(Je situe ça y'a un an et demi)

Un jour entre printemps et été, frontière des saisons, le temps n'en était pas moins mauvais. La pluie, des gouttelettes par centaines, jouait une symphonie bien étrange sur les feuilles des arbres. Ce n'était pas le déluge, pourtant déjà les gens refusaient de mettre le nez dehors, préférant la chaleur sèche du foyer à cette douce humidité. Cela les regardait s'ils voulaient rester coincer entre quatre murs, mais les idées viennent à ceux qui voient le monde. Et Raki le voyait.

Certes, ses vêtements étaient trempés. Ses cheveux aussi. Sa peau par la même occasion. Mais à quoi bon s'en plaindre ? Cela n'avait rien de désagréable, on subissait pire quand on se douchait. La majorité des gens ne devaient donc pas se laver très souvent. Cela en disait long sur l'hygiène des Konohajins, mais il valait sans doute mieux taire cette pensée.

Si les autres ne voulaient pas profiter, alors une seule solution se présentait à lui : profiter pour tous ceux qui ne le faisaient pas. C'était certainement un peu trop pour lui seul, mais après tout, cela ne l'empêcherai pas de dormir. Son objectif du jour était simple : trouver encore plus d'eau. Cela n'était pas particulièrement difficile, on en trouvait partout, surtout en pleine mer. Là, on ne trouvait que ça. Mais il préférait éviter d'aller au bout du monde pour s'amuser.

Sa destination lui apparut rapidement : les cascades du pays du feu. Un paysage magnifique, mais généralement trop peuplé pour pouvoir l'apprécier. Enfin « trop », tout était relatif, cela n'avait rien à voir avec le centre ville. Toutefois, lorsque l'on cherchait un peu de paix et que l'on se retrouvait avec des gens -nommé alors parasites- cela n'avait rien d'agréable. Raki voulait se baigner, s'amuser avec son chakra, se poser contre un arbre et écouter le « silence ». Parfois cela pouvait sembler bizarre, mais il y avait tellement de mouvement dans sa tête qu'une telle paix paraissait idyllique.

Cette fois cependant, tout semblait calme. Sa dernière activité l'avait lessivé à tel point que même penser à une autre lui aurait coûté cher. Il voyait ça comme une journée de repos, chose rare. Peut-être unique dans une année. Dommage qu'il ne fasse pas beau pour ça. Enfin, tant mieux pour lui. Après tout, ses pauvres fourmis auraient souffert si l'expérience avait continué. L'inconvénient majeur était que maintenant il devait réussir à les faire sortir de son chez-lui pour les rendre à la nature. Ces petites bêtes avaient monté une rébellion contre lui, pas si bêtes ces petites bébêtes.

Enfin, avec la pluie, aucun insecte quel qu'il soit ne viendrait l'embêter le temps qu'il trouve une idée. L'insecticide n'était évidemment pas une option à ses yeux.

Raki arriva à destination après une petite marche assez longue. Oui, il fallait montrer la relativité de tout cela. Longue pour lui, petite pour le monde. La téléportation serait à coup sûr le prochain sujet de recherche auquel il s'intéresserait. En tout cas, s'il avait l'occasion de s'en souvenir parmi les centaines d'autres sujets qui l'attendaient impatiemment.

Les chutes lui semblèrent tout simplement magnifiques. On faisait rarement un aussi beau spectacle qu'un paysage sous la pluie avec un ciel clair. Il y avait de fortes chances qu'un arc-en-ciel finisse par naître de ce temps. Les cascades devaient faire plus de bruit en temps normal, mais la pluie y changeait beaucoup. Sincèrement, cela le fascinait la façon dont la météo changeait totalement sa vision des choses.

Un instant, le jeune homme se figea au bord de l'eau. Il était déjà trempé, retirer ses vêtements pour se baigner lui semblait complètement obsolète. Il avait une soudaine envie de marcher sur l'eau pour se laisser tomber au milieu. Très sincèrement, cela n'avait aucun intérêt, juste une petite folie, sur le coup, sans grande importance.

En se dirigeant vers me centre approximatif des magnifiques chutes d'eau, Raki se surprit à improviser quelques pas de danse. Cette nature, et ce silence humain lui plaisait. La nature semblait guider chacun de ses pas d'une main experte. En véritable virtuose elle imposait son rythme et son style. Quel plaisir, que de simplement suivre, pour finir par s'abandonner, et s'enfoncer tout entier dans une frais liquide aux reflets divers.

Toutes les gouttes d'eau qui heurtaient la surface sous laquelle il se trouvait, ils les entendaient. Il les appréciait. S'il avait pu rester indéfiniment sous l'eau, Raki l'aurait sans doute fait.

