Ouvrant les yeux dans un gémissement plaintifs, le jeune blondinet sursauta avant de se mettre rapidement en position assise. Désorienté, il paniqua seulement quelques secondes, en observant l’endroit où il était. Tout ici était semblable à une chambre, avec vu vers l’extérieur. Sans perdre un instant, Len reconnu rapidement l’endroit. Il était actuellement dans une des chambres de l’Hôpital du Shukaï, probablement à un étage que son Maître, Samui Kakeshuou avait réservé expressément pour lui.

Juste après avoir fait cette petite observation, quelqu’un toqua avant d'entrer. C’était une infirmière qui salua le Passeur, avant de se diriger vers sa perfusion, et de vérifié le tout. Sans poser de question, Len observais la fenêtre… Avait-il reçu des visites ? Avait-il eu une personne qui avait eu l’amabilité de s’inquiéter du devenir du petit blondinet ? Probablement pas. C’était pourquoi Len haïssaiT finir malade où même dépendant de quoi que ce soit. Cela lui rappelais au combiens il n’y avait personne, et au combiens il était seul.

Regardant par la fenêtre et évitant le regard de l’infirmière, il lui répondit que tout allait bien lorsqu’elle lui posa la question… Et même si il n’avait aucune envie de savoir la réponse, il fouilla dans l’esprit de l’infirmière, qui tenait le registre des visites de cette chambre. Son pouvoir lui permettait d’éviter tout ces mensonges et les tour autour du pots. Non, il avait la vérité à l’état brute. Et cette vérité fut la suivante : Personne.

Au final, il poussa un soupir désabusé, avant, de reporter, une énième fois, son regard vers l’extérieur. Sur des dizaines de milliers d’âmes vivants au Shukaï, aucune n’avait eu la préoccupation de venir voir l’état de santé du Passeur. Sur tout ces gens, aucune avait eu l’amabilité de venir le voir. Len serra ses poings contre la couverture, tout en grinçant des dents. Il s’interdisait a pleuré. Après tout, il avait eu tout ce qu’il avait toujours désiré. Une maison, un logement, le luxe, et l’argent. Il n’avait besoin de personne dans ce monde, et personne n’avait besoin de lui. Chacun chez soit, et c’était très bien comme ça.

Alors pourquoi les larmes coulaient sur ses joues ?

Quelle plaie ! Après le petit incident aux portes avec Arekushi, Yanosa et Len l’autre jour, Kakeshuou avait donné l’ordre à Aokiji d’emmener le Yamanaka à l’hôpital le plus proche. Il est vrai que le jeune garçon ne devait pas être au meilleur de sa forme. En plus d’être victime d’une vilaine grippe, il avait été harcelé par le Jisetsu puis assommé par le déserteur. Il en avait pris pour son grade, alors qu’à l’origine, il n’avait rien fait. Il fallait avouer qu’à certains moments, le Samui avait dû mal à le considéré comme un simple ado. Malgré ses talents, c’est ce qu’il était. Il ne fallait donc pas s’attendre à ce qu’il réagisse comme ces ainées à ce genre d’harcèlement moral. Aokiji en savait quelque chose. Il en avait été victime durant toute son enfance et également durant son horrible adolescence à Yuki no Kuni. Sur ce point, il pouvait donc comprendre les sentiments de Len.

C’est dans cet optique que l’officier de l’Oda décida donc d’aller rendre visite au passeur le jour d’après. Le soleil allait bientôt se coucher. Il aurait bien voulu venir plus tôt mais il avait bien entendu d’autres obligations. C’est donc en cette belle fin d’après-midi que le Samui se rendit à l’hôpital. Il n’avait pas l’habitude de ce genre de chose. Il n’était jamais allé au chevet de quiconque, du coup, il ne savait pas trop comment s’y prendre. Il y avait-il un protocole social particulier à appliquer dans ce genre de situation ? Devait-il apporter quelque chose à manger ? A boire ? Des fleurs ? Toutes ces questions s’entrechoquèrent dans l’esprit d’Aokiji, puis soudain, alors qu’il était en route vers le centre de soins, un objet posé sur le comptoir d’un commerçant attira son attention. Ce ferait un beau cadeau, histoire de ne pas venir les mains vides.

Une fois arrivé à l’hôpital, l’une des femmes du personnel soignant reconnu le Samui, étant venu la veille, et lui fit part immédiatement de l’état de Len.

