Retour à Suna, retour à la réalité. La guerre était terminée depuis peu et malgré ce que tous semblaient dire ou faire, rien n’avait véritablement changé. Makka restait la cible à abattre et les relations avec Konoha resteraient malheureusement tendues. Si officiellement les deux villages étaient neutres vis-à-vis de l’autre, il existait de nombreux Sunajin éprouvant une rancœur personnelle pour un Konohajin et vice-versa. Et demain, tous allaient devoir retourner à leur quotidien, comme si rien ne s’était passé. Peu importe l’angle selon lequel on pouvait la regarder, cette guerre était absurde. Allongé sur son lit, dans le noir total, Hayato fixait un point imaginaire en se demandant comment tout avait pu commencer. Il se mit volontairement à errer dans ses pensées, espérant ainsi trouver le sommeil. Comme pour lire une histoire avant de dormir, il attira à lui via un fil de chakra l’un des rouleaux entreposé dans une petite étagère de l’autre côté de la pièce et posa sa main sur le sceau qui y figurait.
Revivre un souvenir était toujours une expérience divertissante.

[…]

Ce souvenir-ci était l’un des premiers qu’il avait scellé hors de sa mémoire, car il était particulièrement important pour l’histoire de Suna. Hayato était revenu d’une pénible mission et pensait aux paroles du Sandaime Kazekage, lors de son discours, quelques jours plus tôt… L’idée de guerre ne l’intéressait pas spécialement, mais repenser à ce jour là lui fit penser au discours du précédent Kazekage, au même endroit et dans des circonstances similaires. Une transition qu’Hayato n’avait jamais pu acceptée, mais face à laquelle il était impuissant. Il regrettait de ne pas avoir plus de poids ce jour là, ce qui lui fit soudain prendre conscience d’un élément important : à présent, il était Jonin.
Bondissant littéralement de son bureau, il s’était précipité dans la rue et était ainsi arrivé, haletant, dans une salle d’hopital tout à fait particulière : la morgue.

Je m’appelle Hayato, en tant que Jonin et spécialiste de Fuinjutsu et dans le cadre d’une mission d’enquête dont je fais toujours partie, je demande accès au corps de Kurogane Akio.

Ou plutôt, ce qu’il en restait. Quelques mois plutôt, Hayato ainsi que trois autres Sunajin avaient été envoyés à Kawa no Kuni afin d’y enquêter sur la mort du Shodaime, ainsi que pour reprendre son corps. Et quelle ne fut leur surprise lorsqu’en arrivant sur place, ils tombèrent sur Yarai, partisan de Makka visiblement chargé de faire disparaître le corps et toutes les preuves. Après un terrible affrontement contre ce fin utilisateur de Genjutsu, l’équipe était parvenue à récupérer le corps au milieu des flammes censées le carboniser entièrement. Résultat, impossible de reconnaître son visage par exemple. Mais par contre, les analyses de chakra avaient révélés un sceau étrange au niveau de son torse (1). A présent qu’il connaissait bien le FuinJutsu, Hayato pouvait prétendre au titre « d’expert », bien qu’il existait dans le village plus compétent que lui.

Le corps calciné posé sur cette table froide lui rappela une série de mauvais souvenirs qu’il balaya de son esprit en enfilant une paire de gant. Grâce à un astucieux système de marquage fluorescent, la majeure partie du sceau présent sur le ventre avait pu être restauré, permettant ainsi une étude plus approfondie. Hayato était loin d’être le premier à examiner ce corps, il disposait donc également d’un premier rapport d’autopsie, indiquant que l’état de carbonisation avancé empêchait tout examen correct du corps, toutefois, on savait qu’il n’y avait plus de tête. Une note figurait également concernant le sceau. Ce dernier ne répondait pas aux stimuli de chakra extérieur, ce qui laissait supposé qu’il devait fonctionner selon la volonté du marqué, ou contre sa volonté, mais en tout cas, il agissait bel et bien sur le marqué. Le genre de technique communes aux espions, comme l’était malheureusement Akio.

En relisant attentivement le rapport, Hayato remarqua un autre détail, qui semblait anodin pour les Eisen-nin à l’origine de l’autopsie, mais qui revêtait une importance capitale pour lui : « Le cœur du défunt semble avoir été enlevé post mortem, mais la plaie refermée par cautérisation au niveau du thorax indique que l’organe a été prélevé avant immolation » (2).
Il quitta la salle sans avoir trouvé aucune information venant du corps d’Akio, comme on pouvait s’y attendre. Toutefois, son esprit bouillonnait et réfléchissait activement. Il remettait en place les nouveaux éléments que lui avait apporté cette dernière information et essayait de les incorporer à ce qu’il savait déjà.

