Un travail de longue haleine attendait le Fossoyeur de la Brume. Lui qui n’avait pas chômé depuis son retour à Mizu, il allait devoir quitter sa mère archipel. Il filait à travers les arbres de la Forêt de la Brume. Le vent venait faire claquer les plis de sa chemise blanche au col légèrement entrouvert. Son regard porté sur l’horizon ne faisait plus réellement attention au chemin qu’il connaissait par cœur. De plus, il était simplement guidé par ses dons en sensorialité. Il allait vite arriver à destination. Son « invité » y serait dans les mêmes temps. Pô ne s’était pas trompé en lui disant que cet homme finirait par arriver.

Le polymorphe lui avait en effet envoyé une lettre il y a quelques temps lui signalant pas mal de changements et d’avancements dans leurs projets. A commencer par une mission que le futur Empereur shinobi souhaitait voir exécutée. Pô ne pouvant s’en charger à cause de ses obligations en tant que Konohajin, il avait proposé l’aide et le service du Shinda. Il devrait donc s’occuper de cette fameuse mission. Mais la lettre avait également parlé de personnes rencontrées par le Gekei. Et ce dernier les avait envoyés auprès de Michiki. Un Jisetsu du nom d’Homura ayant aidé un certain Goren à se libérer. Du coup, le Fossoyeur avait attendu leur venue. Ce jour était arrivé. Pour l’un d’eux en tout cas.

Ayant sondé la zone, Michiki avait ressenti le chakra d’un des deux hommes. Difficile de savoir s’il s’agissait véritablement de lui à vrai dire n’ayant jamais croisé sa signature de chakra. Mais il avait un certain niveau. On pouvait supposer qu’il s’agissait de lui. Il espérait que ce soit lui en tout cas. Son esprit ne lâchait pas d’un pouce l’avancée de l’autre shinobi. Ils allaient bientôt se croiser. Pile dans une clairière. L’endroit serait idéal pour discuter. Mais il fallait prévoir un peu plus de sécurité. Un lieu dégagé n’était pas stratégiquement le mieux pour de telles conversations.

Michiki stoppa donc sa course un peu avant d’arriver dans cette clairière. L’autre n’était pas encore tout à fait là alors il pouvait se permettre une halte. Il sortit un parchemin de sa ceinture qu’il déroula au sol. Une dizaine de cadavres en jaillirent, laissant planer un léger fumet blanchâtre. Une fois les pantins sortis de leur cocon, ils se dispersèrent sur les ordres mentaux de leur maître. Ils partirent décrire un cercle autour de la position où seraient postés les deux hommes lors de leur entretien, faisant ainsi office de vigiles de la scène. Le chakra était tout proche. Michiki rangea son matériel, il était temps de passer aux choses sérieuses.

Il fit les derniers pas le séparant de la clairière. Elle offrait une percée lumineuse à travers le couvert sombre des arbres où planait la brume éternelle de Mizu. Le nécromancien rehaussa ses lunettes sur son nez d’un doigt fin avant de finalement s’arrêter au beau milieu du cercle. Puis il vit arriver son fameux invité. Impossible de dire pour l’heure s’il s’agissait réellement de lui. Mais il avait une petite idée pour être mis au courant.

Il avait la main à sa ceinture, dans son étui à scalpels. Il en sortit un qu’il garda dans sa dextre. Ce qui ne devait pas manquer d’attiser une grande méfiance chez son interlocuteur qu’il aborda le plus calmement possible :

- Mes hommages étranger. Je suis censé attendre quelqu’un ici. Un membre du clan Jisetsu. Je préfèrerais m’assurer que c’est bien le cas avant de commencer à me présenter ou que nous nous mettions à parler. Par avance, excusez de ma brusquerie.

