Natsuki avait pour habitude d'être toujours occupé. Que ce soit par son métier de shinobi, l'entrainement physique et mental inhérent à sa profession, la gestion de son complexe du Septième Ciel, son équipe Matsudaï, son rôle de Bras Droit de Mizuki Aburame, au détriment de sa vie privée. Certains disaient que ce tel investissement lui permettait de rembourser ses emprunts pour son établissement, alors que d'autre avançaient que là était plutôt le résultat de sa dernière décennie passée, et expliquait sa progression rapide vers les Hautes-Sphères du Village. L'un dans l'autre, le Nara tatoué trouvait tout de même du temps pour d'autres activités, comme d'assurer un rôle d'instructeur à temps partiel à l'Académie des Shinobi de la Feuille. Il ne dispensait pas de cours magistraux, mais assurait ponctuellement la transmission de son expérience au travers d'exercices pratiques lorsqu'il y avait des demandes. Une activité qui allait pleinement dans la continuité des objectifs pour lesquels il avait fondé son équipe : transmettre à la génération suivante les capacités de se défendre par elle-même. Une version tronquée de l'idéal qu'il visait, certes, mais ce n'était pas comme s'il avait la possibilité de faire plus en une ou deux journées.

Son client du jour d'ailleurs était un Yamanaka répondant au nom de Shigo, s'il en croyait le bulletin remplit par ce dernier qu'il avait récupéré à l'Académie la veille. Et le domaine demandé était le taijutsu. Il n'y avait pas beaucoup plus dessus, aussi Natsuki commença à songer à une douzaine d'exercices éventuels en prévision de ce qu'on allait lui demander. Comme il arrivait toujours en avance à ses rendez-vous, il appréciait rentabiliser son temps. Normalement, Shigo avait eu l'heure et le lieu du rendez-vous – 14 heures sur le terrain d'entrainement numéro 3 – via l'Académie, laquelle devait lui avoir confirmé que sa demande avait été acceptée.

Histoire de gagner un peu de temps dans la narration, si Shigo arrivait à l'heure – ce que Natsuki lui conseillait fortement – le Yamanaka pouvait considérer qu'il le saluera, indifférent à sa tenue atypique, puis lui demandera ce qu'il attendait exactement de lui pour aujourd'hui.

Natsuki hocha la tête d'un air approbateur.

« Un choix judicieux, en effet. La plupart des jeunes pratiquants pensent qu'il vaut mieux savoir frapper vite et fort avant d'apprendre à encaisser et éviter, sauf que les cadavres se retrouvent très rapidement limités dans leurs possibilités. Mais à votre allure général et votre voix, je devine que vous n'êtes plus un jeune inconscient. »

Shigo avait beau se vêtir presque entièrement de la tête aux pieds, et dissimuler son visage derrière un masque, cela ne cachait pas sa posture, la manière dont il se tenait et dont il bougeait. Il était un shinobi profitant déjà d'une expérience certaine, avec une expertise martiale ancrée dans la peau.

« Bien, commençons de suite alors. Mettez-vous en posture de combat. Je vais tester vos huit années de préparation, évaluer où vous en êtes, et déterminer là où je peux intervenir pour vous aider au mieux à développer votre potentiel. Combattez-moi comme vous le feriez en conditions réelles. Je sais que chacun a un style bien à lui, aussi je ferai au mieux pour me calquer dessus : inutile que je vous enseigne des notions qui vont à contre-courant de vos habitudes – sauf si lesdites habitudes sont mauvaises, bien évidemment. »

Contrairement à son étudiant du jour, Natsuki avait opté pour une tenue de circonstance avec les chaleurs de l'été. Un débardeur noir laissait voir ses tatouages remonter jusqu'à ses épaules, où s'en trouvaient deux de part et d'autre légèrement différents des autres motifs. Sa musculature dessinée par des années de pratique se voyait jusqu'à ses mollets laissés à l'air par son pantacourt assorti, eux aussi marqués par des lignes bleutés similaires à ses bras. La légèreté était de mise.

Et c'est avec cette même légèreté qu'il se lança à l'attaque du Yamanaka masqué. Dès le début, il chercha à l'acculer dans une posture défensive, bien qu'il ne se déployait pas au maximum de ses capacités. Les premiers coups étaient toujours là pour jauger son adversaire. Ce n'était qu'ensuite, progressivement, qu'il accélérait la cadence de ses attaques et optimisait les angles de ses frappes. L'objectif ici n'était pas de mener pas le combat, mais d'observer les réactions de Shigo devant ses assauts, la façon dont il se déplaçait pour éviter ou bloquer, quels étaient ses mouvements, sa vitesse de réaction et de décision. Tout autant de facteurs que Natsuki évaluait en dirigeant plus ou moins l'affrontement dans le sens qu'il désirait.

Et une fois qu'il avait déterminé ses forces, il s'attelait à cerner ses faiblesses. Les coups se firent plus rapides, plus précis, et les enchainements plus piégeurs. Moins de liberté pour éviter, moins de possibilité dans les esquives efficaces envisageables. Il était maintenant question de repérer où était le point de rupture de Shigo, où il ne deviendrait plus capable d'éviter convenablement les frappes qui lui étaient destinées. N'importe comment, Natsuki n'appuyait pas ses attaques, privilégiant depuis toujours la vitesse à la puissance. Puis finalement, lorsqu'il repéra le point exacte où se trouvait le Yamanaka dans ses performances, il mit fin à leur passe de coups.

