Vous savez, ces fameux jours où on a l'impression que le monde entier est contre vous? Ceux où vous pouvez lutter de toutes vos forces mais sans pouvoir empêcher une tonnes de crasses de vous arriver en pleine tronche? Ceux où, finalement, on aurait mieux de rester couché plutôt que de se lever pour gambader... Ben Shinji, lui, il avait vraiment l'impression que cette journée n'allait pas être la sienne! Mais lorsqu'il avait reçu une nouvelle mission en rentrant d'une longue soirée de combats, il en avait eu l'intime conviction. L'ordre de mission ne laissait que peu de place à l'interprétation: quelqu'un au bureau des missions lui en voulait!

Ordre de Mission:

- "Sérieusement?" fit-il à l'intention du gosse qui venait de lui amener la mission. "Bon alors écoute: tu vas reprendre ton petit parchemin de mes deux et tu vas gentiment aller dire au connard qui distribue les missions qu'il peut se l'enfoncer..."

Comme trop souvent à son goût, le gamin avait déjà disparu en lâchant un vague "Ergastule!" en guise d'avertissement. Le borgne hésita un bref instant à lui décocher un kunaï dans le dos pour éviter ses visites qui devenaient de plus en plus régulière. Pour quelqu'un qui faisait son possible pour vivre en marge de la société, on le sollicitait bien trop souvent à son goût.

- "... dans le cul!" termina-t-il dans le vide.

Là, en l'occurrence, c'est lui qui l'avait profonde. Il prit une longue rasade de saké et remonta en titubant les escaliers pour rejoindre son petit appartement. Là il s'accorda quelques heures de repos avant que son réveil le tire des bras de Morphée. Le jeune homme hésita vaguement avant de prendre une douche mais se ravisa en estimant que ce n'était pas nécessaire avant d'aller crapahuter dans les égouts. Ha, si Oniri le voyait... Et Yami... Cette simple pensée suffit à le faire déprimer davantage tandis qu'il commençait à se préparer. Il déroula deux rouleaux de sac poubelles et étala son tabac à rouler sur sa table de nuit et se mit au travail...

Une heure plus tard, ce fut un Shinji entièrement recouvert de sac poubelles qui dévalait les escaliers pour rejoindre le point de rendez-vous. Il était un peu en retard si bien que son coéquipier assigné pour cette mission était déjà sur place lorsqu'il déboula dans le quartier résidentiel. Il marqua une courte pause lorsqu'une gamine cria avant de disparaître en courant après avoir posé le regard sur lui. Les bras écartés à cause de l'amas de sacs qu'il portait au niveau du torse et deux cigarettes enfoncées dans les narines pour se protéger de l'odeur, il pivota maladroitement sur le côté pour serrer la main du Kawaguchi.

- "Salut mon gars! Moi c'est Shinji! Plus ou moins ravi de faire ta connaissance!" fit-il en guise de présentations avant de désigner de son œil valide quelque chose à sa taille. "Tu pourrais prendre cette fiole et me donner un peu à boire s'il-te-plaît? Je suis un peu... rigidifié! Ouais, on va dire ça! Ce serait très sympa de ta part!"

Il se pencha un peu en avant et tendit la bouche pour aspirer le précieux liquide avant de regarder avec attention son coéquipier. Ce dernier avait une coiffure hirsute teinte en vert - enfin c'était peut-être sa couleur naturelle après tout - qui était relevée par le bandeau de Suna qui lui barrait le front. Un long manteau gris blanc et noir lui recouvrait la majeure partie du corps et on pouvait indéniablement dire qu'il avait la classe. En tout cas, Shinji le mettait en valeur avec son accoutrement ça c'était certain. Mais au moins il serait protégé, lui!

Un membre du service d'entretien - un Saibogu, forcément - leur indiqua une bouche d'égout avant de l'ouvrir d'un mouvement maintes fois rôdé et leur expliquer que les émanations d'odeurs semblaient venir du réseau adjacent. Il termina en leur confirmant que c'était le point d'accès le plus proche et qu'il leur faudrait avancer dans les tunnels sur une cinquantaine de mètres. À voir la tronche désolée du type, cette excursion n'annonçait aucun plaisir digne de ce nom...

- "Bon et bien je crois que je vais te laisser passer devant Shiro... Sashe... cher coéquipier!" faudrait qu'il retienne son prénom, tiens. "Tu m'as l'air indéniablement plus expérimenté que moi et l'honneur d'ouvrir la marche te reviens, donc!"

L'Akuzu à moitié ivre-mort pivota une nouvelle fois pour faire face à son collègue et lui décocher un de ses sourires goguenards mais fut emporté par son propre poids et tituba quelques instants. Ça a beau se passer très vite, il y a des chutes qui semblent durer une éternité. Shinji glissa sur le rebord en tentant de se pencher en avant et passa directement dans la bouche d'égout grande ouverte. Un bruit de chut et une odeur de flatulence s'élevant avec violence dans les airs plus tard, il y eut un court instant de silence.

- "C'est bon! Il y a un fond!" fit-il laconiquement, sa voix déformée par le tunnel. "Enfin... Un truc qui y ressemble en tout cas..."

Le fond, il l'avait bien touché là ouais! Le visage recouvert de déjections en tout genre, l’œil valide du borgne semblait comme un phare au milieu d'un océan de noirceur. Un air de tueur sur le visage, l'intéressé se redressa avec peine en allongeant sa main pour saisir les barreaux rouillés. Après un effort considérable si l'on gardait à l'esprit la dose d'alcool qui avait dans le sang, le brun réussit finalement à retrouver une position verticale avant de lever la tête vers son coéquipier:

- "J'imagine qu'il n'y a aucune chance que cette histoire reste entre nous?" le questionna-t-il avec un manque d'espoir évident. "Allez viens me rejoindre, qu'on en finisse. Une fois sur place et quand tu es habitué à l'odeur, c'est plutôt coquet ici en fin de compte!"