Et sans prévenir, il jeta d’un coup l’arme blanche qu’il tenait à la main. S’il s’agissait d’un Jisetsu, il devait bénéficier de techniques de portails ou de ralentissement du temps pour arrêter la course de cette arme. Le Kinnegan était la signature rêvée de ce clan. Le meilleur moyen d’avoir l’assurance qu’il parlait à la bonne personne. Ou alors il s’agissait d’un autre membre du clan se faisant passer pour lui mais ce serait pousser un peu loin la paranoïa.

Celui qui faisait face à Michiki ne se donna même pas la peine de réagir comme le nécromancien s’y attendait. Plutôt qu’une technique caractéristique du clan Jisetsu, il eut le droit à une parade effectuée à l’aide d’un sabre imposant. Son projectile ricocha sur l’arme, provoquant un petit tintement métallique tout particulier. Le scalpel partit valdinguer à quelques mètres de là. il avait beau s’être excusé d’avance, il fut accueilli d’une remarque sur l’inutile confirmation qu’il avait demandé.

Toujours sur ses gardes, il relâcha son attention lorsque l’homme face à lui eut les yeux qui s’illuminèrent d’une teinte dorée. Il n’y avait pas de doute, c’était bien un Jisetsu. Leur Dôjutsu était reconnaissable entre mille. Accompagné en plus d’un bandeau du Shûkai, l’homme avait apporté assez d’éléments pour confirmer son identité. Cela semblait être juste. Il referma donc sa trousse à scalpels. Il fixa les pupilles dorées du manipulateur de l’espace-temps. Quel pouvoir intéressant. Redoutable entre des mains habiles. Il espèrerait voir un jour si ce type était un habile utilisateur de son potentiel. Il se présenta comme ancien capitaine shûkajin. Ce qui signifiait qu’il n’était pas un débutant dans l’art du combat.

Celui qui s’appelait Homura expliqua la raison de sa venue ici, déjà connue du Fossoyeur. Pô avait orchestré ceci. C’était bien dans ses habitudes. Toujours une longueur d’avance et des projets plein la tête. Mais l’élève avait appris du maître. Le Serpent n’était plus le seul à réfléchir. Le Fossoyeur avait lui aussi ses petits projets qu’il devait mener à bien. Il ignorait encore si cet homme lui faisant face saurait lui être d’une quelconque utilité. Cette rencontre serait le moment opportun.

Le Jisetsu s’enquit de savoir pourquoi les deux complices l’avaient fait venir ici. Michiki sortit donc une habituelle cigarette qu’il glissa à la comissure de ses lèvres. Il l’alluma de suite après et, sans tirer sur le bâtonnet de tabac, répondit :

- Quelle confirmation pourrais-je te donner ? Je ne suis membre d’aucun clan de Kiri. Je n’étais pas Epéiste comme tu sembles l’avoir été et te montrer mon bandeau ne serait pas suffisant non ?

Il avait tout de même sortit son bandeau frontal sali et abîmé par le temps. Si cela lui suffisait. Michiki avait en effet remarqué l’aspect particulier de cette énorme lame. Il se demandait quel pouvait être son pouvoir, à condition qu’il s’agisse bien d’un Sabre à pouvoir. Il l’ignorait après tout. Peut-être que ce gars n’avait jamais eu quelque chose à voir avec les Epéistes. Le nécromancien frappa du pied et une légère secousse sismique laissa place à deux sièges aux dossiers très hauts, face à face. Le Shinda prit place dans l’un d’eux et continua de regarder son interlocuteur. Un éclat orangé des braises de sa clope vint illuminer ses verres de lunettes alors qu’il reprenait :

- Je serais curieux de voir ce que tu as pu déduire. Quelle est cette fameuse petite idée qui te trotte en tête ?

Il expira un nuage de fumée opaque qui s’envola au gré du vent. Il se reprit l’âpre saveur de la fumée dans les naseaux. Mais il ne resta pas longtemps muet. Même pas l’espace d’une demi-seconde.

- Oh pardon ! Shinda Michiki, ex Kirijin également.

Il inclina légèrement la tête vers l’avant. Son regard était toujours porté sur les pupilles du Jisetsu. Ses yeux vicieux s’illuminèrent d’une petite clarté imperceptible. Un détail venait de le frapper.

