Les yeux se portaient sur ce navire approchant doucement du port. Le froid était une habitude dans cette contrée enneigée sans cesse. Mais la température avait doucement baissée de quelques degrés à chaque heure ; c’était un signal assez fort pour ses habitants pour être informés de la visite exceptionnelle qui était faite. Se rassemblant au port, scrutant la ligne d’horizon, le premier cri vint d’un garçon qui identifia de loin cette embarcation importante se dévoilant dans la brume maritime du matin. Apparaissant comme un point, le vaisseau prit de l’ampleur au fur et à mesure qu’il réduisait la distance avec les quais. Désormais, tous pouvaient observer ses bois et voiles, et n’attendaient rien de plus que son passager pour confirmer la nouvelle.

Nouvelle qui circulait depuis quelques jours sous la forme de rumeur. En effet, pour la première fois depuis un an, la deuxième fois depuis l’avènement de l’Empire, son Maître et Fondateur arrivait et foulait de nouveau ces terres glacées. Certains admirateurs, d’autres soupçonneux, les derniers inquiets, tous s’étaient malgré tout pressés par simple curiosité. Le personnage était assez énigmatique, sa silhouette voilée de mystères et d’inconnues : tyran, guerrier immortel, administratif talentueux, défenseur de tous, petit chef ou autres surnoms, il avait droit au traiement que l’homme commun réservait aux hommes politiques et à ceux qu’ils ne connaissaient ni ne comprenaient pas. Et pourtant, la foule devint de plus en plus massive et massée sur ces quais. Le navire se rapprocha, et aborda. Les murmures et discussions de trottoir laissèrent place à un silence bourdonnant et lourd, comme si on attendait la dernière bête de foire à destination du cirque.

D’un pas imposant et d’une figure forte, l’homme fit son entrée. Toujours à bord, il observa ces concitoyens venus l’accueillir – ou plutôt de violer du regard. Le personnage avait bien conscience qu’il avait une part étrange dans l’opinion. Son coup d’État avait été incompris par beaucoup, et la propagande et le relais d’un message impérial avait peu à peu fait passer les idées. Localement, on ne lui avait pas pardonné la mort de la Daimyo Oge, mais la gouvernance de Yuki Samui, et la sécurité apportée par l’Empire avait renforcée les liens entre les Samui et le peuple. Cet équilibre manqua de peu d’être détruit lorsqu’une violente attaque détruisit une large partie du port de Dhartsedo ; mais le retour inattendu de la même Daimyo – toujours en vie ! – et la création d’un Triumvirat visant à équilibrer les forces locales pour rassurer et protéger ce Pays avait fait son chemin, et demeurait aujourd’hui le grand accomplissement impérial. Ne parlons pas d’amitié franche entre les Samui et les Suzurane ! Mais en se cotôyant plus régulièrement au sein du Conseil de Yuki, les deux arrivaient à une forme d’entente qui ne mettaient ni les uns ni les autres au dépourvu ou en porte à faux.

Un Empereur par la force, mais aussi par la réflexion et l’écoute. Un Empereur prêt à la Guerre, mais avant tout défenseur de la Paix. L’Empereur des Manigences et de l’Imprévisible.

Posant pied sur les quais, la descente lente de l’individu avait créé un arc de cercle très vaste, la foule préférant reculer pour laisser un peu d’air et d’espace au nouvel arrivant. Seule une gamine, tête en l’air et le regard dans les nuages, manqua de reculer et se retrouva nez à nez avec l’Empereur. La malheureuse figurait comme un petit poids face à un sumo au meilleur de sa force ; et l’ombre du Kamui plaça l’enfante dans l’obscurité, lui cachant le soleil. La mère, qui remarquait son erreur, cachait difficilement sa panique mais ignorait si elle devait se jeter pour protéger son enfant, ou rester sur place et prier. Le Ninja fit un mouvement du bras …
… et une main gantée vint caresser la tête de la gamine.

~ Attention, petite, ne perds pas ta mère de vue …

Ce geste inattendu, et les pas qui poussèrent Kakeshuou Samui à se rapprocher de la foule et à serrer quelques mains entrainèrent en récompense une petite salve d’applaudissements timides, pendant que les visages se déridaient. Affichant un air sérieux et sévère, mais accordant malgré tout le rictus d’un sourire, le Kamui valsait entre poignées de main, signes de tête, et salutations basiques.
Son attention se focalisa sur d’autres intérêts lorsque son hôte se divulgua. Une nouvelle fois, devant l’entrée en scène de l’un des membres du Triumvirat, la foule fit place nette.

~ Kirito ! Merci de m’accueillir … . Comment se passent les choses au Triumvirat depuis cette dernière année … .