Tu parles, ouais... Difficile de voir le côté positif des choses quand on est recouverts des déjections des braves citoyens de Suna, même si d'après certaines rumeurs c'était bon pour la peau!

Shinji saisit la lampe-torche que lui tendait son coéquipier et le remercier d'un signe de la tête avant de l'activer et balayer le tunnel avec le faisceau lumineux. Il allongea son bras sur une dizaine de mètres devant eux pour s'assurer que le chemin était dégagé et qu'aucun animal sauvage ou autre joyeuseté du genre attendait tapis dans l'ombre, prêt à se jeter sur leurs mollets. Pour le moment tout semblait en ordre si l'on exceptait la nature du sol et les odeurs qui se propageaient dans le conduit.

L'Akuzu refusa en revanche le masque que lui proposait Sishe.. Seishirō (\o/), préférant largement garder la tête libre de toute contrainte. Il n'avait jamais aimé porté des trucs du genre puisque la respiration devenait plus difficile. Et puis s'il s'était enfoncé des cigarettes dans le nez ce n'était tout de même pas pour rien! Il s'en roula d'ailleurs rapidement une autre avant de la visser au coin de ses lèvres pour l'allumer. Quelques longues bouffées salvatrices plus tard, le borgne suivit le Kawaguchi qui semblait décidé à ouvrir le voie. Il brisa régulièrement le silence avec des "Ha mais c'est dégueu!!!", des "Ça pue!" et autres "Mais qu'est-ce que je fous ici moi?". Ce qui était certain c'est que c'était la dernière fois qu'on le reprenait à crapahuter dans le sous-sol de Suna. Déjà que la partie visible du village n'était pas spécialement agréable à regarder, mais alors ses tréfonds battaient tous les records!

- "C'est ta première expérience dans les égouts j'imagine?" demanda-t-il au jeune homme après une dizaine de mètres. "Je me dis qu'il faut prendre ça comme une expérience particulièrement horrible qui nous grandira et nous rendra plus... heu... matures!"

Ça se sentait tant que ça qu'il ne croyait pas lui même à ce qu'il disait? Le duo poursuivit sur encore quelques mètres avant que le chemin se divise en deux dans le sens de la longueur. Shinji éclaira les deux passages à tour de rôle et rien ne les distinguait vraiment: mêmes odeur, mêmes matières immondes sur le sol...

- "J'imagine que c'est ce qu'on appelle un dilemme..." s'amusa-t-il en décochant un sourire à son partenaire. "On se sépare si ça te va?"

Ils décidèrent donc d'un commun accord de prendre chacun l'une des directions après avoir relevé le manque d'indications claires de la part du Saibogu. Shinji prit le chemin de droite et s'engouffra avec précaution le long du tunnel. Ce dernier adopta rapidement une forme circulaire et l'Akuzu déforma son corps pour s'y mouvoir plus facilement. Il pénétra ensuite dans une salle circulaire remplie de matière fécale et s'arrêta un instant au bord du bassin central avec un air parfaitement dégoûté. Il décida de se rouler une nouvelle cigarette comme pour mieux purifier ses poumons de cet air nauséabond. Après l'avoir glissée au coin de ses lèvres et tenté de l'allumer, il découvrit le sens de l'expression retour de flammes...

L'air s'embrasa lorsque son briquet émit une flamme et l'espace se remplit rapidement en tempête de feu l'espace de quelques trop longues secondes. Lorsque les flammes se dissipèrent, Shinji avait l'apparence d'un homme des tribus de l'extrême sud du pays du vent, avec la peau couleur ébène. Les cheveux roussis et le regard hagard, il resta un instant immobile avant de tousser tout son saoule. Il grimaça lorsqu'il s'anima et constata qu'une bonne partie des sacs avaient fondus sur ses vêtements. Le borgne avait en outre une bonne partie du visage brûlé superficiellement mais bien assez pour lui faire mal dès qu'il mouvait son faciès. Il nota ensuite avec une certaine amertume que les habitants de Suna mangeaient certainement trop épicés et que les gaz de leurs excréments avaient une fâcheuse tendance à s'enflammer à la moindre étincelle...

- "Journée de merde!" râla-t-il.

C'était le cas de le dire! Ce sombre épisode - et ce qu'il restait de sa dignité - derrière lui, l'Akuzu poursuivit son chemin en empruntant l'unique passage à l'autre bout de la pièce. Quelques minutes plus tard il tombait nez à nez avec Seishirō. Après avoir rapidement raconté ce qu'ils avaient vécus et constaté qu'il fallait poursuivre, ils reprirent leur progression.

- "Dis-moi que deviennent les Kawaguchi en fait? Ça fait un bail que j'en ai pas croisé un... T'es bien placé dans ton clan ou t'es un vague cousin éloigné de la branche principale?"

Quelques minutes supplémentaires furent nécessaires pour parvenir à une grande porte de fer rouillé qui ne semblait pas décidée à céder malgré les coups répétés de l'Akuzu. Ce dernier se tourna donc vers son partenaire:

- "Tu as un truc en réserve pour forcer cette porte, l'sablé?"