L'eau ressemblait à un cocon. On s'y sentait bien, à l'aide, en sécurité. Il avait arrêté de faire circuler son chakra quand il en avait eu marre de tournoyer sans but. Et puis c'était fatiguant de bouger tremper. Les habits devenaient bien plus lourds, et il en avait marre de résister à la gravité. Sous l'eau, tout semblait bien plus léger. Il flottait, et ses vêtements avec lui. Cela lui semblait agréable d'être un poisson, pouvoir nager librement. Les oiseaux eux volaient librement. Techniquement, cela revenait presque au même. Mais pour l'instant il voulait être un poisson. Au moins, il aurait pu respirer. Car là, il se sentait déjà devenir violet.

Quelques bulles sortirent de sa bouche. Cela ne prendrait plus longtemps avant qu'il ne soit forcé de sortir la tête de l'eau. Sincèrement, c'était énervant. Ces petits moments de paix, où rien ne l'embêtait. Pas de pensées inutiles, pas de gens exaspérants, pas d'expériences ratées. Non, juste lui, en apesanteur, tranquillement plongé dans l'eau. Et là, ce moment devait finir car humainement, il ne pouvait pas aller plus loin. Son corps lui rappelait rapidement et impitoyablement ses limites.

Recrachant tout l'air de ses poumons, le jeune homme refit surface. Une longue inspiration fut nécessaire pour les remplir à nouveau. Essoufflé, il restait là, à la surface de l'eau. Les vagues créées par la chute d'eau le berçait lentement. Son corps bougeait tout seul. A un moment ou à un autre, il faudrait bien se relever et faire quelque chose. Cela semblait excessivement difficile en cet instant. Même s'il le voulait, Raki devait bien faire vingt kilos de plus tout mouiller. Soulever toute cette masse ressemblait à un prodige pour l'instant. Certes, en temps normal, soulever vingt kilos de plus semblait être une blague. On ne s'entraînait pas pour rien. Mais pour l'instant, Ses muscles semblaient tellement détendu que rien ne marcherait. Même bouger son petit doigt lui semblait trop difficile.

Il lui sembla dériver pendant des heures, en réalité cela ne prit que quelques petites minutes. Son corps s'engourdissait un peu plus à chaque instant. Rester immobile plus longtemps ne lui disait vraiment rien. Levant une main, il la posa sur la surface de l'eau. L'autre suivit. Puis il se hissa, comme sur un mur de pierre. L'avantage de savoir maîtrisé son chakra dira-t-on. Enfin accroupi, Raki ne savait pas encore quoi faire. Déjà, se redresser. Cette action lui rappela à quel point l'eau pouvait être lourde.

Par contre, la seule chose à laquelle il ne s'attendait pas était là. Le jeune homme en resta stupéfait un instant, croyant à une quelconque hallucination due au manque d’oxygène. Il cligna des yeux plusieurs fois, mais non. Son hallucination ne disparaissait pas. Une personne. Une personne était là elle aussi par un jour à ne pas laisser sortir un chien. Comment était-ce seulement possible qu'un autre fou vienne ici ? En plus ce type le regardait. Chacun regardait l'autre.

Lentement Raki s'avança vers l'étranger, se demandant toujours s'il ne s'agissait pas d'un hallucination. C'était assez difficile à croire pour lui, il avait vraiment eu l'impression d'être seul jusqu'à maintenant. Peut-être devrait-il apprendre à détecter les ennemis avant de se faire trancher la gorge par mégarde.

En arrivant près de l'étranger, Raki s'accroupit et le dévisagea encore plus intensément. Il n'y avait qu'un moyen de savoir s'il était réel ou pas. Pinçant ses joues, chacune dans une main, Raki tira. Pas très fort, évidemment. Juste assez pour avoir envie d'éclater de rire en voyant la tête de l'autre.

« Ah ben non, t'es pas une hallucination. Qu'est-ce que tu fais là alors qu'il pleut ? »

Raki lui tapotait gentiment la tête, un sourire accroché aux lèvres. La situation semblait pour le moins étrange. Ce n'était pas la première fois qu'on l'aurait vu faire des choses étranges, mais Raki se demandait quand même depuis combien de temps ce type se trouvait là. Étant donné que lui-même n'avait pas d'armes, il ne voyait aucune raison de prouver qu'il n'avait aucune mauvaise intention. Ce serait même trop fatiguant à son goût.

