Assez clairement, Natsuki avait du mal avec les environnements naturels. Il n'avait aucune difficulté pour y survivre, mais il ne s'y sentait plus vraiment à son aise, comme s'il y avait un décalage et qu'il n'était pas le bienvenue. Pour autant, comme avec la forêt ici présente aujourd'hui, c'était le genre d'endroit idéal pour apprendre à se débrouiller à partir de pas grand chose. Là était la demande que lui avait fait Nuiito, même si Natsuki était d'avis que ce n'était pas ce qu'il y avait à apprendre en premier : avant de se lancer dans le bricolage pour lequel le Nara tatoué commençait à se faire un nom redouté, mieux valait avoir de solides connaissances dans la médecine classique.
Pour l'occasion, Natsuki lui avait donc donné rendez-vous près d'un territoire à la végétation dense dans la forêt de Konoha, histoire de lier quelques bases classiques avec un savoir plus concret sur les plantes utiles à la guérison. Désinfecter des plaies avec de l'acide formique récolté sur place et réduire une fracture avec de l'herbe folle et une pierre plate, ce n'était pas pour tout de suite.
Malheureusement pour Nuiito, Natsuki accordait une grande valeur à la ponctualité, et le jeune Monjara ne semblait pas vouloir montrer le bout de son nez en patchwork. Chaque minutes qui passait ne jouait pas en sa faveur, du moins jusqu'à ce qu'il hurle : son cri étouffé par la forêt parvint tout de même jusqu'aux oreilles du Nara tatoué.
« Qu'est-ce qu'il se trame ? » se demanda-t-il en fronçant les sourcils.
Nuiito ne semblait pas en danger, pour le peu qu'il en avait perçut. Pour autant, maintenant qu'il savait vaguement dans quelle direction était le Monjara, il décida de s'y rendre pour voir ce qui avait bien pu le retenir. La scène sur laquelle il arriva n'avait rien de cocasse.
Un chasseur râleur, une biche aussi blessée qu’affolée et un ninja recousu l'y attendaient. Et avant même que l'on lui explique la situation, Natsuki fit un bond en arrière et s'éloigna de plusieurs mètres de l'animal qui s'agita de plus belle malgré sa blessure. Un kunaï vola en direction de ses pattes, et se planta dans le sol entre celles postérieurs : la bête s'immobilisa aussitôt, comme figée dans une posture peu naturel. Le regard par contre témoignait d'une terreur appuyée.
« Nuiito ! Il faut que vous la calmiez avant qu'elle ne retrouve sa mobilité. Je ne peux pas m'en approcher. »
Heureusement, les Nara s'y connaissaient en cerfs. Et cela n'allait pas être du luxe, vu la blessure qu'il lui avait observé à la patte.
« Frottez-lui le coup avec la paume de la main ouverte mais les doigts repliés. Sur le côté en remontant jusqu'à la tête, puis en redescendant le long de la nuque. Faites-le jusqu'à ce qu'elle se détende, et continuez même jusqu'à ce que vous soyez sûre qu'elle ne va pas tenter de s'enfuir. Je n'ai pas de quoi la sédater, il va falloir faire avec pour lui apporter les premiers soins. »
Natsuki composa une succession de signes, et fit apparaître une copie de lui-même, qui savait déjà ce qu'elle avait à faire : elle s'éloigna au pas de course.
« Bien, vous là-bas. Expliquez-moi ce qu'il se passe ici. Et parlez doucement. »
La biche allait avoir besoin d'un climat calme, pas d'individu hurlant comme des putois. Mais lui allait avoir besoin de comprendre.
Natsuki composa un premier signe, mais Nuiito le prit de vitesse pour faire taire le chasseur, faisant preuve d'une bonne capacité à exercer des tâches multiples. Le Nara tatoué décida toutefois de le soulager de son fardeau barbu pour qu'il puisse pleinement se consacrer à la biche. Trois mains de terre jaillirent hors du sol, attrapèrent le chasseur par dessous les épaules et la bouche, et le tirèrent jusqu'à Natsuki qui l’ausculta.
« Je comprends votre colère d'avoir été blessé par votre proie alors que vous ne cherchiez probablement qu'à gagner honnêtement votre vie et nourrir votre famille, mais il s'avère qu'en l'état, je ne vais pas vous laisser repartir avec : la grossesse que je lui observe m'empêche de pencher en votre faveur dans le cycle de la chaîne alimentaire. »
Tout en parlant, Natsuki libéra le chasseur de sa veste, à la recherche d'une vue plus dégagée sur la blessure du brave homme.