Un surnom comme un autre pour désigner un manieur du sable... Il s'effaça pour lui laisser la place et se rouler une énième cigarette. Ce n'était pas un vulgaire risque d'explosion qui allait le contraindre à arrêter de fumer, ho ça non! Il regarda ensuite son coéquipier se charger de la porte, curieux de savoir ce qui se cachait derrière celle-ci. L'odeur était plus forte à cet endroit et il y avait fort à parier que l'explication sur son origine trouverait son épilogue une fois que l'accès serait libéré. Il fallait l'espérer en tout cas...

Après avoir tendu sa lampe-torche à son coéquipier et allumé la sienne, notre héros lança un regard à Shinji, voulant ainsi s’assurer que ce dernier était fin prêt. Il fixa un court instant son visage et plus précisément les deux cigarettes enfoncées dans son nez. Il avait gentiment refusé le masque proposé par son interlocuteur, stipulant qu’il préférait être libre de ses mouvements et éviter de se sentir étouffer. Inutile d’insister.
Éclairant le tunnel de concert, nos deux protagonistes firent marche dans les profondeurs de Sunagakure no Sato avec, en tête de file, le jeune Kawaguchi.

L’odeur était insoutenable… du moins elle devait l’être si notre jeune ninja ne portait pas ce masque. Quelques émanations arrivaient néanmoins à traverser le filtre, notamment de la fumée de cigarette… Un rictus amusé se dessina sur ses lèvres lorsqu’il imagina Shinji en train de fumer ses clopes directement par le nez. Manquerait plus que les braises réagissent avec les gaz qui se dispersaient dans tous les égouts. En un très court instant, la ville ferait un bond de plusieurs mètres avant de retomber en poussières… Un grandiose feu d’artifice !

Nos deux compères progressaient dans le tunnel. Leur marche était accompagnée de jurons et d’exclamations, lancés par « l’homme-poubelle », ce qui rompait la monotonie et permettait à notre protagoniste de détourner son esprit de l’atmosphère qui régnait en ces lieux.

« C’est ta première expérience dans les égouts, j’imagine ? »

Seishirō tourna légèrement la tête sur sa droite, tendant ainsi l’oreille en direction de son coéquipier qui poursuivit :

« Je me dis qu’il faut prendre ça comme une expérience particulièrement horrible qui nous grandira et nous rendra plus… heu… matures ! »

Ce qu’il ne fallait pas entendre. En quoi cette expédition les rendrait matures ? Notre héros haussa les yeux au ciel, ou plutôt au plafond, puis répondit d’une voix hilare :

« Ahahah ! C’est sûr que traverser les égouts va jouer sur notre maturité ! Je pense me sentir adulte en ressortant d’ici ! »

Il savait pertinemment que les paroles de Shinji étaient ironiques, c’est pourquoi, tout naturellement, il rebondit sur ses paroles par une nouvelle… boutade.

Quelques mètres plus loin, les deux Genins atteignirent une bifurcation… Le fumeur balaya alors les deux tunnels tour à tour de sa lampe-torche, mais rien ne semblait les différencier. Gauche ou droite… c’était kifkif. Restait à savoir vers où ils menaient.
Le fumeur fit un pas en avant, examina une nouvelle fois les deux issues et se tourna vers le Kawaguchi, accompagnant son mouvement d’un sourire.

« J’imagine que c’est ce qu’on appelle un dilemme. On se sépare si ça te va ?
- Très bien, faisons comme ça… de toute façon, je ne pense pas que l’on va trouver de réels dangers ici répondit-il en examinant les parois et le fond obscur du tunnel. »

Ainsi donc, alors que Shinji entreprit l’exploration du tunnel de droite, notre protagoniste longea le mur de gauche et s’enfonça dans les ténèbres… Qu’allait-il bien trouver là-dedans ?

Il progressait lentement, s’assurant de ne pas glisser sur les immondices répandues sur le sol. Un couinement résonna sur sa droite, dans le sillon emplie d’eau stagnante, le faisant sursauter brusquement. Dirigeant spontanément le faisceau de lumière en direction de la source du bruit, Seishirō révéla un bête rat qui, effrayé par l’éclat éblouissant, détala comme un lapin. Son cœur, qui s’était subitement mis à accélérer, reprit son rythme habituel, plus doux et régulier. Un soupir s’échappa de la gorge de notre Sunajin et, une fois remis de ses émotions, il reprit enfin sa route.

Tout à coup, une violente détonation résonna dans les tunnels, suivie d’une étrange vague de chaleur. A cet instant précis, Seishirō se remémora la pensée qu’il avait eue tout à l’heure… Shinji avait sans doute allumé la cigarette de trop. Instinctivement, il tourna la tête derrière lui et vit une vive lueur rouge orangée qui se dissipa en quelques instants. Du feu… oui, il s’agissait bien de feu. Mieux valait courir… si jamais le retour de flammes venait se propager jusqu’ici, notre héros risquait de finir carboniser.
En deux temps trois mouvements, le Kawaguchi s’élança dans les profondeurs jusqu’à finalement atteindre un coude dans le réseau de tunnels.

