En accord avec ce qu'il avait annoncé, Natsuki n'avait récupéré son collier de communication que le lendemain, pour lui rendre place à son cou juste à côté du pendentif solaire. Il n'avait toutefois pas cherché à entrer en communication avec Yami dans les jours qui suivirent, et elle non plus. La tension était retombée – de son côté en tout cas - , mais comme ils avaient tous deux mieux à faire de leur vie que discuter de tout et de rien, le silence radio avait perduré. Jusqu'au jour où Mizuki revint de ses négociations avec le Régent de Suna pour proclamer la paix entre les deux Villages.

Alors évidemment, avoir une chronologie là-dedans était impossible, ce qui nécessitait quelques repères dans le temps pour localiser ce qui suivit la fameuse rencontre entre l'Hokage en titre et Ogami Toshiro. L'entrevue n'avait pas durée plus de trois jours, si l'on prenait en considération le millier de kilomètres à franchir à pied dans un sens puis dans l'autre. Elle n'était pas encore tout à fait achevée à l'heure où ces lignes étaient écrites, mais elle avait suffisamment avancée pour que l'on puisse avoir une bonne idée de comment cela se terminera. Et comme cela excluait toute attaque ou tentative de capture de l'un ou l'autre des camps, cela laissait à Natsuki le champs libre pour continuer sa vie sans assurer davantage le rôle de l'Hokage par intérim.

Il avait passé quelques heures à écouter le récit des négociations – qui en version intégrale et avec les commentaires chauvins du réalisateur était beaucoup plus plaisante que la version résumé papier – puis avait enclenché toute la suite des étapes de ce qui le concernait lui. Et cela avait commencé par contacter la Ketsueki impliquée.

« Cet appel est en PCV, et vous sera facturé douze ryos la minute, plus surcoût éventuel selon l'humeur de l'opérateur. L'acceptez-vous ? »

Mieux valait encore commencer ainsi : Natsuki avait une tendance à l'humour bas de gamme et au trait d'esprit dans les situations où il savait par avance qu'elles n'auront rien d'agréable. Il avait conscience que cela le mettait autant en condition pour les supporter que cela n'arrangeait rien en général, mais comme tout le monde, il avait des défauts.

« Bonjour Yami. » lança-t-il avec enthousiasme, énergie, et surtout rapidité. « Comment allez-vous ? Pas terrible ? Ah, c'est pas de bol. Moi ? Cela va toujours, merci de vous en inquiéter. Bon, je sais que l'on pourrait se tenir la jambe ainsi pendant des heures, mais l'on taillera bavette plus tard, il y a des affaires pressentes sur le feu. J'ai des nouvelles des négociations entre Suna et Konoha. » reprit-il d'une vois plus posée, celle qui laissait à l'autre le temps de répondre. « La paix est plus ou moins signée entre Suna et Konoha. Du coup, même je n'aurai toujours aucune légitimité pour être à Kaze, si je devais être repéré et démasqué là-bas, je ne serais pas illégal non plus. Ce qui nous amène à nous : mon Hokage est rentrée saine et sauve, ce qui signifie que je suis déjà en route pour la mégalopole. Je vous laisse donc choisir d'un point de rendez-vous : je serai là dans trois jours. »

Un départ si rapide n'avait été possible que parce qu'il avait déjà tout préparé en amont. Il s'était déjà expliqué auprès de Mizuki qui ,compte tenu du contenu du dialogue, n'avait pas jugé utile d'ouvrir ou de répondre à un Sujet juste pour cela – entre autre parce qu'elle était occupée et avait mieux à faire – et avait donc donné son accord au Nara tatoué pour un nouveau départ temporaire. Sans solde. Après, cet accord remontait toutefois à il y a un sacré moment, aussi Natsuki espérait qu'il n'y avait pas besoin de renégocier les termes du contrat.

Notamment parce qu'il était déjà parti.

Le sang et la sueur glissait sur ma peau tandis que mes mains étaient malmenées par les échanges brutaux contre le sac suspendu dans ce sous sol sommaire de la Mégalopole.
Des mèches de mes cheveux retombaient de part et d'autres de ma tête alors que le reste était maintenu par une queue de cheval haute.

Haletante par l'effort, j'étais enfermée dans ce cocon de concentration que je m'étais créer, seule. Mes kuchiyoses senseurs surveillant la zone, je ne me souciais aucunement de ce qui m'entourait. C'était dans cet état d'esprit vierge de tout parasite extérieur que je percevais finalement une voix au creux de mon crâne. Une voix que je ne connaissais désormais que trop bien...

Me stoppant dans l'élan du coup que je m'apprêtais à donner, je soupirais et desserrais mes mitaines de cuir pour mieux les retirer et m'accorder une pause. Cet idiot ne me contactait pas par plaisir - notre relation n'était pas de ce genre là – et il avait sans doute une bonne raison de le faire malgré ses plaisanteries qui m'arrachèrent malgré tout un sourire.

« Tiens donc... C'est ma conscience qui me parle ? Je pensais pourtant vous avoir dit de me laisser tranquille. Je ne suis pas partisane des représentations miniatures de moi même trônant avec une fourche pour l'un et un halo pour l'autre sur chacune de mes épaules. »

Une seule effigie suffisait amplement non ?
Le Nara reprenait un ton plus sérieux bien qu'un peu trop enjoué, alors que je m'adossais à une paroi en pierre pour reprendre mon souffle.

« Bonjour Natsuki. En effet, puisque mon état ne vous soucie guère, pas plus que le votre pour ma part, passons nous des politesses d'usages : nous n'en sommes pas là n'est-ce pas ? »

Il tenait de son côté a peu de choses près le même discours ce qui nous mettait d'accord sur un point.

J'écoutais attentivement ses retours sur les négociations entre Konoha et Suna, n'ayant, pour l'heure, eu aucun retour de ces dernières. Visiblement celles-ci étaient plutôt en bonne voie et avec un peu de chance et une bonne dose de « nous n'avons pas le choix » pour Suna, la guerre entre les anciens alliés allait prendre fin rapidement. Du reste, le Konohajin s'était déjà mis en route pour me retrouver afin de commencer nos recherches pour débusquer Heyle et faire revenir ma Oniri.

« C'est une bonne nouvelle. Pour le fait que vous ayez pu vous libérer j'entends. Bien que le reste nous arrange aussi d'une certaine manière.
Retrouvez moi au pied de la fontaine tarie du centre ville lorsque vous arriverez : mes kuchiyoses sauront m'avertir de votre présence. Je vais de ce pas avertir notre contact d'Odaichi de notre venue imminente. »

Ogami nous rejoindrait après l'entrevue auprès du Saibogu : puisqu'il n'avait pas besoin de savoir ce que Saix pourrait nous dire concernant Heyle ou même Oniri.

Y'avait-il quoi que ce soit d'autre à ajouter ? Pas vraiment et ma pause avait assez duré.

« Je sais que c'est faire preuve d'un optimisme proche de la sottise, mais je garde espoir que nous en arrivons là un jour. Qui sait ce qui peut arriver à deux êtres seuls et torturés, livrés à eux-même dans l'immensité désertique. »

Impossible de dire à son ton s'il était sérieux, ou s'il participait simplement à ce jeu vicieux avec Yami qui se pratiquait à coup de surin et de langue fourchue. Mais dans le cas où la bague aurait été munit de la visioconférence, elle n'aurait pas été plus avancée avec son expression. Certaines choses gagnaient à rester entourées de mystère, au même titre que la reproduction des Aburame ou la généalogie des Hyûga.

La liaison fut rompu, et Natsuki poursuivit sa route. Le voyage en lui-même ne présentait pas grand chose d'intéressant, dans la mesure où il se limitait à mettre successivement un pied devant l'autre puisque les combats aléatoire avaient été désactivés.

Ainsi, les deux premiers jours ressemblèrent sensiblement au troisième, au détail près que le décors qui filait autour de lui changeait. Via la technique de métamorphose – ou le Henge, dans la langue de Nobuo Uematsu – il avait régulièrement changé d'apparence pour ne pas attirer l’œil commun, tout en sachant que pour un senseur en éveil, il brillait autant qu'un phare dans la nuit. Mais là n'était pas l'important pour le moment : tant qu'il était sur son territoire, il ne risquait pas grand chose. C'était pour après qu'il devra se montrer plus prudent.

C'est finalement sous les traits d'un homme entre deux âges d'allure effacée qu'il pénétra dans la Mégalopole, vêtu à la mode locale. Une citée qui évoluait sans cesse, mais qui en définitif ne changeait jamais vraiment. Les rues ne se ressemblaient plus en seulement deux semaines, mais cela n'était que la surface : le fond lui restait fidèle à ses fondations.

Il ne perdit toutefois pas de temps à admirer l'architecture locale, et se faufila par les petites ruelles jusqu'à la fameuse fontaine tarie que lui avait indiqué Yami en guise de point de rendez-vous. Partit de là, il supposa que Yami devait s'y trouver déjà, s'il avait bien comprit son message, et que les félins sans poils qui lui servaient de familier l'aient averti. Ç’aurait été plus simple selon lui de l'avertir de son arrivée via la pierre de sang, maintenant qu'il en avait une, mais si la Ketsueki avait tenu à procéder ainsi, il devait bien y avoir une raison – ne serait-ce que pour le spectacle.

Il s'aventura donc sur la supposition qu'elle était déjà là, que c'était la seule personne à être sur place, et sous ses traits métamorphosés lui adressa la parole à une distance respectable.

« Ruo praka kor mel'askaldor chiruta'lot ? »

Qui dans la langue ancienne devait signifier s'il ne se trompait pas '' Connaissez-vous un restaurant qui sert du rat avec de la sauce tomate ? ''. Restait à savoir si c'était une langue fictive, ou si elle avait son propre dictionnaire qu'il n'avait pas trouvé. Et après étude de la question plus tard dans la nuit, il s'avéra que ce n'était pas la langue qu'il imaginait - le dialecte ancien des Ketsueki qu'il s'était donné la peine d'apprendre parce qu'il s'ennuyait sur la route - mais plutôt de celle d'un peuple de chats des terres arides qu'il n'avait aucune raison de connaître. Il effaça donc les derniers instants, et se présenta de façon plus conventionnelle, plus en respect avec ce qu'il ignorait du monde.

« La fontaine avait l'air plus claire dans la chanson. L'on n'a guère envie de se baigner dans celle-ci... » commenta-t-il avec une pointe de déception en étudiant le bout de son doigt qu'il avait passé sur la pierre.

L'un dans l'autre, c'était sans importance : c'était pour la mise en contexte.

Les journées se succédèrent et ne se ressemblèrent pas.

J'avais fait en sorte de préparer ce voyage de manière incognito, prétextant à la Saibogu des affaires claniques a régler qui me rendraient indisponible quelque temps bien qu'elle possédait toujours la pierre de communication pour me contacter en cas de réel besoin.

Je voyagerais léger avec quelques préparations médicinales dans mon sac au cas où et qui pourraient m'être utiles pour m'octroyer une couverture au besoin ainsi qu'un dispositif pour nous faire plus discret si mon contact nous faisait faux bond sur son aide à ce sujet.

Etant originaire de Kaze je n'avais pas eu de mal a retrouver dans ma garde robe une tenue locale qui me fondrait dans la masse. Un pantalon bouffant noir et un top blanc plus tard, j'étais prête à arpenter mon désert de nouveau. Mes cheveux étaient attachés en une queue de cheval haute dont la pointe retombait au milieu de mon dos tandis que les tatouages ornant mon cou et descendant jusqu'à mon coude étaient exposés. J'avais suffisamment changé en deux années pour ne pas m'adonner à un quelconque changement illusoire. D'autant plus que les Ketsueki avaient encore leur place à Kaze quand bien même ma chevelure d'ébène et mes yeux écarlates trahiraient mon appartenance clanique.

Mes kuchiyoses sondaient la Mégalopole et les alentours en ce troisième jour, guettant l'arrivée du Nara et lorsqu'il fut repéré, ils venaient m'avertir, me laissant le temps de prendre mon sac pour rejoindre le point de rendez vous et l'y attendre.
Je n'étais pas particulièrement ravie de le retrouver mais je m'étais résolue a subir sa présence au moment où je m'étais décidée a prendre contact avec lui. La méfiance restait de mise mais puisque nous œuvrions dans un but commun les hostilités n'étaient pas à craindre pour l'heure : nous avions malheureusement besoin de l'un et de l'autre pour retrouver la Oniri du passé. Nous verrions ensuite.

L’énergumène avait beau s'être métamorphosé il n'en restait pas moins que ses répliques stupides et sa nonchalance le trahir à son arrivée. J'arquais un sourcil probablement imité par le chaton noir tout a fait adorable qui se tenait perché sur mon épaule en l'entendant proférer des paroles dans la langue ancienne. Je l'avais enseigné en bonne partie à Oniri mais j'espérais bien que l'apprentissage de cette langue ne s'était pas ajouté à la découverte des leurs durant leur roucoulement au sein de Suna. Cette idée était déjà bien assez pénible a imaginer pour ne pas penser qu'il m'avait volé une autre langue que celle de la Saibogu.

Se tenant à bonne distance, il finissait toutefois par se rapprocher pour venir admirer la fontaine de plus près. Pas d'eau ni de pièce gisant au fond, était-il déçu ?

« Peu importe son allure. Ce n'est certainement pas à la Mégalopole qu'il faut s'y fier. »

Quand bien même elle aurait été somptueuse je me serais personnellement gardé l'envie d'y tremper mes pieds. Par convenance principalement mais aussi parce que l'on était pas a l'abri d'un déversement d'une quelconque arme bactériologique en son sein. Mieux valait se méfier de tout en cette terre viciée et c'était bien pour cela que je poursuivais notre conversation mentalement, directement au creux de son crâne.

« Sous quel pseudonyme devrais-je m'adresser à vous en public lors de ce périple ? J'ai bien songé à « Médor » mais cela aurait pu mettre la puce à l'oreille des Kazejin.  »

Après tout, n'étions nous pas comme chien et chat ?

« Entre nous ou avec mon contact, qui nous rejoindra plus tard, vous pourrez m'appeler Yami mais pour le reste contentez vous de « Nemui ». »

Le chaton noir jusque là tranquillement posé sur mon épaule avisait le Nara avec une certaine curiosité de ses pupilles fendues. Son air adorable et innocent se changeait bien vite en un tout autre lorsqu'il révélait un sourire carnassier en croissant de lune.

« Lui c'est Crazy. Inutile de vous préciser pourquoi. »

Reprenais-je à voix haute.
Sous ses allures juvénile, ce félin cachait bien son jeu. Comme tout les Kuchiyoses son existence ne remontait pas à hier et celui là savait être un véritable démon mais il était avant tout un fidèle messager et un senseur passant inaperçu par son apparence contrairement à mes autres félidés.

« Bien ! Les présentations étant faites et les précautions prises, nous pouvons nous mettre en route. Nous descendrons au sud vers le port d'Higata et prendrons un bateau direction Odaichi où le bras droit de Saibogu Satoshi nous attendra. »

Nouvelles paroles directement implantées dans sa tête. Le voyage débutait et la route risquait d'être longue : mieux valait qu'il ne compte pas sur moi pour lui faire la conversation. Et pourtant... après avoir quitté la Mégalopole...

« Les négociations se sont terminées à temps. Je n'aurais sans doute pas été capable de patienter guère plus longtemps... »

Si mes paroles pouvaient sembler acerbes il n'en étaient rien, elles étaient même plutôt ponctuées d'une certaine inquiétude dont je ne laissais transparaître que la surface.