« J'espère que vous entendrez ces paroles d'un homme dont le clan vénère les cerfs à l'égal des divinités mieux que ma demande d'il y a trois minutes. »
Relevant la manche, il était difficile de voir quelques chose tant la plaie était couverte de sang en phase de coagulation. Une blessure digne de la morsure d'une herbivore prête à tout pour défendre la vie qui grandissait en elle. Il fit donc sortir d'un sceau l'indispensable trousse de premiers secours, et entreprit de nettoyer localement pour y voir clair.
« Mais dites-moi, Chasseur, où est votre veste orange et votre arc de chasse ? Je ne vois près de vous aucun des équipements réglementaires pour cette activité. »
Moment de silence gênant de la part du chasseur.
« Vous n'êtes pas en train de chasser avec du matériel de braconnage, n'est-ce pas ? »
Le chasseur était face à un sourire qui n'avait aucun lien de parenté avec l'humour ou la sympathie. Et alors qu'il bredouillait quelques explications maladroites, un cri s'arracha de sa gorge tandis que des doigts fouillaient avec perfidie sa blessure. Une main bien en chair cette fois-ci lui bloqua la bouche.
« Shhhhhh... Ce n'est rien. Cela va passer. » assura Natsuki d'une voix faussement doucereuse.
Le chasseur, qui était toujours maintenu immobile, commençait vraiment à s'inquiéter.
« Oui, ce n'est rien comparé à ce qu'il se passerait si j'apprenais que c'était le cas. »
Natsuki tira de sa trousse un flacon, et en versa le contenu sur la plaie de son patient.
« Cela va brûler, c'est normal : c'est une preuve que la désinfection est efficace. Endurez en silence. »
La dernière phrase tomba sur un ton sec, le visage fermé de Natsuki indiquant que la plaisanterie était terminée. Il releva les yeux vers le Monjara.
« Ecoutez Nuiito. Normalement, avant de faire quoi que ce soit, il faudrait vérifier la profondeur de sa blessure, et s'assurer que les mâchoires du piège n'ont pas fêlé ou brisé l'os. Sauf que c'est douloureux, et que cette biche est un animal sauvage. Elle a beau s'être apaisée parce qu'elle n'a pas le choix, si vous lui faite mal, elle n'intégrera pas que c'est pour son bien et va se débattre. Est-ce qu'elle perd beaucoup de sang ? Si c'est le cas, il va falloir lui faire un point de compression. Autrement, mieux vaut attendre que mon double ramène le vétérinaire de la ferme Nara, ainsi que son équipe. »
Il baissa ensuite les yeux vers le chasseur.
« Pour ce qui est de cet homme, il est fort et robuste : il est bien capable de comprendre que la douleur des soins est nécessaire pour être soigné. Je vais lui faire un point de compression le temps que '' l'hémorragie '' se calme. Ensuite, ce sera vous Nuiito qui allez le recoudre, quand mes Cousins auront récupéré la biche. Cela vous va ? »
Il ne précisa pas si la question s'adressait au chasseur ou au Monjara, mais l'un dans l'autre, '' non '' n'était pas une réponse acceptable, ni acceptée.
« Nuiito, c'est un animal sauvage, bien sûr que vous avez bien fait de l'enlever du piège. Mais maintenant, si vous voulez déprimer sur vos capacités, vous le ferez plus tard : là n'est pas le moment, surtout avec une biche blessée à proximité. Alors ressaisissez-vous. »
Là encore, ce n'était pas une question, mais un ordre. Car que ce soit dans le domaine médical, sportif ou martial, le doute de soi et l'incertitude n'étaient pas permit. L'on pouvait l'être avant, l'on avait le droit de l'être après, mais pas pendant l'activité. Natsuki interdisait à ses équipiers de flancher moralement dans les moments critiques. L'échec par contre était toléré, car c'était une notion bien différente.
Un moment passa, et les renforts finirent par arriver : une équipe de cinq hommes et femmes se présenta à eux. Rapidement, ils analysèrent la situation de la biche, et prirent le relais à Nuiito une fois les explications données. Narrativement parlant, comme le cas de Nuiito était plus intéressant que celui de la biche, l'on précisera simplement avant de la sortir de l'histoire qu'elle s'en tira, vécu heureuse et longtemps dans le harem de son cerf dominant avec qui elle eu encore beaucoup de faons.