Spoiler:

La lettre avait été envoyer très rapidement aussi vite que le temps me l'avait permis. J'avais rencontré une personne plutôt énigmatique, mais claire sur ses propos. Reprendre ce qui lui revenait de droit, c'était ce que j'avais compris. Suzurane Hakyô, fils du dernier chef des Suzurane de ce qu'il m'avait dit et j'avais pris ses propos très au sérieux.. Même en tant que membre du Triumvirat, et que je m'étais montré discret sur mon rôle lors de sa rencontre, je savais que ses paroles n'étaient pas à prendre en plaisanteries. Non, c'était du sérieux, j'en avais clairement le pressentiment. Ainsi, ce fut une missive plus que urgente qui fut envoyé au village caché d'Iwa, relatant les faits et demandant la venue immédiate de l'Empereur. La réponse de ce dernier n'avait pas tarder à arriver, m'ordonnant certaines choses et m'annonçant ainsi sa venue.

Les ordres données fut vite entrepris, et je mettais en premier lieu rendu au palais du Triumvirat. Il me fallait prévenir mes collaborateurs de cette arrivée et savoir surtout ce qu'en pensait les Suzurane. Le représentant du clan m'avait donné sa parole quant à sa fidélité et loyauté au Triumvirat (et donc à l'Empire, par extension), mais il m'avoue ne pas contrôler son clan où il y avait beaucoup d'indépendantistes. Il y avait donc un risque que certains suivent cet Hakyô. Puis, ils m'avaient donné leur consentement pour renforcer les grandes villes.

Maintenant, il me fallait attendre l'arrivée de l'Empereur à la ville portuaire, Dhartsedo. C'était le jour J et j'arrivais, il était déjà là. Son arrivée avait formé une petite ronde autour de lui, et à mon arrivée, on me laissa passer. J'étais devenue assez réputé du fait de mon statut au Triumvirat. M'approchant du Kamui, ce dernier me salua avant de me demander ce qu'il s'était passé durant cette dernière année.

Bienvenue sur Yuki no Kuni, Kamui-sama. Tout se passe à merveille pour être honnête et l'entente est au beau fixe avec les Suzurane et Oge Akeko. Jusqu'à maintenant, l'arrivée de ce Hakyô perturbe l'équilibre...

Et, j'avais dit ces derniers mots à voix basse. Même si cela était un fait public désormais, il était important que cela reste entre l'Empereur et moi.

L’arrivée d’un Empereur sur l’une de ses contrées était toujours un évènement local important. Et cela était encore plus vrai lorsque ce dernier ne mettait que rarement les pieds ici. C’était le cas pour Yuki no Kuni, où Samui Kakeshuou avait choisi d’installer un Triumvirat pour consolider son emprise. Il y avait probablement là une volonté de masquer l’absence de constitution réelle ici. Mais pour Hakyô, c’était surtout pour répondre à la mort de Samui Yuki et peut-être même pour renforcer l’île maintenant que Kiri était réapparue.

C’est pourquoi il ne fut pas difficile pour l’Héritier de savoir quand le Kamui arriverait. Il prévint Yamada Kioshi le matin-même, et lui donna ses dernières instructions pour cette journée qui s’annonçait décisive pour l’entreprise du Suzurane.

─ Si je lève le poing, rejoins-moi. Sinon, les consignes restent les mêmes : empêche quiconque de me perturber.

Puis ils partirent de l’auberge du port. Dehors, ils se séparèrent bien vite, tandis que les premiers villageois se décidaient à attendre aux meilleures places. En moins d’une heure, la place publique de Dhartsedo était devenue bondée, à tel point qu’une couche de gens l’entourait. C’est dans ce climat populaire qu’il arriva.

Jamais de sa vie Hakyô n’avait vu l’un des hommes qu’il haïssait pourtant le plus. Et il fallut bien avouer que les descriptions physiques qu’il avait recueillies au cours de ses périples n’étaient pas des mensonges. Samui Kakeshuou était un homme grand, qui en imposait de par sa prestance autant que par des muscles encore présents malgré son âge. Et surtout, il reflétait l’âme d’un shinobi voire… d’un vrai guerrier.

─ Voilà donc le grand Empereur du Shûkai, et son cousin laquais…

La voix, contrairement à celle de Kirito à l’instant, avait suffisamment porté pour que tout le monde entende. Une partie de la foule sembla s’agiter un peu, les visages se tournèrent, et les premiers regards convergèrent vers un borgne qui s’engouffra entre eux… pour finalement faire marche au milieu du cercle qu’avait formé la foule. Suzurane Hakyô faisait face aux deux Samui sans la moindre timidité.