« Cela empire. Lors de nos sessions d'entraînements, enivrée par l'adrénaline du combat, il n'est pas rare que je perçoive une lueur primitive dans son regard pourtant aveugle. Je n'ai dès lors plus a faire à une combattante mais à une bête sauvage. »

Cette soif de sang, cette frénésie de destruction... c'était déroutant. Effrayant de la voir à ce point changée mais déroutant de constater qu'elle ne parvenait même plus à s'en rendre compte...

« Voilà un conseil que la ville vomit déjà à quiconque avec plus de trois grains de jugeote met les pieds ici. » répondit-il en reniflant, afin de poursuivre la discussion fictive.

Mais les vraies questions se posaient par une voie beaucoup plus silencieuse.

« Je pensais à quelque chose dans le goût de Dracul ou Xehanort. » répondit-il avec un haussement d'épaules mentale. « Cela ne colle pas bien avec mon apparence actuelle, mais ce n'est pas sous métamorphose que je compte fouler le sable de Kaze. Un peu de maquillage me conviendra beaucoup mieux pour rester discret. »

Pour des raisons qu'il avait déjà évoqué.

« Plutôt séduisant comme pseudonyme, j'aime bien. »

Il se demanda si le sourire charmeur qu'il lui adressa suffirait à la faire changer d'avis, par simple esprit de contradiction. Ce fut le chat prénommé Crazy qui lui rendit son sourire, mais il ne lui prêta aucune attention. A ses yeux, pour qui la faune n'était rien de plus que des formes de vie qui le détestaient, les félins domestiques se trouvaient à la première place sur l'échelle du mépris – et ce déjà bien avant qu'il ne commence à subir les effets de son corps. Il se contenta donc d'approuver d'un signe de la tête l'itinéraire qui lui était proposé.

Et ce fut sur ces mots qu'ils quittèrent la Mégalopole, Natsuki transformé cette fois-ci en femme basanée à la coiffure tout en tresses. Le début se fit dans le silence, alors que chacun courait à un rythme soutenu. Toutefois, le Nara tatoué dont l'expression féminine était devenu bien plus sérieuse s'était donné jusqu'à l'extérieur de l'immense capitale à attendre pour ouvrir la bouche. Non pas pour combler le vide et chasser d'un air faussement détendu son inquiétude vis-à-vis des enjeux de leur mission, mais pour en apprendre plus sur la situation d'Oniri. Comme si poser la question là-bas, malgré la sécurité de la pierre de sang, pouvait éveiller les oreilles de la Mégalopole et laisser des traces... Mais grande surprise, à une seconde près, ce fut Yami qui rompit le silence la première.

« Elles n'ont duré que trois jours, et notre dernière rencontre ne date que de deux semaines. La situation d'Oniri s'est aggravée à ce point ? »

Pour que Yami lui jette autre chose que du venin à la figure, oui, cela devait l'être. Les symptômes qu'elle lui décrivait lors d'une mise en situation de lutte ne lui étaient pas inconnus, mais ce n'est pas sur cette phrase qu'il tiqua le plus.

« Je vous demande pardon ? » lâcha-t-il en tournant soudainement sa tête vers Yami. « Pouvez-vous étayer ce que vous entendez par regard '' aveugle '' ? »

Le mot en lui-même avait plusieurs sens. Dans ses accès de crises frénésiques du passé par exemple, Natsuki avait le regard aveuglé par la rage, ce qui ne signifiait pour autant qu'il vivait dans le noir. Cela pouvait aussi correspondre à la pupille d'Oniri marquée de sa cicatrice, œil aveugle qui ne donnait plus de signe de fonctionnement. Mais peu importe de quel versant de la définition il se laissait imaginer, il redoutait que ce soit la plus regrettable que lui annonce Yami.

Car certes, la Saibogu pouvait vivre parfaitement avec les yeux fermés en permanence, tant ses capacités de perceptions étaient impressionnantes - sa vue était accessoire pour ainsi dire - mais aussi poussés que devenaient ses autres sens, le monde pour un aveugle ne se limitait plus qu'à des perceptions. Les personnes n'étaient plus que des informations, dépourvu de visage, d'expression et de forme... L'espace d'un instant, l’amertume le piqua, avant qu'il ne la chasse d'un mouvement négatif de la tête. Il n'avait pas le temps pour cela.

« Nous la ramènerons Yami, je vous en fais la promesse. »

Les promesses n'étaient rien de plus que des mots, qui n'engageaient que ceux qui y croyaient. Mais la voix déterminée de Natsuki ne laissa aucun doute sur son engagement envers celle-ci, et sur les montagnes qu'il déplacera pour l’honorer.

« Et pour le reste alors ? Comment cela se passe depuis deux semaines pour elle et son comportement ? Quand vous n'êtes pas en pleine '' sessions d'entrainement '' j'entends. »

Il mettait des guillemets, mais cela ne relevait aucune accusation ni ne proférait aucun sous-entendu. Tout au mieux, cela soulevait sa perplexité devant sa propre expérience vis-à-vis de sa malédiction quant à la qualité d'un '' entrainement '' lors d'un accès de frénésie.

« Et il y a autre chose que je souhaiterais vous demander. »

Sa voix sérieuse laissait toutefois transparaître une note qui tenait plus de l'hésitation que de l'inquiétude.

« Je me doute bien que vous allez m'envoyer paître, mais au moins comme cela ce sera dit, et nous en serons débarrassés. »

Il ne lui laissa pas le temps de glisser une douceur saveur poignard, et enchaina.

« Quand Oniri a disparu de Suna, je n'ai eu droit qu'à une seule lettre, quatre mois après, pour me dire qu'elle était toujours là. Rien de plus. L'on ne dit pas que l'on est vivante à quelqu'un quand l'on souhaite qu'il nous oublie. Pourquoi a-t-elle déserté de coup ? »

Il savait qu'elle ne lui répondra pas. Il savait que des réponses, s'il devait en obtenir, il ne les aura que de la bouche d'Oniri elle-même. Mais l'incertitude pesait depuis longtemps, trop longtemps pour qu'il ne tente pas au moins.

« Je me doute bien que ce n'est pas juste pour fuir des chasseurs que vous vivez toutes les deux planquées dans la Mégalopole. Je sais que vous tramez quelque chose avec d'autres mercenaires et shinobi. La pierre de sang que vous m'avez donné, il n'y a pas que nous trois qui en portons une. Mais tout cela ne me regarde pas. Tant quand vous restez en dehors des radars de Konoha, je ne fouillerai pas dans vos activités. J'ai bien comprit qu'Oniri ne tenait pas à ce que j'apprenne quoi que ce soit de ce qu'il se passe. Pas tant qu'elle n'aura pas fini en tout cas. Alors dites-moi simplement. Est-ce que cela a un rapport avec l'évolution de sa condition d'hôte ? »

Il peinerait à croire que c'était le cas, alors que Yami ne s'alarmait du changement drastique d'Oniri que depuis quelques mois. Mais dans tout autre cas de figure, il avait conscience qu'il valait mieux pour lui de ne pas savoir. Non pas pour lui éviter de la peine ou une autre futilité de ce genre, mais pour ne pas le mettre en porte à faux entre la Saibogu et Konoha.

Alors au final, tout ce qu'il demandait, c'était que Yami lui ôte cette incertitude. Il s'en contenterait.

Le Nara avait une nouvelle fois changé d'apparence, optant pour une silhouette féminine. C'était quelque peu perturbant de le voir sous ces traits mais j'étais bien trop préoccupée par la situation d'Oniri dont je lui faisais part pour vraiment m'en soucier.

Mon visage se tourna vers lui lorsqu'il en fit de même, soulignant ce qui m'apparaissait désormais comme un détail si bien que je n'eus pas la présence d'esprit de penser au fait que lui n'était pas au courant pour sa cécité.

« J'entends ce que cela signifie : Oniri est désormais aveugle. Elle a perdu l’œil qu'il lui restait de valide suite à un affrontement. »

Cette nouvelle m'avait aussi affligé lorsqu'elle était survenue.

« Je lui ai proposé d'y remédier à travers une opération mais elle a refusé car cela l'aurait affaibli sur une longue période et elle ne pouvait se le permettre. »

De part le temps de rééducation. Sans compter qu'elle préférait cette condition pour affiner davantage ses sens.

La promesse que me fit ensuite le Nara sut m'atteindre.
C'était un fait : je m'étais tournée vers lui comme un dernier espoir pour me venir en aide. Cela m'arrachait la langue de l'admettre mais il était bien la seule personne vers qui j'avais pu me tourner pour espérer obtenir un soutien, puisqu'il tenait également a elle.

« Eh bien... Je sens qu'elle lutte par moment, même si elle s'évertue à ne rien laisser paraître. Elle est plus froide et cynique également. Elle semble appréhender tout et n'importe quoi avec légèreté comme si elle n'en avait cure. »

Son caractère avait drastiquement changé mais cela ne me dérangeait pas autant que cette soif de sang qui semblait la ronger. Cela ne s'apparentait en rien à la même chose mais, jeune Ketsueki, j'avais connu cet attrait irrésistible pour l'élixir écarlate et je savais bien a quel point il était difficile de s'en préserver. Pendant combien de temps la Saibogu parviendrait elle a lutter encore ? Je craignais d'en connaître la réponse...

Le Nara sembla tourmenté par quelque chose qu'il n'osa me demander bien qu'il finit par se lancer. Je l'écoutai tout en restant de marbre aux premiers instants, comprenant peu à peu que ce n'était pas tant la raison de la désertion d'Oniri qu'il souhaitait connaître mais bien si cela était dû au seul fait de sa condition nouvelle.

Je prenais un instant pour réfléchir à ce que je pouvais lui exposer, voulant lui répondre sans pour autant le mêler à quoi que ce soit. Il était plus sage pour lui comme pour nous qu'il n'en sache pas trop sans quoi il serait amené a traquer la Saibogu après lui être venu en aide et nous devrions l'éliminer dans le même temps : un drama auquel je ne souhaitais assister, voulant éviter cette alternative à Oniri.

« Vous la connaissez suffisamment pour ne pas penser qu'elle a délibérément abandonner les siens n'est-ce pas ? Oniri a déserté par devoir. Toutefois, je crains que sa nouvelle condition l'a écarté de cette conviction. »

C'était la vérité. Son souhait de venir en aide à Kaze depuis l'extérieur s'était bien vite soldé par des rêves de grandeur afin de s'octroyer une puissance toujours plus grandissante. Le Nara était bien loin de se douter qu'elle était désormais à la tête d'une grande organisation criminelle, promettant a chacun de ses membres d’œuvrer pour leurs projets personnels en échange de leur implication en son sein.

« Elle aurait déserté même sans « ça » si c'est ce que vous voulez savoir. Quant au message qu'elle vous a fait parvenir après un an, en effet, à cette période là elle se souciait encore de ses sentiments. Pour tout vous dire, vous étiez un sujet de conversation sensible et nous nous sommes querellées quelques fois à ce propos. Il y a bien longtemps que votre nom n'est pas ressorti dans nos conversations mais je ne suis pas certaine qu'elle se montrerait aussi réceptive à mes paroles si tel devait être le cas aujourd'hui. »

Elle ne prêterait pas cas à mes paroles ou en serait beaucoup moins affectée : cela était certain.

« Pour autant, si cela peut vous rassurez, je ne pense pas qu'elle vous ait totalement oublié. »

Ça aussi ça me faisait mal de l'admettre.

« Votre relation n'a certainement pas dû faciliter sa prise de décision quant à sa désertion. Mais elle s'y est résolu, pour sa nation. »

Elle avait fait son choix sans pour autant oublier le reste : c'était sa condition qui le lui avait mis de côté.

Natsuki eu besoin d'un instant pour accuser le coup. Il y avait beaucoup d'informations à encaisser, et aucune n'était vraiment agréable à apprendre. Il n'y avait pas vraiment de réconfort dans le fait d'être un sujet de conversation sur les lèvres de celle qu'il a aimé, surtout si c'était pour disparaître ensuite. Être ignoré, oublié était souvent bien plus douloureux que d'être méprisé. Au moins avec Yami, il était à peu près certain d'éviter le pire de ce côté là...

Tout n'était pas négatif, à en croire les impressions de la Ketsueki, mais l'espoir était une lame redoutable : l'enfer savait très bien en entretenir la dernière étincelle dans le cœur de ses prisonniers pour prolonger le supplice. N'importe comment, les sentiments de Natsuki, ce qu'il pensait, et les idées d'Oniri n'avaient pas leur place dans l'équation. Qu'elle soit son amante, son amie, ou son plus redoutable combat, elle avait été là quand il avait eu le plus besoin de quelqu'un. Elle l'avait tiré hors du précipice au bord duquel il se retenait depuis beaucoup trop longtemps, et c'était tout ce qui comptait : qu'importe le regard et les intentions qu'elle lui portait aujourd'hui, il ne pouvait pas la laisser sombrer davantage sans rien faire.

« J'aurai sans doute fait exactement la même chose. » avoua-t-il enfin d'une voix neutre.

Il savait dans quoi il s'était engagé en acceptant les sentiments qu'il nourrissait pour Oniri. Elle était comme lui une militaire, et leur vie professionnelle passait avant tout le reste. Et même si avoir été mit de côté ne rendait pas les deux dernières années moins douloureuses, au moins il pouvait le comprendre.

Il médita un moment sur tout cela, laissant le voyage se dérouler uniquement sous la cadence rythmée de leur chaussures martelant le sol. Puis il se souvint qu'il avait quelque chose à dire à Yami, sans avoir encore trouvé le bon moment pour cela, à moins que c'était l'envie qui lui faisait défaut. Mais l'opportunité se présenta, alors il le lança avant de le regretter. Il aura déjà largement l'occasion de le faire ensuite...

« Yami. » commença-t-il d'une voix neutre en regardant droit devant lui. « Concernant la dernière discussion que nous avons eu par pierre de sang... je pense que je vous dois des excuses. Je n'irai pas jusqu'à dire que les mots ont dépassé ma pensée, mais je les regrette : je sais que ce n'est pas vrai. »

Natsuki savait reconnaître quand il avait tort, même envers quelqu'un avec qui il ne partageait pas d'affinité, comme Yami – en l'état des choses, c'était même tout le contraire. Après, de par le fait qu'il n'avait justement aucun atome crochu avec elle, ce qu'elle comptait faire de ses paroles lui passait royalement au-dessus : il était tranquille en âme et conscience avec lui-même.

Et probablement que là-dessus, il n'y eu aucun autre événement susceptible d'être relevé durant le trajet, et aucune discussion qui ne saurait être décalée à leur traversée en bateau, ou leur débarquement. Il embarquèrent donc au port d'Higata, sur un bateau prenant la direction d'Odaichi. Chaque fois que Natsuki s'était rendu au Pays du Vent, il se retrouvait à devoir mettre les pieds là-bas. Ce n'était pas une capitale pour rien...

A l'occasion du dernier jour de voyage en mer, il entreprit de cesser les dissimulations par métamorphose, et à l'aide du sac scellé qu'il avait emmené avec lui – parmi beaucoup d'autres choses –, il commença le déguisement qui lui collera à la peau durant tout son séjour. Derrière un paravent installé dans sa cabine, son ombre s'agita sur le tissu en rythme de ses mouvements. Entièrement nu et entouré de son matériel à porté de main, il s'appliqua sur la peau une fine couche de peinture évoquant le blanc pâle. Membre après membre, ses tatouages disparaissaient alors que sa peau prenait une teinte laiteuse en absorbant la poudre qu'il émiettait dessus pour en prolonger la durée. Même sous l'eau, la peinture corporelle pouvait ainsi tenir plusieurs jours sans se détériorer. Et avec la traversée du désert tout en sueur qui l'attendait, son déguisement avait au moins besoin de cela pour rester crédible. Et c'est alors qu'il achevait de peindre son visage que Yami entra dans sa cabine. Ils avaient à faire le point sur les jours à venir.

