On passe notre vie entière à s’inquiéter de l’avenir, à faire des projets pour l’avenir, à essayer de prédire l’avenir... Comme si savoir à l’avance pouvait amortir le choc. Mais l’avenir change constamment. L’avenir est le lieu de nos plus grandes peurs, et de nos espoirs les plus fous. Mais une chose est sûre : quand finalement, il se dévoile... l’avenir, n’est jamais comme on l’avait imaginé. Et malheureusement parfois il cache derrière des tas de problèmes, de douleurs et de choses monstrueuses qu'on ne voudrait supporter. Pourtant il est bien là, et il faut le supporter et l'accepter sans contrainte, car plus tu le fera, plus tu souffrira. Un avenir dur, qui continu dans le temps en te regardant droit dans les yeux. Un temps qui part en continuant sa route, oui le temps part.

Ce temps, on ne peut l'arrêter. Ce temps qui découle au fil des horloges et de chaque instant que nous passons. Arrivez-vous à vous souvenir de chaque instant que vous avez vécu ? Non, bien sûr que non, cela est bien trop impossible pour des humains dit « normaux ». Comme si, à cette date, de cette heure, de cette minute et de cette seconde on arrivait à savoir exactement quel mouvement nous avions, de quoi nous avions discuter. Le temps d'avant était le temps d'avant et il le restera bien longtemps encore. Seul Chronos serait capable de réparer les trous qui nous manque.

Alors faut-il que je me souvienne de qui je suis et de qui j'étais ? Devais-je me souvenir de l'allégeance suprême que j'avais fait envers Yoru et Yuka ? Devais-je oublier mon ancien grade, ignorer mon épée ? Non, certes le passé est bien passé. Mais les formules magiques que nous apprenons quand nous sommes gosses, dans l'espoir de voir un lapin sortir, personnes ne les oublie. Et même parfois, on les note dans un petit carnet qu'on appelle notre Grimoire. Cette innocence que nous avions nous la perdions en combat, quand la mort s'offrait à nous et qu'elle nous souriait doucement.

L'ai-je côtoyée et m'a-t-elle appelé ? Bien sûr. « Mon ami » quand elle s'adressait à moi. « Te rappelles-tu de tout cela ? » quand elle continuait les conversations. Mais je l'ai oublié elle aussi. Je lui ai dis au revoir et je l'ai éloignée de moi. J'avais bien trop peur de devenir son serviteur. À quoi bon devoir devenir la marionnette d'un jeu aussi perfide qu'est celui de la mort ou de la vie ? Je ne suis rien et pourtant je suis tout. Je suis partis de ma ridicule histoire pour intervenir face aux plus grands protagonistes qui aujourd'hui ne sont plus là.

Était-ce le destin ou la chance qui avait choisis de me laisser en vie, sur mes deux jambes ? J'aurais pu être blessé ou encore martyrisé, mais rien de tout cela n'est arrivé. Non rien du tout. Les seuls changements qui sont parvenus à ma personne sont ceux de ma puissance oubliée et de ma personne. Encore aujourd'hui le diable joue avec moi. Et même si mes oreilles elfiques sont la preuve d'être un garçon capable d'entendre les messages divins, je doute de moi. Ma conviction et mes connaissances se maigrissent. Le temps et le monde étant toujours en plein changement, moi aussi je dois aussi changer.

Pourquoi alors mes oreilles elfiques avaient disparues du jour au lendemain ? Me disaient-ils que je ne méritais plus mon grade de messager divin ? Bien sûr.

J'étais ce guerrier de l'effroi, ce prince déchu après tant de guerres. Et cette histoire devait continuer de vivre. Si j'étais ce prince, je me devais de reprendre la couronne et devenir un Roi, non ? Et au fur que le temps passait, ces quelque secondes dont j'avais parlé, mon reflet dans l'eau changeait. Il n'y avait rien de spécial, je garde toujours cette tête. Mais mes pupilles se dilataient. Mes yeux me brûlaient de plus en plus jusqu'à en mettre mes mains dessus pour essayer de calmer cette douloure.