« Ce n'est pas mal du tout, tout cela. Vous observez bien ce qu'il se passe au cours d'un affrontement, et je vois que vous parvenez à prendre rapidement vos décisions. Cependant, arrive le moment où votre corps n'arrive plus à suivre les informations que votre cerveau reçoit. Où avez-vous apprit à vous battre, dites-moi ? » questionna Natsuki.

Il était toujours intéressant de connaître celui que l'on entrainait, car l'histoire de vie influait bien plus que ce que l'on pourrait le croire sur l'entrainement du présent.

« Bien évidement que j'ai retenu mes coups. » lui répondit Natsuki. « Le but de ceci n'était pas que l'un parvienne à vaincre l'autre, mais que je puisse évaluer votre niveau et vos limites actuelles, afin de déterminer comment vous aider à vous en affranchir. Et maintenant que je sais cela, j'ai une bonne idée de sous quels angles aborder la suite de la journée. »

Un travail qui devrait rapidement être intériorisé par Shigo, compte tenu de son passé. Le Yamanaka avait apprit de la plus rude et punitive des manières, en tirant son expérience de la nécessité de survivre plutôt que par le désir de se battre au nom d'une cause. La volonté de survivre était l'un des moteurs les plus puissants sur une courbe de progression. Natsuki fut toutefois tiré de ses réflexions par une question qui le concernait directement.

« Mes tatouages ? Oui, ils ont une signification à leur manière. » répondit-il avec un sourire. « En eux-même, ce ne sont que des symboles qui ne se rattachent à rien. Mais pour moi, il s'agit d'une promesse que je me suis fait bien plus jeune. »

Il passa distraitement une main sur les courbes de son bras droit en parlant de cela.

« Ils sont la promesse que je me suis fait sitôt que j'ai entrevue comment tournait le monde, et comment il changeait les Hommes. J'avais beau être jeune, je savais déjà que je n'y échapperai pas non plus. Aussi je me suis fait imprimer à même le corps ce serment de rester fidèle à mes principes et à mes valeurs. Peu importe où ma vie de soldat me mènera, peu importe ce que je serai contraint de faire par devoir, je voulais ne pas oublier pourquoi je me bats, et surtout, qui je suis. »

Il relâcha son bras puis haussa les épaules.

« Pour d'autres, un nindô est amplement suffisant pour retrouver sa route lorsque l'on en arrive à faire des écarts. Chacun sa méthode, mais ce n'est pas le sujet du jour. Maintenant que vous avez récupéré, il est temps de passer à la suite, que je vais scinder en deux parties. La première se concentrera sur comment aiguiser davantage vos réflexes. La seconde développera l'utilisation du chakra pour accroître votre mobilité, et permettre à votre corps de bouger aussi vite que vos yeux le souhaiteraient. »

Natsuki posa les mains sur ses hanches, et afficha un sourire confiant.

« Pour l'un comme pour l'autre, je suis certain que vous avez conscience qu'il ne suffira pas d'une journée pour les intégrer pleinement. Ce sera un travail de longue haleine qu'il faudra assurer de votre côté aux cours des mois à venir : je ne suis là que pour vous donner les clefs vers l'escalier de la réussite. »

Même les génies avaient besoin d'un temps minimum pour intégrer de nouvelles notions.

« Pour la partie réflexe, il va être question de pousser vos sens à leur paroxysme, d'intégrer à votre corps une mémoire musculaire, de sorte à ce que quand vous captez un danger, l'information soit immédiatement transmise à vos membres sans faire le détour habituel vers le cerveau pour y être interprétée. Pour la partie chakra, je vais vous aider à canaliser au mieux votre énergie pour la déployer de façon ponctuelle extrêmement rapidement, afin d'accroître la vélocité de votre corps durant un bref instant : celui d'une esquive. »

Les deux exercices étaient étroitement liés, et les scinder distinctement en deux n'étaient pas vraiment possible. Il s'agissait juste d'un axe majeur et d'un axe mineur, l'un préparant à la réussite de l'autre.

« Par lequel préférez-vous commencer ? »

Le service était à la carte.

« Je dirai que les deux se valent. Développer les réflexes permet au corps de réagir instinctivement, presque par lui-même, lorsqu'il est mit dans une situation où il perçoit un danger. Travailler sur l'utilisation du chakra sur le physique accroit plutôt la mobilité '' consciente '', volontaire. L'esquive parfaite est un combiné des deux. Elle est exécutée de façon mécanique par le corps, dans une position optimale par un mouvement rapide qui devient possible par le renforcement très bref de l'agilité grâce au chakra. Comme je vous l'avais relevé tout à l'heure, cela ne sert à rien de voir ou sentir une attaque si l'on est incapable d'y réagir en conséquence à temps. Avoir juste l'opportunité de se dire '' mince, je vais me faire tuer. '' n'a jamais aidé grand monde à s'en sortir. »

Jamais sans une aide extérieure très réactive en tout cas.

« Néanmoins, je reste d'accord sur un point : il y a toujours un exercice plus efficace que l'autre. Lequel, cela dépend de la personne. En fonction de leurs facilités et de leurs préférences, j'en propose l'un ou l'autre. Pour vous, ce sera donc la condition physique et les réflexes en premier. »

Natsuki songea à une série de possibilités avant de trouver celui qui serait le plus adapté.