« Vous voilà. » dit-il après un bref coup d’œil par-dessus le paravent pour s'assurer qu'il s'agissait bien d'elle. « Je ne suis pas encore tout à fait prêt, vous m'excuserez de vous faire la discussion d'ici. »

Il détacha les cheveux qu'il avait maintenu en coiffure traditionnelle Nara le temps de se colorer entièrement le corps. Dans l'ombre, ces derniers cascadèrent sur ses épaules, révélant ainsi qu'ils avaient bien poussé depuis la dernière fois. Leur couleur noir que Yami pu brièvement apercevoir lorsque Natsuki lui présenta son crâne tranchait avec son habituel bleu terne assimilé blanc argenté. La coloration était préférable au port de n'importe quelle perruque, aussi réaliste et bien attachée qu'elle soit.

« Si j'ai bien comprit, nous allons maintenant rencontrer l'assistant personnel de Satoshi Saibogu, qui nous attend à Odaichi, c'est bien cela ? Je vais m'abstenir de poser des questions dépourvu de sens comme '' est-il fiable ? '' ou '' peut-on lui faire confiance ? '', - je me doute bien que vous avez choisit consciencieusement vos relations - mais au moins une me taraude l'esprit : en quoi est-il impliqué dans l'histoire des hôtes au sein de la famille d'Oniri ? »

Non pas qu'il mettait en doute les connaissances du second de Satoshi. Et même s'il le voulait, cela ne changerait de toute façon rien : il savait que le Saibogu allait être très occupé avec Konoha prochainement, s'il n'était pas déjà en route maintenant vers le Pays du Feu. Simplement, le Nara tatoué était curieux de la situation, il appréciait de savoir dans quoi il mettait les pieds, et avec qui il traitait.

« Le verrons-nous dès aujourd'hui ? » demanda-t-il ensuite à haute voix.

Les vêtements qui pendaient pliés en deux sur le paravent disparurent un à un, alors qu'une main à la pâleur maladive les saisissait pour les enfiler. Après quelques minutes pour ajuster certaines pièces, il écarta la séparation d'une main, et présenta à Yami son déguisement entièrement naturel.

« Vous aimez ce que vous voyez ? » lâcha-t-il d'une voix caverneuse en écartant les bras sur le côté, dans une posture de mise en valeur.

Ses yeux écarlates comme son sourire aux crocs naturels transpiraient l'arrogance. Une fine barbe taillée dessinait le contour de ses lèvres pour tomber jusqu'à son menton. Et aussi bas que descendait le regard ensuite, il n'y avait que son torse musclé où poser les yeux, mis en avantage par une longue veste ocre taillée pour ne pas couvrir plus loin que les épaules. Rien de plus qu'un pantalon assorti couvrait le reste, si ce n'était l'imposante plaque d'acier ouvragée pourvu d'un crâne qui lui ceinturait les hanches jusqu'au dessus du nombril.

'' Chiche '' revint en écho d'une lointaine discussion.

Spoiler:

Le Nara avoua qu'il aurait probablement fait la même chose que la Saibogu : choisir sa nation à ses sentiments... Quelle bien étrange vision des choses. La mienne ne s’embarrassait pas de ce genre de choix moraux : je suivais mes intérêts, voilà tout. Les sacrifices au dépend de mes envies ne faisaient pas partis de ma philosophie. Pas plus que la pensée d'autrui à mon égard ne pouvait m'atteindre. C'est pourquoi je haussais un sourcil circonspect à l'entente de son repenti dont je n'avais que faire.

« Je me moque éperdument de votre pensée me concernant. Aussi je n'éprouve pas la moindre considération pour vos excuses. »

Pourquoi s'en souciait-il subitement ? Pensait-il que cette escapade tisserait un lien au demeurant inexistant ? Il était vrai que j'avais rafistolé son squelette et sciée une barre de fer entourant sa jambe en guise de maintiens de débrouillardise mais s'il espérait s'attirer mes faveurs simplement parce que nous avions un dénominateur commun en la personne d'Oniri il se fourvoyait lourdement.

Je roulai des yeux sans ralentir ma cadence après cette interlude pour le moins inutile. Ce voyage promettait visiblement son lot de surprise et je ne m'attendais certainement pas à celle qui allait suivre alors que nous nous étions mis en route par la voie maritime, aux derniers instants de ces quatre jours de traversée à temps défavorable.

Assise sur le lit de ma cabine, je caressai la tête du chaton noir qui, contrairement à la plupart de mes autres félins, possédait un pelage. Nous arrivions bientôt à Odaichi et il me restait à évoquer quelques détails avec le Nara bien que le débarquement n'était pas encore imminent.
Dans ce but, je me redressai et laissai au soin de mon kuchiyose de surveiller mes effets personnels en mon absence. Il avait beau ressembler à une adorable boule de poils, je ne me faisais pas le moindre soucis pour Crazy et sa frimousse parfois si angoissante.

Frappant à la porte du Konohajin, plus par crainte d'entrer au mauvais moment que par politesse, je pénétrai ensuite dans la pièce semblable en tout point à la mienne si ce ne fut le paravent tiré duquel j'eus un aperçu rapide qui me fit douter d'être entrée dans la bonne chambre... Enfin, cela serait effectivement ce que j'aurais pensé si je n'avais pas reconnu sa voix.
J'arquai un sourcil inquisiteur à l'encontre du paravent et surtout aux paroles que j'entendis.

« Ne vous excusez pas. Je ne tiens de toute façon pas à découvrir ce qui se cache derrière. »

Je m'adossai contre le mur, bras croisés, écoutant les questions qu'il avait à me poser avant de lui répondre d'une voix neutre :

« C'est bien cela. Saix était présent à Yuki no kuni à mes côtés et auprès d'autres Sunajins alors que nous cherchions Oniri qui avait été enlevée. »

Rapatriée sur sa terre natale par sa « famille ».

« Il avait connaissance de l'histoire des entités. Et entre nous, il ressemble bien trop à mon goût à une version plus jeune de Satoshi... »

M'étais d'avis qu'il s'agissait d'une énième invention ou procédé du vénérable Saibogu. Son implication dans l'histoire et le fait qu'il avait connaissance de la nature de la mère d'Oniri prenait ainsi à mes yeux tout son sens.

« Nous le retrouverons en effet aujourd'hui, peu après notre débar...quement. »

Je parlai jusqu'ici d'un ton neutre mais mon dernier mot fourcha par la surprise tandis que mon regard se posa sur cet homme dont je me serrais assurément souvenu si j'avais déjà eu a loisir de le croiser...

« Comme quoi... Un peu de maquillage et d'apparats peut vous changer un homme... »

Un picotement me parcouru les canines alors qu'une lueur d'intérêt dût se dessiner dans mon regard écarlate, luisant d'appétence. Ce dernier descendit vers son torse nu aux muscles saillants que je détaillais avec minutie : un corps comme il ne m'avait pas été donné d'en voir depuis longtemps...

Décollant mon dos du mur, je m'approchais d'un pas dans sa direction, bras toujours croisés sans cesser de l'aviser.

« Puisque vous avez rejoint le cercle des Ketsueki et que j'en suis la dirigeante il nous faut désormais finaliser votre affiliation. Avez vous une préférence pour l'endroit de la morsure... ? »

Lui susurrais-je presque, dans un sourire taquin.
Je laissai planer une seconde de trop et retrouvais contenance en plus de mon sérieux pour feindre la comédie.

« Mmh plus sérieusement... Hormis la barbe dans son cas, vous ressemblez beaucoup à mon père. Ce qui est assez déroutant... »

Ne disait-on pas que les femmes recherchaient un homme à l'image de leur père ? Et puis... je pensais à Kioshi et me demandais où avais-je la tête...

« N'avions nous pourtant pas convenu que le déguisement d'un Kazejin n'était pas le meilleur des compromis ? Et si votre attitude vous trahissait ? Ou si vous étiez amené a devoir utiliser vos dons claniques ? »

Je haussais un nouveau sourcil.
Je le lui avais pourtant déjà dit : a trop vouloir imiter quelque chose on en tombait dans le cliché au point ou cela en était ridicule.

« Votre physique est plutôt convaincant, je dois l'admettre. Mais quel est votre position face à votre clan ? Faites vous partie des adorateurs de Jashin ? Quelles sont vos pensées à l'égard de Kyoshi Rei ? »

Autant de choses sur lesquelles tout Ketsueki avait son opinion : sauf que la plupart suivait la Comtesse, autrement dit moi, tandis que le restant résidait encore à Suna.

« Depuis ma désertion, mon clan est scindé. Les éléments les plus instables m'ont suivi. »

Etait-ce pour diriger les plus dignes de porter le nom des Ketsueki ou simplement pour débarrasser Suna de la mauvaise graine... seul moi le savais.
Je n'avais aucune envie de faire étalage de mes affaires claniques mais puisqu'il voulait jouer les manieurs de sang mieux valait qu'il en connaisse les grandes lignes.

« Tâchez de vous fondre dans la masse même si, vous le verrez, les regards convergeront presque toujours dans notre direction. »

Les Ketsueki avaient beau être installés depuis toujours à Kaze et depuis un petit moment à Suna, il n'en restait pas moins que notre réputation nous poursuivait : les regards qui nous étaient adressés se montraient rarement amicaux et souvent effrayés.

« Je vais prendre cela pour un '' oui ''. » dit-il en affichant un rictus satisfait.

Yami le dévorait du regard, il le sentait presque rouler sur sa peau, mais à aucun moment il ne doutait être vu autrement que comme de la viande fraîche. Le dangereux cocktail de séduction, d'arrogance et de dédain qu'était la Ketsueki avait de quoi faire frémir n'importe qui, et lui-même sentit ses poils se hérisser en réponse à un mélange de désir et de mépris lorsqu'elle lui susurra l'idée de planter ses crocs dans sa chair. Prêts à se jeter à la gorge l'un de l'autre, les crocs au clair, il lui rappela qu'elle n'était pas la seule à savoir jouer de cet air-là.

« Peut-être avez-vous un morceau de préférence ? » murmura-t-il avec sensualité en présentant innocemment la carotide saillante de son cou.

Leur nez se touchaient presque, un grondement sourd évoquant un rire s'échappant de ses lèvres alors que la tension grimpait, son corps prêt à lui bondir dessus et la renverser au sol. Mais il se détourna le premier dans un grognement frustré, étant largement plus prédisposé à éprouver la haine que l'envie : ce n'était pas le moment de jouer à cela. Surtout que Yami prendra beaucoup plus de plaisir à l'écharper vif que réciproquement - plaisir qu'il ne comptait pas lui céder. Tournant le dos, il commença à ranger son matériel.

« La seule chose dont je me souviens avoir convenu avec vous était de sauver Oniri. » répondit-il d'une voix patiente. « Alors je ne vois pas ce que mon emprise sur les ombres vient faire là-dedans : que je me serais déguisé en Kazejin ou même en chat, le problème aurait été le même. Vous croyez que je ne compte que sur l'héritage de mon clan pour survivre ? Ne me donnez pas l'occasion de vous décevoir dans ce cas. »

Le plus simple était encore de prétendre au besoin qu'il imitait les pouvoirs de ceux qu'il tuait en buvant leur sang. Ses affaires réunit dans la mallette de déguisement, elles disparurent dans un sceau qu'il jeta dans son sac de voyage. Dans le fond, les reproches continuaient.

« Alors plutôt que de brasser inutilement de l'air avec votre langue fourchue, servez-vous en pour m'apprendre ce qui manque à mon rôle. Car après tout, je ne suis qu'un simple servant : votre pensée est mienne, Bludrexe »

Autrement appelée '' Reine de Sang '' dans la langue ancienne. Son sourire suffisant révéla qu'il avait déjà fait ses recherches sur le clan des Ketsueki et leur histoire. Pour peu qu'il soit présenté comme étant au bas de la hiérarchie, il n'avait même pas à parler sans qu'elle lui en donne la permission.

Natsuki jouissait d'une excellente mémoire, pour le meilleur comme pour le pire, aussi Yami pouvait avoir la certitude qu'il retiendra tout ce qu'elle lui dira au sujet de son clan, même si dans le fond il doutait que le Sunajin, peu importe qui il sera, ait envie de perdre son temps à en apprendre plus sur lui.

« Bien, maintenant que la leçon d'histoire est terminée... » dit-il au terme de celle-ci. « ... il y une dernière chose que j'aimerai savoir avant que nous débarquions. Quand vous avez mentionné Saïx tout à l'heure, vous avez évoqué dans la même phrase l'enlèvement d'Oniri. Qu'est-ce que c'est que cette histoire ? »

Oniri lui avait parlé très peu d'elle pendant qu'il avait séjourné à Suna en sa compagnie, préférant vivre l'instant présent pour créer des souvenirs plus joyeux. Mais après deux ans de vide en son absence, c'était visiblement de la bouche des autres qu'il avait beaucoup à en apprendre sur elle.

Le Nara jouait avec le feu. Un brasier subitement allumé dont il pourrait bien être le premier à s'y brûler. Ma soif n'était plus aussi incontrôlable que lors de mes jeunes années et bien que je ne rechignais pas à l'idée de succomber à la tentation, éprise de désir et de convoitise à cette simple pensée, je ne faisais à l'instant que m'amuser.

Toutefois, sa réponse allant dans le sens de mon petit jeu me donnait davantage envie de me laisser tenter... Quel goût pouvait avoir le sang d'un Nara ? Se rapprochait-il réellement de son animal totem en la représentation du cervidé ? Et qu'en était-il de celui d'un Nara possédant une entité démoniaque ? Ma curiosité me poussait à le découvrir, me laissant porter par ses mots et sa gestuelle qui sonnaient comme une invitation tandis que j'en conservais un certain détachement, prête à fondre sur lui canines en pointes effilées dehors.

Mon regard écarlate observait le sien falsifié, intensément. Nos visages si rapprochés me permettait d'entendre son souffle rauque tout comme il pouvait percevoir le mien dans cette atmosphère sous tension malsaine. La soif de chair n'était ici en rien semblable à celle que l'on pourrait dépeindre en évoquant deux corps subitement consumés par le désir : il n'était là question que de deux chasseurs s'avisant avec dualité et appétence dans l'attente de savoir qui des deux serait la proie soumise à l'autre.

Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas ressenti cette émotion perfide. Cette situation qui par le moindre geste, la moindre parole, pouvait conduire aux déchaînements des passions affamées. Je n'en étais pas à mon coup d'essai et cet aspect faisait même partie de ma nature mais je devais avouer que le défi que représentait le Nara ajoutait un brin d'excitation supplémentaire.
Les crocs révélés, malgré cette ambiance enveloppée de sensualité, n'en était pas moins une mise en garde, une affirmation des pulsions meurtrières qui en découlaient et dont le défi se révélait si enivrant...

Après un grondement que je percevais comme de la frustration, Natsuki se détourna pour ranger son matériel, mettant fin à cette tension. Mon regard ne le quitta pas tandis qu'un sourire satisfait s'étira sur mes lèvres, le calme aussi soudainement retrouvé qu'il fut parti.
Cette facette du Nara éveillait mon intérêt et je comptais bien lui faire refaire surface... en un autre temps. Pour l'heure venir en aide à Oniri restait la priorité : nous avions besoin d'être tout deux en état pour cela. Nous coopérions d'abord, nous nous étriperions passionnément ensuite.