Posé dans un atelier, devant une feuille de papier, il dessinait un petit schéma pour remettre les choses à leur place. Peu de Sunajin connaissaient Makka, à vrai dire, lorsque cette dernière avait fait son apparition aux yeux du monde, sur son île à Hai no Kuni, très peu d’habitants du désert, hormis peut-être certain membre du Kakumeigun originel, s’étaient retrouvés là-bas.
La rencontre avec « le démon à forme humaine » avait eut lieu pour Suna quelques temps après le départ de Kawaguchi Manzo, à l’époque du Triumvirat. Ce dernier était le supérieur d’Hayato, affilié au Conseil de Guerre, à ce moment là.
L’idée folle avait germé dans l’esprit du jeune homme le jour de l’incendie cendré, mais il se demandait si au final, le départ de Manzo n’était pas en lien direct avec l’arrivée de Makka à Kaze no Kuni ? Et si le Triumvir était allé la défier et qu’elle serait venue brûler le village pour se venger ? Plutôt farfelu, mais pourtant cohérent (3).

*Et c’est là qu’Akio sensei est apparu, la version du Nidaime se tient. *

Araakoa Aare, l’homme au centre de toute cette histoire. Il y intervient en devenant Nidaime Kazekage, après avoir sauvé le village du terrible espion de Makka, Kurogane Akio. La nouvelle avait fait beaucoup de bruit et encore aujourd’hui, certains ne l’acceptaient toujours pas. Les circonstances de sa mort n’avaient que peu surpris. Un élément important marqua toutefois Hayato le jour du discours du Sandaime : d’après ce dernier, Aare serait le véritable assassin de Kurogane Akio. Ce qui expliquait alors toute une série de choses.
Naturellement, sans même qu’il ne s’en rende compte, Hayato venait d’assembler toutes les pièces du puzzle. Il pouvait ainsi contempler cette Vérité temporaire. Mais elle n’était qu’un iceberg et cachait encore toute une série de secrets.

Que savait-il sur Nidaime. Il savait ce que tous savaient le concernant, qu’il a été choisi par le conseil pour dirier le village, qu’il était un shinobi émérite bien avant la création de Suna. Toutefois, Hayato savait sur Aare quelque chose que peu savaient. C’était une anecdote qu’on lui avait racontée au cours d’une mission à Kusa no Kuni. Selon les dires de Kaio Kagenuro, outre ses talents pour la nécromancie, Aare était : « un homme doué dans le ninjutsu et encore plus dans le langage » (4). Ce jour là, ce Jonin était même allé jusqu’à affirmer que le langage était la plus grande force de ce mystérieux Nidaime. En y repensant, Hayato comprit alors qu’il s’agissait là d’une sorte de mise en garde. Pour une raison qui lui échappait encore, ce Sunajin connaissait relativement bien le Nidaime. Si le marionnettiste avait eu la clairvoyance et l’intelligence de comprendre à quel point Aare pouvait être manipulateur.
A l’inverse des Eisen-nin, les nécromanciens cherchaient à détériorer le corps d’autrui et faisaient de nombreuses recherches sur les morts. Cette dernière affirmation glaça le sang du jeune homme, qui repensa à la très récente intervention de Kenji, sur le balcon.

*D’après Meteora, le véritable responsable de la mort d’Akio-sensei serait Aare lui-même… C’est trop gros pour être une simple coïncidence. Du coup, la boucle est bouclée. *

Difficile à croire et pourtant tellement vrai. Araakoa Aare avait probablement tué Akio par interêt, plutôt que de le capturer pour le faire parler. Tenant là le précieux cadavre d’un puissant shinobi, partisan de Makka, il devait très certainement l’avoir étudié avec ses connaissances en nécromancies, lui ôtant au passage son cœur. Hayato bloqua dans sa déduction, et il remarqua subitement que le nom de ce Jonin qui l’avait renseigné sur Aare, était un anagramme de Kurogane Akio. Plusieurs explications étaient possibles, mais la plus logique d’entre elles (également la plus loufoque) partait du principe qu’Aare, grand shinobi érudit, devait très certainement être capable de faire revivre les morts, sous son contrôle. L’idée fit frissonner Hayato, qui s’imaginait une sorte de marionnette ultime, une marionnette humaine, immortelle et capable d’utiliser son chakra….
Il se souvint de l’air effacé de Kaio, il se souvint que l’homme n’avait pas bu le thé qu’on lui avait proposé, et n’avait que très peu mangé sur les six jours d’aller-retour.

*Non, si ce type était Akio-sensei, j’aurais du le remarquer à sa voix ! *

Il y avait une autre explication logique qu’il ne tarda pas non plus à trouver. Kurogane Akio n’avait probablement jamais existé, sa voix, son apparence, ses vêtements… Tout cela n’était qu’une couverture. La technique utilisée par Aare devait certainement ressusciter le véritable corps d’un individu, mais n’avait visiblement pas besoin du corps originel. Que fallait-il penser d’une telle chose ? Ce genre de jutsu était-il sans conséquences ? Penser que le chakra permettait une telle prouesse donnait le vertige. Mais utilisé avec sagesse, il devait y avoir un moyen de lui trouver d’incroyables propriétés.
Il était fort peu probable que Kenji ignore cette réalité. Il fallait lui parler pour en savoir plus.