Quelques mètres plus loin devant lui, une ombre se dessina, précédée d’un puissant halo de lumière. Visiblement, les deux chemins de tout à l’heure menaient au même point, si bien que Shinji rejoignit son coéquipier.
Seishirō observa avec soin son interlocuteur… quelque chose avait changé. La peau recouverte d’une épaisse couche noire, les cheveux hérissés tel un savant fou qui aurait raté une expérience… Notre ninja s’efforça de ne pas rire et déclara, d’une voix qui reflétait un soupçon de moquerie :

« Je me disais bien que l’explosion de tout à l’heure était liée à ta soif de nicotine… J’imagine que les habitants du village ont dû ressentir une légère secousse, hé hé hé ! Il marqua une courte pause puis acheva Pour ma part j’ai juste croisé un rat… rien de bien passionnant… »

Shinji répondit au manieur de Sable, accompagnant ses paroles de grognements, puis les deux ninjas poursuivirent leur grande traversée.
Alors qu’ils progressaient, le « calciné » prit à nouveau la parole, souhaitant à tout prix briser le silence qui s’installait petit à petit entre son interlocuteur et lui :

« Dis-moi, que deviennent les Kawaguchi en fait ? Ça fait un bail que j’en ai pas croisé un… T’es bien placé dans ton clan ou t’es un vague cousin éloigné de la branche principale ?
- Euh… répondit spontanément notre Sunajin qui ne s’attendait pas à une telle question. Et bien les Kawaguchi vont plutôt bien en fait. Après, nous ne sommes pas différents de vous tu sais, regarde-moi : je pourrais très bien être un ninja comme toi ou bien… euh… Il l’observa de haut en bas et esquissa un sourire en examinant son visage noir. Bref, nous sommes comme tout le monde. Sinon je fais partie de la branche principale, mon père est un descendant direct des fondateurs donc… disons que la lignée se poursuit et… tiens ? »

Alors qu’ils parlaient tranquillement, leurs pas les menèrent face à une immense porte en fer, usée par le temps et l’humidité. Shinji s’avança, l’examina grossièrement avant de donner quelques coups dans le métal, espérant dégager la voie. Et, voyant que ses efforts étaient vains, il se tourna vers le Kawaguchi et lui demanda s’il avait un moyen d’ouvrir cette porte.
Laissant l’accès à son coéquipier, le fumeur se décala légèrement et alluma une nouvelle cigarette, sous le regard noir de notre Sunajin qui ne manquerait pas de se venger si une nouvelle explosion devait survenir.

Immobile devant la porte, les bras croisés, Seishirō scrutait chaque élément. Malgré la rouille qui s’était incrustée sur le fer, ce passage semblait bien scellé et il serait difficile de faire sauter cette protection. Si cette porte était fermée, c’était sans doute pour une bonne raison. Cependant, il s’agissait de l’unique issue.
Utiliser le sable et l’infiltrer entre les gonds permettrait sans aucun doute de déloger la porte de son emplacement, cependant la poussière accumulée ici était entièrement imbibée d’eau et d’urine, la rendant ainsi inutilisable… notre héros maniait le sable et non la boue… Il devrait donc user de ses cellules grises et de son ingéniosité pour pouvoir passer… ou peut-être avec un peu de chance…

Alors qu’il se posait mentalement pour réfléchir, Seishirō plaça les mains dans ses poches et toucha du bout des doigts de la main gauche une espèce de feuille de papier… Tandis qu’il tira l’objet inconnu de sa poche il pencha la tête en direction de l’entrée de sa poche et, à la vue des inscriptions notées sur le papier, un éclair de génie traversa son esprit.
Une note explosive ! La probabilité d’en avoir ne serait-ce qu’une seule à disposition étant faible, le Kawaguchi remercia la chance et s’approcha de la porte avant de la coller au niveau des gonds. Le métal était trop épais pour être détruit… par conséquent, il était judicieux de viser les zones plus fragiles.

Après s’être écarté, Seishirō se tourna vers son coéquipier et lui expliqua son plan :

« Bien. Comme pour toi tout à l’heure, la moindre détonation entraînera un retour de flammes… et là, ce sera plus conséquent que ta petite cigarette. Je vais donc dissiper pour un court instant les effluves et les gaz au fond du tunnel grâce au Fûton et, à cet instant, tu feras exploser la note. Tu es prêt ? »

Sur ces mots, le Kawaguchi se tourna en direction de l’obscurité et se prépara à composer une courte série de signes. Leurs actions devaient être parfaitement synchronisées… à la moindre erreur, tout partira en fumée.

J'aimais bien ce Kawaguchi. J'avais souvent entendu que les membres de son clan étaient hautains et renfermés sur eux-même mais c'était sûrement des rumeur déformées par la jalousie ou le temps. De toute façon je ne prêtais pas vraiment attention aux rumeurs la plupart du temps. Déjà parce que je les entendait principalement dans les bars que je fréquentais et que les gens qui les prononçaient était souvent alcoolisé ou ignares. Voir les deux en fait! Et puis j'avais un désintérêt évident pour les histoires claniques. Rien d'étonnant finalement puisque je me fichais pas mal des Akuzu, ma propre famille. Alors celles des autres... Pourquoi lui avoir posé la question dans ce cas? Par politesse, envie de faire la discussion ou simplement par curiosité... Faites votre choix! Je notai toutefois dans un coin de mon esprit que Seishirō faisait partie de la branche principale des Kawaguchi car si je ne m'intéressais pas aux clans en général, j'aimais connaître les individus que je rencontrais. Et puis un jour les liens que j'étais en train de tisser avec ce membre de l'une des familles les plus influentes de Suna pourraient m'être utiles...

Mais nous avions d'autres chat à fouetter actuellement. Cette porte rouillée nous posait problème et je n'avais pas envie de m'éterniser plus que nécessaire dans cet infâme bourbier pestilentiel. Mes pouvoirs étaient d'aucune utilité pour le moment puisque je n'arrivais pas à faire céder l'obstacle et je n'avais guère envie de me fracturer les os en me montrant trop insistant. Il semblait en être de même pour la maîtrise du sable de mon coéquipier mais ce dernier tira de sa poche un joker plus qu'intéressant: une note explosive! Ouais, ça pouvait fonctionner. Mais les risques d'explosions restaient importants et je ne comptais pas crever pour ouvrir une simple porte...