Et le voilà qui redevenait désagréable, me faisant lever les yeux au plafond tout en perdant le peu de patience dont je disposais. L'entendre cependant utiliser un terme de la langue ancienne me fit tourner le regard sur lui, sourcil arqué, avant d'émettre un léger ricanement amusé. Il connaissait visiblement son sujet.

« Vous avez de la chance. Je suis justement la Comtesse la moins tyrannique parmi mes ancêtres. Vous pourrez donc parler sans me quémander la permission tout en me baisant les pieds tant que ce n'est pas pour ouvrir votre bouche sur des futilités. »

Quant à la leçon d'histoire...

« En tant que Ketsueki Kazejin vous ne vouez pas d'attirance particulière au culte de Jashin, cela sera plus simple ainsi comme vous vous en doutez. Vous tâchez d'être un Ketsueki respectable et respecté sans la moindre envie de prendre toute vie que vous jugez inutile, parce que vous n'avez pas à perdre votre temps sur ce pauvre menu fretin et accessoirement parce que vous êtes fidèle à votre patrie... Pour autant vous possédez votre caractère et on ne peut guère vous faire confiance de part la méfiance que vous inspirez. Tout le monde se tient en général à l'écart des Ketsueki ou tâche de ne pas trop se mêler de leurs affaires. Ils savent bien que la moindre goutte de sang subtilisée signerait leur fin. Et surtout, ils se souviennent des faits rapportant notre nom.»

Ceux comme quoi mes ancêtres, et même plus particulièrement mon père, ont décimés bons nombreux d'être humains sur ces terres désertiques. Mon paternel était l'un des plus grands tyrans que Kaze ait connu par le passé. Les Akuzu et les Marionnettistes s'étaient alors alliés pour défaire la menace Ketsueki, aujourd'hui presque exterminés par leur trop grande confiance en leur puissance.
Je ne comptais pas retranscrire leurs erreurs. Les miens seraient menés à la place qui nous était due autrement que dans la simple conquête par le meurtre et le sang.

Au final je ne lui apprenais que peu d'éléments et c'était mieux ainsi. Ogami n'en savait pas davantage et n'allait pas le questionner sur le nom des différents chef de clan, Comtes ou Comtesses pour la plupart, sortant directement de ma lignée. Et quant bien même le Toshiro s'y adonnerait, je n'aurais qu'à souffler les réponses à l'oreillette du Nara.

Ce dernier rebondit d'ailleurs sur un point que j'attendais.
M'adossant une nouvelle fois contre le mur, les bras croisés et la tête légèrement inclinée, je l'avisais de manière amusée.

« On dirait que vous ignorez beaucoup de choses sur celle que vous prétendez aimer. Ne s'est elle pas prêtée à la confidence auprès de celui qui berçait ses nuits ? »

Ironisais-je avec un brin de mépris avant de lui apporter une réponse.

« Elle a effectivement été enlevée lorsque nous étions encore Sunajins. Ses proches ou encore les manieurs de shoton ont été conviés à se rendre à Yuki no Kuni. Le kidnappeur n'était autre que son père biologique. L'histoire est longue et complexe mais pour faire court, Oniri et Soma, sa jeune sœur sont issues d'une union entre humain et démon : leur mère étant Ewa, l'une des quatre entités formant Yorn. Ce mélange incomplet mettait la vie d'Oniri et Soma en péril si bien que leur père a voulu y remédier. Pour former une entité complète à part entière, Soma a décidé de sacrifier sa vie pour ne faire plus qu'un avec celle d'Oniri. »

Arrivait-il à me suivre dans ce récit compliqué pour lequel il m'arrivait moi même de me perdre ?

« C'est lors de ce périple que j'ai approché Chura : l'entité de Yorn représentant son corps obscur. Nous nous sommes battus contre lui. Oniri était a demi consciente puis s'est éveillée sous sa forme démoniaque complète. Nous avons affronté son père avant qu'il ne se scelle avec le démon géant dans les profondeurs d'une caverne. »

Mon regard s'était perdu vers le plafond alors que je racontais tout cela, emprunte d'une certaine nostalgie. Je me souvenais de la peur vrillant mon esprit tandis que je voulais retrouver Oniri à tout prix, désobéissant pour cela déjà à un ordre de Kioshi, alors Chef du Kakumeigun.

« La forme démoniaque d'Oniri est complète depuis ce jour. »

Elle avait réussi à trouver l'équilibre de ces nouvelles facultés jusqu'à ce qu'il la laisse lui subtiliser un fragment de pulsion de son propre démon. Je me gardais bien de le rajouter mais mon regard méprisant devait parler pour lui même. Cependant, je ne pouvais m'arrêter une nouvelle fois sur ces faits justement parce qu'il en était ainsi et que seul nos recherches nous permettraient de rectifier cette erreur que je ne pouvais pardonner au Nara.

La sirène du bateau retentissait dans un bruit sourd à cet instant et nous pouvions l'apercevoir depuis le hublot : la terre était en vue, le débarquement imminent.
Je me détournai pour quitter dès lors la pièce dans une dernière parole.

« Je vais chercher mes affaires dans ma cabine. Venez m'y retrouver s'il y a certains points qui nécessite votre éclaircissement en attendant l’amarrage du bateau, Xehanort... »

Ma tête tourna dans sa direction tandis que je lui glissais son pseudonyme d'une voix suave avant de reprendre la route.

Natsuki ne l'avouera jamais, mais au fond de lui-même, il aurait été déçu que Yami manque de lui faire une remarque au sujet de ses connaissances relativement ténues sur Oniri. Aussi, sous son visage agacé par le commentaire de la Ketsueki se cachait un sourire invisible.

« Peut-être qu'ayant trouvé quelqu'un qui lui apportait un peu de bonheur dans la vie – et pas seulement sur l'oreiller -, elle a préféré vivre les moments agréables que nous passions ensemble plutôt que de ressasser un passé douloureux. »

Il haussa les épaules.

« Surtout si elle savait qu'elle disparaitrait ensuite. »

Mais il le concédait, il avait beaucoup de lacunes sur l'histoire de la Saibogu, une fois la partie sur sa petite enfance passée. Peut-être qu'elle se serait davantage ouverte s'ils avaient eu plus de temps devant eux, mais avoir la réponse ne l'avançait à rien dans l'immédiat. Et s'il ne trouvait pas de solution avec Yami pour l'état d'Oniri, la réponse n'aura même plus d'intérêt tout court.

Il ramena donc son attention sur ce que lui expliquait la Ketsueki afin d'apporter un peu de lumière sur les zones d'ombre d'une histoire dont il était loin de connaître tous les recoins. Des explications qui donnaient un peu plus de sens sur le peu dont lui avait fait part Oniri, comme sa relation avec Soma.

« Je vois. » finit-il par dire simplement lorsque Yami eu terminé.

Ce qu'il voyait était vague, car issue d'une histoire compliquée, mais c'était justement parce qu'il prenait les faits pour ce qu'ils étaient sans chercher à leur donner une certaine logique qu'il parvenait à suivre le fil de la narration.

« J'espère que mon corps n'a pas de famille lui. Je serais bien embêté de devoir lui faire face si elle venait le chercher pour prendre des nouvelles sur ce qu'il devient. »

Mieux valait encore espérer qu'il était né tout seul comme un grand : il concevait d'ailleurs mal comment pourrait coexister une famille de créatures comme celle dont il s'était approprié le corps. Et avant qu'il ne se perde à tenter de l'imaginer, la sirène du bateau leur signala qu'ils arrivaient à destination sous peu. Yami retourna alors se préparer dans sa propre cabine, non sans lui lancer un dernière salve embrasée – qui eu en seule réponse un grondement guttural de prédateur.

Il acheva de réunir ses affaires de son côté, et s'enveloppa dans une large cape de voyage aux couleurs du sable si répandu Kaze. Comme il avait comprit que les Ketsueki, bien qu'attirant toujours sur eux des regards torves, n'étaient pas du genre à se cacher, il laissa sa capuche pendante derrière lui pour offrir son visage blafard aux yeux de tous. Que chacun puisse l'identifier, et savoir qui il était, sans qu'il ne témoigne de la moindre honte à ce sujet.

Une fois le bateau à quai, il descendit la passerelle en compagnie de Nemui, à la recherche de leur premier rendez-vous. D'après ce qu'il avait comprit, ce fameux Saïx devait les attendre dans un bar en début d'après-midi, ce qui en plus d'être très vague correspondait plus ou moins à maintenant. Il avait eu droit à une description de l'assistant de Satoshi, même si dans le fond, comme Yami le connaissait et que lui ne la quittera pas, c'était assez accessoire.

L'information qui lui servait davantage était le nom de l'établissement dans lequel ils avaient rendez-vous. Il n'avait jamais mit les pieds là-bas, mais même si ses souvenirs d'Odaïchi étaient vieux de deux ans, ils étaient aussi frais dans sa mémoire que s'il les avait emmagasiné la veille. Natsuki avait beaucoup flané dans la capitale avec Oniri, mémorisant sa foule, ses rues, ses boutiques, créant tant de nouveaux souvenirs dans lesquels s'inscrivait le sourire de la jeune femme qui l'accompagnait. Un sourire qu'il voulait revoir.

Resserrant sa cape sur son corps, il prit la tête de la marche et se fraya un chemin jusqu'au bar dont il connaissait la localisation. Il constata d'ailleurs durant le trajet que Yami n'avait rien exagéré. Tous les regards se portaient vers eux lorsqu'ils passaient à proximité de quelqu'un. Des regards où se lisait la méfiance et la crainte. Natsuki se souvenait des difficultés qu'il avait eu pour avancer dans les rues bondées par une foule dense. Aujourd'hui, les gens s'écartaient presque de son chemin, ce qui leur firent gagner beaucoup de temps.

En une vingtaine de minutes seulement, ils atteignirent le bar nommé '' le XIII '', où ils entrèrent. A l'époque, Natsuki n'en avait vu que la façade, et découvrait aujourd'hui qu'il n'avait pas raté grand chose dans le fond. L'architecture globale était vraiment minimaliste, et jouait davantage sur ses couleurs vives que sa décoration pour la mise en ambiance. Hormis les hautes chaises du bar où un serveur assurait le service, l'essentiel du mobilier pour prendre place se résumait à des canapés et des banquettes.

Il y avait peu de clients à cette heure-ci, aussi Natsuki n'eu pas trop de mal à remarquer celui qui les intéressait. Ignorant la salutation du barman, il indiqua Saïx à Yami d'un mouvement de la tête, et la laissa passer devant pour prendre contact avec lui.

Mécaniquement, le Nara déguisé avait déjà repéré les sorties, les individus présents dans la salle, et la façon dont l'on s'intéressait ou non à lui.

Son grondement guttural m'étira un sourire tandis que je quittai la pièce pour retrouver la mienne.
Crazy fut toujours posé sur le lit sans avoir bougé d'un iota. Même ma présence ne le fit pas broncher si bien que j'eus l'impression d'avoir a faire à une représentation taxidermiste. Je ne m'y attardai cependant pas, préférant la quiétude du silence aux inlassables ronronnement des félins ordinaires.

Mettant de l'ordre dans mes affaires, je me changeai à mon tour sans prendre la peine de me dissimuler derrière le paravent, prenant des vêtements avec lesquels je serais un peu plus à mon aise même si cela resta encore bien loin de mon style habituel. Je maintins mes longs cheveux noir avec deux broches et un ruban écarlate tout en passant un élastique en tissu de la même couleur autour de l'une de mes mèches tombantes.

Apparence:

Fin prête, je rejoignis le Nara pour le débarquement, quelque peu éblouie par les rayons du soleil et cette chaleur lancinante dont je n'avais plus l'habitude mais qui m'avait pourtant manqué depuis mon dernier passage à la capitale. C'était stupide et complètement hors propos mais la simple vision de l'astre diurne me faisait penser à Kioshi... Lui et son clan se revendiquant comme des soleils alors que, paradoxalement, je lui avais toujours souligné que j'étais davantage une servante de la nuit... Mais qu'importait...

Nous ne perdions pas un instant pour nous diriger vers le bar dans lequel nous attendait Saïx. Cela faisait bien longtemps que je ne l'avais pas revu et pour ainsi dire cela me semblait dater d'une autre époque voir même d'une autre vie.

Étonnamment, le Nara semblait savoir où se trouvait le fameux bar de l'organisation « XIII ». Peut-être avait-il eu l'occasion de se balader avec Oniri par ici et de compter fleurette pendant que je me tuais à la tâche dans mon bureau du Kakumeigun... Comment cela j'étais acerbe ? …

En un sens, rien avait changé ici. J'avais déjà eu l'occasion de revenir en ce lieu et comme je l'avais dit plus tôt au Nara, les regards étaient toujours les mêmes sans qu'ils ne m'atteignent d'une quelconque façon. Je n'avais pas besoin d'être considérée par ces gens dont j'ignorais tout et dont je me moquais bien. Ils n'étaient en rien un poids, un fardeau mais bien au contraire une fierté.
Celle de faire toujours véhiculer la crainte et la méfiance que mes ancêtres avaient instauré et suscité. Un héritage dont je me sentais digne et qui me faisait garder la tête haute en observant droit devant moi, vers mon chemin, ma destinée, sans que celles d'autrui ne viennent entraver mes objectifs.
Bien entendu, il y avait quelques exceptions. Des êtres que je jugeais si chers qu'il m'était possible de détourner la tête dans leur direction pour leur prêter mains fortes. Il fut un temps ou aucune vie en ce monde ne jouissait d'un tel privilège de ma part et bien que cela me causait certaine fois du tord, il n'en restait pas moins un moyen de me sentir vivante malgré les palpitations de ce cœur qui ne m'appartenait pas.

Les dédales des rues furent franchies dans un complet silence jusqu'à l'entrée dans ce fameux bar. A peine eus-je mis un pieds dans la bâtisse que je repérai notre homme. J'observai malgré tout les alentours avec méfiance, laissant à loisir Crazy – toujours perché sur mon épaule – scruter les environs avec ses sens amplifiés. Dans le même temps, je passais en revu mes différents liens écarlates justement noués avec les êtres comptant dans mon existence et remarquai la présence d'Ogami se rapprochant peu à peu de la capitale, m'étirant un sourire.

Le Nara fit un signe de la tête dans la direction du Saibogu qu'il avait reconnu à son tour. Sans perdre un instant, j'allais a sa rencontre, m'asseyant sur la chaise de bar juxtaposée à la sienne tout en commandant un bloody mary au barman pour qu'il s'occupe de ses affaires.

« Cela faisait longtemps, Saïx. »

Glissai-je dans un fin sourire.
Je désignai ensuite le Nara déguisé d'un mouvement de tête.

« Il m'accompagne pour lui venir en aide. Il est un peu bestial mais on peut lui faire confiance pour ce périple. Aussi surprenant cela peut-il paraître il est un être cher pour elle. »

Ce genre de phrase était toujours aussi écorchant à prononcer mais il s'agissait d'une vérité qui devait être dite : Saïx avait vu Oniri grandir et il était certains qu'il ne laisserait pas le premier loubard s'immiscer dans l'histoire familiale de la Saibogu. Je l'avais vu lors de son sauvetage à Yuki no kuni et cela même sous ses airs de froideur : il tenait à elle.

« De quoi disposez vous pour nous venir en aide ? »

Sous entendu lui ou Satoshi. Des rapports archéologiques, des faits dont avait connaissance Satoshi Saibogu lui même concernant les entités... Tout était bon à récupérer.