- Pô m’avait parlé d’un autre individu. Vous n’avez pas supporté le voyage en amoureux ?

- Ta demande était justifiée. Pas la peine de t’excuser il n’y a pas de mal.

Ainsi Michiki avait accueilli les mots d’excuse du Jisetsu l’invitant à justifier son identité. Ce qui arrangeait le nécromancien au final car il aurait eu du mal à le faire. Ce détail étant réglé, il avait rangé son bandeau. Cela faisait bien longtemps qu’il attendait là. Difficile de croire qu’il le ressortirait en de telles circonstances.

Homura ne profita pas du siège proposé par Michiki, se contentant de s’appuyer dessus. Ce geste fit sourire légèrement le Shinda. Au moins il ne faisait pas face à un inconscient. L’homme se méfiait et c’était une bonne chose. Cela prouvait qu’il réfléchissait un minimum.

Il enchaîna ensuite pour réagir sur la remarque à propos du sabre. Il n’avait pas été Epéiste et l’obtention de cette arme avait été assez particulière. Un assassinat pour le compte d’une mission du Shûkai. A la fois un acte patriote, et un gain pour l’exécutant. Le genre de missive qui avait toujours plu au nécromancien. Avant même qu’il ne réagisse ou ne dise quoique ce soit, le Jisetsu se justifia et lui demanda de ne pas le juger. Le Fossoyeur eut un ricanement qui s’échappa bien malgré lui :

- Je serais bien mal placé pour te juger ! Si j’ai quitté Kiri bien avant sa destruction, c’était dans le seul but de m’améliorer et de devenir plus fort. Je peux comprendre ce genre de quêtes, à condition qu’elles n’aillent pas trop loin. Comment tu as obtenu ce sabre, je m’en fous. Ce qui compte, c’est comment tu l’utilises…et comment tu l’utiliseras…

Il avait mis un petit temps avant de sortir les derniers mots. Petite phrase ponctuée d’un très léger sourire en coin. Qui ne décrocha pas lorsque vint le temps des suppositions à son sujet. Homura présenta ses arguments et ses conclusions quant au rôle et l’identité du Shinda au sein de la Brume. Il avait toujours adoré voir les gens tenter d’établir son portrait. Certains étaient si loin du compte ! En l’occurrence, le possesseur du Kinnegan avait une bonne base. Il mentionna la Brume Sanglante et le Misuto. Il en vint à le qualifier d’inquisiteur même. C’était un rôle dont le Shinda avait entendu parler. Mais l’arrivée au pouvoir de son senseï à la tête de l’unité n’avait pas retenu une telle fonction. Il ne manqua pas de répondre aux suppositions de son interlocuteur perspicace :

- Deux bons points dans ta déduction en effet ! J’étais proche de Yoru lorsqu’il a décrété l’ère de la Brume Sanglante et j’ai bien alimenté ce titre. Quant au Misuto, mon mentor en était à la tête et je l’ai repris lorsqu’il quitta la Brume. Par conséquent je n’ai pas été inquisiteur. Nous avions à l’époque remaniée l’organisation de l’unité et c’était un rôle que nous n’avions pas préservé.

Venait ensuite le cas du dénommé Goren dont Pô avait parlé. Absent de cette rencontre, Homura avait perdu sa compagnie lors de leur arrivée sur l’archipel. Il s’estima être le seul intéressé par l’offre du Gekei. Michiki nota dans un coin de sa tête qu’il devrait ensuite s’occuper de retrouver cet homme. Il avait à lui parler aussi. Même si pour l’heure, il avait déjà bien à faire avec le Jisetsu. Il ne se laissa donc pas déconcentrer par cet élément anodin et continua sa conversation :

- Dans ce cas si nous n’attendons pas d’invités supplémentaires…

Michiki érigea plusieurs pans de terre autour du duo. L’ensemble formait un simple cercle. Un nuage de fumée entoura le nécromancien alors que des cadavres d’aigles l’entouraient. Deux se disputaient une place sur le haut du dossier, un était simple posé au sol tandis que les autres voletaient à proximité de leur maître. Sur un ordre silencieux de ce dernier, ils prirent tous leur envol pour s’élever bien haut dans le ciel en décrivant des cercles concentriques. La clairière était bien cernée et surveillée. En plus de cela, Michiki prépara une technique de repérage pour sonder les alentours en prime.