« Tu t'appelles comment ? »

Devant cette personne, Raki ne savait pas vraiment quoi faire. Jusqu'à ce qu'il lui tirât les joues, il était intimement persuadé d'avoir affaire à un songe. Aucune personne saine d'esprit ne viendrait aussi loin d'un quelconque village par un temps pareil sans raison. Bien évidemment, lui-même n'avait rien d'une personne saine d'esprit. Il n'était pas fou, mais ses petites habitudes faisaient que l'on ne pouvait pas le considérer comme mentalement disposé à vivre correctement en société. Rien que le fait qu'il choisît de vérifier la tangibilité du corps de l'autre en tirant ses joues montrait son état d'esprit.

Un enfant plus qu'un adulte, le jeune homme s'amusait réellement d'un rien. En l’occurrence ce rien était la personne qui lui faisait face. Un gringalet. On avait l'impression de le casser avec un coup de poing. Des cheveux longs, et d'un couleur assez originale, des yeux noirs. Sincèrement, Raki voulait le jeter à l'eau. La raison ? Il n'y en avait pas. Une pulsion comme ça. La pauvre chose était totalement crispée. L'embarra sans doute. Mais qui d'eux deux devait se sentir le plus gêné ? Après tout, c'était lui que l'on observait, et pas l'inverse. Une désagréable impression de déjà-vu qui le fit frissonner.

« Ye chui en train de m'enchrainer. Moi ché Yuri et chtoi ? »

Enchaîner ? Entraîner ? La différence était assez difficile à faire. Mais bon, vu qu'il n'avait pas l'air d'un douteux sadomasochiste, on pouvait pencher facilement pour l'entraînement. Qui plus est, aucune chaîne ne traînait sur le sol. Un indice important, même si Raki le reléguait au second plan.

Un entraînement, hein ? Quelle drôle d'idée. Ce type aurait pu s'entraîner ailleurs, et bien au chaud. A la place, il venait dans un coin reculé, sans personne pour l'assister ou le secourir. Il aurait pu s'ouvrir le crâne et décéder stupidement. Les ninjas... passer leur vie à faire des missions, à suivre des ordres. Décidément, cela sonnait tristement faux. Un entraînement ne pouvait pas porter ses fruits si l'on ne pouvait pas en revenir. A quoi bon faire une mission et la réussir s'il fallait pour cela mourir ? Ce type, avait-il la résolution ? Avait-il une bonne raison ? Pourquoi se battait-il ? A quoi cela l'avançait ?

« Pourquoi est-ce que tu t'entraînais ? »

Le jeune homme avait un peu perdu de sa splendeur. Son sourire et son amusement laissaient place à autre chose. Des doutes sur cet inconnu qui répondait au nom de Yuri. Quelles obscures motivations pouvaient bien être né dans son cœur ? Avait-il seulement encore quelque chose d'humain ? Raki n'en était pas très sûr. Il avait perdu foi en ses alliés et en ses ennemis. Ce n'était pas une question de confiance. Une chose pareille ne s'acquiert pas aisément, et avec du temps seulement. Non, c'était plus profond et important à ses yeux. Une question de valeurs, d'idéaux. Si son village ne partageait pas son opinion, cela lui posait un très sérieux problème de confiance. Comment faire une mission si les gens retournent leurs vestes en lâches traîtres qu'ils étaient ? Pourquoi ne pouvaient-ils pas simplement se montrer humain de temps à autre ?

Ce type devait être comme les autres. Il n'y avait aucune raison d'espérer plus.

Ils allaient tomber malade à s'amuser sous la pluie de la sorte. Enfin, l'amusement était vraiment restreint, voire inexistant. On trouvait mieux, peut-être que sauter du haut des chutes seraient mieux. Quelques petites sensations fortes. Cela serait par contre difficile de remonter à la surface. Le courant le pousserait au fond, il ne pourrait pas ressortir. Avec un peu de chance, on retrouverait son corps quelques mois après. Dans le pire des cas, il serait décomposé et dispersé, coulant paisiblement jusqu'à la mer. Il s'évaporerait, reviendrait sous forme de pluie. Ce serait génial de vivre la vie d'une goutte d'eau, pouvoir s'enfoncer dans la terre, geler pendant un millénaire avant de continuer son petit chemin.

De l'eau, il y en avait assez pour ne pas vouloir en rajouter. Ils dégoulinaient. Les personnes saines d'esprit avaient bien fait de rester tranquillement à la maison. Le lieu appartenait désormais aux audacieux. Des gens qui n'avaient pas froid un yeux, mais un peu au reste du corps.