« Bien, les choses sérieuses commencent maintenant, même si elles sont moins compliquées et moins intéressantes qu'avec une biche sauvage. »
Tout le monde était partie, il ne restait que les deux protagonistes et le figurant de cette affaire.
« Tout d'abord, ce que j'ai fait avant, c'est nettoyer la peau à l'endroit blessé. Avec le sang qui s'écoule à demi-coagulé partout, il devient difficile de repérer les plaies. Si cela ne saigne pas et s'il n'y a pas de corps étranger évident à l'intérieur, alors il faut nettoyer pour évaluer la taille et le nombre des plaies. Comme nous désinfectons ensuite, de l'eau clair suffit amplement pour cela, même si la biseptine fait usage deux en un. Et au pire, un chiffon, cela fonction aussi, parce que dans l'urgence, l’aseptise est le pseudo-cadet des soucis : ses conséquences ne sont pas immédiates, contrairement au décès de la personne. »
Natsuki désigna, avec un désintérêt total pour la victime qui n'avait pas voix au chapitre, la blessure à l'épaule.
« L'on voit ici essentiellement une plaie dû à une morsure. Qu'est-ce que vous pouvez me dire sur ce type de blessure avant que nous débutions, Nuiito ? »
Niveau considération du patient, Natsuki était à zéro pointé ici, mais c'était purement volontaire. Car si d'une part le concerné n'en méritait que peu, de la seconde, l'on commençait par apprendre la technique de soin avant d'intégrer le patient en tant qu'humain dans l'équation, sans quoi l'esprit s'y perdait entre les deux avec la peur de faire mal.
« C'est l'idée, en effet. Sur une plaie plus ancienne, mais encore ouverte, les rougeurs sont signes d'inflammation. Et qui dit inflammation dit infection. Ce que ce genre de blessure à toutes les chances de faire sans traitement adapté. Ce qui a été fait, heureusement pour lui. »
Natsuki adressa un regard qui aurait pu être sympathique dans un autre contexte, puis reporta son attention sur Nuiito.
« Par expérience, je peux dire aussi que les blessures par morsures comptent parmi les plus compliquées à traiter. Autant là, cela va encore, ce sont des dents d'herbivore qui ne sont pas taillées pour percer et déchirer. Mais cela aurait été bien pire venant d'un loup, ou même d'un castor. Non seulement ils ont des mâchoires extrêmement puissantes, mais en plus, ils ne font pas que mordre : ils déchirent. Un chien par exemple, ou une panthère, secouent la tête pour arracher le morceau de chair qu'ils ont entre les dents. Alors un coup de sabre ou de hache, c'est relativement simple à traiter, car la blessure est nette, mais une morsure, je vous laisse imaginer le chantier que c'est : recoudre pour que la plaie puisse cicatriser convenablement n'est pas une mince affaire. »
Heureusement que dans ce monde, le chakra était la base de la vie, et que son usage médical permettait de guérir à peu près n'importe quoi. Sauf qu'il ne suffisait pas de poser les mains en faisant de la lumière verte et en scandant '' Wololo '' pour que cela marche, et que l'on n'avait pas toujours un ninja-médic sous le coude : il fallait le plus souvent apprendre à se débrouiller à l'ancienne.
« Heureusement pour notre chasseur, ici la morsure est nette. La biche n'a que '' pincé '', et les vêtements ont empêché que cela s'enfonce trop profondément. Mais dans le doute, mieux vaut suturer. Je ne vais pas manquer de respect à un Monjara en lui demandant s'il sait faire cela. »
Natsuki le laissa ainsi commencer, et meubla le tout avec quelques connaissances supplémentaires dans le domaine.
« Après, la suture n'est pas la solution à tout, mais elle couvre bien 60 % des problèmes que l'on rencontre sur le terrain. Car en définitif, le but du jeu avec le sang est le même pour tous : il doit rester à l'intérieur du corps. »
Règle simple et méthode libre, l'on perd quand la personne meurt.