- Je préfère prendre les mesures qui s’imposent. Nous n’allons pas nous contenter de ressasser de vieux souvenirs. Par ailleurs ne t’alarmes pas si tu as des dons de senseur, le chakra que je malaxe actuellement est un jutsu de repérage pour vérifier que nous sommes bien seuls.

Maintenant que toutes les précautions avaient été prises, le plus intéressant allait pouvoir commencer. La cigarette du binoclard était terminée. Il en jeta le cadavre un peu plus loin d’une simple pichenette sur le cul de la clope. Puis il porta son regard azur rendu violet par les verres de ses lunettes sur celui lui faisant face depuis tout ce temps. Il devait s’impatienter !

- Tu étais jusque-là capitaine au Shûkai. Pourquoi avoir rejoint un tel poste ? Et pourquoi l’avoir quitté surtout ?! Le mal du pays qui t’a poussé à retrouver ta patrie ?

Le regard de Michiki se porta sur ses volatiles à la remarque du Jisetsu. Pas assez discrets ?! A cette hauteur, à moins d’un pouvoir très particulier, personne ne pouvait les voir. Il ne s’en faisait pas pour cela, décidant d’éluder la remarque du détenteur du Dôjutsu doré. Ce dernier n’avait pas manqué de rapidement répondre aux multiples interrogations du nécromancien. Michiki avait pressenti des raisons bien précises et complexes. Il fut légèrement déçu en apprenant la vérité.

Homura avait pris le poste de capitaine car il lui avait donné accès au pouvoir et à une mine d’informations importante. Ce dernier point pouvait intéresser le Shinda qui néanmoins s’accorda avec lui-même pour dire que ce type avait juste agi dans sa nature d’Homme. L’attrait pour le pouvoir avait eu raison de lui. C’était à la fois compréhensible et déplorable. Michiki avait appris au fil de son pèlerinage que le pouvoir n’était pas aussi prépondérant que ça. Ce qui lui avait le plus manqué lors de son exil, ce n’était pas son éternelle insatisfaction de puissance. Ce qui lui avait pesé c’était la défense de valeurs et un cadre à protéger et à défendre. C’était en partie cette conclusion qui l’avait poussé à revenir à Kiri.

S’il avait pu réaliser ça un peu plus vite, il aurait été présent en ce triste jour. Nul doute que ça n’aurait rien changé. Mais c’était un regret que bon nombre de Kirijins portait. « Et si j’avais été là, j’aurais… ». Rien du tout mon garçon tu serais mort avec les autres c’est tout. Si le Shinda avait été présent, la seule chose qu’il aurait pu faire aurait été d’étoffer de manière considérable son armée privée. S’il ne l’avait pas rejoint. Non foutaises. Un nécromancien qui meurt, c’est bien trop ironique et sarcastique pour être possible. Pourquoi pas un Yôgan qui se brûle pendant qu’on y est.

Le Jisetsu lui expliqua ensuite que son départ avait été précipité et non prémédité lors que Kakeshuou s’était auto proclamé empereur et avait pris les pleins pouvoirs. Il ne manqua pas d’ailleurs de lui faire remarquer que Pô avait participé à cela. Michiki arracha une tête songeuse. Il exagéra exprès pour lui sortir un :

- Je sentirais presque un reproche vis-à-vis de mon collègue, je me trompe ?