Alors que Raki s'amusait tranquillement à tirer les joues du dénommé Yuri, quelque chose le toucha délicatement sur l'épaule. Le battement d'un oiseau s'enfuyait au loin. Il n'avait quand même pas osé ? Pas ça, pas maintenant, pas ici !

Eh bien, si. Il fallait croire que les oiseaux avaient plus de faciliter à chier sur les gens que les gens à se faire chier. Ce n'était pas non plus à mourir, ce n'était que des déjections corporelles comme les autres. Raki avait vu pire. Cela ne rendait pas ce caca appétissant pour autant. Relâchant sa prise sur les joues de sa victime, le jeune homme ne pensait même plus à l'autre. Après tout, il se pouvait que la peau ne puisse déjà plus se retendre comme avant, et qu'elle pende de chaque côté de la mâchoire. Cela donnerait une touche originale à l'apparence un peu efféminée de son interlocuteur.

« Bah... L'entraînement peut servir à ça par exemple, éviter les merdes qui tombent du ciel. Je vois que toi tu ne t'es pas suffisamment entraîner. Je ne prétends pas pouvoir esquiver à chaque fois, mais ceci n'empêche que ça me donne un petit avantage. »

De la moquerie ? Cela ne risquait pas de toucher Raki. Ça l'amusait surtout. Un coin de sa bouche remonta en quittant des yeux la merde qu'il s'était prise. C'est sûr qu'il aurait du être un peu plus attentif aux alentours au lieu de s'amuser comme un gamin. Il pouvait bien accorder un point à son adversaire.

« Touché. »

Son manque d'entraînement venait surtout du fait qu'il n'avait pas de temps à perdre à s'entraîner pour des futilités. Il y avait bien d'autres choses à faire plus importantes que d'améliorer sa dernière technique de boule de feu. Les techniques médicales demandaient beaucoup de temps et de concentration. Tout le temps qu'il passait à les améliorer pouvait sauver des vies, même si cela ne l'aidait pas vraiment à devenir paranoïaque.

« Et toi comment t'appelles-tu ? D’où viens-tu ? »

D'où venait-il ? C'était plutôt où il allait qui le préoccupait. Cette question était un véritable mystère pour l'instant, et l'élucider était une priorité.

« Raki, Konoha. »

Plus minime, il n'y avait certainement pas. Après tout, il s'était accroupi au bord de l'eau, et rinçait son épaule. L'ambiance était plutôt décontractée. Ils n'avaient pas encore essayé de s'entre-tuer, un bon signe selon Raki.

S'abriter n'était sans doute pas une mauvaise idée, à ce rythme, il allait finir coincé au lit pendant quelque chose. Yuri bien entendu, Raki ne tombait pas malade. C'était la maladie qui lui tombait dessus, et vu qu'il n'aimait pas trop qu'on lui tombe dessus sans prévenir, il la plaquait au sol, avancer de la clouer à une planche. Il l'affichait ensuite sur un mur, où il la faisait lentement griller avec une lampe. Elle crachait tous ses secrets, avant de finir tué par un quelconque agent secret que son cerveau envoyait dans son sang la tuer.

Assis dans une petite grotte Raki s'ébroua un peu, histoire de perdre une vingtaine de kilos en trop. Ses habits ne faisaient pas qu coller à sa peau, il la compressait tellement ils étaient chargés.

« Je crois que ça va durer un petit moment encore. »

Frissonnant un petit coup, Raki jugea bon d'allumer un petit feu. Enfin, cela correspondait surtout à faire apparaître des flammes sur ses mains, car il n'y avait pas de bois dans la grotte, et dehors, tout serait humide. Il était inutile d'essayer d'en trouver.

Cela lui donnait une position assez étrange, en tailleur, penché en avant pour poser ses coudes, et ses mains tendues. Les flammes crépitaient délicatement au creux de ses paumes. Ce n'était pas un feu de joie, mais il santait déjà son visage se réchauffer, provoquant un nouveau frisson dans son dos. La lumière qui s'en dégageait l'hypnotisait. Elle se reflétait légèrement sur les parois, faisant danser leurs ombres avec élégance. Il avait soudain l'impression qu'il faisait nuit à l'extérieur tellement la luminosité était différente.

« Je peux pas vraiment faire mieux dans l'état actuel des choses. Alors dis-moi, pendant qu'on est coincé ici, est-ce que tu aimes les sucettes ? »

Raki coupa l'allumage d'une de ses mains pour l'amener vers son pantalon. Fouillant dans une poche, il en retira deux sucettes avant d'en lancer une à l'autre. Enfonçant la sienne dans un recoin de sa bouche, il continua sa petite discussion totalement décontracté.