« Je vous le donne en mille, je ne suis pas médecin, Nuiito. Ce que j'ai apprit sur le tas, c'est comment assister les blessures les plus fréquentes, et offrir un peu plus de temps à un vrai soigneur pour intervenir. J'ai souvent été mon propre cobaye par ailleurs. Et j'ai trouvé une constante à cela : quand l'on coud le blanc avec le blanc, le rouge avec le rouge, et le jaune avec le jaune, en général, cela se passe plutôt bien. Celui qui vous a refait le sous le masque s'y connaissait trop, ou pas assez ? »
Natsuki n'avait encore jamais abordé la question des cicatrices de Nuiito avec ce dernier. Le Monjara n'était clairement pas un prix de beauté, mais le Nara tatoué avait vu plus d'une blessure de guerre dans sa vie. Elles laissaient parfois des conséquences graves pour ceux qui leur survivaient, et ils n'avaient pas le choix que de vivre avec. En tant que soldat, Natsuki était donc plus tolérant que d'autres avec cela. Mais ce n'était peut-être pas le bon moment pour parler de cela.
« Dites-le moi si je vous déconcentre, hé ? »
Le chasseur avait intérêt à ne pas se manifester, en ce qui le concernait.
« Toutes les cicatrices d'un homme ont une histoire. Parfois elle est épique, parfois elle est stupide, mais assurément, elles marquent notre vie – littéralement. J'aimerai beaucoup entendre un jour l'histoire des vôtres, si elle n'est pas trop intime. Pas ici, bien entendu, ce n'est ni le lieux ni le moment. » précisa Natsuki en baissant son regard sur le chasseur.
Il tapota sur l'épaule de ce dernier avec son seul bras valide.
« D'ailleurs, vous aussi, vous en aurez une bonne à raconter, lorsque l'on vous demandera pourquoi vous êtes revenu des bois uniquement avec un bandage sur l'épaule et vos sous-vêtements sur vous. »
S'en suivit un moment de silence pour laisser au chasseur de biche le temps de comprendre, mais pas assez pour avoir l'occasion de répliquer.
« Allons allons, vous ne pensiez quand même pas que j'allais vous laisser filer avec une claque dans le dos après ce dont j'ai été témoin ? Le braconnage avec votre outillage est illégal, et je représente une autorité militaire suffisante pour avoir le droit de vous séquestrer et de vous livrer à la justice, alors estimez-vous heureux de vous en tirer à si bon compte : la honte et les piqures de moustiques sur le derrière n'ont jamais tué personne. »
Sauf si un Aburame le décida.
« Le choix vous appartient. »
Il était toujours important d'offrir le choix à autrui, surtout avec une option très mauvaise : cela soulageait la conscience.
« Bien, Nuiito. Maintenant que c'est cousu, il est temps de protéger la plaie de ce brave homme avec un bandage. Un adage dit que '' l'homme intelligent a conscience que bander ses plaies ne fait que les dissimuler. ''. Il faut comprendre ici qu'il ne faut pas s'arrêter à là. Un bandage remplit différentes fonctions. Certains ont un effet compressif sur les blessures hémorragiques, d'autres absorbants pour les blessures plutôt suintantes et fibrineuses. Il convient donc de les changer régulièrement, mais pas trop souvent non plus sans quoi vous allez arracher la peau qui peine à se reconstruire, et détruire le processus de cicatrisation. Une notion a avoir donc, tout en gardant à l'esprit que dans les situations d'urgence, c'est inutile de s'en inquiéter. En effet, en ce genre de situations, le bandage privilégie deux choses uniquement : isoler la plaie de l'extérieur pour éviter que d'autres germes ne s'y ajoutent, et la compresser pour favoriser la création du clou plaquettaire qui va stopper la perte de sang. Pour faire le bandage en lui-même par contre, il n'y a pas vraiment de secret. La méthode dépend de là où est la plaie, mais pour les membres, tous se valent dans la finalité. L'essentiel est de ne pas faire trop garrot, même pour les compressifs. »
Natsuki désigna du bout de son plâtre sa trousse de secours.
« Il y a des compresses stériles et des bandes velpeaux auto-adhésives dedans. Prenez le nécessaire et faîtes lui son pansement. »
La prise simple mais ferme de Natsuki assurait que leur patient malgré lui ne partirait nulle part. Il fallait que ce dernier en ai bien conscience.
« Par ailleurs Nuiito. Vous avez réfléchi à ma proposition d'intégrer Matsudaï ? Je continue de voir au quotidien que vous êtes attentif et talentueux, aussi mon offre tient toujours.»
« Toute histoire vaut la peine d'être racontée, Nuiito, mais pas à tout le monde. Et cela, c'est à vous et personne de décider avec qui : ce choix vous appartient exclusivement. En ce qui me concerne, je n'ai jamais forcé personne à me dire ce dont il n'a pas envie de parler par lui-même. Hors cadre du travail. » précisa-t-il après un moment de flottement.