Saïx attendait maintenant depuis une bonne dizaine de minute dans le XIII. Sa patience n'était pas parvenue à avoir raison d'un verre de whisky si bien que des glaçons de tardèrent pas à tinter dans un verre à moitié rempli. Le Saibogu était plutôt bon collègue avec le patron des lieux si bien que ce dernier s'appliquait généralement à doser généreusement chacune de ses commandes. Et comme un vice allait toujours avec un autre, il s'alluma une cigarette sitôt installé. Il n'était pas le seul consommateur si bien qu'une odeur de tabac froid imprégnait depuis longtemps les murs de l'établissement. Cela ne paraissait pas sous ses airs durs mais le bras droit de Satoshi était plutôt détendu. Sa progression l'obligeait à faire preuve d'un certain détachement vis-à-vis de ce qui l'entourait. En réalité disons plutôt que c'était ce qui lui avait permis de tenir toute ces années. Cela et le whisky.

Accoudé contre le bar il vit finalement entrer la personne qu'il attendait en ne pouvant s'empêcher de penser que cette merdeuse, à l'image de celle de Satoshi, avait également bien grandit. Il réprima un sourire à cette pensée et attarda un peu plus son attention perçant de son regard d'acier les traits de l'homme qui l'accompagnait. Pour faire simple Saïx n'avait aucune foutre idée de qui était cet individu ce qui l'incitait à être naturellement méfiant. En première vu il s'agissait d'un Ketsueki, pas besoin d'être anthropologue pour le deviner. Mais s'il n'était pas le meilleur senseur du pays il remarquait très distinctement que le niveau en chakra de ce type crevait le plafond. Hésitant un instant il finit par passer outre tous ses aspects. La Ketsueki était suffisamment grande pour savoir qui l'accompagnait, lui n'était pas payé pour s'en méfier.

-Trois ans si je ne me trompe pas. Dit-il avec un sourire en coin. Et enchanté monsieur... ? Il attendit sa réponse. Xehanort ? Ce non me dit quelque chose... Vous seriez pas de la famille de … ?! Non laissez tomber.

Décidément la petite Saibogu, outre sa formidable capacité à se foutre dans des pétrins pas possibles, avait tendance à s'entourer de gens bizarre. Ce n'était pas qu'il n'appréciait pas la Ketsueki à sa juste valeur, mais il fallait admettre qu'elle était sacrément toqué elle aussi. Lorsqu'elle le questionna sur la marche à suivre il passa machinalement ses doigts dans sa barbe finement taillée, dubitatif.

-Suivez-moi...

Il s'éloigna du bar pour prendre place à une table dans le fond. Il y avait moins de monde de sorte que le groupe pourrait discuter en toute tranquillité. Là il déplia une carte de Kaze quadrillée.

-Pour être honnête je n'ai aucune idée de où est-ce que Heyle se trouve, pour autant je peux vous affirmer où est-ce qu'elle n'est pas.

Il désigna la partie en vert de la carte elle désignait tout le nord de Kaze.

-Juste au-dessus de Suna, jusqu'aux différentes frontières au nord et à l'est et délimité par le fleuve Taiga à l'Ouest. L'essentiel des fouilles archéologiques de ces cinquante dernières années se sont exclusivement concentrées dans cette partie du pays en raison du grande nombre de sites. Autant affirmer qu'il n'y a plus rien à découvrir ici. Ce qui nous laisse tout le reste à explorer...

Voilà ce qui arrivait quand un pays venait à acquérir différent peuple de différentes ethnies en les laissant se mélanger entre elle, évoluer, se clanifier et ce sur une période de plusieurs millénaires. On obtenait d'un point de historique et archéologique que ce Saïx aimait à communément appeler « un beau bordel ».

-Autant dire qu'il faudrait cent ans de plus pour réussir à le trouver et si t'as l'éternité devant toi miss, ce n'est pas vraiment le cas pour nous. Seulement il y a une possibilité pour nous de brûler les étapes.

Il leva un regard vif pour s'assurer tour à tour de l'attention des deux protagonistes.

-On sait que le peuple à l'origine de la création de la mère d'Oniri se nomme les Kar'solrei. On à retrouver des vestiges de leur civilisions à Yuki et Kaze, mais celle-ci en très petits nombres et leur contenu n'était pas vraiment probant, hormis pour le démon millénaire à tentacule enfermé dans la montagne...

Il adressant un regard à Yami avant de hausser les sourcils.

-Ça avait vraiment été une journée de merde... Bref passons. Autant dire qu'en ce qui concerne Kaze nous n'avons que peu d'informations sur les Kar'solrei sauf que... Il marqua une pause en se fendant d'un sourire. Ô surprise... Tu possèdes des Kuchiyose en lien avec cette civilisation ! Tous récupérés dans des sites de fouilles dans le désert.

Satoshi n'en avait jamais donné l'impression mais il avait étroitement surveillé les actions de sa fille dans l'éventualité ou un jour son côté démoniaque venait à se manifesté et comme Suna conservait toutes les archives concernant ses Shinobi, Saïx était au fait des moindres détails techniques concernant Ketsueki Yami éternel partenaire d'Oniri.

-Je m'avance peut-être un peu, mais si nous essayons de mettre en corrélation les informations de notre banque de donnée sur l'histoire de Kaze, ses différents peuples ainsi que les ruines allants avec aux souvenirs et informations que disposent tes invocations ; nous pourrons peut-être avoir un début de piste.

Une fois entré dans le bar, Natsuki se montra beaucoup plus silencieux. Durant tout ce qui suivit, il se limita à trois phrases. L'une avec un sujet, une avec un verbe, et une dernière avec un complément. Difficile de rentrer davantage dans les critères de Yami donc...

La jeune femme s'avança jusqu'à Saïx qui les avait dévisagé – surtout lui, en fait – et prit place au bar, sur la haute chaise adjacente. Natsuki se contenta de suivre et s'installa du côté de la Ketsueki, afin d'éviter de flanquer leur contact. Mieux valait éviter de créer plus de tension qu'il y en avait déjà. Le visage neutre, il avait effacé le sourire arrogant affiché à Yami lorsqu'il lui avait présenté son costume. Il pouvait difficilement se faire oublier avec son apparence, mais moins il fera de vague, et mieux il se portera.

« Xehanort » répondit-il simplement de sa voix caverneuse lorsque Saïx l'interrogea sur son identité.

Le serveur vint rapidement à leur rencontre, interrompant au passage les mondanités d'usage pour prendre leur commande : un bar ne tournait pas juste avec de la discussion entre consommateurs et visiteurs.

« Sundae fraise. »

Ses doigts griffues déposèrent sur le comptoir la monnaie locale en guise de paiement, suite à quoi ils s'éclipsèrent tous les trois vers le fond du bar, d'où ils profitaient d'un peu plus de place et de tranquillité pour le sujet principal de leur rencontre. Ainsi que d'une table pour étaler un plan du désert de Kaze – soit l'ensemble du Pays du Vent, en fait.

« Permettez. » avertit Natsuki avant porter avec nonchalance une main à l'intérieur d'un pan de sa veste.

Il en tira une feuille pas plus large qu'une carte de visite, sur laquelle tenaient un sceau et une inscription '' insonorisation ''. En la posant sur la table et en double-tapotant de l'ongle dessus, le sceau étira brièvement ses branches sur la table, et suivit les contours jusqu'au sol en disparaissant progressivement. Le tout n'eut pas besoin de plus de deux secondes pour créer une bulle invisible d'où le son ne pouvait ni entrer depuis l'extérieur, ni sortir depuis l'intérieur.

Passé ce point là, il resta passif dans le reste de l'échange. Ses oreilles mémorisaient chacun des mots que prononçait Saïx, tandis que ses yeux l'observait. Et son premier constat fut qu'il ne correspondait pas à l'idée qu'il s'en était fait. Sans savoir pourquoi, il l'avait imaginé... autrement. Et plus jeune aussi. Mais c'était sans importance, car ce n'était pas pour son physique que Yami et lui étaient venu le trouver, plutôt pour les informations qu'il avait à leur offrir.

Natsuki étudia le plan qu'il avait sous les yeux, en y rattachant les indications que donnait un doigt ici et là. Sans surprise, avec un désert aussi image qu'un pays, Saïx ignorait où pouvait bien se trouver Heyle. Tout au mieux, il pouvait indiquer là où il n'était pas nécessaire de chercher, mais cela laissait une large zone à couvrir – même en y déduisant les multiples galeries souterraines Kawaguchi qui zébraient le territoire. Cela lui rappela combien la piste qu'ils suivaient pour venir en aide à Oniri était ténue, et reposait sur des suppositions et des hypothèses. Combien ils n'avaient presque rien en main, mais qu'ils étaient déterminés à jouer le tout pour le tout pour arriver à leurs fins.

La discussion se poursuivit, et avec elle, son lot de surprises. Natsuki eu l'occasion d'en apprendre – vaguement – plus sur les origines d'Oniri, dont les liens étroits qui existaient entre les parts de Yorn et le peuple dont étaient issu les animaux de compagnie de Yami. Comme le monde était petit... Les deux femmes s'étaient décidément bien trouvées. Sauf si elle avait trouvé le pacte lors de l'une de ses expéditions avec la Saibogu à la recherche de son histoire.

L'un dans l'autre, l'origine de ce lien comptait moins que ce que les invocations avaient à leur apprendre. Même si Natsuki n'était pas spécialement emballé par l'idée de se fier à un félin pour avancer, il était prêt à s'y résoudre, faute de mieux. Ce qui lui tira un sourire sous cape quelque part, en pensant que Yami devait ressentir exactement la même chose envers lui. Puis il plissa les yeux, dégouté, en s'imaginant cette fois comme un félin ronronnant sous les caresses de la Ketsueki.

Une image qui lui passa l'envie du reste de sa glace...

Les présentations étant faites, nous nous retrouvions sur une table du fond pour se feindre en discrétion même si notre groupe suffisait à lui même pour véhiculer un message contraire... Le Nara s'arrangea pour que l'on ne soit pas entendu et Saïx débuta ses explications.

Je ne fus pas surprise d'entendre qu'il n'avait pas la moindre idée de l'emplacement de l'entité pas plus qu'il ne pouvait nous fournir que des informations sur là où elle n'était pas : c'était ce que j'avais imaginé.

Je l'observai montrer les différentes zones de Kaze sur la carte comprenant que ce qui restait à explorer était tout de même colossal et que notre périple allait durer bien plus encore que ce à quoi je m'attendais... La quête d'une vie... Saïx l'évoquait en parlant de mon immortalité et même si cela ne m'effrayait pas de m'y dévouer pour l'éternité, Oniri ne la possédait pas et bientôt ses actions inconsidérées lui vaudrait des retombées que je ne souhaitais pas voir arriver : le temps pressait.

Le Saibogu en venait à parler de la civilisation ancienne de laquelle était issue la mère d'Oniri, Ewa : les Kar'solrei... Ce nom ne m'était pas inconnu et pourtant j'étais certaine de ne jamais avoir entendu la chasseresse l'évoquer... Cela me revenait toutefois lorsque Saïx fit mention de mes kuchiyoses et le rapport qu'ils avaient avec ce peuple. J'avais déjà entendu Hotep en parler en utilisant la langue des anciens et en un sens cela n'était pas étonnant puisqu'ils avaient été en mesure de discuter avec Akraï et les autres araignées antiques utilisant ce même langage dans les montagnes de Chura à Yuki no Kuni.

Mes félidés étaient tous issus de temple enfouis de Kaze. Mon regard se tourna vers le Saibogu, inquisiteur alors qu'il affirmait cette information. Comment était-il au courant ? Le vénérable Satoshi avait-il toujours posé son nez dans les affaires touchant sa fille et donc certaines des miennes ? La surprise laissa rapidement place à l'esquisse d'un sourire.

« En effet. J'ai été récupéré mes félins dans des sites sous terrains de Kaze. Oniri était présente lors de mon premier pacte, avec Méphisto ainsi que pour Aastet. La langue des Anciens qu'ils utilisent l'a toujours fasciné et elle a même appris à l'utiliser. Je comprends mieux pourquoi elle s'y intéressait, même s'il n'était pas sûr qu'elle en connaisse le rapport avec sa propre famille en ce temps. »

Pour Hotep j'étais avec Kioshi et pour les autres je m'y étais rendue seule.

Saïx suggérait donc la chose suivante : se fier à l'histoire de mes invocations pour tenter d'obtenir un début de piste. A vrai dire, je ne savais pas vraiment si je devais en rire ou en pleurer... Surtout en considérant que le plus historiens de tous était incontestablement Méphisto et qu'il leur faudrait s'accrocher pour comprendre ce qu'il voudrait nous expliquer. Toutefois, c'était en effet une piste et il ne fallait pas la négliger. Je jetais un coup d'oeil à Crazy, mon chaton noir toujours perché sur mon épaule et m'adressais à lui :

« J'espère que tes frères et sœurs ont une bonne mémoire malgré la poussière qui s'est entassée dans leurs oreilles. »

Je haussais les épaules.

« Il faudra bien. Sinon il se pourrait bien que vos neufs vies chacun ne vous suffisent pas. »

Le tout en le gratifiant de grattouilles affectueuses sur le sommet de sa tête malgré mes paroles contradictoires avec mon geste.

« Nous y allons. »

Informais-je le reste de la bande alors que tout avait été passé en revue.

Il nous fallait un coin plus reculé pour que je puisse les invoquer si bien que nous longions les côtes d'Odaïchi sur quelques kilomètres, le long de la plage avant d'être finalement isolés.
Un par un je les invoquais. Mordant mon pouce pour laisser mon sang s'écouler que j'apposais sur le sable pour former le sceau d'invocation. Méphisto, Hotep, Aastet. Mes trois kuchiyoses principaux. Les petits étant bien trop perturbés – plus que les autres – pour répondre pertinemment et la nouvelle avait encore quelques difficultés à maîtriser la langue.

J'avisais mes fidèles kuchiyoses avec un regard neutre mais possédant inéluctablement des attentes à leur encontre.

« Aujourd'hui, c'est votre histoire qui m'intéresse. Que savez vous des Kar'solrei ? Avez vous une idée de l'endroit dans le désert où pourrait se trouver l'une de leur entité nommée Heyle ? Possédez vous des souvenirs y faisant référence du temps où vous étiez dans vos sanctuaires ? »

Mon regard se posait tour à tour sur chacun d'entre eux, sur les deux félins bipèdes de taille humaines comme sur celle évoquant un chien de taille moyenne.

« Soyez concis et clair. »

Le « concis » s'adressait à Hotep et le « clair » à Méphisto. Bien qu'il était entendu d'avance que leurs monologues ne seraient pas une partie de plaisir de déchiffrage...

Voici les informations qui sont mises à votre disposition :

Spoiler:

Pour simplifier le jeu vous pouvez partir du postula qu'une case = 150 Km sur la carte

Hotep: (Trouvé en B : 11)
Il se souvient que quand les maîtres travaillaient au sanctuaire le vent venait toujours de la même direction. (Il dit cela en se grattant l'oreille gauche avec insistance, la tête tournée vers le sud)

Aastet : (Trouvée en M : 10)
Elle se souvient que ses anciens maîtres se rendaient souvent quelque part vers l'ouest du pays pour effectuer de nombreux travaux. Le trajet était assez long.

Méphisto : (Trouvé en K : 12)
Il se souvient de suivre le petit ourson dans le désert lorsqu'il partait avec ses maîtres pour aller dire bonjour à sœurette. En tout et pour tout, il nous fallait une mensualité et demie, dans les meilleurs conditions, pour arriver à destination finale.