« Si on avait des Marshmallow, ce serait mieux, mais j'avais pas pensé à faire un feu de joie aujourd'hui.

L'ambiance était légèrement dérangeante. Seuls, dans une grotte, dans une obscurité naissante, trempés jusqu'aux os, grelottant presque quand un courrait d'air s'engouffrait dans leur refuge. Raki était habitué aux situations qui laissaient les autres dans l'inconfort. Toutefois, en ce cas précis, il ne savait pas quoi dire ou quoi faire. D'habitude, il aurait marché, ou trouvé une quelconque action physique à faire pour briser l'immobilité générale.

En ce cas précis, il devait rester dans une position étrange pour partager son feu. Il pouvait se la jouer égoïste comme un gamin : « non c'est mon feu ! » et partir de l'autre côté de la grotte. Enfin, il n'y avait pas non plus un espace infini. Il finirait par être pris dans un recoin si Yuri décidait de le suivre. Et en plus, aucune raison ne lui venait à l'esprit pour justifier un comportement pareil.

Le silence, bien que gênant, pouvait être agréable. Ils partageaient ensemble un moment de paix, en toute sérénité, comme deux voyageurs perdus. Chacun finirait par reprendre sa route lorsque la tempête serait levée. Comment qualifier ce qu'ils auraient vécus ? Un grand rien en attendant que la lumière se montre ?

Apparemment, ce serait difficile. Raki ne saurait dire ses ses yeux voyaient très sombre à cause de ses flammes, ou parce qu'il commençait vraiment à faire nuit. En tout cas, on approchait sans aucun doute du soir.

L'autre accepta la sucette sans broncher. A vrai dire, Raki aurait préféré la garder en cas d'urgence. Enfin, il en avait encore une dizaine, mais pour une nuit, cela ne suffirait pas. Au plus deux heures. A ce point là, l'économie d'une sucette importait. Pourvu que les secours fassent vite.

Les secours ? Quels secours ? Étaient-ils en danger ? Raki délirait déjà. Il sentait l'angoisse monter. Rien que l'idée de ne plus avoir de sucette le torturait.

L'autre paraissait plus calme. Évidemment, il n'y avait aucune raison de paniquer lorsque l'on était pas un trou à sucettes. Il plaqua ses mains, t après quelques instants, ils avaient un mini-bûcher à enflammer. Cette capacité était suffisamment connue pour que lui-même connaisse le nom et tout ce qui allait avec par cœur. Un Hayashi.

Dans cette situation, c'était aussi surprenant qu'utile. C'était vraiment une bonne combinaison. L'un fournissait les flammes, tandis que l'autre l'alimentait. Si seulement Yuri pouvait l'alimenter en sucettes et non en bois, cette épisode serait tout à fait agréable.

Un vrai feu était bien plus impressionnant. Surtout parce qu'on pouvait éviter de se cramer les cheveux en même temps.

« Et donc, que fais-tu ici dans cet endroit isolé ? Par quel vent t'amène si loin de chez toi et sous un temps si exécrable ? »

Raki n'était pas certain de pouvoir donner la réponse sans passer pour un fou. Mais d'un autre côté, l'autre aussi était dehors par ce temps. Entre fous, ils devaient pouvoir se comprendre et éviter les jugements trop hâtifs. Cédant à la tentation, il confia à l'oreille qu'il espérait discrète.

« Je suis juste venu parce que j'avais envie de me baigner tranquillement. Je pensais qu'il n'y aurait personne vu le temps qu'il fait. »

Un sourire gêné au coin des lèvres, il espérait ne pas trop faire peur à l'autre. Après tout, ce serait dommage qu'il parte sous la pluie et se rende malade à cause de lui.

« Et toi, tu viens ici pour la vue ou pour t'entraîner ? Je pensais qu'un Hayashi s'entraînerait avec le reste de son clan et pas en solitaire dans un coin aussi reculé. »

Raki avait parlé sans trop réfléchir, juste pour briser la glace. Jusqu'à ce qu'il se rende compte de sa bêtise. Si Yuri avait de mauvaises relations au sein de son propre clan, l'ambiance en pâtirait. Essayant de sa rattraper, il ajouta précipitamment, ne laissant pas à l'autre le temps de répondre.

« Enfin, c'est bien de s'entraîner seul aussi, on progresse et on personnalise le tout. En plus, on gêne personne normalement. »

C'était complètement raté, et Raki se grattait nerveusement derrière la tête, embarrassé. La lourdeur de ses vêtements humides lui donnait l'impression de soulever des poids de dix kilos à chaque aller-retour du sommet de son crâne jusqu'à sa nuque.

« Il fait un peu chaud, non ? »