« Le meilleur moyen pour forger le corps et les réflexes, c'est le combat : une seconde de situation réelle vaut amplement son heure d'entrainement. Toutefois, nous n'allons pas passer la journée à nous taper dessus, bien que cela me serait aussi grandement profitable. Peut-être à la fin, éventuellement. En lieu et place, je vais tout de même vous mettre en danger, afin que vos nerfs et vos sens soient sur le qui-vives. Cela ne vous rappellera certainement pas le bon vieux temps de l'Ile de la Cendre, mais vous placera dans une situation de difficulté où vous allez devoir être sur la brèche pour vous en sortir va vous mettre dans la condition idéale pour affûter vos réflexes. Si vous êtes partant en tout cas. Sinon, eh bien ce sera surtout de la passe de coups jusqu'à plus soif. Avec éventuellement une pointe de bondage sur la fin, si vous vous sentirez suffisamment capable de vous passer de vos yeux pour esquiver. Mais je reste persuadé que sans expérience au plus proche du réel, sans risque, vous n'arriverez jamais à atteindre un niveau acceptable. Pour avoir survécu au règne de Makka, je suppose que vous en avez pleinement conscience. »

Natsuki fit jaillir du sol un socle de pierre parfaitement lisse d'un mètre de diamètre, qui ne s'éleva pas plus haut que la hauteur des genoux.

« Si vous voulez bien prendre place dessus, il va constituer le périmètre sur lequel vous pouvez vous déplacer. Je vais me placer à une vingtaine de mètres de vous, et vous lancer des pierres : à vous de vous débrouiller pour ne pas vous faire toucher, et ce sans sortir du piédestal. A intervalle irrégulier, je vais augmenter le rythme, tout en me rapprochant, ce qui vous laissera de moins en moins le temps de réagir. Cela ne va pas vous rendre plus vif en quelques heures, bien évidemment, mais vous allez éprouver beaucoup de choses au cours de la séance. Je veux que ces sensations se grave dans votre mémoire, et s'ajoute à celles de votre vécu. Mieux encore, si elles peuvent vous le rappeler, et déclencher cet instinct de survie primaire qui a assuré la pérennité de votre existence jusqu'à présent : il vous guidera jusqu'au prochain palier d'excellence. »

Dans le cas du premier exercice, les pierres allaient voler, toute avec la promesse d'un sérieux hématome si elles atteignaient leur but. Natsuki commençait toutefois toujours doucement : le rythme venait après, une fois le temps de chauffe passé.

Le mot d'ordre pour cette entrainement était '' pression ''. Natsuki assura une pression grandissante mais continue sur Shigo afin de le pousser dans ses retranchements avec de brusques accélérations de ses projectiles. Les têtes des pierres qu'il lançait étaient rendu arrondie pour ne pas causer de dégâts inutiles à la cible mouvante, mais elles n'en restaient pas moins dangereuses, et chacun de leur impact tendait à le rappeler. Et progressivement, la magie opéra, Natsuki le remarquant dans les mouvements du Yamanaka. Il en était arrivé à un point où il ne réagissait plus que par instinct. Ses mouvements comptaient de moins en moins de déchets pour aller directement à l'essentiel, une nécessité s'il tenait à son intégrité physique que son esprit avait sciemment intégré jusque dans ses muscles.

Certains pourraient considérer cet exercice comme un acharnement cruel passé le point où Shigo était en peine, mais Natsuki lui le pensait comme essentiel. Chaque étudiant avait une manière d'apprendre qui lui était propre, et qui donnait les résultats les plus efficaces. De par son histoire de vie sur l'Île de la Cendre, Natsuki avait rapidement cerné que c'était avant tout l'instinct de survie qui guidait son étudiant du jour sur le chemin de la progression, ce désir de ne plus être faible, et ne plus avoir à subir la force des autres, ni même la craindre. C'était cette idée qui l'avait probablement forgé pour le mener à ce qu'il était aujourd'hui, c'était selon ces principes qu'il avait grandit et progressé. Cela, et son traumatisme d'avoir été empoisonné par des baies qu'il insère depuis dans la grande majorité de ses intrigues avec autrui.

A terme, Shigo fut poussé jusqu'au point de rupture, où il se retrouva incapable de se défendre efficacement. Il évita de peu de tomber hors du socle, ce qui n'aurait au final pas changé grande chose, puis se redressa à l'aide d'une maîtrise très réactive du chakra, prêt à poursuivre. Une volonté admirable, et Natsuki ne chercha pas à le dissuader. Au contraire, il le remit tout de suite dans le bain en reprenant ses lancer francs.

La grêle de pierres qu'il fit à nouveau pleuvoir fut de courte durée toutefois. Il cessa en effet rapidement de tirer, et opta pour une charge en direction de son étudiant, dont il passa au-dessus du socle d'un coup de pied sauté. A peine eu-t-il posé le pied à terre qu'il pivota brusquement pour lancer son autre jambe en direction de Shigo pour le faucher. Une aura meurtrière se dégagea de chacune des frappes qui suivirent, ne laissant aucun doute sur ses intentions. Il n'y avait pas eu d'avertissement, pas de nouvelles consignes : seulement un Nara tatoué décidé à ruer de coup de son adversaire. Il n'y avait plus de réelle retenue dans ses attaques, il frappait avec vélocité, des coups éclairs après lesquels il se retirait systématiquement. C'était comme s'il dessinait un périmètre plus large autour du piédestal, duquel il ne restait jamais dedans plus d'une attaque. Sa vitesse donnait l'impression qu'il menait ses assauts de toutes parts, et cette contrainte qu'il appliquait était la seule maigre marge de manœuvre qu'il accordait à Shigo, si tant soit peu que ce dernier le réalise seulement.

Le véritable sujet d'intérêt était cependant de découvrir quelle était la réaction du Yamanaka face à ce revirement de situation. Les règles avaient brutalement changé, de même que l'aura et le niveau de puissance que déployait Natsuki. Shigo allait-il se cantonner à la défense sur son cercle, s'interroger sur l'agression soudaine de son entraineur du jour, se mettre à bouger, à fuir, à se battre ?