Mais quand je les rouvris, c'était avec des pupilles vertes émeraudes que je me regardais.

Tiens, ce reflet de moi était pourtant si pure et bien claire. Pourquoi alors que j'étais dans le trouble le plus total mon visage semblait si optimiste ? Un signe qu'au final tout allait bien dans le meilleur des mondes ? Mais il n'était pas nécessaire de se voiler la face, Tatsuô. Si je devais affronter mes démons et mes craintes, je le ferais sans problèmes. Étais-je encore le jugement de certaines sphères inatteignables ? Des gens jouant avec moi comme ils pourraient le faire avec de simple poupées. Cela ne me plaisait pas, bien sûr que non. En quoi devais-je devenir le loisir de personnes qui m'étaient sois-disant « supérieures » ou encore « intouchables » ?

Puis c'est au fur et à mesure que je poussais ma réflexion à son paroxysme que je me rendais compte que mon reflet se ternissais. Il devenait quelqu'un d'autre, tant pour les formes que pour les couleurs. Oui il ressemblait à un visage qui m'était bien plus familier qu'autre chose : celui de Yusuke. À la vue de son visage moqueur et joueur je jetais un caillou dans l'eau pour troubler cette vision d'horreur. Toi qui m'a abandonné, toi qui m'a pris pour ta simple marionnette, tu reviens aujourd'hui, quelques jours seulement après, pour rire de ma condition ?

Mais étais-tu le clown ou le persécuteur ? Celui qui rit ou qui fait rire ? Tu te moquais de moi malgré la distance qui nous séparait ! Mais où étais-tu ?! Pourquoi m'avoir laissé seul derrière tout ! Moi, ton soi-disant élève et la personne sois disant de confiance ! Non je ne suis rien de tout ça. Maintenant je ne suis qu'un simple pion de ton échiquier ! Mais non, cela est bien fini. Si aujourd'hui tu m'as conduit au Shukaï, c'est peut-être pour que je trouve ma véritable voie. Mais ça, tu ne l'as pas fait exprès, non loin delà même.

Ainsi je me levais, une colère noire, oui c'était ça. Une colère désinvolte, le peuple se levant contre son oppression et sa condition. Devenais-je la représentation même de la liberté et de ce royaume libre ? Sûrement et d'ailleurs, j'étais après tout moi aussi libre. Plus personne n'était mes chaînes qui m'attachaient encore au lourd poids de la culpabilité. J'étais devenu un autre, une personne peut-être plus mature mais surtout bien plus puissante. Oui, ce que cachait toutes ces pensées songeuses était ce que je cherchais depuis toujours..

Ainsi, face à l'étang, je jetais mes clés dorées qui m'avaient permis de remplacer la force qui me manquait. Elles brillaient une à une, chacune me remerciaient de les avoir chercher pour les réunir mais surtout de les avoir utiliser comme un bon maître. Oui, j'étais fier et heureux d'avoir permis à quelques esprits et démons de goûté une dernière fois au « bonheur » du combat. Mais qui sait, un jour, une personne entendra parler de la légende des 12 clés d'or et se mettra à leur recherche. Sauf que cette fois-ci, elles seront toutes réunies au même endroit.

Je regardais ma main, oui les marques avaient disparues. Je n'étais donc plus le propriétaire du zodiaque. J'étais aussi libéré de ce poids. Et dans un dernier mouvement, j'essayais d'attraper la lumière comme pour l'arracher. Une nouvelle vie commençait pour moi. Je pouvais oublier passé et histoire. Mais ce que j'avais avec moi était quelque chose de bien plus grand et de bien plus puissant. Je marchais alors vers l'horizon, sans le but concret de tomber sur un village. Les couleurs du ciel se mélangeaient à ma peau et à mon corps tout entier.

Je devenais un sorte de spectre lumineux. Et quand toute cette lumière partit...

C'est avec une armure noire et deux grandes épées dans chaque mains que je marchais vers mon destin.