Seishirō m'expliqua rapidement son plan, à savoir user du Fûton pour contenir un inévitable retour de flammes lorsque je me chargerais de faire exploser la fameuse note. Cette idée était plutôt bonne même si elle n'occultait pas totalement le risque de mort prématurée. Mais c'était la meilleure option dont nous disposions à l'heure actuelle! Ceci dit nous devions agir en parfaite synchronisation si nous espérions éviter l'explosion qui allait immanquablement suivre. Décidément je n'avais pas envisagé qu'un simple voyage dans les égouts pouvait comporter autant de risques. Et je ne pus m'empêcher de me demander si Tawako m'avait volontairement envoyé dans cette galère, en toute connaissance de cause. Mais ce n'était pas le moment de s’apitoyer sur son sort alors même que la concentration était de rigueur.

- "Ok, faisons comme ça!" répondis-je, faute de pouvoir proposer mieux.

Nous nous mirent en position après avoir rapidement réglé les détails. Je m'agenouillai donc à côté de la note explosive tandis que mon partenaire se tenait debout à côté de moi. Je devais ensuite reculer derrière-lui tandis qu'il se chargerait de repousser les flammes, faisant ainsi barrage pour me protéger. L'explosion allait être extrêmement rapide et le gaz s'enflammerait à l'instant même où la première flamme apparaitrait. Ce laps de temps ridicule n'offrait que peu de marge de manœuvre - en fait, aucune - et la moindre erreur signifierait la mort. Sans parler des conséquences pour les habitations au-dessus. Mais pour le coup, en bon égoïste que j'étais, je me foutais royalement! De toute façon, une fois qu'on passait l'arme à gauche, on ne pouvait pas vraiment se soucier des autres n'est-ce pas? J'adressais alors un regard au Kawaguchi:

- "Si on s'en sort je te paie un verre dans le premier bar que nous croiserons une fois la mission accomplie!" lui promettais-je avant de reporter mon attention sur la note explosive. "Paré?"

J'attendis qu'il me confirme d'un signe de tête que c'était le cas avant de tendre la main en direction de la note. puisant dans mon chakra pour me tenir prêt à le libérer pour déclencher l'explosion.

- "À la une, à la deux et... stop!!!"

Je ne prononçai pas le dernier chiffre et tournai un regard amusé vers mon partenaire qui lui, devait sûrement moins apprécier que moi ma petite tentative d'humour. La pression sur nos épaules était déjà assez grande pour ne pas en plus se permettre ce genre de plaisanterie douteuse. Je levai une main pour m'excuser sans me départir de mon sourire. Quitte à crever, autant que ce soit avec le sourire aux lèvres non?

- "Non bon d'accord je suis un petit con je le reconnais! On recommence sérieusement cette fois d'accord? Alors un, deux et TROIS!"

La note commença à se consumer lorsque je l'activai et les braises se rapprochèrent rapidement du sceau explosif. Je me hâtai ensuite de me placer derrière mon collègue alors que mon palpitant battait tellement fort que je pensai un moment qu'il allait jaillir de ma poitrine pour se faire la malle. Puis il y eut un flash de lumière aveuglante et l'air augmenta brusquement de température pour devenir encore plus étouffante que celui dans le désert. Par réflexe je levai une main devant mon visage en fermant les yeux. Je restai ainsi quelques secondes en m'attendant à sentir la morsure des flammes sur ma peau mais rien ne se produisit. La température baissa rapidement et le grondement sourd qui sifflait à mes oreilles disparut en même temps. Lorsque je rouvris les yeux, une odeur de souffre couvrait momentanément celle des déjections et la porte avait été arrachée de ses gonds. Mais je ne savais pas si nous avions gagné au change...

Le passage libéré, nous pûmes voir ce qui causait toute cette puanteur: une salle carrée de trois mètres de longueur sur autant de largeur fut rapidement visible lorsque nous l'éclairâmes et le spectacle qui s'offrit à nous me retourna les intestins. Je portais une main à ma bouche par réflexe lorsque je sentis que mon estomac voulait régurgiter l'alcool que j'avais ingéré. Je réussis à maintenir ce flot qui menaçait de s'écouler de ma bouche et prit immédiatement une gorgée d'alcool. Des cadavres étaient empilés pêle-mêle l'un sur l'autre, sans la moindre décence funéraire. Certaines semblaient dans un état de composition avancée tandis que d'autres semblaient avoir trouvé la mort quelques jours plus tôt. La plupart portaient de profondes entailles sur le corps et pratiquement tous avaient la gorge ouverte. Je vis même un rat sortir de la bouche de l'une des dépouilles pour rejoindre ses congénères qui fuyaient l'endroit, sans doute effrayés par notre présence. Et l'odeur... J'avais pourtant affronté des momies avec Yami et Oniri mais ça n'avait rien de comparable. J'avais beau chercher, aucun mots ne me venaient à l'esprit pour qualifier les effluves qui détruisaient mon sens olfactif...

J'échangeais un regard avec Seishirō et fit un pas dans la salle, enjambant des dépouilles en faisant de mon mieux pour ne pas entrer en contact avec. De l'autre côté de la pièce se trouvait une autre porte, en parfait état cette fois-ci. Je la poussai et elle céda sans la moindre résistance, offrant l'accès à un couloir sombre mais bien entretenu. Les déjections laissèrent place à de la pierre et nous pouvions au moins quitter cette "boue" dans laquelle nous marchions depuis le début.

- "Qu'est-ce que tu en penses? Un tueur en série? Quelque chose comme ça?"