─ Je suis Suzurane Hakyô, l’objet même de votre visite ici. Que le peuple de Yuki no Kuni se réjouisse de mon retour ici, ils auront pu voir une… Il fit mine d’hésiter, mais reprit rapidement. seconde fois, l’Empereur qui leur donne tant !

Il avait esquissé un rictus qui disparut subitement de son visage. De son unique œil visible, il scruta le Kamui qui était à une bonne trentaine de mètres de lui. A ses côtés, Samui Kirito pouvait se sentir ignoré par le Nukenin. Il avait joué son rôle, mais désormais… c’était un face-à-face presque total entre les deux prétendus dirigeants. L’un se basant sur des faits militaires passés qui ne lui revenaient pas, l’autre sur l’unique base de son sang et d’une courte expérience.

─ Je suis l’unique fils et héritier de la Montagne, le dernier grand chef Suzurane, assassiné par le Régent et Troisième Mizukage lors de la conquête barbare des Kirijins ici. Emprisonné des années durant jusqu’à la destruction de la Sanglante, j’ai assisté à l’avènement d’une Alliance des Pays Neutres qui a profité de la fragilité de ce pays pour le placer sous sa bannière. Une bannière devenue pleine de sang lorsque vous avez fait votre coup d’état. Tout ça, je n’ai pu le voir que depuis le Grand Continent, mais à présent je suis là, enfin, pour vous poser une question.

La pause qu’il marqua ne dura guère. Il avait largement eu le temps pour peser ses mots.

─ Vous n’étiez pas le chef des Kirijins, et aucune des deux formes du Shûkai n’a fait du bien à Yuki no Kuni, qui a au contraire du souffrir d’absence de dirigeants à certains moments quand ces derniers n’étaient pas proies à des assassinats. Alors, je vous le demande : où est donc votre légitimité pour gouverner ici ?

C’était bon accueil que l’Empereur avait reçu de façon générale de la part de la foule. Et suite à l’arrivée de son proche parent, les deux hommes avaient eu le bref instant d’échanger quelques mots. L’Ancien était pour l’instant plus intéressé par la tenue du Conseil triumviral et sur son fonctionnement – bon ou mauvais – que sur le risque que Kirito avait émis dans une lettre quelques semaines plus tôt. Ce dernier n’hésitait d’ailleurs pas à revenir sur ce sujet, montrant bien son inquiétude et le sérieux qu’il plaçait dans cette affaire … .

Fort heureusement, nulle traque, nulle recherche ou question ne devait être posée pour identifier et localiser l’individu : de sa voix forte, et sans gêne quant à la foule qui l’entourait, ledit personnage et intrus se faisait connaître et interpelait ouvertement le duo Samui sur un ton supérieure et invectif. La foule, surprise par cette interjection, préféra prendre un peu de recul pour laisser de la place à ce nouvel acteur. De toute évidence, le ton employé n’était pas celui de la sympathie et on pouvait presque voir la naissance d’un conflit dns les airs. Certains n’hésitèrent d’aillezurs pas à quitter les lieux sans demander leurs restes ! Contrairement à d’autres Nations, les Neiges avaient été relativement épargnées par les conflits : ce n’était pas aujourd’hui qu’il fallait faire preuve de trop de curiosité … .

Ayant réagi immédiatement à l’appel qu’on lui adressait, le Kamui avait fait volte-face. Et en dévisageant la face éborgnée du personnage, il avait levé la main pour interdire à Kirito toute intervention armée ou offensive de sa part. Le jeune homme était prudent et ne manquait pas de courage ; mais la scène était complexe. Le pire ennemi possible pour la Paix en ces lieux venait d’apparaitre au milieu d’une foule trop curieuse pour prendre ses jambes à son cou. Si un conflit devait absolument apparaître, il fallait le retarder le plus possible pour que le plus grand nombre d’imbéciles se décide à partir.
Le Suzurane avait certainement conscience de la curiosité du peuple ; et il en jouait à gorge déployée. N’hésitant pas à critiquer ouvertement le Maître du Shukaï, il se doutait certainement que les badauds seraient trop surpris pour les laisser débattre en paix. Le personnage se donnait ainsi un bouclier populaire et en jubilait certainement de l’intérieur.

Mais c’était un tort de penser que l’Empereur se laisserait déstabiliser par ce genre d’intervention publique. En vérité, le sextagénaire ne put retenir un petit sourire narquois sur ses lèvres ; depuis sa prise du pouvoir, c’était bien la première fois qu’un individu prenait le risque ouvert et public de le défier ! Et ce genre de provocation lui avait durement manqué ! Si l’étranger était prêt à en assumer les conséquences, alors Kakeshuou Samui jouerait cette partie avec un grand plaisir. Pendant le procès verbal interminable de son opposant, l’ancien s’était tourné lentement dans sa direction et avait comblé la distance de deux pas, ne venant pas pour autant opresser son interlocuteur par sa proximité. Il restait grave et silencieux, écoutant avec calme et patience, attendant la fin du plaidoyer. De toute évidence, cet homme était un vestige de l’Ancien Temps, tout comme lui ; mais à la différence du Vénérable, il venait pour la zizanie et la Guerre, et non pour favoriser la Paix voulue par le Shukaï. Un idiot surgi des profondeurs ; profondeurs qu’il n’aurait jamais dû quitter … .