Il se trompait sûrement. Mais tant qu’à faire, il préférait être sûr de tout. Il ne manqua pas d’ailleurs d’avoir une réponse dans la seconde. Homura ne semblait pas en vouloir à Pô puisqu’il partageait des valeurs communes avec ce dernier. Des principes qui l’avaient mené à l’écouter et à se présenter ici même aujourd’hui pour rencontrer le chef du Fumetsu. C’était très certainement cela qui l’avait attiré. Comme pour le Shûkai. Michiki n’était néanmoins pas disposé à direct balancé toute l’organisation à la face d’un parfait inconnu. Il avait eu son lot de confiance pour le moment. D’ailleurs, elle avait été abusée il y a peu. C’était une occasion rêvée pour mettre à l’épreuve le Jisetsu.

- Pô t’a envoyé ici car je suis le représentant d’un groupuscule bien particulier. Inconnu de tous, nous nous sommes formés il y a peu dans un seul but : devenir la base de données la plus développée du monde shinobi. Je m’explique.

Il marqua un court temps de pause avant de reprendre.

- Kiri aurait peut-être eu une chance si elle avait su ce qui lui tomberait dessus. Elle aurait pu répliquer ou au moins se préparer. Mais malheureusement, elle n’était pas informée de ce qui allait arriver. Ce qui l’a conduit à sa perte. J’ai donc décidé de monter un vaste réseau de renseignements qui me permettra de mettre en commun les connaissances de chaque coin de ce monde. Si les villages mettaient en commun leurs infos, il n’y aurait plus de guerres, plus de conflits. Et les tragédies comme Kiri n’auraient plus lieu d’exister.

Il observa Homura un petit moment pour essayer de déceler ce qu’avait pu lui inspirer tout ce qui venait de suivre. Néanmoins, il ne se perdit pas dans son fil de pensée et recentra vite le sujet.

- Etant encore à nos débuts, nous cherchons des associés directs pour étendre ce réseau. Tu sembles bien renseigné, ce qui fait déjà un bon point pour tout. Mais je ne me fie pas à mes associés sur le simple argument qu’ils sont bien renseignés.

Michiki se leva à ses mots et se rapprocha petit à petit de la position du Jisetsu. Son regard exprimait toute la détermination et la motivation qui l’habitaient lorsqu’il se mettait à œuvrer pour son projet.

- Je tiens avant tout à m’entourer de personnes de confiance. Et je préfère m’assurer que tu en fais partie avant de t’en dire plus. si tu es disposé à nous rejoindre, j’aurais donc un petit service à te demander avant toute chose.

Michiki inspira pour reprendre son souffle et avaler sa salive. C’est ça de jacasser en continu !

- Il y a peu, j’ai accordé ma confiance un peu vite. C’est à cause de cet évènement que j’agis ainsi et ma demande est en lien direct avec ce fameux moment.

Il était à présent à seulement quelques mètres du détenteur du Kinnegan. Il pourrait presque voir le moindre détail de la pupille dorée s’il l’activait. Mais l’heure n’était pas à l’admiration d’un pouvoir héréditaire. L’heure était aux choses sérieuses et aux prémices d’un de ses plans.

- J’ai envoyé une personne à Suna, pour la mettre à l’épreuve aussi. Mais mon erreur a été de trop lui en dire. Je lui avais demandé un rapport hebdomadaire et aucune nouvelle depuis. Et c’est là que j’aurais besoin de toi.

Il avait ponctué sa phrase en le pointant rapidement de l’index avant que ce dernier ne finisse sur la charnière centrale de ses lunettes pour les remonter un peu.

- Si tu veux faire partie de ce groupuscule, et que tu es prêt à passer ce « test », j’aimerais que tu te rendes toi aussi à Suna afin de te renseigner sur cette femme. Elle se nomme Koken Hasü. J’ignore totalement où elle pourrait se trouver. Elle aurait pu tout aussi bien s’évanouir déshydratée dans le désert que prisonnière dans des geôles malfamées. Je veux donc que tu retrouves sa piste et que tu me la ramènes. Ou au moins que tu puisses m’en apprendre davantage pour être au fait de ses agissements.