La réponse semblait évidente mais je tenais à avoir son avis là-dessus. D'autres portes nous bloquèrent le passage mais s'ouvrirent sans la moindre difficulté. Elles devaient contenir l'odeur et la limiter au secteur où se trouvaient les cadavres. Quant à ce tunnel, à en juger par son état, il devait mener directement à la source de tout ceci. Nous progressâmes avec plus de facilité tandis que l'odeur s'estompait peu à peu. Aucun de nous deux ne s'en plaignit à vrai dire...

Nous arrivâmes finalement devant des barreaux servants d'escaliers. Ces derniers menaient à une trappe en bois qui ouvrait certainement sur une demeure. En prêtant l'oreille nous pûmes entendre un sifflement sinistre et le bruit d'une lame qu'on frottait pour aiguiser. j'échangeai un nouveau regard avec mon camarade et soupirai. Qu'allions-nous trouver là-haut?

Seishirō avait expliqué son plan, il ne restait plus qu’à l’appliquer. Se plaçant de telle sorte à jouer son rôle au moment voulu, notre Kawaguchi se tourna vers le trou du tunnel et étendit les bras, prêt à composer sa série de signes.
Shinji, quant à lui, s’agenouille à proximité du mur, non loin de la note explosive. Certes le périmètre entre l’utilisateur et la note pouvait être assez grand, néanmoins les égouts étant assez étroits, difficile de faire autrement…

Ce stratagème était risqué, compte tenu de l’infime laps de temps entre l’activation des kanjis inscrits sur la note et la technique Fûton qui permettrait de disperser les gaz. Le fumeur dirigea le regard en direction de son coéquipier et lui lança un pari. Notre héros lui adressa un sourire et hocha la tête de haut en bas, acceptant la proposition. Les événements prenaient une toute autre tournure, il n’avait pas intérêt à se rater : un verre était en jeu !
Sur ce, Shinji tendit la main en direction de la note, se prépara à l’activer et commença à compter. Notre héros se tenait prêt : les bras légèrement étendus devant lui, les doigts parés à s’entrelacer dans un ballet impressionnant pour un observateur extérieur. Dans quelques instants, il soufflerait une vague d’air mêlé à du chakra pour dissiper les effluves ambiantes.

Soudain, alors que le borgne s’apprêtait à clamer le tant attendu « Trois ! », celui-ci s’arrêta et tourna la tête en direction du Kawaguchi. Son regard amusé ne pouvait mentir : il venait de faire une blague… ou plutôt il avait tenté d’en faire une. Seishirō lui rendit son regard et imagina alors une nouvelle alternative s’ils s’en sortaient tous les deux. « Pour m’avoir fait sursauter… je vais considérer que tu me dois maintenant un deuxième verre. » songea-t-il avant de lâcher un soupir.
Shinji présenta un semblant d’excuses avant de terminer le décompte.

A cet instant, notre protagoniste exécuta une rapide série de signes et, après avoir insufflé du chakra dans l’air emmagasiné dans poumons, relâcha une bourrasque qui poussa les gaz dans le fond du tunnel. Au même moment, la note explosa, produisant un violent flash lumineux, suivi d’une puissante détonation qui déséquilibra le Kawaguchi, manquant de le faire tomber dans les ordures.
La voie était enfin libre !

S’approchant de l’ouverture, Seishirō dirigea le faisceau de lumière vers les ténèbres et ce qu’il révéla manqua de le faire vomir, tout comme son coéquipier. Des cadavres, entassés les uns sur les autres, qui avaient visiblement commencés à pourrir. Entaillés à divers endroits, la gorge grande ouverte et recouverte d’une épaisse couche de sang coagulé, ces corps avaient été placés ici volontairement… Un spectacle macabre qui ferait frémir des lecteurs de polars.
Le masque que portait le Kawaguchi n’était pas assez épais, si bien que notre héros récupéra promptement le second toujours dans son sac avant de le sangler par-dessus le premier, avant de humer l’air et voir si son idée fonctionnait. Fort heureusement, les effluves ne parvenaient plus à traverser les filtres du masque.
Nos deux protagonistes s’échangèrent un regard, puis Shinji enjamba les corps inertes avant de rejoindre, dans le fond de la pièce, une autre porte donnant sur un long couloir taillé dans la pierre. Voilà qui était de mieux en mieux.

« Qu’est-ce que tu en penses ? Un tueur en série ? Quelque chose comme ça ?
- Hm… un détraqué de plus, terré dans les profondeurs de Suna. »

Les ninjas du Sable poursuivirent leur route à travers le couloir. Après avoir traversé plusieurs portes et atteint ce qui semblait être la dernière, Shinji et son coéquipier s’approchèrent et tendirent une oreille. Un bruit strident, un crissement… comme si quelqu’un était en train de faire glisser une lame contre une pierre à affûter… Le Kawaguchi fut pris d’un frisson qui parcourut tout son corps. A nouveau, son compagnon d’arme et lui s’échangèrent un regard puis notre Sunajin approcha sa main de la poignée et poussa la porte.

Derrière l’entrée se trouvait une grande pièce sombre, éclairée par quelques bougies… au centre de cette salle se trouvait une sorte de table d’opération disposée sous une grande lampe à néon, illuminant d’une vive lumière blanche une jeune femme allongée. Elle était immobile, sanglée et bâillonnée… sans doute au cas où elle essayerait de se débattre ou d’appeler à l’aide. Une silhouette se dessinait devant la table d’opération. A en juger sa carrure imposante et les grosses paluches qui tenaient fermement une espèce de hachoir de boucher, il s’agissait d’un homme… ou alors d’une femme nourrie aux hormones masculines… cette deuxième hypothèse parut alors à notre héros peu probable, si bien qu’il se focalisa sur la première.