Que le débat politique commence !

~ Le « cousin laquais » ne s’abaissera pas à répondre aux invectives d’un personnage aussi insignifiant qu’un ivrogne ayant trop consommé … . Il en faut bien plus pour nous toucher dans notre Honneur et nos valeurs … . Mais si c’est le débat qui vous plaît, je suis prêt à vous attribuer du temps ! La raison première de ma venue est le peuple de Yuki lui-même, mais si vous désirez à ce point la priorité, je consens à vous la donner … .

Une façon relativement douce et plébisciste de reprendre le débat et de faire démentir une quelconque marque de faiblesse. Le peuple attend certainement à ce que le combat commence et que les armes se croisent ; mais il n’en sera rien. L’Empereur ne risquerait pas ici un combat meurtrier qui conduirait cette Nation à la Guerre Civile.

~ Je confirme une grande partie de vos propos ! Nous avons effectivement « profité » d’une fragilité pour répondre à l’appel de sa dirigeante, Akeko Oge, co-fondatrice de l’Alliance des Pays Neutres, pour placer cette contrée sous notre protection. Depuis, hormis l’incident de l’année dernière qui avait détruit le port de Dharteso, tout n’a été que prospérité ; je vous en remercie !

Le retour – surprise ! – de l’ex-Daimyo au sein d’un Triumvirat avait laissé le peuple perplexe, mais une bonne campagne de propagande pour expliquer le pourquoi du comment avait mit fin à toute théorie du complot alliant l’Empereur et l’ancienne Daimyo fut suffisante pour montrer un nouveau visage de l’Empire : le Kamui « Assassin et Tyran » devenait le Kamui « Protecteur et défenseur du peuple ». De plus, la mise en place du Triumvirat réunissant les ennemis d’hier pour en faire les alliés de demain offrait une plus grande prospérité au Pays, qui pansait ses anciennes blessures et allat de l’avant. Enfin, le travail de Ketsuen Samui dans ce même port détruit auparavant permit d’effacer partiellement l’échec dans la défense des lieux et de redonner confiance à la population comme aux investisseurs étrangers.

~ En revanche, vous cumulez certaines erreurs : j’ai été le chef des derniers Kirijins prêts à se battre pour un jour revenir sur leurs terres et à trouver refuge dans une cause noble plutôt que dans le mercenariat et l’indépendance dangereuse que vous représentez. Et le Shukaï a apporté plus de sécurité et d’ordre à cette Nation autonome que vous à travers toute votre vie. Ma légitimité ici ? Elle n’existe pas. Car je ne règne pas sur Yuki no Kuni ! C’est le rôle du Triumvirat des Neiges, alliant l’ancienne Daimyo Akeko Oge, les représentants des Samui, des Suzurane et des autorités urbaines de gouverneur sur ce pays. Je suis certainement celui qui se place au sommet de l’Empire des Nations Neutres ; mais ce n’est en aucun cas pour me placer au dessus de la volonté des Peuples.

Voilà qui réaffirmera le message déployé cette dernière année au sei de chaque Nation-membre de l’Empire. Et il est dit que cette déclaration aurait un effet positif sur la foule à proximité. Contrairement à sa réputation de guerrier et de « tyran », le Dernier des Kirijins restait fin stratège et politicien passionné.
Il était temps maintenant de porter le coup d’estoc.

~ Ce qui m’amène à vous. Vous êtes Suzurane : vos racines et les Vôtres sont ici, ce qui rend logique que vous reveniez. Mais si c’est pour troubler cette Paix que le Shukaï a su instaurer, il est évident que vous me trouverez en travers de votre chemin. Ma question à moi aussi est limpide : qu’espérez-vous obtenir en venant sur ces terres ?

Spoiler:

─ Trop insignifiant pour votre cousin mais pas pour vous s’amusa le Suzurane.

D’autant plus que Samui Kirito avait d’ores et déjà rempli son rôle. Qu’importe les mensonges politiques énoncés par l’Empereur, son jeune cousin et le Nukenin savaient très bien que la raison première de la visite du Kamui étaient liées à la menace de Dhartsedo. Le possible – ce n’étaient que des rumeurs pour l’instant – membre du Triumvirat des Neiges avait exactement fait ce qu’Hakyô avait attendu de lui.