Bien évidement, s'il cherchait à le pousser jusqu'à l’extrême limite, Natsuki n'allait pas le massacrer non plus. Un coup au but mettrait fin à l'exercice. Et probablement même à la journée d'entrainement. Aussi fort qu'il soit, le Nara tatoué ne pouvait pas maintenir son rythme d'assauts éclairs en parcourant plus de six mètres entre chaque coup à une telle fréquence indéfiniment. C'était un test d’endurance pour lui aussi, et il espérait sincèrement que Shigo s'y montre à la hauteur.

Il en avait le potentiel en tout cas.

Shigo se montra réactif devant les assauts répétés de Natsuki, et décida de quitter son socle de pierre afin de fuir. Il fit de son mieux pour s'assurer une couverture convenable compte tenu de l'écart de niveau qui existait entre eux deux, et parvint même à légèrement entammer le rythme d'attaque du Nara tatoué. Un choix judicieux autant dans ses mouvements que dans l'emploi des techniques qui lui assura une légère avance tout en réduisant les possibilités d'angles d'assauts pour Natsuki.

La poursuite qui suivit ces habiles manœuvre fut toutefois très courte, mais ne s'acheva pas sur le prédateur refermant ses griffes sur son gibier. Contre toute attente, Shigo – ou son corps seul – eu la réaction que le Nara tatoué cherchait justement à automatiser chez lui : il esquiva de lui-même en contre rythme le coup dans le dos qui lui était destinée, et porta dans la foulée la suite logique de ce genre de mouvement, à savoir une contre-attaque. Le coude dressé en guise de réception, Natsuki ne freina pas et le percuta de tout son élan en plein thorax. Une brève et tardive formation de carapace à cet endroit réduisit quelque peu la violence du choc, mais la douleur ne fut pas assez pour qu'il s'immobilise : sa charge les entraina tous les deux au sol.

Natsuki fut le premier à se retrouver sur ses pieds après un roulé-boulé, puis une fois l'impact accusé, il abaissa sa garde. La pression ambiante sembla se relâcher aussitôt.

« Assurément, vous êtes bien plus fort que vous en avez l'air, Shigo. » le complimenta le Nara tatoué tandis qu'il récupérait son souffle.

Il s'était mit lui-même de la difficulté dans l'affaire, mais le Yamanaka avait su efficacement lui opposer résistance, et ce de la manière la plus efficace pour l’exercice.

« Vous vous êtes montré très réactif sur le changement de ton soudain de l'entrainement, et vous êtes parvenu à exécuter de beaux mouvements. Le meilleur reste toutefois cette capacité que vous avez à vous plonger dans cette sorte de transe pour laisser agir uniquement vos sens. Votre instinct de survie est acéré. Cependant, il met un peu de temps à se déclencher réellement, et uniquement en réponse à un stimuli extrême. Je vous propose de nous en arrêter à là pour aujourd'hui, ces premiers exercices s'étant montrés concluant. Pour l'avenir, cette capacité de votre corps à réagir au danger doit devenir un automatisme, une réaction immédiate. Vous en avez largement les moyens. Demain, nous étudierons davantage l'exploitation du chakra en décharge pour accroître brièvement la vitesse du corps. Ce sera probablement plus court, car moins compliqué à mettre en place. Avec ces deux clefs en mains, rien ne saura vous atteindre. »

Tant qu'elles seront poussées à leur paroxysme, et bien au-delà en tout cas. N'importe comment, Natsuki était au moins sûr d'une chose : Shigo avait une prédisposition à la survie bien supérieure à la moyenne. Un don et une malédiction quelque part, car là où l'on s'évertue à survivre de toutes ses forces, cela signifie que l'on ne vit pas. Et à quoi bon exister si ce n'est que pour vivre sur fil du rasoir, et encaisser pour avancer plutôt que de profiter ? Quelle vie menez-vous donc Shigo ? S'interrogea Natsuki. Mais la réponse ne le regardait pas.

« Vous avez peut-être des questions avant que nous nous retrouvions ici demain à la même heure et au même endroit ? »

Peut-être que le Yamanaka avait envie d'un peu potasser la théorie en avance de ce qui l'attendait demain, ou consolider les connaissances et pratiques acquises aujourd'hui.

« En un sens, oui, l'accroissement de la vitesse du corps grâce au chakra pour optimiser une esquive et celle exploitée dans le cadre de la charge sont assez similaires. Toutefois, il existe aussi entre les deux des différences notables, et non des moindres. Par exemple, dans le cadre d'un sprint, comme vous savez le faire, l'énergie s'accumule dans les jambes. En gorgeant le muscle pour augmenter sa rapidité de déploiement et renforcer ses ligaments afin de soutenir l'effort, vous devenez capable d'effectuer des pointes de vitesses dans une direction donnée. En ce qui concerne l'esquive, c'est différent dans le sens où c'est l'ensemble du corps qui est soumit à la décharge de chakra. En terme d'énergie, c'est la même quantité utilisée à peu de choses près, mais comme davantage de muscles sont concernés, la durée est beaucoup plus brève, juste le temps d'un mouvement. Il est certain que ce sont les jambes qui déterminent le positionnement et l'aptitude à se placer hors d'un danger, mais juste compter sur elles n'est pas suffisant. Sauf si, bien entendu, vous faîtes partie de ces gens convaincu qu'ils peuvent éviter les attaques leur étant destinées en effectuant une '' charge à reculons ''. Personnellement, je suis d'avis que le concept est déjà suffisamment explicite en lui-même pour que je perde du temps à démontrer en quoi il est ridicule. »

Il y avait des choses dans la vie qui se passaient de commentaire.