Soudain, la voix grave de l’individu résonna dans la pièce. Ses phrases, saccadées par des espèces d’aspiration buccale qui empêchait sa bave de s’écouler sur le sol, laissaient transparaître son état mental instable :

« Uéhéhéhé… ne vous inquiétez pas mademoiselle, je vais soigner cette vilaine plaie. Allons, ne bougeons plus… »

Sur ces mots, il approcha son couteau de boucher en direction du bras gauche de la belle endormie. Sans perdre une seconde, Seishirō attrapa un kunaï dans sa sacoche et décocha un superbe tir en direction de la main de la brute. Le projectile vint se planter dans la chair de l’individu, l’obligeant à lâcher son outil de chirurgien. Un grognement s’échappa de sa gorge et, après avoir retiré le kunaï du dos de sa main et l’avoir jeté à terre, il tourna la tête en direction des deux ninjas. Son regard était terrifiant, un véritable dément qui avait perdu la raison depuis longtemps et qui nourrissait petit à petit son esprit malade en disséquant de pauvres innocents. Il fixa les bandeaux des deux ninjas et lâcha :

« Ahahaha ! Des ninjas du Sable ! Allez-vous en, vous allez gêner mes patients !
- Vos patients ? répondit Seishirō sur un ton interloqué. Vous considérez le tas de cadavres au bout de ce couloir et la jeune femme devant vous des patients ?!
- Mes opérations précédentes ont échoué, c’est vrai… mais je suis certain d’y arriver ! Et vous ne m’en empêcherez pas ! »

A cet instant, l’homme se leva brusquement de son tabouret et s’empara d’un grand couteau accroché sur le mur face à lui. Seishirō tourna la tête en direction de son coéquipier et lui lança :

« Je sens qu’on l’a énervé. Fais attention, vu sa carrure et sa force, un coup et tu es découpé en deux. Je vais sur son flanc gauche et toi le droit. Je vais essayer de libérer la captive et la placer dans un coin de la pièce pour éviter qu’elle ne soit prise entre deux feux. Allons-y ! »

Ni une ni deux le Kawaguchi attrapa un nouveau kunaï qu’il serra fermement dans sa main gauche et se propulsa sur l’adversaire. Assisté de Shinji, les deux Sunajins firent face au malade mental avant de l’attaquer à plusieurs reprises. Ses assauts étaient lents et lourds : face à l’habileté de ses adversaires, il ne pouvait rien faire.
Ne voyant pas en ce balourd un redoutable ennemi, Seishirō s’écarta du combat et vint libérer l’inconnue des sangles qui la retenaient prisonnière. En quelques instants, il la souleva de la table d’opération avant de venir l’allonger contre un mur loin de son ravisseur. Et, tandis qu’il veillait sur sa sécurité, Shinjin continuait son affrontement avec l’armoire à glaces.

Il y avait des tarés dans ce monde de fous, ça je le savais déjà. Mais le spécimen qui se tenait devant nous devait certainement être bien placé dans la hiérarchie des psychopathes, ça à n'en pas douter. Je restais un instant interdit en voyant ce type à la carrure massive lever un grand couteau de boucher après avoir rassuré la victime qu'il s'apprêtait vraisemblablement à mutiler. Comment pouvait-il justifier ses actes par la volonté de soigner, d'aider son prochain? Il lui manquait vraisemblablement une case - enfin, une bonne dizaine au bas mot - pour qu'il en arrive à agir ainsi. Heureusement mon coéquipier fut prompt à réagir et décocha un kunaï qui vint bloquer le mouvement de ce type alors qu'il s'apprêtait à abattre son arme sur la pauvre demoiselle attachée et impuissante.

La blessure qu'il reçut à la main ne vint pas entamer sa bonne humeur malsaine et il se contenta de retirer la lame de sa chaire avant de nous faire face. Après avoir avisé nos bandeaux il nous demanda simplement de nous aller en arguant que nous allions gêner son patient. Ce type vivait vraisemblablement son délire et il semblait convaincu du bien fondé de ses actes. Ce qui le rendait encore plus dangereux! La folie qui l'animait était une puissante motivation et tant qu'il pensait être dans son bon droit en agissant ainsi, il était tout simplement impossible de songer ne serait-ce qu'à le raisonner. Ça tombait bien à vrai dire puisque ce n'était pas du tout dans mes intentions. La psychologie, ce n'était pas du tout mon truc. Mais alors pas du tout!

Le type se saisit d'un grand couteau accroché au mur, au milieu d'autres "outils chirurgicaux" soigneusement disposés de la même manière. Le tout pendant que Seishirō me signalait qu'il fallait faire attention avant de proposer un plan d'action. Ce dernier prendrait le flanc gauche, me laissant ainsi le côté droit. Il tenterait ensuite de libérer la malheureuse pour la mettre à l'abri.

- "Tu sauves la demoiselle en détresse c'est ça?" m'amusai-je malgré les circonstances. "T'as le bon rôle!"

Je plaisantais, évidemment! Et puis nous n'avions pas vraiment le temps de débattre sur le rôle que nous souhaitions respectivement endosser. D'autant plus que le taré n'allait vraisemblablement pas nous en laisser le temps. Je bondis donc à la suite de mon coéquipier le temps d'une mission pour l'épauler dans son assaut. Nous opposâmes la vitesse à la puissance, l'agilité à la force. Ce type ne semblait pas vraiment en mesure de nous atteindre tant ses mouvements étaient lents et disgracieux. Nous pouvions lire ses intentions avant même qu'il abatte ses coups. Néanmoins sa carrure et la chaire flasque qui le recouvrait semblait le rendre insensible à nos propres attaques. Il se contentait de les encaisser sans que cela semble avoir la moindre influence, ce qui était plutôt rageant au fond. À ce rythme le combat risquait de s'éterniser même si nous avions au moins l'avantage de pouvoir éviter les ripostes sans grands efforts.