Le silence reprit tout à coup ses droits. Un instant où chacun réfléchissait de son côté. Le calme régnant fut brisé par la voix de Michiki qui intervint de nouveau :

- Qu’en dis-tu ?

Comme Michiki s’en était douté, Homura n’avait pas de rancœur envers le Gekei sinon il n’aurait même pas pris la peine de se déplacer jusqu’à lui. La remarque du nécromancien avait été plus rhétorique qu’autre chose. Une petite boutade dans une atmosphère très sérieuse, presque solennelle.

Le Jisetsu admira les talents d’orateur du Fossoyeur. Il est vrai qu’avec le temps, il s’était grandement amélioré. Il se souvenait de ses premiers mots en public dans le temps de Kiri, ça n’avait rien à voir. Il avait lui-même pris en maturité que ce soit spirituellement ou dans les idéaux qu’il défendait. Autrefois, il voulait faire payer à la race humaine ce qu’elle était. Aujourd’hui il s’assumait comme faisant partie d’elle, sans pour autant oublier ses origines ainsi que ses projets. L’Homme restait un fléau pour la Nature. Sa nouvelle facette animale faisait ressurgir en lui d’anciennes opinions à ce propos qui l’avaient mené à sympathiser avec son maître Gekei.

Certains de ses travaux d’ailleurs devraient intéresser Pô lorsqu’ils se reverraient. Mais c’était pour un tout autre moment. Pour l’instant, Michiki attendait de voir s’il pouvait compter sur ce tout nouvel allié pour se renseigner à Suna sur le sort de cette Hasü qu’il y avait envoyé. Il n’oubliait pas sa cousine qu’il visitait toujours. Mais la Koken était très faible. Le moindre petit accident pouvait être fatal. Même si le Shinda avait un très mauvais pressentiment au sujet de son espionne improvisée, il préférait assurer ses arrières en y envoyant quelqu’un de plus aguerri et expérimenté. Ce qu’il aurait dû faire depuis le début.

Le Jisetsu semblait remplir toutes les qualités pour cette mission. S’il avait réussi à s’extirper de la surveillance du Shûkai en tant que Capitaine, alors il pourrait remplir ce rôle à merveille et fournir de précieux renseignements sur la situation du côté de Suna. Michiki ne regretterait certainement pas son choix ce coup-ci et il pourrait remercier Pô de cette recrue talentueuse. Et ce sentiment fut renforcé lorsqu’il fut interpellé par le détenteur des Yeux Dorés.

Ils auraient pu en rester simplement là. Mais Homura ne marchait pas à l’aveuglette et demanda à être éclairé sur la situation. Avant de faire quoique ce soit, il tenait à être mis au courant de ce qui l’attendait et ce pourquoi il agissait. Un comportement qui plaisait au nécromancien. il n’avait pas à faire à un vulgaire pion obéissant. Ce dont il ne voulait pas. Le Fumetsu exigeait un respect de l’autorité, mais ne prônait pas la dépendance totale. Rien qu’en remettant légèrement en question la proposition du Shinda, le Jisetsu avait su captivé son attention sans le savoir. Ce jeune homme était définitivement à surveiller de près.

Mais Michiki restait d’un tempérament prudent étant donné des affaires qu’ils traitaient maintenant. Il avait déjà eu l’habitude en gérant le Misuto, mais maintenant c’était encore plus vital et nécessaire. Sinon il ne demanderait pas à son interlocuteur de réaliser une telle chose. Le nécromancien ne répondit pas tout de suite, cherchant bien précisément ses mots pour être assez clair sans pour autant trop en dire. Le sourire qu’il arbora ensuite montra qu’il avait trouvé. Il releva la tête, fixant les prunelles si particulières du Jisetsu, malgré le fait que son Kinnegan ne soit pas activé.

- Disons juste que, si tu arrives à mener cette mission à bien, la Brume se lèvera sur toutes tes questions.