« Après, si cette simple théorie vous suffit pour la mettre en pratique de votre côté, je n'ai pas de problème à décommander notre rendez-vous de demain pour la suite – que je pense sera de toute façon assez courte, compte tenu de vos capacités. C'est vous qui voyez. »

La question suivante arracha un sourire à Natsuki, avant de le faire rire franchement pendant un bref instant.

« Alors c'est le genre de rumeurs qui courent sur moi en ce moment ? Je sais que mes faits d'armes m'entretiennent une certaine réputation, mais là, c'est purement exagéré : je ne suis jamais qu'un homme. Non du tout, je n'ai jamais affronté d'ancien démon, quelle que soit la forme que vous entendez par là. Enfin, il y en a bien un eu un, un Jijetsu, mais je doute que c'est cela qui soit à l'origine de quoi que ce soit de glorieux dans une rumeur. Avec lui, c'est Miko qui s'est attribuée le plus d'attention avec ce qu'elle lui a fait subir... »

Un traitement avec lequel le Nara tatoué n'était pas forcément en accord, même si d'une certaine façon, cela avait été la balise nécessaire pour faire signifier que le règne de Onpu Myakudon était terminé, et que les manières de faire allaient changer.

« Vous verrez qu'avec le temps, quand vous vous serez vous aussi projeté vers les sommets, vous allez devenir un sujet de conversation qui passera d'une bouche à l'autre de temps en temps, mais la légende qui se construira autour de vous ne correspondra par forcément tout le temps à l'Histoire. C'est un fait qui régit d'ailleurs notre métier même : l'important n'est pas la vérité, mais ce que les gens croient. »

Les apparences n'étaient pas fiables, chacun en avait conscience, mais lorsque tout le monde porte un masque, qu'il soit d'os ou de chair, distinguer le vrai du faux devient difficile.

« Et donc, pour en revenir au sujet principal. Dois-je croire que vous revenez demain, ou que vous préférez que nous en restions là jusqu'à ce que vous soyez prêt pour un nouvel enseignement dans quelques mois ? »

Shigo fit le choix de reprendre leur séance le lendemain, ce à quoi Natsuki répondit d'un hochement de tête. Ils convinrent de l'heure et du lieu, puis ils se séparèrent. De son côté, le Nara tatoué passa une partie de sa soirée après le bureau à réétudier la théorie de l'utilisation du chakra. Pour lui, elle était devenue depuis longtemps aussi naturelle que respirer, si bien que c'était parvenir à l'expliquer à d'autres qui était devenu compliqué. Le problème des automatismes... Au final, enseigner à des étudiants permettait d'en revenir à ses propres bases, à des éléments que l'on avait pour ainsi perdu de vue à force de construire au-dessus. Une base solide est nécessaire, mais il est bon de temps à autre bon de revenir vers elle pour s'assurer que les étages suivants soient bien droits.

Le lendemain, après une matinée passé à jongler entre ses diverses obligations professionnelles, il se dégagea une demi-heure après le repas pour revoir une dernière fois le contenu de son cours, puis se rendit à l'endroit convenu la veille, en avance, comme d'habitude. Selon lui, l'après-midi était amplement suffisante pour que Shigo parvienne à saisir les bases de l'usage instantané du chakra pour de très brèves pointes de vitesse. Probablement même qu'il n'aura pas besoin de plus d'une heure ou deux avant qu'ils s'attèlent à lier l'exercice du jour à celui de la veille. Réussir nécessitait surtout de la pratique et de l'expérience, mais l'apprentissage était toujours meilleur si l'on connaissait les bonnes pistes.

« Bonjour Shigo, vous avez passé une bonne nuit ? » lui demanda Natsuki lorsque ce dernier se présenta à lui.

Il avait bien conscience que ses entrainements pouvaient être éprouvant pour le corps, surtout quand l'on n'avait pas l'habitude. Non pas que la condition physique de ses étudiants était en cause, mais il avait tendance à les pousser à faire des efforts inhabituels, cumulés à de la gymnastique d'esprit qui venaient à bout de la plupart des shinobis peu habitués à cette formule.

« Bien, si vous êtes prêt, alors je suggère que nous commencions de suite. Vous souvenez-vous de ce que je vous ai dit hier, avant que nous nous quittions, au sujet de l'utilisation du chakra dans le cadre qui nous intéresse ? Et surtout, avez-vous réfléchit à la question, et à l'approche par vous-même ? »

Une fois de plus, l'exercice débutait avec de la théorie.

Natsuki hocha la tête d'un air satisfait.

« Eh bien ma foi, l'entrainement de cet après-midi va être encore plus court que ce que je pensais. Votre réponse est aussi complète que ce que je pouvais en espérer. Un esprit vif dans un corps sain, vous avez décidément tout ce qu'il faut pour réussir dans la vie, si ce n'est l'expérience des années – laquelle n'est jamais assez. Vous êtes dans le juste en tout cas. L'efficacité d'une charge se mesure à la distance parcouru en une seconde, grâce à une abondance de chakra localisé dans les jambes. Pour l'esquive, comme vous l'avez bien retenu, cela tient davantage de '' l'explosion ''. Et le terme n'est effectivement pas choisi à la légère, car elle peut détériorer le corps si elle n'est pas justement dosée. »

Ceci était aussi valable pour un seul membre, dont la surcharge de chakra pouvait déchirer les muscles ou rompre les ligaments. La différence lors d'un déploiement dans tout le corps était qu'il était impossible de doser l'intensité au cas par cas.