Kaze : A cette époque les arts ninja n'étaient que peu répandus ce qui limitait les moyens de locomotion au traditionnel « marche à pied » où aux « traversées à dos de chameaux » qui n'était pas nécessairement plus rapide. Les voyageurs pouvaient en moyenne marcher durant une dizaine d'heures par jour (essentiellement la nuit). Aussi loin que le permettent les études archéologiques il est possible d'affirmer que Kaze a toujours porté le même nom aux yeux de toutes les civilisations ayant vécu dans le désert.

Maboroshi : Région connue de tout temps comme étant une des plus dangereuses de Kaze, les vents violents et les fortes températures rendant la zone totalement inaccessible. Généralement les voyageur préfèrent contourner cet endroit. C'est aussi pour cette raison qu'on ne sait pratiquement du Maboroshi ni des secrets que peut éventuellement renfermer cette région.

Suna : Le village n'existait bien évidemment pas à l'époque. Il n'y avait à la place qu'une immense cavité rocheuse.

Oasis Suishou : Il a toujours été question d'un point de restauration important dans le désert. De tout temps de nombreux commerces et auberges s'y sont établit pour accueillir les voyageurs avant que ces derniers ne reprennent la route.

Fleuve Taiga : Principale source d'eau du désert. Une grande partie de la population s'y concentre depuis toujours.

Mont Kaze : Parsemée par de nombreuses et anciennes ruines, les montagnes étaient jadis très peuplées. Cependant l'étude de ces dernières révèles qu'elles appartenaient à un autre peuple que les Kar'solrei. Aujourd'hui les ruines ont été reprises et aménagée pour accueillir les Kazejin.

Oasis de Jouvence : Lieu magnifique au décor presque paradisiaque. De nombreux mystères et légendes circulent à son sujet. Il s'agit, à ce jour d'un spot touristique important et renommé à travers le Yuukan. La légende prêtent à ses eaux des vertus curatives quand bien même aucune études sérieuses ne l'approuve.

Maintenant qu'ils avaient eu ce qu'ils voulaient obtenir – ou plutôt ce qu'il pouvaient obtenir – de Saïx, Natsuki et Yami quittèrent le bar après avoir prit congé de leur informateur. Leur prochaine source de renseignements étant les compagnons félins sans poil de la Ketsueki, ils décidèrent de quitter la capitale par la plage et de trouver un endroit isolé, à l'abri des regards : c'était mieux pour ce qu'ils comptaient faire.

Successivement, le Nara déguisé vit apparaître les trois invocations convoquées. Parmi le total de quatre en comptant le sac de dents pointues perché sur l'épaule de Yami, il en connaissait déjà deux de sa précédente visite : Hotep pour le grand bipède et Méphisto pour le squelette enveloppé dans une peau sur mesure. Restait donc cette dernière créature, représentante du beau sexe dans le quator, qu'il déduisit être la Aastet que la Ketsueki avait évoqué tout à l'heure.

Autoritaire comme à son habitude, Yami donna les consignes à ses créatures. Et tout comme l'on pouvait s'y attendre de la part d'un animal dont la principale raison d'être est de nuire au quotidien de son propriétaire – en miaulant à la porte de la chambre dès six heures du matin ou en laissant ses poils partout dans la maison par exemple - , les réponses furent assez vagues. Mais d'un autre côté, ç'aurait été trop simple de juste leur montrer une carte et d'avoir l'indication du lieu. Quant à se fier à leurs souvenirs de voyage à travers un décors familier pour retrouver le temple, c'était un peu cuit aussi : il suffisait de cligner des yeux pour que les dunes du désert se soient déplacés sous le râle du vent. Donc niveau familiarité et environnement...

Armé d'un bâton, Natsuki traça une carte grossière du Pays du Vent dans le sable, avec ses principales zones clef telles que Odaichi, Suna, les oasis etc... Parti de cela, il ajouta des périmètres approximatifs pouvant correspondre aux zones décrites par chacun des trois félins, aidé par Yami qui connaissait mieux le pays et ses animaux que lui.

« Quand vous dites cela, Hotep, je ne peux m'empêcher de remarquer que vous détournez le regard pour observer la mer. Y a-t-il une raison à cela ? »

Car si le fait de se gratter l'oreille gauche était une direction camouflée à coupler avec l'indication du vent qui souffle toujours du même côté, il restait encore à déterminer si le point de départ était la plage d'Odaïchi ou son temple à l'époque.

« Alors, si je me fie à Méphisto... » commença Natsuki en parlant comme s'il venait d'exprimer une idée inconcevable. « … et que l'on considère qu'un individu moyen voyageant souvent se déplace à la vitesse de cinq kilomètres par heure, cela nous donne cinquante kilomètres par nuit pendant quarante-cinq jours, soit ce territoire-ci. »

Yami procéda à une réduction de la zone en indiquant que le petit ourson était probablement la constellation de la petite ours, laquelle indiquait couramment le nord.

« L'unité de mesure '' assez long '' étant très précise pour un voyage vers l'ouest dans le désert – merci Aastet -, voilà ce que cela donne. »

Un schéma assez moche avec des traits partout, et des questions en suspend. La '' sœurette '' de Mephisto était-elle Aastet ou un autre chat encore dans le temple de Heyle ? Ou même Heyle, pourquoi pas ? Le sens du vent de Hotep indiquait-il qu'il voyageait dans une direction unique en ligne droite, ou en diagonale ?

L'on allait dire que non : pas de diagonale, seulement des lignes.

Contrairement à ce que j'aurais cru, je ne pouvais pas reprocher à mes Kuchiyoses de se perdre en explications... Elles étaient au contraire relativement maigres et peu précises, bien que cette dernière notion ne m'étonna en revanche guère.

Je les écoutais successivement, me demandant si certaines informations avaient la moindre importance dans le discours de Méphisto et Hotep : comme le fait que ce dernier se gratte l'oreille en regardant dans une direction après avoir parlé par exemple.

Le bilan fut plutôt clair : un joli sourcil arqué d'incompréhension.
Ce n'était pas la carte du Nara et des gribouillis qu'il pouvait y faire dessus qui m'aidait a y voir plus clair mais j'essayais néanmoins de superviser son travail : notamment en lui faisant des réflexions sur la mauvaises dispositions voir l'absence complète de certains lieux de Kaze.

Le vent soufflait en cet après midi et la carte – déjà peu compréhensible – ne résistait pas vraiment au balayage des grains de sable qui en constituait le... dessin.
Lorsque Natsuki questionna Hotep sur sa façon d'observer la mer pendant son explication je ne pus m'empêcher de lever les yeux au ciel :

« Bien sûr que non, il n'y a aucune raison à cela ! Regardez le vous même et dites moi si vous pensez qu'il est doté de la moindre forme de concentration ?! »

Hotep était intelligent mais il avait l'attention d'un enfant de cinq ans... et encore...
S'il ne me croyait pas...

« Lorsque nous l'avons trouvé dans son temple avec Oniri, il était en train de compter inlassablement et s'imaginait des doubles de lui même dans la pièce à qui il donnait des ordres ! »

J'avais élevé légèrement le ton de ma voix, agacée, et vins me pincer l'arrête du nez tout en fermant les yeux pour retrouver mon calme.

« Je rectifie mes propos concernant Méphisto : le petit ourson qui fait référence à la petite ourse est, à mon sens, une vue plus globale pour parler des constellations et donc du voyage dans le désert de nuit. »

Ce qui en soit n'était pas une information capitale puisque quiconque qui vivait dans le désert - ou non- savait que les trajets nocturnes étaient préférables à ceux sous la morsure du soleil.

« Soeurette ? »

Méphisto était plutôt du genre vague, partant dans sa vision en détachement total avec notre propre réalité : l'entendre parler de manière si affective sonnait étrange et me surprenait.
Mon regard se posa successivement sur le félin quadrupède puis sur son homologue bipède féminine.

« Aastet ? Tes anciens maîtres Méphisto allaient voir ou allaient chercher Aastet avant de se rendre là où ils devaient aller ? »

Les temples des deux félins n'étaient pas très éloignés ce qui étaient plausibles. Mais... pour aller où ? En observant la « carte » et en se basant sur les informations que mes félidés nous avaient confié ainsi que sur les différents lieux de Kaze en général, tout semblait converger vers la zone du Mont Kaze, de la Tombe de l'Empereur et du Temple des moines du vent. Cela réduisait déjà notre champ de recherche mais nous ne possédions toujours pas le lieu précis pour autant...

Après mure réflexion nous décidions de nous rendre à la Tombe de l'Empereur mais il manquait encore une personne dans notre petit groupe. Une personne dont je détectais la présence par notre lien écarlate que je gardais en joug depuis que je l'avais perçu.

Je renvoyais mes kuchiyose a l'exception de Aastet qui restait pour le moment avec nous, a peu près dissimulée sous sa cape a capuche rabattue. Nous étions à la capitale, il y avait de tout et ce n'était certainement pas le premier kuchiyose qu'elle croisait : peut être même que des Gekei séjournaient ici de temps à autre et si le soucis se faisait sentir elle se camouflerait ou bien je la renverrais.

Natsuki sur les talons, je me dirigeais vers les portes de Odaichi, sachant qu'Ogami m'y attendait avant de me tourner vers le Nara :

« Attendez moi là avec elle. »

Je ne voulais pas que celui que j'appelais mon petit frère puisse voir une quelconque menace dans la présence de ces deux là en guise d'escorte. Comme je le lui avais toujours dit et rappelé : jamais je ne causerais de tord à Kaze.

Le Nara m'avait dans son champ de vue au loin tandis que je reconnaissais le Toshiro même sous ses traits modifiés. Un sourire chaleureux se dessina sur mes lèvres alors que j'allais l'étreindre pour me retrouver dans ses bras, déposant ma tête contre son épaule.

« Tu m'as manqué. »

Lui murmurais-je en toute honnêteté.
Sa présence, cette chaleur humaine... Cela faisait un bien fou après toutes ces batailles et ses réflexions pour garantir sa vie. Un autre aspect de moi même se dessinait lorsque j'étais avec lui, Oniri et Kioshi. La différence résidait dans le fait qu'Ogami et moi n'avions jamais eu besoin de mot pour nous comprendre quand bien même je venais pourtant d'exprimer clairement ma pensée tant elle était profonde.

Aux portes de la capitale, je n'étais pas sous ma vraie forme. Je n'appréciais guère me déguiser, je laissais ce plaisir à mon maître. La raison pour laquelle j'avais utilisé un henge basique, c'était puisque ma sœur me l'avait demandé. Après contact sous forme de missives, nous avions décidés de nous retrouver aux portes de la capitale. Nos mécanismes de détections auraient très bien pu les détecter mais j'avais fait en sorte d'établir un dispositif afin de le « court-circuiter » à ma guise. Cela dit, j'avais demandé à des équipes de se tenir prêt au moindre faux pas. Je n'avais guère peur de Yami, bien au contraire. J'avais encore confiance en elle malgré la distance et ses actes, au fond elle tentait d’œuvrer pour le pays après tout. Je ne pouvais rester focalisé sur sa désertion, je devais essayer de la comprendre et de trouver des solutions. « Je devais » oui, à mes yeux c'était comme une obligation. Yami était une des seules personnes à me comprendre entièrement, nous étions en quelque sorte liés par un lien qui ne pouvait être décrit facilement. Je ne pouvais prétendre être son frère si je ne parvenais pas à saisir le sens de ses actions.

Il me semblait être un homme droit, je tentais de vivre selon les règles dictées par nos dieux et notre pays. Seulement de temps en temps, je devais faire des entorses au règlement. J'en étais le premier à être chagriné et pourtant c'était toujours pour faire profiter Kaze no Kuni à court ou à long terme. J'avais discuté avec les plus grands déserteurs de mon pays, Oniri, Yami et Kioshi ; Tout ceci avait un sens à mes yeux et j’espérais que mes projets se concrétisent afin d'en faire en profiter ma patrie.

Aujourd'hui la visite de Yami avait plusieurs sens ; Elle était à Kaze pour obtenir des réponses et faire en sorte de soigner les maux de Oniri. Cette dernière était aussi liée à moi, en quelque sorte. Le démon qui m'avait possédé était l'ennemi du sien et elle m'avait aidé à le contrôler. Sans elle je ne serai sûrement plus là à l'heure actuelle, je devais le reconnaître. Le démon m'avait fait endurer pendant des mois un calvaire indescriptible, les dons de la Saibogu m'avaient permis de tenir le coup et même de réprimer l'esprit de Chura qui résonnait en moi. Je me sentais redevable et pourtant-...

Je la vis finalement arriver, au loin. Elle était bien là et seulement à la vue de cette dernière, j'étais comme emparé d'un sentiment de joie. Cela faisait un moment maintenant que je n'avais pu la serrer dans mes bras, elle était essentielle pour moi. J'avais un moment imaginé l'enchaîner dans nos geôles par pur égoïsme, je voulais la protéger et aussi l'avoir à mes côtés. Mais lui ôter sa liberté serait comme la poignarder, je le savais pertinemment. Je m'étais vite ravisé sachant qu'elle ne pourrait être heureuse enfermée entre quatre murs. Pour le moment elle ne causait pas de problème au pays, elle souhaitait même l'aider. Sauf qu'il n'était plus possible de tracer notre route séparément, nous devions collaborer afin de réaliser nos projets. C'était même une obligation à mes yeux.

Lorsqu'elle était enfin à ma hauteur, je la pris dans mes bras. Je posai mon menton sur sa tête et fermai les yeux pendant quelques secondes. J'appréciais ces courts moments même si le fait d'être sous henge me dérangeait. J'avais l'impression de ne pas apprécier le moment autant que je pouvais le faire, j'étais comme bridé par ma fausse apparence. Ma main gauche sur son épaule et l'autre sur une de ses hanches, je la poussai légèrement afin de croiser son regard.

« J'ai emprunté cette apparence à un Saibogu. Qu'est-ce que tu en penses ? » Dis-je en souriant avant de reprendre la parole. « Je suis très heureux de te revoir, ça faisait un moment n'est-ce pas ? »

Trop longtemps peut-être, je m'étais habitué à cette distance mais à chacune de nos rencontres je repensais aux bons moments qu'on avait passé ensemble et j'étais comme empli de nostalgie. Je me permis de prendre encore un peu de temps afin de déposer un baiser sur son front et prendre soudainement un air un peu plus sérieux. Je voulais être à ses côtés et discuter de tant de choses, seulement elle n'était pas là pour ça.

« Yami, tu sais ce que je tiens beaucoup à toi. Tu m'as fait une demande et j'ai accédé à cette dernière mais avant de continuer ce voyage, tu dois accéder à une des miennes. J'ai réfléchi à ce que tu m'as dit, je sais que tu œuvres pour Kaze et même si je ne suis pas tout à fait d'accord avec tes actes, je peux maintenant les comprendre. Cela dit dorénavant nous devons marcher côte à côte et non dans des directions opposées. Tu dois t'engager à prendre la même direction que moi, aujourd'hui je représente le pays et nos choix doivent corréler. L'Empire fait parti de cet accord, tu dois être prête à respecter nos choix et à ne pas nous entraver dans notre développement. »

Mes yeux plantés dans les siens, je lui pris la main délicatement et attendis sa réponse.

Je profitai quelques instants supplémentaires de cette étreinte de retrouvaille et me pris a sourire lorsque Ogami évoqua son apparence emprunté à un Saibogu :

« Peu importe, tu restes toujours le même. »

Il déposa un baiser sur mon front avant de s'écarter légèrement pour adopter un ton plus sérieux. Si je pouvais être là sans avoir a user de stratagème pour brider mon chakra c'était grâce à lui et puisque personne ne nous était tombés dessus cela signifiait qu'il avait bel et bien tenu sa parole, comme il l'avait toujours fait.
Toutefois, son expression changeante ne me disait rien qui vaille et modifiait par conséquent la mienne tandis que je l'écoutais.

