J'errais sans but au milieu du dédale que formaient les ruelles de Kiri depuis déjà plusieurs heures, scrutant les alentours à la recherche d'une distraction décente. Le claquement de mes talons sur les pavés résonnaient dans la nuit tel un battement de métronome, seul bruit au cœur de cette nuit paisible. Une légère brise balayait les feuilles mortes au sol et s'engouffrait de temps à autre dans ma cape, la faisant se soulever au rythme de mes pas. La lueur vacillante des torches dessinait des ombres aux contours incertains le long des murs, telles des fresques noires qui semblaient vouloir happer les imprudents qui s'en approchaient de trop près. J’entraperçus furtivement un reflet flou dans la vitrine de verre d'une échoppe et marqua une pose, prête à bondir au moindre signe de vie. Non ce n'était que mon reflet déformé par la distance. J'aurais vraiment tout donné pour trouver un humain. Oui, un simple clochard à massacrer aurait suffit pour m'occuper des heures durant. Je me sentais d'humeur joueuse ces derniers temps. En plus, s’entraîner à la torture servait un jour ou l'autre non ?

Je marchais depuis un bon moment et avais fini par m'éloigner de la ville. J'avais bien croisé une ou deux personnes mais l'omniprésence de ninjas à chaque fois me gênait. Je ne tenais pas à croupir dans une prison humide juste pour un ou deux civils morts. Et puis les autres partisans ne se donneraient sûrement pas la peine de me sauver vu mon niveau en combat. Je pouvais rivaliser avec un chunin mais guère plus. Un profond soupir s'échappa de mes lèvres et chassa toutes les pensées qui parasitaient mon esprit. La lune guidait maintenant mes pas sur un petit sentier de campagne et, à vrai dire, je comptais rebrousser chemin et retourner au chaud dans mon appartement. Ce soir encore je me contenterai d'un bon livre pour m'occuper. Vie de mer... Soudain une lumière ténue au loin attira mon attention et piqua ma curiosité au vif. Des marais me séparaient de ce mystérieux éclat et je n'avais pas souvenir qu'il existait une habitation dans cette zone perdue. Une ferme isolée pleine de paysans qui ne demandaient qu'à se faire tuer avec de la chance. Devais-je prendre le risque d'aller voir s'il y avait des gentils gens à assassiner ? Au pire si je ne pouvais pas les tuer j'endosserais le rôle de la jeune fille perdue au cœur de la nuit. Finalement, après cette courte hésitation, j'enjambais la clôture qui longeait le chemin et qui me séparait du sol spongieux et des arbres décharnés du marécage. La terre émis un bruit de succion répugnant au contact de mes pieds et libéra une fragrance de pourriture tandis que je m'y enfonçait comme dans des sables mouvants. Appétissant... Le bas de mon pantalon s'imbiba aussitôt de l'eau saumâtre et me fit frissonner de dégoût. Je commençais déjà à regretter mon choix mais il était trop tard maintenant. Je me mis donc à avancer à une cadence soutenue en songeant au plaisir qui m'attendait plus loin.
Plus je me rapprochais, plus la lumière devenait intense et bientôt des murmures vinrent jusqu'à mes oreilles. Enfin, au bout de quelques minutes, un bâtiment délabré émergea du décors sinistre. L'éclat qui perçait les ténèbres provenait d'une fenêtre à l'étage. J'entrepris donc de faire le tour de la maison afin de vérifier qu'une personne ne viendrait pas m'interrompre et atterris dans une petite clairière en friche. Huhu... De toute évidence j'étais seule avec mes nouveaux amis. Je pris une profonde inspiration et masqua complètement les pulsions meurtrière qui émanaient de moi comme on me l'avait appris. Des larmes coulèrent de mes yeux tandis que je dirigeait vers l'entrée principale. Je comptais me faire passer pour une pauvre enfant perdue et apeurée pour m'immiscer plus facilement à l'intérieur. Une fois dedans... La nuit m'appartiendrais.
Je me mis à taper contre le battant en bois pourri qui servait de porte et cria d'une voie d'une voix chevrotante quelques mots étouffés.


- Il y a quelqu'un ? S'il vous plaît ouvrez moi je me suis perdu et je n'arrive pas à retrouver mon chemin ! Je sais que vous êtes là on voit de la lumière depuis l'extérieur... Je vous en prie j'ai froid, je suis trempée et la brume commence à monter ! Par pitié...


Des craquements résonnèrent à l'intérieur. Je rayonnait au plus profond de moi: ce soir serait classé sous le signe de l'amusement. Enfin pas pour tout le monde.