Si les basses insultes ou encore les comparaisons d’ivrognes ne semblaient pas atteindre le Suzurane, qui gardait un calme presque aussi olympien que celui à qui il faisait face, il y eut un déclic. En effet, une phrase ou plus particulièrement un mot eut le pouvoir de faire sortir l’outsider de sa quasi-neutralité. On vit l’Héritier serrer le poing, avant qu’il n’hurle ces mots :

─ Ne parlez pas d’honneur ! Quel homme honorable tenterait d’assassiner les seigneurs d’une alliance qui défendait justement la neutralité de certains pays ?!

Il s’approcha lui aussi de deux pas, imitant alors son interlocuteur. Jamais il n’aurait peur d’un tel homme. Le Suzurane le jugeait d’ailleurs comme étant pire que celui dont il s’était vengé, à savoir l’ancien Troisième Mizukage. Lui avait été fou, direct et barbare. Mais le Kamui était quelqu’un de froid, vicieux, qui profitait des situations et des faiblesses de chacun pour se placer au-dessus de tout autre. Qu’il l’eût fait partout ailleurs, soit, mais il avait commis l’erreur d’agir sur Yuki no Kuni !

─ C’est vous qui vous méprenez, rajouta-t-il tout en tentant de se calmer. Sous le règne de la Montagne, et lorsque j’étais son second : nous n’avons jamais eu à essuyer de conflits, hormis lorsque vous, Kirijins, êtes venus nous conquérir par pur égoïsme ! Que chacun se souvienne que les Samui qui sont venus sur nos terres sont les mêmes que ceux qui sont venus nous massacrer par pure barbarie il y a des années !

Sans craindre quoi que ce soit, il fit un court tour sur lui-même pour s’adresser à la foule. Sans encore lui avoir clairement indiqué ses intentions, l’objectif du Suzurane commençait à se dessiner. Si les spectateurs s’attendaient pour certains à un combat, ils ne pouvaient qu’être intrigués par un tel débat.

─ Depuis que vous êtes là, « Empereur », voilà la vérité : vous avez tenté d’assassiner chaque seigneur des pays dits alors neutres, y compris ici ; vous avez été incapables d’empêcher une attaque de malheureux mercenaires qui ont entre autres détruits une partie ce port où nous nous trouvons et vous avez plongé ce pays dans une guerre contre Kumo, en forçant chacun d’entre nous à combattre prochainement aux côtés des Kirijins, ceux-là mêmes qui nous ont conquis sans diplomatie il y a des années !

La réplique pouvait avoir du succès, ou au moins réveiller les mémoires. Sous le règne de la Montagne et de son fils, seules des petites idioties claniques avaient été sources de conflits sur le pays. Samui Kakeshuou se trompait, et tout le monde pouvait en attester : Yuki no Kuni n’avait jamais été en paix depuis qu’il était là.

─ Votre paix sonne comme une insulte à mes oreilles, et je ne suis pas le seul ! Alors je n’ai pas peur de vous le dire, messire, même en ayant été retenu captif et torturé des années durant par les vôtres à Kiri, j’ai plus contribué pour mon pays que tous vos meurtriers de Samui. Kiri était votre maison, retournez-y ! Ou alors restez dans votre Empire, qui n’est plus celui des Pays Neutres, puisque vous les avez entraînés dans une guerre contre Kumojins et Nukenins ! Mais je vous le dis : vous n’êtes pas le bienvenue ici, Shûkaijins ! termina-t-il en tournant une nouvelle fois autour de lui pour s’adresser à la foule en même temps qu’à son principal interlocuteur.

D’un geste trop rapide pour inquiéter quiconque, Hakyô avait dégainé son épée. Une lame imposante mais d’un fer commun à tous les autres. Une arme qu’il planta devant lui, alors qu’il continuait de fixer le Samui. Malgré le volume et la gravité de sa voix, l’Héritier était redevenu calme.

─ Je ne ferai pas l’erreur que Kiri ou le Shûkai ont commis en déclarant des conquêtes et des guerres sans pourparlers : je suis venu vous proposer un pacte. Et ce public sera témoin de mon engagement.

Le Fils du Nord adressa à nouveau un regard sur les deux côtés de l’audience. L’heure était venue.

─ Si l’Empire retire son autorité sur ses terres et que j’en prends la direction de par mon statut, mon sang ou le rôle que j’y ai déjà joué, je m’engage à maintenir un Triumvirat qui me conseillera. Vous aurez un délai d’un mois pour prendre ce que vous aviez ici. Tous les Suzurane souhaitant rester fidèles à l’Empire pourront rester sur le Grand Continent. Quant aux Samui qui voudraient rester sur ces terres, ils le pourront à condition de ne plus combattre pour le Shûkai. Je ne peux que trop bien comprendre et respecter ceux qui ont perdu leur foyer, mais les terres de Yuki no Kuni sont des terres indépendantes. Et de par cela, j’entends aussi ne jamais soutenir Kumo, comme aucun autre village caché.