Il comprenait mes actes même s'ils ne les approuvaient pas. Il savait que j’œuvrais pour le bien de Kaze comme je le lui avais déjà répété mais il voulait que l'on regarde dans la même direction et que je me plie à suivre des choix en corrélation avec les siens... Son discours m'étira un fin sourire.

« Arrives-tu seulement à entrevoir les possibilités dont je dispose en œuvrant pour Kaze depuis l'extérieur ? Les lois qui régissent Suna ne sont pas miennes et je t'ai déjà dit que jamais je ne nuirais à mon pays natal. Tout ce que je fais, je le fais dans l'intérêt de Kaze et aussi du mien. »

Mon regard était ferme et doux à la fois.

« Tu m'as déjà parlé de l'immunité que Kioshi avait négocié pour moi. Ais-je attaqué l'Empire depuis ? Non. Nos directions ne sont pas les mêmes mais mènent à la même finalité : le bien de Kaze. Je ne suis plus entre les murs de Suna, je n'ai pas connaissance de toutes les décisions qui y sont prises et ne le souhaiterais de toute façon pas. »

Être nukenin c'était prendre le risque de se faire attraper et de devoir divulguer des informations confidentielles : autant ne pas en emmagasiner.

« Je t'ai déjà fait savoir lorsque vos choix me semblent douteux tout comme votre alliance avec l'Empire. J'aimerais pouvoir dire : soit, faites comme bon vous semble, mais Suna à souvent trop souffert des mauvaises décisions de ses Kazekages. A croire qu'il s'agit d'une véritable malédiction. »

Ma main libre venait attraper la sienne sans que mon regard ne quitte le sien, solennel.

« Nos intérêts convergent et tu le sais parfaitement. Nous avons bien plus à apporter à Kaze que tu ne te l'imagines. Il nous faut simplement sortir des sentiers battus pour y parvenir. Tu sais tout comme moi à quel point notre nation a besoin de se redresser et cela sur des fondations solides. J'ai pleinement confiance en toi pour cela : mais tu n'y parviendras pas seul. Ne vois pas des ennemis là où tu as de précieux alliés, l'inverse étant également valable. »

Mes doigts entrelacèrent les siens avec conviction.

« Je te demande simplement de me faire confiance ou de continuer à le faire. Je t'en fais la promesse : rien ne sera fait à l'encontre de Kaze ou de son développement. Nous pourrons même discuter si tu le souhaites de certaines stratégies possible en ce sens. »

Et ainsi fouler la même direction.

Nous discutions un moment sur le sujet et il était certain que nous en reparlerions mais pour l'heure, il fallait que je lui présente celui qui serait notre allié dans cette traversée du désert.
Je me retournais dans la direction du Nara déguisé en Ketsueki et lui fit un signe de la tête pour se rapprocher, tout comme Aastet portant toujours son capuchon.

« Je te présente Xehanort. Il est l'allié dont je t'avais parlé. »

Je laissais au Toshiro le soin de répondre aux présentations ne sachant guère quelle identité il comptait se donner avant d'énoncer notre première destination qui, je l'espérais, serait la bonne.

Une fois la destination décidée, il leur restait encore à rencontrer le contact dont Yami lui avait parlé. Cette dernière l'en informa après avoir renvoyé toutes ses invocations à l'exception d'une seule, et ensemble, ils regagnèrent Odaïchi. Comme à son habitude, la Ketsueki pure sang ne pipa mot sur le trajet, et Natsuki, qui n'avait rien de plus à raconter, en fit de même, ce qui contribua à la tranquillité de chacun – vu que chaque discussion était propice à hausser la tension d'un cran.

Ils marchèrent un moment en ville, jusqu'à ce que Yami l'arrête au détour de la dernière rue avant l'immense porte d'entrée. Probablement pour parler seule à seul avec son contact. Ne l'avait-elle donc pas averti qu'elle avait un compagnon de voyage ? Probablement que si, et si le contact était bien un Sunajin, Natsuki ne pouvait pas le blâmer d'être méfiant. Mieux valait donc laisser la Ketsueki désamorcer la situation d'abord, si ce n'était pas autre chose...

Il n'avait aucune crainte cela dit, ayant déjà dépassé depuis longtemps le stade de la méfiance envers elle. Non pas qu'il lui faisait spécialement confiance, mais il savait qu'elle avait besoin de lui pour aider Oniri – et inversement -, aussi tant qu'ils poursuivront cet objectif, elle ne tentera rien contre lui. Et pour ce qui était du après, il préférait ne pas y penser encore. Surtout s'ils continuaient comme sur le bateau de se tourner mutuellement ainsi l'un autour de l'autre, avec les crocs au clair et la jugulaire bien en vue.

C'est ainsi qu'il prit place sur le perron d'une maison, légèrement en hauteur par rapport à la foule qui défilait sur le grand axe. Aastet était à ses côtés, mais semblait ne même pas calculer, une situation qui lui convenait tout à fait. Le menton soutenu par sa paume ouverte dont les doigts griffues se perdaient dans ses long cheveux, il se contenta donc d'observer Yami et son contact de loin.

Une sacrée surprise quelque part, car si de sa position il ne parvenait pas à entendre ce qu'ils disaient, il avait encore d'assez bon yeux pour voir la scène. Et celle que jouèrent les deux protagonistes concernés avait de quoi le faire sourire. Car de loin, entre les étreintes, les bises très localisées et les mouvements des corps échangés, il pourrait presque croire à un lien affectif très profond entre les deux, le presque tenant en ce qu'il avait vu de Yami jusqu'à aujourd'hui : il doutait qu'elle puisse se comporter ainsi avec qui que ce soit. Non pas qu'il la soupçonnait de ne pas savoir être aimante, mais assurément pas de l'exprimer ainsi.

Il attendit un moment, puis finalement, il capta le mouvement de tête de Yami lui étant adressé. Il était temps qu'il s'immisce dans la petite troupe avec Aastet. Enfin, '' avec Aastet '', il était plus juste de dire qu'ils allèrent chacun des deux au même endroit en même temps plutôt que ensemble : ils continuaient de s'ignorer dans l'indifférence la plus totale. Arrivé à leur niveau, il s'arrêta pour dévisager de la tête aux pieds d'un regard méfiant le contact de la Ketsueki, comme s'il évaluait ce qu'il valait. Si ce dernier correspondait toujours en partie à sa description, alors il portait un sabre avec lui. Presque aussi grand que lui, Natsuki n'avait pour une fois pas à baisser les yeux pour s'adresser à quelqu'un, et il ne l'égalait d'ailleurs en taille que grâce aux cinq centimètres que lui faisait gagner les talonnettes à l'intérieur de ses chaussures. Après quelques instants toutefois, il finit par se fendre d'un sourire fin comme une lame de rasoir.

« Enchanté. » gronda-t-il de sa voix caverneuse.

Les présentations terminées, et un voyage suffisamment long en perspective pour discuter au cours de celui-ci si besoin, ils prirent chacun le nécessaire à leur traversée du désert, car c'était presque le Pays du Vent entier qu'ils avaient à parcourir.

*********************

Une durée indéterminée plus tard.

Le groupe arriva finalement à Misasagi, qui abritait la Tombe de l'Empereur. Pénétrer en son sein ne releva pas de l'épreuve de force, chacun des membres de la troupe faisant démonstration de compétences bien au-dessus du niveau moyen que ce que la garde habituelle avait l'habitude de rencontrer. Un passage qui fit d'ailleurs comprendre à Natsuki que le contact de Yami n'était pas n'importe qui non plus. Certes, il s'en était déjà rendu compte à sa façon de se tenir, de se mouvoir, aux durillons qui marquaient ses mains et qui prouvaient que son épée n'était pas là juste pour l'apparat, mais là il avait la confirmation de ses suspicions.

L'exploration commença alors, et dura plusieurs heures. Plusieurs heures au cours desquelles ils inspectèrent l'immense tombe de fond en comble, sans laisser le moindre grain de poussière non retourné. Tout cela pour faire choux blanc : ils ne trouvèrent rien. Et déjà qu'une certaine tension baignait dans le groupe, la frustration de faire du sur-place, de s'être trompé sans avoir la certitude qu'ils étaient peut-être juste passés à côté de quelque chose ici, n'arrangea rien.

« Nous avons effectivement peut-être manqué un indice... » marmonna Natsuki pour lui-même.

Il tira la carte de Kaze de son sac, et la déplia en utilisant le sépulcre de l'empereur comme support. Ce n'était pas comme s'ils l'avaient déjà profané en l'ouvrant un peu plus tôt dans la journée de toute façon... Les bras croisés sur sa poitrine, il s'efforça de se concentrer pour se remémorer tout ce que leur avaient dit les créatures les moins fiables de la Création : chaque parole, chaque inflexion de la voix, chaque geste, chaque commentaire de Yami, chaque hypothèse qu'ils avaient émit ensemble. Et si en fait, Hotep n'avait pas juste l'attention d'un enfant de cinq ans ? Et si en fait, Méphisto n'était pas juste un métronome sur pattes ? Si le petit ourson était effectivement le nord ? Et si pour une fois, ce satané sac d'os voulait bien dire ce qu'il voulait signifier, à savoir que sa sœur était Aastet, et qu'il faisait route avec elle ? Cela remettait tous les calculs de distance en cause...

Des voyages dans le désert, Natsuki en avait désormais eu sa dose, et maintenant qu'il avait aussi bien parcouru l'est que l'ouest du Pays, il pouvait affirmer avec certitude que le vent ne soufflait pas toujours dans la même direction de ce côté là du désert. Leur théorie sur Hotep tombait donc à l'eau, au cas où tout le reste ne leur avait pas déjà mit la puce à l'oreille. Ils n'étaient pas au bon endroit du tout... Le temps et l'énergie perdues l'agaça, mais il n'eut pas de mal à se contenir.

« Bludrexe, vous devriez venir voir. » annonça Natsuki en effectuant à salut respectueux avant de prendre la parole. « Bien qu'il semble évident que j'ai fait fausse route, je pense avoir trouvé où nous devons aller. »

Il désigna la carte, et tapota de son ongle griffu le Lac Kaze.

« Si Méphisto et Aastet faisaient route ensemble à l'époque, alors cela réduit grandement le périmètre de nos recherches. Et dans ce secteur, il n'y a qu'un seul endroit où le vent ne souffle toujours que d'un côté. »

Le renfoncement dans le Mont Kaze, là où reposait le lac du même nom...

Nous voyagions depuis plusieurs nuits déjà pour nous rendre jusqu'à la Tombe de l'Empereur dans l'espoir d'y trouver la présence de Heyle. Toutefois, une fois sur place, nos efforts furent vains. Il n'y avait pas le moindre signe d'elle, quant bien même nous avions fouillé le moindre recoin des lieux. J'inspectai chaque aspérité des différents murs constituant l'endroit, cherchant une cache secrète, un mécanisme, un sceau quelconque à activer pour nous révéler les mystères de l'endroit mais après plusieurs heures nous devions nous rendre à l'évidence : il n'y avait rien ici.

Où était l'erreur que nous avions commise ? J'interrogeai Aastet pour savoir si ce lieu lui évoqua quelque chose mais il n'en était rien. Je me pris alors à réfléchir malgré cette frustration muée rapidement en colère tandis que le temps nous était compté : du moins pour Oniri.

Le Nara m'interpella ensuite pour que je vienne le trouver, ce que je fis tout en observant la carte et le tracé de ses doigts griffus dessus pour souligner notre erreur et la zone où nous devrions plutôt nous rendre, non loin d'ici : le Lac Kaze.

Son raisonnement se tenait et au moins nous trouvions nous dans le bon secteur et non a l'opposé malgré notre erreur. Il nous faudrait quelques jours de traversée supplémentaires pour parvenir à bon port. Avisant mes compagnons d'infortunes, je les sommais de nous remettre en route, non sans un certain amusement pour me passer les nerfs.

« Très bien Xehanort, tu t'es montré efficace. Ta Bludrexe en est satisfaite. »

Le complimentais-je dans un sourire un rien sarcastique.
Au diable le vouvoiement envers l'un de mes serviteurs, en présence d'Ogami il devrait s'en contenter et assumer pleinement le rôle qu'il s'était lui même attribué en osant emprunter les traits des membres de mon clan.

Nous nous mettions ensuite en route, arpentant le désert de nuit pour profiter de sa fraîcheur tout en nous reposant le jour. Même s'il s'agissait là d'un grand mot étant donné que le niveau de méfiance entre notre trio crevait le plafond et qu'aucun de nous de fermait vraiment l’œil. J'avais beau faire confiance à Ogami après ses paroles je ne pouvais m'empêcher de rester sur mes gardes au cas où il aurait la mauvaise idée de profiter de mon sommeil pour m'entraver et me ramener à Suna de force. Pour ainsi dire, et paradoxalement, ma méfiance était beaucoup plus tourné envers les idées miroitants dans l'esprit de celui que je considérais comme mon frère plutôt qu'envers le Nara qui avait besoin de moi pour l'heure et qui ne constituait donc pas une menace immédiate.

Il me fallait aussi veiller à ce que la couverture d'Ogami ne tombe aux oubliettes dans une dissipation incontrôlée de son changement d'apparence lorsqu'il sommeillait lui même par exemple. Aucun de nous deux ne tenait à ce que le Nara découvre que mon allié n'était autre que l'actuel dirigeant du village caché du sable.

Notre avancée jusqu'au Lac Kaze fut pénible et nous demanda d'arpenter les hauteurs du Mont Kaze dont les côtes se révélaient parfois très pentues. Rien de très exceptionnel pour des personnes disposant de notre condition mais néanmoins fatiguant. Notre hauteur nous permis toutefois de repérer un oasis en contrebas, nous permettant de nous ravitailler en eau tout en nous bénissant d'un nouveau bain bien mérité après toutes ces journées inlassable de courses soutenues.
Retirant mes vêtements sans me soucier le moins du monde des éventuels regards posés sur moi, j'entrais dans l'eau la première. Exposant à loisir mes diverses cicatrices - notamment la plus impressionnante à l'emplacement de ce qui devrait être mon cœur qui se perdait sous ma poitrine et qui donc serait possiblement la première qu'il remarquerait – ainsi que mes tatouages.

Une fois tout le monde rafraîchit et propre comme un sous neuf, nous nous étions remis en route, atteignant la journée suivante notre destination finale...

Le lac Kaze s'offre à vous. Malheureusement rien n'indique la présence d'un temple ou quoique ce soit. Les Kuchiyose de Yami ne parviennent pas à donner d'informations viables. Les lieux ont beaucoup trop changé depuis leur dernière visite il y avait de cela plusieurs siècles. Ils ne se souviennent même pas de la présence d'un lac. Vous cherchez donc à vous renseigner auprès de la population locale et apprenez que quelques petites ruines sont déjà été aperçue au fond du lac. Il ne vous en faut pas davantage pour partir les explorer.

Vos recherches se révèlent plus que fructueuse. Vous découvrez en effet l'entrée d'un tunnel submergé et décidez de l'emprunter toujours en faisant attention à vos réserves d'oxygènes. Ce dernier s'enfonce de plus en plus dans la terre. Passez un cap vous arrivez au bout de votre excursion aquatique en traversant littéralement le plafond d'une petite grotte. En regardant au dessus de vos têtes vous réalisés que l'eau du tunnel est maintenue en lévitation par une barrière dont les sceaux sont incrustés dans les parois.