L’allusion était faite, pas forcément évocatrice mais suffisamment au goût du Shinda. Restait à voir si Homura s’en contenterait ou s’il tenterait de gratter un peu plus d’informations. Ce que Michiki ne pouvait lui reprocher et il tâcherait quand même de répondre avec le plus de soin possible pour éviter de nouveaux problèmes inutiles.

Les mots du Shinda avaient été compris. En même temps, il aurait fallu le dernier des abrutis incompétent pour ne pas saisir la référence. Ce qui permettait à la fois de tout dire sans rien dire. Un genre de phrase qu’appréciait particulièrement le nécromancien.

A sa grande satisfaction, l’homme ne demanda pas plus de renseignements. Il se contenta de cette phrase à moitié mystérieuse. Et c’était bien mieux comme ça. Michiki ne tenait pas à rentrer dans le vif du sujet avec un parfait inconnu. Tant qu’il n’aurait pas passé une petite période de test, il ne prendrait pas le risque. Hasü lui aura moins servi à ça. Même si elle ne représentait pas un danger dans l’immédiat, il préférait rester prudent dorénavant.

D’où cette petite mission de renseignements. Elle pourrait prendre du temps ou à peine quelques jours. Cela lui importait peu tant qu’il obtenait des résultats dignes de ce nom. Si elle était morte, il récupérerait le corps. Si Suna l’avait récupérée avant lui…Il aviserait selon la situation. D’où l’intérêt d’envoyer Homura là-bas en « éclaireur ». Uniquement au niveau des informations pour le moment. Peut-être lui demanderait-il de passer à l’action ensuite. Ce serait selon son rapport. D’ailleurs il ne manqua pas de le préciser :

- Parfait. N’agis pas aveuglément. Récolte d’abord les informations nécessaires et tu m’en aviseras par la suite. Je te dirais quoi faire.

Puis le Jisetsu évoqua un nouveau sujet. Il acceptait certes d’accéder à la requête du Fossoyeur mais il émit une condition. Il avait semble-t-il quelques affaires d’ordre personnel à traiter en premier lieu. Michiki était plus que circonspect par cette nouvelle. Il aurait aimé que tout soit réglé d’emblée. Mais il ne pouvait contrôler les agissements de cet homme qui n’était pour le moment pas un membre de son organisation. Mais il serait nécessaire par la suite que certaines règles soient édictées en ce sens. Un sourire lui vint en même temps que l’idée germa dans son esprit. Il n’apporta aucune explication quant à cette réaction. Un simple petit discours :

- Entendu Homura. Je te laisse régler tes différents dans un premier temps. Néanmoins, je te préfère te prévenir maintenant d’une chose très importante à propos de notre groupuscule. Dans le cadre de ses activités, aucune affaire personnelle n’a lieu d’être. Elles restent à la porte. Comme tu n’es pas encore officiellement des nôtres, je ne peux t’en blâmer. Mais lorsque tu recevras la confirmation de ton adhésion à notre organisation, garde ce principe en tête. Il y en a d’autres que je t’expliquerais en temps voulu.

L’entretien touchait à sa fin. Le détenteur du Kinnegan prit congé simplement. Michiki lui répondit donc dans la foulée :

- Bonne chance pour tes quêtes. Et à la prochaine en effet.

Peut-être que cette fameuse « prochaine » arriverait plus vite que prévue. Michiki l’espérait. Son esprit tordu avait déjà manigancé plusieurs idées faisant appel aux talents d’un Jisetsu. Cet homme serait un atout de taille. Le laisser filer serait idiot. Si le test s’avérait positif, le Fumetsu bénéficierait d’un soutien intéressant. Le nécromancien rappela ses pantins et les révoqua tous dans leurs rouleaux respectifs. Il dissipa les sièges de terre puis quitta à son tour la clairière pour s’en retourner à ses affaires. Il ne devait pas chômer pour le Fumetsu. Chacun de ses actes œuvrait dans l’intérêt de l’Hydre pour qui il espérait un glorieux avenir couronné de succès.