Il ne posait pas les questions de la même manière dans ces cas là.
« Bien, mon brave chasseur, mon ami en a fini avec vous, je dirai donc que moi aussi : vous allez enfin être débarrassé de nous. Permettez moi de fait de vous débarrasser. »
Par un simple contact du plat de la main sur l'épaule du chasseur, Natsuki fit jaillir hors de sa paume des branches de fuinjutsu. Deux instants plus tard, elles s'étaient imprégné aux vêtements pour les faire disparaître, ne laissant que ce que Natsuki avait annoncé plus tôt. Ainsi que les bottes, car il n'était pas cruel.
« J'espère que nous nous reverrons en des circonstances plus favorables. » lui adressa Natsuki en souriant avant de s'éloigner avec Nuiito et son matériel.
Ils ne se revirent jamais. Le chasseur fut dévoré quelques heures plus tard sans pouvoir se défendre par une meute de loups ayant flairé sa blessure. Sa femme, déjà gravement malade, succomba deux jours plus tard faute de pouvoir payer les médicaments coûteux mais nécessaire à sa guérison avec l'argent qu'il ramenait en extra grâce à ses chasses clandestines. Leur seule fille, alors âgée de six ans, se retrouva orpheline de ses deux parents, sans famille pour lui assurer un avenir décent.
« Pourquoi vous et pas un autre ? » répéta Natsuki alors qu'il était sur le chemin du retour avec Nuiito. « Outre le fait que vous manquez de confiance en vous et que vous vous dépréciez beaucoup, je crains que mes réponses ne soient guère toutes beaucoup plus flatteuses. Voulez-vous tout de même savoir ? C'est naturel, mais attendez-vous justement à ce que ce ne soit pas ce à quoi vous vous attendez. »
La démarche tranquille dans la forêt, Natsuki s'expliqua.
« En premier, il y a que vous êtes ici, et pas un autre. '' Être au bon endroit au bon moment. '' Autrement dit, c'est une opportunité qui s'est ouverte pour vous comme moi. Libre à vous de saisir ou non ce que j'ai attrapé de mon côté. En soit, cette raison, même si elle n'est pas la seule, existe indépendamment de vos capacités. Mais ce n'est pas pour autant réducteur pour vous. Voyez-vous, des opportunités, nous en avons dans notre vie plus qu'il n'y a d'étoiles dans le ciel, mais chacune ne se présente qu'une seule fois : un homme se juge à sa capacité à les reconnaître et à les saisir. »
Entre autre.
« En second, je vais vous demander de concevoir la situation autrement. Imaginons que l'on me présente l'étudiant le plus parfait et le plus talentueux qui soit, un étudiant qui sait tout faire, qui comprend tout de suite et qui réussit tout ce qu'il entreprend. Qu'est-ce que vous voulez que j'en fasse ? Je ne cherche pas l'étudiant parfait, Nuiito, pas plus que je ne cherche les cas les plus difficiles en particulier par volonté du défi. Mais quand je regarde quelqu'un, je ne m'arrête pas à ce qu'il est : je vois aussi ce qu'il peut devenir. Matsudaï n'a pas pour vocation d'élever mes étudiants au-dessus des autres, il n'y a aucune fierté à tirer de cela. Avant tout, c'est les élever au-dessus d'eux-même. »
Traitez quelqu'un pour ce qu'il est, et il le restera. Considérez-le pour ce qu'il pourrait devenir, et il le deviendra.
« En troisième, et non des moindres, il y a le fait que je vous apprécie. Oui, des ninja compétents et talentueux, il y en a plein à Konoha, mais c'est vous et pas eux que je connais, que j'ai appris à découvrir un peu et voir évoluer. Vous vous cachez derrière un masque, que vous portez peut-être davantage pour les autres que pour vous-même, mais si vous pensez qu'il y a la moindre once de pitié pour vous dans mon offre, alors c'est que vous me connaissez encore très mal. Je ne me permettrai pas de vous manquer de respect à ce point. »
Glissant un regard vers Nuiito, Natsuki avait lui aussi une question à lui poser.