Il rajouta rapidement quelques détails, qu’il jugea sur le moment très importants.

─ Vous conserverez les hommes qui vous sont devenus fidèles et les membres de votre clan qui ont réellement vu Yuki no Kuni comme une seconde maison resteront. A l’heure actuelle, Yuki no Kuni est le pays le plus proche de votre ennemi. Acceptez le pacte que je vous propose et pour la première fois, vous pourrez réellement vous proclamer défenseur de la paix.

Spoiler:

Je m'étais présenté face à l'Empereur, membre de mon clan. Il était imposant, il était impérial et franchement, je n'avais aucune envie à lui ressembler. Trop distant vis-à-vis de son peuple, trop froid, et puis sa peau pâle faisait vraiment peur quand même. Bien qu'il avait toujours été droit et sympathique avec moi, je savais bien que ce n'était pas le cas avec tout le monde. Kakeshuou me demandait alors comment c'était passer cette dernière année au Triumvirat, et je lui expliquais que tout allait bien jusqu'à l'arrivée de cet Hakyô. D'où la raison de la venue de l'Empereur sur le pays enneigé. Un certain équilibre de paix avait réussi à être installer ici, et personne n'imaginait le travail monstre que cela avait demandé.

La voix d'un homme fit s'agiter la foule, et mon regard se portait vers le son d'où provenait la voix. C'était lui qui apparaissait au milieu du cercle face à Kakeshuou et moi. C'était le borgne : Suzurane Hakyô. Cet homme ne donnait aucune envie de l'acclamer, de l'encenser. Non, il perturbait tout ce qui avait été entrepris sur ce beau pays et ça m'exaspérait. En plus de me faire totalement ignorer par ce dernier, il ne se prenait vraiment pas pour de la merde. Non, il se sentait comme supérieur à nous, chose qu'il ne devrait pas faire. D'ailleurs, ce fut bien vite qu'il reprit la parole pour justifier sa présence ici sur Dhartsedo. Il se présentait comme l'héritier de son père, ancien chef des Suzurane, et ce fut une conversation entre l’Empereur et cette personne qui débuta. Un calme impérial qu’était le Kamui, et je ne ratais pas une miette de cette discussion plus qu’importante.

Les réponses du Samui étaient fort intéressantes à entendre, et bien que l’homme qui se disait héritier d’ici y répondait assez bien, j’avais l’impression que la nouvelle popularité de l’Empereur commençait à jouer en sa faveur. Ce dernier demanda alors clairement ce que souhaitait maintenant le Suzurane. Sur la défensive quand il sortait son épée au cas d’une éventuelle attaque, il plantait cette arme au sol. Une aberration totale ce qu’il demandait, était-ce vraiment possible ? Comment allait réagir l’Empereur ? Le Suzurane demandait le retrait de l’Empire sur Yuki no Kuni (ainsi des Suzurane qui seraient loyaux envers l’Empire, ainsi que de tous les autres sujets) et si les Samui décidaient à rester ici, ils devaient refuser à combattre pour l’Empire. Les regards de la population (qui commençait doucement à s’en aller) ainsi que de moi-même se posèrent sur l’Empereur. Ce dernier me prit par surprise en indiquant à tous que c’était à moi de répondre en tant que membre du Triumvirat de Yuki no Kuni et c’était désormais sur moi que les regards étaient posés. M’avançant alors, c’était à moi de prendre la parole.

« Il est temps d’arrêter cette mascarade. Pensez-vous réellement que Yuki no Kuni vous revient de droit ? Comme si ce pays était un objet ? Non. Personne dans ce pays ne sait qui vous êtes, et vous vous dîtes légitime ? Mais, qui êtes vous à part le ‘fils de’ ? »

Et, alors que je m’étais avancé en parlant sous quelques regards appuyés de la foule qui semblait accepter ce que je disais, je défiais du regard le Suzurane.

« Vous souhaitez apporter une guerre pour avoir ce que vous pensez mériter ? Et ce serait nous qui cherchons la guerre ? Sachez qu’en tout cas que votre proposition est refusée par le Triumvirat de Yuki no Kuni, Suzurane Hakyô. Et, je ne suis pas seul à décider si vous osez penser croire cela. Oge Akeko, les représentant de votre propre clan sont en total accord avec mes propos ».

Voilà, mes propos étaient clairs quant à la situation. L’Empire, et surtout Yuki no Kuni, n’acceptait pas cette proposition qui se voulait aberrante. Non, mais pour autant, je ne cherchais pas la guerre pour mon pays.