« Ah c’est vous qui avez amené ce mignon petit garçon hier, c’est ça ? »
« Oui en effet. Comment va-t-il ? »
« Physiquement, il va de mieux en mieux. Il se rétablit petit à petit. Mais il a été triste toute la journée. »
« Ah bon ? »
« Oui. Vous êtes la première personne à venir lui rendre visite aujourd’hui. Il doit surement se sentir seul. »
« Je vois. Il est dans quelle chambre s’il vous plait ? »
« Celle au fond du couloir, sur votre gauche. »
« Merci beaucoup. »
« Il a de la chance d’avoir un grand frère attentionné comme vous. »
« Grand frère ?! Non, nous ne sommes pas frères ! »
« Ah vraiment ? Désolé, mais il faut avouer qu’il y a un petit air de famille, vous ne trouvez pas ? »
« Euh… »

Aokiji, gêné, ne répondit pas et se dirigea directement vers la chambre de Len. Un air de ressemblance ? Oui, c’est vrai ils avaient la même couleur de cheveux mais de là à les prendre pour des frères c’était un peu exagéré.

En moins d’une minute, le Samui arriva devant la porte entrouverte de la chambre. Le Yamanaka était allongé sur le lit, la tête tournée vers la fenêtre. En observant de plus près, Aokiji pouvait apercevoir de l’eau sur la joue du jeune garçon. Des larmes ? Etait-il si affecté par le fait que personne n’était venu le voir jusqu’à maintenant ou était-ce à cause d’autre chose ? Soudain, une pensée heurta le Samui. Où pouvait bien être la famille de Len ? Il n’en parlait jamais. L’officier de l’Oda commençait peu à peu à cerner le petit blondinet. Celui-ci qui lui avait été si désagréable lors de leur première rencontre, s’avérait avoir plus de points communs avec lui en fin de compte. Lui aussi s’était retrouvé coupé de sa famille au même âge. Il savait à quel point s’était difficile de vivre dans cette pesante solitude.
Aokiji frappa timidement à la porte puis fit son entrée.

« Bonjour gamin, c’est pas la forme à ce que je vois… »

Le Samui n’était pas très doué dans ce genre d’exercice, mais il s’efforçait tout de même à faire en sorte que cette situation ne soit pas trop embarrassante aussi bien Len que pour lui. Il prit une chaise et s’assit juste à côté du garçon.

« Tiens, je t’ai apporté quelque chose. Je ne sais pas si ça va te plaire, mais je me suis dit que tu devais surement t’ennuyer seul dans cette chambre. »

Fouillant dans la poche de son long manteau blanc, Aokiji sorti le cadeau qu’il avait acheté pour Len. Il s’agissait d’une figurine articulé représentant le héros à la mode chez les jeunes en ce moment. C’est du moins ce que le commerçant lui affirma. Fouillant encore un peu, il sortit également une bande dessiné relatant les aventures de ce justicier hors du commun. Les ados aimaient ce genre de chose non ? Il espérait sincèrement que tout cela allait lui plaire et que cela pourrait décocher un sourire au Yamanaka.

Len regardait vers la fenêtre, les larmes coulantes sur ses joues. Sans comprendre pourquoi, il avait beaucoup de mal à identifier le mal qui le rongeait. Était-ce le sentiment de solitude, où celui d'avoir perdu sa liberté ? Après tout, avant, il y avait une raison que personne ne vienne le voir. Il voyageait souvent et ne revenait jamais sur ses pas. Mais aujourd'hui ? C'était un citoyen sédentaire du Shukaï. Et malgré le fait que tout le monde ici pouvait savoir qu'il se trouvait là, tout le monde s'en fichait.

Ou presque. Quand on toqua à la porte, Len eu comme réflexe d'essuyer ses larmes, tandis que son interlocuteur lui parlait. Sans même l'avoir regardé, Len reconnaissait cette voix d'entre mille. Aokiji ! Son coéquipier tout aussi blond que lui dans l'équipe ! Alors il était venu ? Mais... Pourquoi ? Il n'avait rien à gagner... Alors pourquoi était-il venu ? Aucune réponse n'était évidente pour Len. Sans perdre un instant, il releva la tête, affichant un léger sourire. Il n'avait même plus la force de faire semblant.

« Si si... Je vais bien, je t'assure. »

Mais la suite de la phrase d'Aokiji eu l'effet d'une bombe, détruisant, une bonne fois pour toute, le masque protecteur de Len. Tout ce qu'il avait retenu de la phrase, c'était le mot "seul". Alors qu'Aokiji offrait de gentils présents au blondinet, celui-ci se mit soudainement à se recroqueviller sur lui-même. Encore une fois, la vérité sur sa solitude par un simple mot avait, encore et toujours, cet effet virulent sur son humeur. Sans avoir la possibilité de se tenir, les larmes revinrent encore de plus belle...

Il pensait. À ce qu'il avait vu, à ce qu'il avait subi, et à ceux qu'il avait connus. En soit, trois choses confirmant une seule et unique vision : la cruauté. Il se souvenait encore des souvenirs d'Arekushi, mangeant un cœur humain, et éradiquant des vies sans aucune pitié. Il pouvait encore avoir la texture en bouche, le goût et l'odeur. Il se souvenait encore des multiples abandons qu'il avait commis, et du refus de lui donner a mangé alors qu'il était seul.