« Maintenant que je vous ai dit tout cela, êtes-vous satisfait de ces réponses ? Et plus encore, êtes-vous toujours d'accord pour avoir un mentor avec des motivations comme les miennes ? »
Natsuki était quelqu'un d'assez simple dans son fonctionnement. Il ne se cachait que rarement de ses intentions, et bien qu'il savait parfaitement mettre les formes et le verbe appropriés, il n'hésitait pas à faire connaître son avis lorsque l'on lui demandait.
Il était l'exemple même de '' ne pose pas les questions dont tu ne veux pas entendre les réponses. ''
« Alors notre affaire est entendue. Soyez le bienvenu au sein de mon équipe, Nuiito. Vous êtes le premier de la nouvelle génération, que je nommerai Matsudaï 2.0. J'ai eu d'autre étudiants avant vous, mais à ce jour, il n'y en avait plus : tous l'ont quitté pour des raisons diverses et variées. Peut-être avez-vous entendu de vos propre oreilles la réputation qui plane sur cette équipe. » s'enquit Natsuki, très peu touché par la réputation en question.
La réputation de faire abandonner le métier de shinobi à tous ceux qui le choisissaient comme mentor.
Cela faisait des années que des jeunes diplômés de l'Académie entraient dans son équipe Matsudaï, et après s'être rendu compte qu'en réalité, le métier de Shinobi est éprouvant et dangereux, ils décrochaient, et se lançaient dans autre chose. Non pas que c'était dommage pour eux, mais Natsuki en avait plus qu'assez d'investir du temps dans des gosses fraîchement promus qui se sont lancés dans une carrière militaire seulement parce qu'ils fantasment le métier de ninja. '' Je veux être ninja parce que c'est cool, et que je vais devenir fort. '' Combien de fois l'avait-il entendu de leur bouche celle-là, alors qu'ils ne comprenaient même pas le véritable sens des mots qu'ils prononçaient ? Il avait bien conscience que c'était quelque chose que chaque chef d'équipe connaissait occasionnellement, mais il avait vraiment l'impression de ramasser tous les spécimens de l'espèce...
Cela avait conduit Natsuki à de nombreuses remises en questions de lui-même. Plus d'une fois, il s'était demandé si la faute ne venait pas de lui, si dans le fond, il était un mauvais instructeur. Puis il avait finit par comprendre que non, que le soucis ne venait pas de lui, mais d'une nouvelle génération de ninja qui embrassait cette carrière par fantasme plutôt que par nécessité.
Cela expliquait pourquoi il avait changé de méthode depuis un an. Maintenant, il rompait les nouveaux dès le début, en les confrontant avec la réalité dans sa version la plus crue. Fini les filtres, fini la guimauve. Ainsi, il faisait gagner du temps à tout le monde : ceux qui ne se brisaient pas étaient ceux avec qui il savait qu'il pouvait arriver quelque part, les autres – la majorité – retournaient chez eux la queue entre les jambes et allaient se chercher un vrai travail de suite au lieu de se faire perdre – ainsi qu'au Nara tatoué – quatre mois à chaque fois.
Natsuki offrait à ses étudiants son expérience, mais aussi la possibilité de devenir meilleur, d'avoir les outils pour atteindre leurs objectifs personnels et d'en ressortir grandit. Mais il ne pouvait pas leur donner la volonté d'y parvenir. Cela, cela devait venir d'eux-même : et il y en avait encore et toujours pour croire qu'ils pouvaient abuser de sa patience sans avoir la moindre once de détermination véritable en eux.
Nuiito avait prouvé qu'il avait un petit quelque chose en plus que n'avait pas la plupart. La véritable question étant maintenant : est-ce que ce sera suffisant ? La réponse se trouvait dans l'avenir.
« Je m'occuperai des papiers liés à Matsudaï dans la soirée. Vous pourrez passer en fin de matinée demain au troisième étages du Palais du Hokage pour les signer ? Demandez le bureau administratif à l'accueil pour savoir où c'est. »
Parce que l'administration et la paperasse étaient au centre du monde.
« Et avant que j'oublie, il y a deux dernières choses que vous devez savoir sur Matsudaï. La première est que je ne gère Matsudaï que neuf mois par an, du début du printemps à la fin de l'automne. L'hiver est entièrement consacré à des activités qui me sont propres, aussi durant cette période vous serez livrés à vous-même. L'occasion de me montrer au printemps les progrès que vous aurez fait durant la saison froide. En deuxième, en tant que membres de la même équipe, le vouvoiement n'est plus de mise entre nous. » lui glissa-t-il avec un sourire.