« Le problème que vous soulignez est donc pertinent, mais n'a pas de solution au sens strict du terme. Pas que je connaisse en tout cas. Toutefois, comme nous avons tendance à l'apprendre très vite dans la vie, un problème possède parfois plusieurs solutions. Et dans notre métier, un problème peut aussi se contourner. Intéressons-nous aux facteurs entrant en ligne de compte dans l'esquive de justesse. »

Les bras croisés, Natsuki leva son index.

« Tout d'abord, il y a l'intensité de l'énergie déployée. Il convient de rapidement repérer jusqu'à point votre corps peut tolérer sans se déchirer. Et si le seuil est insuffisant, il y a deux moyens d'agir dessus. Le premier est d'habituer les muscles, les os et les tendons à supporter cette brève décharge. Le second est d'agir sur la résistance de votre corps pour le renforcer, afin qu'il puisse mieux encaisser les brusques explosions de chakra. Plus vous avez de marge, et plus le risque de vous blesser est faible. »

Il leva ensuite son majeur pour rejoindre l'index.

« Ensuite, il y a la durée de la décharge de chakra. Plus celle-ci est courte, et moins le corps est exposé à un effort susceptible de le rompre. Mais pour être en mesure de raccourcir ce temps d'exposition au chakra, il convient d'exécuter un mouvement efficace. Cela se compte en dixièmes se seconde, mais elles peuvent faire toute la différence. Elles l'ont déjà fait plus d'une fois en ce qui me concerne... » précisa-t-il en passant une main sur son cou.

Il leva finalement son annulaire pour le dernier point.

« Enfin, il y a le mouvement du chakra dans le corps. En partance du tronc, il se répand dans tout le corps. Son déplacement doit être fluide, semblable à un courant électrique. S'il s'arrête à un endroit, comme c'est le cas lorsque nous utilisons le chakra pour adhérer à une surface ou pour courir plus vite, il y a de forte chance que dans le cadre d'une libération brusque et intense, il cause des dommages. S'il se contente de passer, alors il apporte juste le temps d'un instant l'énergie nécessaire à une esquive, et s'évacue sans s'accumuler. »

Décroisant ses bras, il les posa sur ses hanches.

« Je résume donc. Il faut que vous vous concentriez sur l'intensité de l'énergie déployée, la durée à laquelle vous exposez votre corps à celle-ci, et sur la fluidité de la circulation du chakra pendant le mouvement. Il y a donc un timing à affûter de façon de plus en plus précise, jusqu'à ce que à terme, cela devienne un automatisme, un réflexe conditionné que votre corps emploie de lui-même lorsque vous amorcer une esquive. Cela fait beaucoup de choses à réfléchir en même temps, n'est-ce pas ? Le corps-à-corps, contrairement à ce que l'on pourrait croire, n'est pas qu'une affaire de force réservée à des sans-cervelle. »

Même si pour beaucoup, pour atteindre la perfection, la réflexion doit s'effacer au profit de l'instinct.

« Vous vous en sentez capable ? Alors essayez. Essayez en bougeant en même temps, ne soyez surtout pas statique pour ce genre d'exercice. »

« Sans avoir la prétention d'être un génie du combat, je n'ai jamais eu de problème de ce genre, et le concept d'avoir nécessairement un Hyûga derrière moi pour ma sécurité ne m'a jamais effleuré l'esprit. Et il y a une raison très simple à cela : contrairement à ce que vous disiez... »

Natsuki s'arrêta dans sa phrase car Shigo ne l'écoutait déjà plus. Il venait de partir s'échauffer en courant en rond, l'esprit focalisé sur son objectif.

« Si cela vous embête ce que je dis, ou que je dérange, n'hésitez pas à me le faire savoir... » marmonna dans sa barbe inexistante le Nara tatoué, à sa propre attention.

Après quelques minutes, le Yamanaka sembla prêt pour s'exercer sur la leçon du jour. Il concentra, laissa son corps se gorger de chakra, puis exécuta une esquive aussi performante qu'incontrôlée. Le mouvement fut rapide, mais son manque de maîtrise dessus l'amena à s'éclater contre le tronc d'un des arbres présent sur le terrain d'entrainement. Natsuki le rejoignit d'une démarche tranquille, avant de se pencher vers lui pour l'observer à travers son masque avec le regard de celui qui savait que cela allait arriver.

« Vous êtes encore conscient ? » lui demanda-t-il.

Natsuki lui palpa les bras, le torse et les jambes brièvement, comme le ferait quelqu'un à la recherche d'une arme dissimulée. Ici et là, il enfonça de deux phalanges un index inquisiteur et probablement peu agréable.

« Pas de fracture, ni de rupture des ligaments. Votre flux de chakra a l'air stable. » diagnostiqua Natsuki au terme de son examen. « Bien, pendant que vous finissez de récupérer, permettez-moi d'en profiter pour répéter ce que je vous disais. Si effectivement, je n'ai jamais eu besoin de quelqu'un pour réguler mon chakra qui s'emballe, c'est tout simplement parce que j'ai toujours cherché ma limite par le bas plutôt que par l'excès. Vous avez à très juste titre relevé que l'on ne connait pas ses limites à l'avance. C'est un fait. Mais j'ai l'impression que votre volonté de progresser rapidement vous induise sur une mauvaise méthode. »

Mauvaise, et potentiellement délétère.

