il ne voyait pas le bout. La rencontre avait été plaisante. Il y avait des personnes intéressantes -fort heureusement- dans la coalition. Il y avait aussi une certaine masse d’idiots, du moins de ceux qui répondaient à ces critères aux yeux de Sagi. Mais au moins savait-il aujourd’hui à quel médecin s’adresser si un jour, quelque chose devait lui arriver qui n’est pas pu être évité.