Oui, c'est de cette cruauté sans égale que l'on appelle "vérité" que Len souffrait. Si certains avaient la chance de vivre dans le doux mensonge, ce n'était pas son cas. Toujours d'une voix brisée, il demanda à Aokiji...

« Pourquoi le monde est si cruel ? Je ne vous ai rien fait... Alors pourquoi êtes-vous comme ça ? »

La réponse du garçon était à peine crédible. Il n’allait pas bien, c’était évident. Au-delà de l’aspect physique, il semblait avoir pris un gros coup au moral. Du moins, c’est l’impression qu’eut Aokiji. Celle-ci s’accentua lorsque Len ne put contenir ses larmes face aux présents du jeune homme. Sur le coup, le Samui ne comprit pas réellement la raison d’une telle réaction. Pleurait-il de joie ? Les cadeaux lui avaient-il plu à ce point ? Peu probable. Alors que le petit Yamanaka s’était recroquevillé sur lui-même, Aokiji était assis là, immobile, silencieux, regardant d’un air gêné le patient. Ce n’était pas son style de consoler les gens, il ne savait tout simplement pas comment faire.

Finalement, Len brisa le silence embarrassant qui commençait à s’installer et lui posa l’une de ses questions qui n’avait ni bonne ou mauvaise réponse.

« Euh… »

Que pouvait-il bien lui répondre ? C’était aux parents de soulager les enfants de ce genre d’interrogations. Il essayait tant bien que mal de détourner le regard mais il ne pouvait pas rester silencieux bien longtemps. De plus, il pouvait se retrouver dans la tristesse du blondinet.

« Ecoute. Sache que la cruauté dans laquelle nous vivons n’a aucune limite. Si tu t’apitoies sur ton sort, tu te retrouveras très vite aspiré par les âmes malveillantes de notre monde. Tu dois te montrer fort Len. Tu as un potentiel énorme. Je suis persuadé que tu as un avenir brillant devant toi.»

Aokiji marqua un temps d’arrêt pour regarder le jeune garçon qui écoutait attentivement ses paroles. Tout ce qu’il était en train de dire, il dut l’apprendre par lui-même. Il n’avait pas de mère, de père ou de grand frère durant son adolescence pour lui dire tout ça.

« Moi aussi à ton âge j’étais un faible, une victime. Si j’avais gardé cet état d’esprit, je serais surement toujours coincé à Yuki no Kuni à servir de patrouilleur. Alors qu’aujourd’hui j’ai beaucoup plus confiance en moi, j’ai des amis, des ambitions. Donc garde la tête haute. Ne laisse personne te sous-estimer ou te rabaisser. Tu n’es plus seul Len… »

Le Samui sous-entendait qu’à partir de maintenant, il serait là pour lui. Il ne voulait pas que le Yamanaka grandisse avec toute tristesse. S’il pouvait éviter un tel calvaire à quelqu’un, il le ferait volontiers.

Il pleurait. Il était là, sans défense. Depuis toujours, on le détestait... Et pourtant, il souhaitait l'amour. Un paradoxe étrange, que seul l'argent lui avait offert un peu de répit. C'était pour ça, qu'il dérobait tout Ryos qu'ils pouvaient aux autres. Mais personne ne prenait le temps de le comprendre...

Il était là, pleurant sans limites. Son petit coeur acculé et à bout, devant ce qui semblait être son Grand-frère de fortune. Il l'écoutait, entre deux sanglots. Mais il ne s'apitoyait pas sur son sort... Ou peut-être un peu ? Il n'en savait rien. Il voulait juste vivre heureux, et aimé, c'était probablement son vœu le plus cher. Et, en tant qu'orphelin, le seul moyen qu'il avait trouvé d'attirer l'attention était de faire des bêtises, ou le vol.

C'était de cette carapace, grâce à son pouvoir, qu'il s'était lui-même faite, qui lui permettait d'être dans la position qu'il était actuellement. Le Passeur du Shukai... N'était-ce pas une position confortable. Il le croyait, avant qu'il ne rencontre ce... Arekushi. Il le détestait. C'était la première fois qu'il ressentait une haine aussi grande, aussi puissante, aussi encombrante. Cette même haine qui lui dictait de le réduire en miette. Il le ferait, aujourd'hui, il se l'était juré...

Mais il était trop faible encore... Il écoutait son frangin, avant de se blottir contre lui. Il déversait des torrents de larmes... Oui, c'était la première fois que quelqu'un verrait le Passeur du Shukai dans un aussi piteux état psychologique. Entre deux sanglots, il fit promettre à Aokiji...

« Ne m'abandonne pas toi ! Ne m'abandonne jamais ! »

Il serra de toutes ses forces de petit chat son grand-frère, avant de fermer les yeux et de se calmer... Et il s'endormit très rapidement dans ce qui allait être le début d'une amitié fraternelle incroyablement forte.