« Vous voulez participer à la vie de ce pays ? Démarquez-vous, montrez que ce pays vous est réellement cher à votre cœur et vous pourriez peut-être rejoindre le Triumvirat de Yuki no Kuni ».

Voilà la proposition que je lui lançais, certes cela était loin de ses exigences, mais c’était tout ce que l’on pouvait proposer. Rien n’était acquis de droit ici, non absolument rien du tout.

Spoiler:

La tension montait invariablement dans l’échange. Et dans cette bataille, ni le Suzurane ni le Samui membre du Triumvirat ne mâchait ses mots. Les deux allaient droit au but, n’hésitant pas à médire, maudire et cricifier verbalement en place publique. Le Fils de la Montagne faisait connaître son dégoût des Samui et de l’Empire comme un furoncle ne supportant pas la médecine appliquée ; sa capture et sa captivité ainsi que le passé lourd de la rivalité opposant Samui et Suzurane pesaient dans son argumentaire, c’était indéniable. Il allait jusqu’à proposer une profonde modification des choses ! Optant pour une neutralité totale du Pays des Neiges à la condition que les éléments impériaux, quels que soient leurs Races ou leur camp, quittent le navire et laissent ces terres sans chercher à y revenir.

La réponse de Kirito Samui s’était faite d’autant plus virulente, comme pour rivaliser avec l’Étranger. Il soulignait le souhait de préserver les populations et cette Nation d’un nouveau conflit entre Ninjas, entre camps rivaux depuis des décennies. Rejetant les origines et l’importance du visiteur, il s’appuyait sur son autorité en tant que membre du Triumvirat, pour refuser toute proposition du personnage adverse. Si les arguments étaient compréhensibles, le jeune homme s’engageait quand même sur un terrain dangereux … .
La main lourde qui tomba sur son épaule le ramena au calme, pour laisser son tour de parole à l’Ancien et Empereur.

~ Du calme, Kirito. N’oublie pas que tu n’es qu’une voix au sein de ce Triumvirat, et qu’elle est l’égale de toutes les autres. Il portait son regard vers le Suzurane. Les jeunes générations n’ont pas connues Suzurane Hakyô, maître des Suzurane lors du conflit qui opposa Mizu et Yuki il y a plus d’une décennie. On ne peut pas leur en vouloir. Et ce jeune loup est encore en apprentissage dans l’exercice de ses fonctions ; mais son manque d’expérience n’en retire pas la justesse de ses propos. Et en ce qui me concerne, je rejete intégralement votre offre.

La déclaration était sans appel. Pour le Kamui, il était hors de question d’accepter une telle chose qu’un départ en masse des effectifs et des soutiens impériaux pour le bon vouloir d’un seul homme ressorti du passé pour imposer sa loi primaire et primale sur un pays qui n’avait pas remarqué son absence et n’attendait pas son retour. Evidemment, Kakeshuou Samui comptait bien s’expliquer pour se rendre plus clair.

~ Vous sortez de griefs qui aujourd’hui n’ont plus cours sur cette île. Le Pays des Neiges est l’un des piliers du Shukaï, l’un de ses fondateurs. Dire qu’il n’en a jamais voulu n’est qu’une interprétation personnelle manquant de connaissances sur ce sujet. Par la suite, tous savent désormais que l’élimination des Daimyos menaçant la paix des peuples était une nécessité ; raison pour laquelle Oge Akeko en a réchappé ! Mais plus que tout, ce peuple a grandi des épreuves de ces dernières années pour créer une nouvelle unité autour d’un Triumvirat effectif et fonctionnel, rassemblant autour d’une table Samui, Suzurane et autorités de la Nation toute entière ! Vouloir ostraciser une partie de la population pour votre bon plaisir ne peut satisfaire qu’une seule personne, et c’est vous !

Le rappel historique était nécessaire. L’Histoire de Yuki no Kuni était agitée et connaissait des traces d’ombre. En revanche, prétendre aujourd’hui que ces malheurs perduraient était un mensonge, alors que la paix entre les anciens Clans n’avait jamais été aussi durement obtenue, et que cette Nation pouvait prétendre à sa pleine souveraineté, tout en faisant partie d’une superstructure qui la défendait à tout instant contre des ennemis nombreux et avides. Tout aussi étrangers géographiquement que venant d’un passé sulfureux où on pensait avec ses poings et non avec sa tête.