Seishirō décida donc de porter assistance à la demoiselle, la détachant avant de la porter dans un coin de la salle d'opération improvisée. Ce qui énerva ce boucher qui poussa un long cri désapprobateur avant de tenter de charger le Kawaguchi, m'ignorant purement et simplement.

- "Nooooooooooon! Tu vas lui faire mal! Il faut que je la soigne, IL LE FAUT!!! Rends-là moi tout de suite! Elle est à moi!"

- "Pas si vite l'affreux!"

Je le saisis pas le col pour freiner sa course mais je fus emporté par l'élan du colosse sans être en mesure ne serait-ce que de le ralentir. J'allongeai donc mes jambes pour les caler contre le mur en face afin de m'en servir comme appui. Puis je tirai un grand coup en arrière et le psychopathe fut enfin bloqué dans son mouvement. Il se retourna vivement en brassant l'air de sa main armée et je ne dus ma survie qu'à un réflexe salvateur. Pour le coup j'avais réussi à l'énerver et il commença à s'acharner sur moi, continuant son ballet meurtrier avec l'efficacité inexistante dont il faisait preuve depuis le début de l'affrontement. Mais l'alcool émoussait également mes mouvements et avec l'absence de Seishirō, son attention était uniquement focalisée sur moi. Et ce qui devait arriver arriva: un coup de couteau me lacérer le torse et je reculai en titubant avant de me baisser pour éviter une seconde attaque qui s'écrasa contre le mur, soulevant une gerbe d'étincelles qui témoignait de la fureur de son assaut.

Je bondis ensuite à l'abri et portai une main à ma poitrine avant de lever une main ensanglantée devant mon visage sur lequel se lisait la surprise. Conscient que la moindre faute d'inattention pouvait me coûter la vie, je décidai de contre-attaquer avant d'être poussé à la défensive trop longtemps. Je pris mon élan et me laissa glisser sur le sol au moment où l'autre frappait le vide d'un mouvement horizontal. Je m'enroulai ensuite autours de lui comme un serpent en usant d'un jutsu propre à mon clan. J'allongeai mes bras et mes jambes autours de ses membres pour l'emprisonner et bloquer ses mouvements. Il se débattit évidemment avec force et véhémence mais ses tentatives furent vaines. Bloqué dans cette prison élastique, il ne put guère faire plus que s'agiter dans le vide. Je le laissai faire tout en faisant de mon mieux pour résister à cette pression titanesque afin qu'il se fatigue de lui-même. De longues minutes s'écoulèrent jusqu'à ce que finalement ses mouvements ralentisse et qu'il se mette à respirer avec l'élégance d'un chameau qui aurait galopé toute la journée dans le désert sous un soleil de plomb. Puis quand il fut à bout de force je me rétractai avant de lui écraser à de nombreuses reprises la tête contre le mur. Du sang commença à maculer la paroi puis un craquement sinistre témoigna que son nez venait de céder. Je frappai encore quelques coups pour m'assurer qu'il avait son compte avant de me dégager pour éviter d'être écrasé par sa chute sourde en arrière.

- "Peut-être que ça va lui remettre les idées en place!" fis-je faiblement, joignant mes mains à mes genoux en me penchant en avant.

Haletant, j'eus besoin de quelques instants pour reprendre mon souffle tout en pensant avec un faible sourire que la cigarette avait sérieusement réduit ma capacité pulmonaire. La suite fut bien plus agréable: nous trouvâmes une sortie qui donnait directement sur l'une des ruelles malfamées de Suna. Entrée par laquelle ce psychopathe devait faire passer ses victimes avant de les faire disparaître dans les égouts une fois ses sombres desseins terminés. Seishirō alla avertir des responsables de la sécurité pendant que je me soignais et gardais un œil - c'est le cas de le dire - sur la victime qui pour le coup semblait en état de choc. Tremblante, incapable de parler, elle se recroquevilla sur le sol. Et malgré mes tentatives pour la rassurer, elle ne décocha pas la moindre mot pendant toute la durée de notre attente. Elle allait avoir besoin d'un sérieux soutien psychologique, ça semblait aussi évident que compréhensible...

Lorsque la garde arriva et prit en charge la victime comme le bourreau - qui pour le coup allait certainement passer de longues années à l'ombre - on nous demanda d'éclaircir la situation. Je laissai le soin à mon partenaire de tout leur expliquer tandis que certaines soldats descendaient dans le couloir pour aller constater par eux-même l'ampleur de la folie de ce pseudo-médecin autoproclamé. Après quelques dizaines de minutes on nous libéra de cet interrogatoire et nous pûmes regagner l'air libre. Respirer à nouveau de l'oxygène pur nous fit le plus grand bien. Doux euphémisme...

- "Je vais aller faire soigner cette blessure correctement et prendre une bonne douche!" fis-je à l'attention de mon camarade. "On se retrouve en début de soirée au Heaven's Night, ça te va? Hé oui, je n'ai pas oublié que je te dois des verres mon pote!"

Laissant le soin à la garde de gérer ce problème de cadavres - après tout nous devions uniquement trouver l'origine de cette odeur - nous nous séparâmes pour aller chacun de notre côté. Le tout avec la satisfaction du devoir accompli. Il était maintenant temps de fêter cette victoire même si elle avait un goût amer...