La grotte en elle-même est naturellement éclairée par d'innombrables petits cristaux luminescent. Ces derniers sont inexploitables en l'état, mais il vous est possible d'en extraire afin de les utiliser comme source d'éclairage. Au fil de votre exploration vous remarquez que les parois se font de plus en plus étroites. En touchant l'une d'elle vous réalisé que, de part leur aspérité, celle-ci on été travaillé par l'homme. Avec le peu d'élément dont vous disposez vous arrivez à comprendre que vous vous trouvez dans ce qui devait-être une ancienne mine jadis accessible par l'entrée du lac.

La grotte finit par céder sa place au profit de ruines plutôt bien conservées et à l’architecture assez géométrique. Cette partie là est plongée dans l'obscurité la plus totale. Les lieux se présentent comme un véritable petit labyrinthe que vous parvenez aisément à déjouer sous couvert d'un minimum d'orientation. Vous sentez alors que l'atmosphère tend à s'alourdir de plus en plus au fil de votre avancé et ce à tel point que même sans être senseur vous réalisez que cela est du à la présence d'une énorme source de chakra.

Vos soupçons se confirment au moment de déboucher sur une vaste salle souterraine d'une centaine de mètre carré, là encore très mal éclairée. Le plafond est si haut que vous ne parvenez à le distinguer à travers l'obscurité. La scène se déroulant au centre, quant à elle, semble irréaliste tant elle dépasse votre compréhension.

Il s'y trouve un imposant bloque de cristal couleur ocre qui n'est pas sans évoquer un monolithe fait d'ambre. A l'intérieur se trouvait un homme, oui un homme d'une quarantaine d'année environ à la peau mate, inconscient, piégé en position fœtal.

Autour se trouve un totale de huit stèles haute d'un bon mètre ornées d'anneaux de pierres orientés en direction du fameux cristal. Sur chacun des murs à gauche et à droite se trouve d'autres structures en cristal noir encastrés dans la roche. Il en émane des faisceaux de chakra pur d'une noirceur abyssal relié aux anneaux des stèles avant d'être redirigé vers le centre de la pièce. Quatre faisceaux irradient le monolithe tandis que les quatre autre passent au travers pour directement atteindre l'homme à l'intérieur. Sur les murs, le sol ainsi que les stèles sont visibles d'innombrables sceaux gravés dans la roche et relié entre eux pour donner forme à une arborescence d'inscriptions d'une infinie complexité. Il faudrait certainement des décennies à un groupe d'expert en fuinjutsu pour en comprendre le fonctionnement.

Vous remarquez à l'autre bout de la pièce une issue qui semble mener sur une autre salle dont émane une autre et incroyable source de chakra qui vous parait moins hostile cette fois.

Le soleil achevait enfin sa course à travers le ciel. Son anneau doré commençait déjà à embrasser l'horizon, embrasant ainsi le ciel des ses teintes rougeoyantes. Le moment de la journée le plus agréable, quelque part : la température baissait jusqu'à être supportable le temps d'une heure ou deux. Après quoi, elle baissait encore, et l'aride journée laissait place à la nuit glaciale.

Ce cours laps de temps était donc propice pour profiter du petit oasis près duquel ils avaient campé pendant la journée. Yami avait même été la première à y plonger pour se rafraîchir, dévoilant sans complexe ses formes à ceux qui voulaient bien les voir.

« Aucune pudeur » songea Natsuki en la regardant s'engouffrer dans l'eau.

Pour autant, il mit lui-même plusieurs de secondes – de trop, selon les critères de la politesse – avant de détourner les yeux, alors qu'il observait non pas un corps de femme mais de guerrière. Elle portait sur sa peau les cicatrices de nombreuses batailles, même s'il doutait que l'une des plus impressionnantes venait d'un affrontement. Chacune se gravèrent dans la mémoire de Natsuki, bien plus que ses courbes ou les tatouages qui se traçaient dessus.

Dans un léger grondement gutturale, il tourna le dos à Yami et monta la garde devant l'oasis plus par principe du rôle que par réelle nécessité – surtout quand l'essentiel de son attention était accordée à Mr Saibogu. Depuis que le jeune homme était arrivé dans le groupe, la tension avait changé de cran. Ce n'était plus la même que celle qui grésillait entre la Ketsueki et le Nara tatoué. Eux, c'était simplement parce qu'ils ne s'aimaient pas, et que rien ne semblait pouvoir changer ce fait – à commencer par eux. Il n'y avait pas méfiance particulière, pas plus que nécessaire en tout cas.

Mais depuis le Saibogu épéiste justement, le niveau de méfiance crevait le plafond. Natsuki n'avait aucune confiance à lui accorder, et réciproquement, mais ce qui le travaillait le plus était que l'air de rien, il avait l'impression de sentir des frictions bien plus prononcées entre Yami et son contact, maintenant que la fausse scène de tendresse avait fini de tromper les spectateurs à Odaichi. Il y avait anguille sous roche, et plus les jours passaient, plus Natsuki était certain que la Ketsueki ne lui avait pas tout dit à propos du Saibogu – ne serait-ce que qu'elle n'avait pas trouvé mieux en contact pour infiltrer le Pays du Vent. Et vu qu'elle ne lui avait rien dit, il savait qu'il ne servirait à rien de poser la question, sinon user de sa salive.

A l'apparition des premières étoiles, ils reprirent la route. Ils y étaient presque.

Ils finirent par fouler des pieds le Lac Kaze, un endroit d'autant plus vivant dans le désert qu'il y avait de l'eau pour en profiter. Restait maintenant à trouver un temple que personne encore n'avait remarqué. Et sans surprise, ce n'était pas sur les félins bipèdes que l'on pouvait compter pour en apprendre plus. Après, dans le fond, la marche à suivre s'imposait plus ou moins d'elle-même, et se confirma après un premier contact avec la population locale.

« Je vais en éclaireur, je vous préviens si je trouve quelque chose. » annonça-t-il en scellant tout le matériel qui n'avait pas besoin d'entrer en contact avec l'eau.

Il plongea ensuite, et aidé d'une bulle d'air lui apportant tout le nécessaire pour respirer, commença à explorer les bas fond du lac. La clarté du jour et l'eau translucide aidant, il se repéra dans les profondeurs, jusqu'à découvrir une entrée façonnée par la main de l'homme. A l'aspect de la construction, cela ressemblait à une ancienne mine, hypothèse qui se confirma lorsqu'il s'avança dedans. Et qui disait mine disait obscurité, il dû combler l'absence de lumière en grattant du bout de l'ongle le charme collé à son épaule droite : le sceau dessiné dessus diffusa alors une lumière semblable à une torche.

Son exploration le fit déboucher à terme sur une curiosité singulière : il traversa la surface de l'eau, mais depuis le mauvais côté, comme si cette dernière n'avait pas bien comprit comment fonctionnait la gravité. Une lumière étrange baignait dans la grotte où il venait d'atterrir, procurant comme un voile bleuté devant les yeux, combinaison de l'éclat de centaines de cristaux dont ils étaient la source. Le dédale se poursuivait au loin, signe qu'il y avait bien plus à voir ici.

« Je pense avoir trouvé une entrée. Mettez-vous en route, je vous retrouve dans le fond du lac, sur le versant ouest. Il y en a pour dix minutes de nage, environ. » transmit-il à Yami via sa pierre de sang.

Après de nombreuses brasses coulées, ils finirent par tous arriver au bon endroit, trempés mais satisfaits de se rapprocher du but. Le temps de sécher un minimum, Natsuki s'intéressa aux sceaux qui ornaient le plafond, et qui depuis des années œuvraient à maintenir l'eau hors de cette veine. Ils explorèrent un peu leurs environs, tandis que la carte mentale des lieux se dessinait dans l'esprit du Nara tatoué. Et au bout d'un moment, la mine laissa place un tout autre type de pierre, façonnée très différemment : ils venaient de découvrir l'entrée d'un temple.

Et en l'absence de lumière pour continuer, ils optèrent pour souffler un instant avant de se lancer à la suite. Yami les avait avertit à ce sujet : si c'était comme pour les autres temples enfouis, ils n'étaient pas les bienvenu ici, et l'endroit n'attendra pas longtemps avant de le leur faire savoir. Natsuki en profita pour réunir plusieurs cristaux lumineux qu'il arrangea en trois lanternes de fortunes. Tant qu'il le pouvait, il préférait ménager l'autonomie de ses charmes éclairants.

Parés à tout, ils se lancèrent finalement à l'attaque du temple. Chacun sur leurs gardes, la progression fut lente essentiellement à cause de la recherche de pièges qui pouvaient baliser leur route. Très vite, ils se rendirent compte que les couloirs qu'ils empruntaient étaient arrangés de sorte à former un dédale, mais avec sa carte mentale, du temps, et de l'usure de chaussures, Natsuki les mena sur une sortie – à défaut d'être la sortie – : quelque chose attendait par là-bas, il le sentait.

La lumière de leurs lampes de fortune déchira une obscurité vieille de plusieurs siècles lorsqu'ils arrivèrent dans une vaste salle, large au point de n'en distinguer ni les bords ni le plafond depuis l'entrée. Une exploration plus poussée offrit son lot de découverte.

« Qu'est-ce que c'est que cela ? » grogna Natsuki pour lui-même en découvrant l'immense cristal ambré, et ce qu'il abritait en son sein.

La source d'énergie qu'il sentait depuis tout à l'heure, qui lui donnait l'impression de marcher à travers une légère densité, venait de là. Des rayons dont ils découvrirent l'origine convergeaient tous vers le centre, que ce soit sur le cristal ou l'homme qui se trouvait dedans. Impossible de dire s'il était vivant ou non, même si la logique avait tendance à pencher vers le non. N'importe comment, cela ne le regardait ni ne l'intéressait, pas en de pareilles circonstances : il cherchait une certaine Heyle, qui étant une femme, ne portait par définition pas d'attributs masculins entre ses cuisses, et ne pouvait donc pas être celui qu'il avait sous les yeux.

Il se contenta donc d'un simple regard interrogateur en direction de Yami, dans l'hypothèse où elle en savait plus que lui sur la question.

Ce lac était impressionnant, tant par son étendue que par sa simple présence. Il n'y avait rien aux alentours et, même si je me doutais qu'il regorgeait de secrets, la population locale nous confirma la présence de ruines avant la formation de celui-ci.

Le Nara alla repérer les lieux, nous laissant seuls Ogami et moi. Pour autant je fus focalisée sur le but de cette expédition et ne me confondit donc pas en discussion inutile malgré notre champ libre. Une ouverture qui dura même un peu trop longtemps à mon goût... Que fabriquait cet imbécile ? Était-ce réellement si profond ? Je commençai à perdre patience et m'apprêtai même à le contacter via la pierre de sang avant qu'il ne le fasse par lui même. Il avait trouvé une entrée et nous n'avions plus qu'a le rejoindre.
Ne voulant guère informer Ogami de notre système de communication, je me contentais de lui dire que nous avions assez attendu avant de m'engouffrer dans l'eau à mon tour, renvoyant Aastet pour le moment qui refusait de toute façon de traverser l'étendue aqueuse.

La technique fuuton en place pour respirer, nous nagions vers le fond du lac, retrouvant à l'ouest l'entrée dont m'avait fait part le Nara que je vis à travers l'eau dans une pièce qui sembla quant à elle au sec... Tiquant sur ce phénomène, je m'engouffrai malgré tout dans cette anomalie pour retrouver le Ketsueki cosplay et observai depuis ma position l'eau en suspension avant de porter mon regard qui s'écarquilla sur les éclats de cristaux bleus qui parleraient aussi à Ogami.

« C'est bel et bien ici. Des cristaux similaires se trouvaient dans la caverne de Chura. »

Les lieux laissaient penser à une ancienne mine mais la structure de la pierre changea au fil de notre avancée, nous faisant découvrir des dédales façonnés par l'homme : un temple bâti par les Kar'solrei.
A partir d'ici, la lumière était inexistante et ce n'était pas la piètre lueur des éclats de cristaux qui nous permettraient d'y changer quoi que ce soit, aussi, lorsque le Nara me tendit ce qui devait être un semblant de lanterne je l'observai avec un certain scepticisme, sortant de ma sacoche une lampe torche que je lui tendis tout en en prenant une pour moi même . Connaître des Saibogu avait du bon.

Notre progression fut lente car minutieuse : il n'était pas question de foncer tête baissée alors que plusieurs pièges étaient sans doutes disséminés un peu partout. Malgré tout, au fur et à mesure de notre avancée, un sentiment de mal aise s'immisçait en moi. Je percevais une « présence » pour le moins impressionnante sans même disposer d'un quelconque don sensoriel. J'avais déjà ressenti cette sensation des années plus tôt alors que Chura ne se trouvait guère loin.
Je portai un coup d’œil à mes compagnons d'infortunes comme pour avoir la confirmation qu'eux aussi percevaient cette aura pour le moins particulière et puissante.

Prudemment, nous avancions jusqu'à une immense salle impressionnante tant par sa taille que par son contenu. En effet, un énorme morceau de cristal ambré trônait au centre de la pièce et semblait alimenté par d'autres aussi noirs que la nuit. Le plus surprenant restait toutefois l'homme nu en position fœtal enfermé à l'intérieur. Visiblement, des faisceaux de chakra pur – qui ne me disaient rien qui vaille – convergeaient vers la structure et l'homme pour maintenir cet équilibre instauré ou en tout cas c'était ce que je supposais. Il y avait également bon nombre de sceaux que j'étais incapable de comprendre et dont je laissais le soin de décryptage au Nara si toutefois il en était capable. Le regard du concerné se posa d'ailleurs sur moi, en attente de réponse à la scène qui se déroulait sous nos yeux.

« Cela me rappelle le cristal dans lequel nous avions enfermé Oniri afin de la soigner. Le moment où sa sœur a donné sa vie pour elle. Mais... Le cristal était bleuté et il n'y avait pas tous ces faisceaux étranges teintés de noirceur. Pas plus qu'il n'y avait cette configuration de stèles et de sceaux autour. »

Je ne craignais pas d'évoquer tout cela devant Ogami qui était lui même présent dans la caverne de Chura à ce moment là.
J'avais donc déjà vu une personne enfermée dans un cristal dégageant du chakra mais pas de cette manière.

« Sa mère est également restée longuement enfermée dans ce même cristal bleu. »

Comme dans une sorte de stase.

« Et elle était Ewa, l'une des quatre entité de Yorn. »

Mon ton changeait à mesure que je parlais, pensant réaliser quelque chose qui n'était vraiment pas de bonne augure...

« Chura est l'entité opposée à Heyle et il s'agissait d'une immense créature tentaculaire tandis qu'Ewa était sous une forme plus humaine. Cette émanation de noirceur me laisse penser que cet individu piégé dans le cristal est peut-être l'opposé d'Ewa... Seth. »

A moins que Heyle était en fait un homme dans sa représentation humaine mais ce chakra obscur tendait à me faire oublier cette spéculation.

« De ce que j'avais pu apprendre, Seth est une entité se trouvant également à Kaze. Si mon hypothèse s'avère exacte, nous n'avons plutôt pas intérêt à le sortir de son cocon de cristal. »

Sa présence écrasante alors même qu'il était enfermé n'était qu'une indication de plus à ne pas s'y laisser tenter.

« Qu'en est-il des sceaux Xehanort ? Tu parviens à les déchiffrer ?

J'attendis ses réponses avant de poursuivre :

« Allons voir un peu plus loin. La présence qui s'y trouve semble moins hostile. »

Et donc possiblement Heyle mais cela serait bien trop simple... Nous n'avions pas croisé le moindre piège. Cette donnée renforça davantage notre méfiance, nous faisant prendre gare à ne pas fouler le sol orné de sceaux divers pour nous rendre dans la pièce adjacente et y découvrir ce qu'elle contenait.