« J'ai très clairement senti lors de votre mouvement que vous avez déployé une quantité phénoménale de chakra. Bien plus que nécessaire pour l'essentiel des attaques existantes. S'ajoute à cela que surprit par votre soudaine mobilité accrue, vous n'avez pas été capable d'ajuster votre déplacement. Je ne comprends pas la raison pour laquelle, alors que vous vous montriez frileux à juste titre, vous y allez à fond dès le début. Si je peux me permettre le conseil, vous devriez plutôt tenter de vous exercer à des déplacements avec de faibles déploiements de chakra, et d'augmenter progressivement l'intensité de votre énergie. Cela vous permettra de trouver votre limite sans risque, en plus de vous habituer à contrôler vos placements lors de brusques et brèves accélérations. Avant de courir, il faut apprendre à ramper. »

Natsuki le jaugea du regard lorsqu'il se releva, pour s'assurer que tout était en état, puis l'invita à reprendre.

« Le terrain est davantage dégager par là-bas. Vous devriez vous y exercer pour éviter des accidents similaires. Quand vous vous sentirez prêt, nous passerons à une pratique un peu plus pointue, avec une nouvelle simulation de combat. »

La pratique restait parfois le meilleur moyen de comprendre la théorie une fois les bases intégrées.

Shigo débattit un moment sur la façon dont il pensait être le mieux pour utiliser son chakra au combat. - à savoir à fond.

« Avec votre voix partiellement étouffée par votre masque, et le peu que je suis en mesure de voir de votre expression, je n'arrive pas à déterminer si vous avez le ton de quelqu'un qui pose des question parce qu'il cherche à comprendre – ce qui est une excellente chose – ou si au contraire, si c'est plutôt le genre qui cherche à me démontrer qu'il est dans le juste et qu'il en sait beaucoup plus que moi – ce qui est tout à fait possible, mais très mal formulé dans ce cas. Dans le doute, sensei, je vais croire que mes connaissances peuvent encore vous être utiles, et vous expliquer mon point de vue sur la question. »

Natsuki croisa les bras sur sa poitrine.

« Ce que vous relevez est intéressant, et les deux argumentaires se tiennent. Toutefois, comme vous l'avez souligné, tous vos exemples prennent place au cours d'un combat. Alors oui, en situation réelle, la faute n'est pas permise, mais ici, nous ne sommes pas en train de nous battre : nous nous entrainons. Et l'entrainement justement, cela sert à l'apprentissage. Cela sert à connaître les fautes qu'il est possible de faire, et comment ne pas les commettre. L'exercice engendre l'expérience, et l'expérience induit la justesse. »

Décroisement des bras, pose sur les hanches.

« Vous avez tout à fait raison sur un point : mieux ne vaut pas se montrer timoré sur le déploiement d'énergie, trop valant mieux que pas assez – sauf si vous vous déchirez bêtement tous les muscles. Là est l'éternel équilibre à trouver entre la consommation optimale théorique, et l'utilisation en situation pratique réelle. Et celui-ci se découvre avec l'habitude – ce que l'on acquiert rarement au combat, où l'erreur est fatale. Vous m'avez demandé ce à quoi je pensais durant les micro-secondes qui précèdent une attaque. Aucune de vos deux propositions n'est correctes cependant, tout simplement parce que je ne pense pas à cet instant. J'ai depuis longtemps rompu mon corps à ce que j'ai abordé avec vous hier, à savoir à agir de lui-même. L'automatisme et la mémoire musculaire sont des armes redoutables. Je sais jusqu'à inconsciemment quel seuil d'énergie ne pas dépasser, quelle quantité utiliser en fonction de la situation que je perçois, et comment me déplacer en conséquence. »

Nouveau mouvement des bras pour aérer le dialogue.

« Alors oui, mon seul de résistance est supérieur au vôtre, mais croyez-vous que ce soit la seule chose qui nous différencie ? Contrairement à ce que vous pourriez penser, il n'y a pas un si grand écart de '' réserve de chakra '' entre nous. Ce qui nous sépare, c'est l'expérience, et l'habilité à utiliser notre énergie de façon optimale, sans gâchis ni déchet. Mais je n'irai pas à l'encontre de votre courant de pensée. Si vous préférez courir plutôt que marcher, habituer votre corps à se briser plutôt qu'à se renforcer, connaître l'ivresse de la vitesse excessive plutôt qu'optimale, et considérer votre vie comme un combat plutôt que cette journée comme un exercice, grand bien vous fasse. Simplement, je ne donnerai pas cher de votre peau quand après avoir tout dépensé pour éviter deux coups de pied, votre adversaire n'aura plus qu'à vous cueillir sans se fouler avec le troisième. »

Il haussa l'épaule, l'air de dire que c'était sans importance.

« Mais je n'ai pas la science infuse, et peut-être qu'éventuellement, je suis en tort de penser ainsi. En attendant, je suis toujours en vie. Tout comme vous. Alors maintenant dites-moi, à la lumière de tout ceci, dois-je continuer de vous faire perdre de votre précieux temps avec mon expérience douteuse et un peu d'exercice pratique, ou bien jugez-vous que je vous en ai déjà gâché assez ainsi, et que le moment est venu que je dispose ? »

N'importe comment, Natsuki ne voulait pas s'attarder plus de deux heures encore : il y avait une promotion sur les légumes au marcher, et Tante Lulu l'avait missionné pour faire le plein.

Natsuki secoua négativement la tête de gauche à droite en soupirant.

« Non, le problème ne se situe pas dans le fait que vous me teniez tête. Au contraire, que vous me posiez des question pour que je réfléchisse à ma propre pratique est une bonne chose. Cela me montre que vous voulez comprendre, et cela fait évoluer le tout. Ce que je n'apprécie pas par contre, c'est votre ton, que vous me l'exprimiez d'une manière telle qu'elle me donne l'impression que vous êtes persuadé d'avoir raison, et que tout ce que je vous explique est infondé ou mauvais. Votre méthode est peut-être meilleure, en plus d'être plus risquée à mon sens, mais en attendant, ce n'est pas moi qui craint de subir un éclatement des membres. Alors je ne vous empêche pas d'apprendre à votre façon si vous préférez le faire à vos dépends, en utilisant vos convictions pour les mettre en lien avec ce que nous avons vu hier. Mais dans ce cas, je ne peux pas dire que je vous serai d'une grande utilité, dans la mesure où les deux moyens vont diamétralement en sens opposé. Alors c'est vous qui voyez. »

Difficile de savoir ce que Shigo aurait fait s'il avait entendu cela avant de faire son choix, mais la construction des post sur un forum faisait qu'il avait décidé d'employer la méthode sécurisée pendant une heure.

« Bien. » annonça Natsuki au terme de cette durée, après l'avoir conseillé tout du long comme il le pouvait et quand il le fallait. « Considérons que tout ceci n'était pas véritablement épuisant, et que vous avez la forme. Voulez-vous mettre un peu de pratique dans tout cela, histoire de voir ce que cela donne au plus proche du réel ? Je peux si vous le désirez stimuler votre sens du combat et de l'apprentissage en vous attaquant un peu. Rien de vaut un échange de coups pour affermir les premiers acquits au cours de l'exercice »

Cela dépendait des gens, bien évidemment, mais Natsuki était plutôt de ce genre là, à s'épanouir pleinement aux travers des combats.

«  Si vous voulez m'offrir du répondant, libre à vous : c'est même l'intérêt de l'esquive que de se placer en position de contre-attaque idéale. Par contre, si vous voulez que nous finissions là-dessus, vous serez gentil d'éviter de me reflanquer des frousses comme vous l'avez fait hier : je gère très mal la panique. »

Natsuki le précisa, car Shigo semblait en effet du type à aimer garder les petites roulettes sur son vélo. C'est tout du moins ce que sa signature laissait entendre : il préférait que son adversaire lui révèle tous ses points faibles plutôt que de se fatiguer à les chercher lui-même. A moins qu'il en était tout simplement incapable ?

N'importe comment, le Nara tatoué avait prit ses précautions. Comme la veille, comme tous les jours.

Devant la réponse du Yamanaka, Natsuki se contenta de hausser les épaules : cela n'avait pas d'importance pour lui.

« C'est vous qui voyez. Vous vous êtes déjà bien entrainé sous ma supervision, et vous avez sué plus que nécessaire pour mériter l'objet de vos convoitises – qui je suis sûr, est beaucoup plus méritant de l'acquérir par l'effort que lorsqu'il est simplement gratuit ou offert par le Village, n'est-ce pas ? »

Les chemins les plus courts n'étaient pas forcément les plus agréables, surtout lorsque l'on cherchait à s'inscrire dans quelque chose de construit, qui profite à son personnage et à son évolution, que ce soit dans sa mentalité, sa façon de percevoir le monde, ou tout simplement sa force. Natsuki l'avait déjà constaté par lui-même en discutant avec d'autre : commencer tout de suite au top rendait souvent la construction de soi et la narration bien moins plaisante que quelque chose de bâtit avec le temps et ses efforts.

« Par contre, nous revoir demain ne va pas être vraiment possible. Mon agenda étant hélas plus chargé que ce que je souhaiterais – même si je me suis mit dedans tout seul comme un grand – je n'ai que ces deux jours là à vous offrir avant un moment. N'hésitez toutefois pas à reprendre contact avec l'Académie pour d'autres leçons avec moi dans quelques temps, ou avec un autre si vous êtes pressé. »

Et puisque l'on parlait d'Académie...

« Tant que j'ai le doigt sur le sujet, n'oubliez pas de passer au bureau des validations pour faire enregistrer notre séance d'entrainement : les gens ont parfois tendance à oublier que c'est l'étudiant qui doit réaliser la démarche, et non le formateur. Si c'est la première fois, sachez qu'il y a aussi un questionnaire de satisfaction à remplir. Enfin, si l'on peut appeler cela un questionnaire... Il ne s'agit que d'une grille de satisfaction allant de un à dix, et il y a en-dessous une petite place pour écrire les '' autres remarques ''. Je trouve cela un peu ridicule, dans la mesure où l'Académie considère que tout ce qui est-dessous de '' huit '' équivaut à '' un '' . Cela fait un peu vente forcée, mais bon... Je crois que c'est le Hokage Nikkou qui avait mit cela en place à l'époque, pour déterminer si cela valait le coup de mettre en place un budget pour les cours particuliers. »

Dire qu'aujourd'hui, les deux seuls choses que faisait l'ancien Hokage était de plaindre son verre vide et de vider son verre plein. Triste.

« Surveillez aussi votre boite aux lettres, ou n'importe quel autre support qui vous sert à recevoir vos messages. Vous devriez y trouver prochainement dedans l'intitulé de la technique d'origine qui vous servira de support à la description de celle que vous aller créer à partir de l'apprentissage d'aujourd'hui. »

A moins que c'était juste le code de la technique qu'il devait donner ? Il ne savait plus.

« Bon, je vais y aller du coup. Je vous souhaite une bonne récupération Shigo. Et si je peux me permettre un dernier conseil, les sources chaudes des Rakuzan sont idéales pour chasser les courbatures avant qu'elles ne s'installent. Si vous voulez vous requinquer, n'hésitez pas à y faire un saut. »

Ainsi s'acheva un apprentissage plutôt intéressant, et bien plus plaisant que la plupart des autres auxquels il avait beaucoup de mal à leur donner plus de forme qu'un simple échange d'ordres / exécutions répétitifs à souhait.