~ Nous sommes de la même génération, et avons connu les mêmes conflits. Mais contrairement à vous, j’ai pu observer – et sans intervenir – les désirs de ce Pays, et les efforts de ses habitants. Si vous voulez obtenir gain de cause, c’est au Triumvirat qu’il faudra adresser votre requête. Et accepter la décision de ce dernier, comme ce jeune homme l’a souligné – déclarait le Lion des Neiges en tapant une nouvelle fois l’épaule de son jeune congénère de sa main glaciale. En revanche, et en ce qui me concerne, il est hors de question de créer une guerre pour les ambitions malsaines d’un homme enfermé dans le passé, pensant avant tout à sa soif de pouvoir, et qui sera prêt à vendre ce pays au premier ennemi du Shukaï venu, dans le seul but de voir tomber l’Empire, une unité de Nations déterminés à se battre pour la Paix et rien d’autre.

L’Ancien ne comptait pas se laisser embobiner par des arguments auxquels il ne croyait absolument pas. Il était confiant quant à la décision du Conseil Triumviral, même si rien n’était gagné. Mais si cet homme surgi des méandres des vieilles années se décidait à obtenir ce qu’on lui refusait par tous les moyens, Kakeshuou Samui lui-même entreprendrait de mettre un terme à un conflit qui n’avait pas lieu d’être.

Ils parlaient. Oui, « ils », car Kirito s’était autorisé à ajouter sa futile participation à ce débat. Si le Suzurane avait eu envie de s’amuser du cousin laquais qui pouvait finalement répondre, ce qu’il entendit le stoppa dans son désir d’ironie. Ce ne furent pas spécialement le mot « mascarade » ou le ton désobligeant du jeune homme qui firent progresser le Borgne dans un état d’énervement, mais bien l’ignorance totale de ce dernier. Et le pire, c’est qu’il fut rapidement rejoint par son supérieur. Ce fameux Empereur…

A les entendre, on croirait qu’ils croyaient réellement à leur paix. Une paix amenée par l’assassinat de politiques et autres seigneurs, par une prise de pouvoir ensanglantée, et qui faisait aujourd’hui des conflits contre Kumo et le Pays de la Foudre ? Quelle bêtise ! S’il y avait dans le public quelques rares personnes à se moquer d’un tel mensonge, Hakyô enrageait de ne pas en voir plus. Comment ces gens, son peuple de surcroît, pouvaient rester de marbre ou pire encore encourager un tel discours ?

Ce ne fut pas seulement son poing, mais également le deuxième, et tout le visage de l’Héritier qui se crispèrent à l’unisson. Forcément, il pensa au signe qu’il avait convenu avec Yamada Kioshi. Un seul mouvement, léger, et il passerait à l’action. Affaibli par son passé, Hakyô restait persuadé d’être un grand combattant. Mais ses derniers mois d’entraînement au Yuukan suffiraient-ils ? Face à lui, Samui Kakeshuou surtout, le Samui Kirito pouvant être laissé à l’ancien Kazekage… Les quelques gardes ne feraient sans doute pas le poids dans un tel affrontement… Mais pouvait-on penser que le Kamui n’était pas venu entouré ? Après tout, il restait un « Empereur »…

─ Il suffit. J’en ai trop entendu.

Mais il ne leva pas le bras. Ses poings restèrent serrés. Yamada Kioshi devrait donc rester dans la foule. Vraisemblablement, le Suzurane avait quelque-chose à dire, avant d’éventuellement passer à l’action.

─ Je ne demanderai rien à votre nouveau Triumvirat, car je n’ai que faire de vos magouilles diplomatiques. Si vous êtes satisfait de nommer des gens comme vos cousins qui ignorent tout de l’Histoire de ce pays comme il vient de le prouver à l’instant, grand bien vous fasse. Vos mensonges ne m’atteignent pas.

Il se tourna vers la foule. Il ne fallait pas oublier que dans la forme actuelle, leur échange était proche du véritable débat politique. Si certains auraient pu s’attendre à un combat féroce, ils devaient être déçus… à moins que la qualité oratoire soit au rendez-vous ?

─ Vous osez de parler de nécessité de paix pour justifier l’assassinat de ceux qui dirigeaient les pays du Shûkai ? Toutes ces nations avaient formé l’Alliance pour de bonnes raisons, des raisons réellement pacifiques. Mais tout ce que vous avez fait n’a amené comme conclusion qu’une prise de pouvoir sanglante qui vous a donné le monopole et a fait de vous un Empereur. Et vous me comparer à un homme pensant à sa soif de pouvoir ?

Son regard, muni d’une seule pupille visible, revint côtoyer l’homme froid du Shûkai. De temps à autres, il regardait également le jeune Kirito. Il n’avait pour eux que haine et pitié.

─ Vous n’avez même pas pris la peine de répondre à ce que je déclarais plus tôt. Que ce soit la guerre contre Kumo, le fait que de par sa localisation mon pays soit directement en première ligne dans ce conflit absurde… Vous n’avez rétorqué que de votre désir de paix, une ineptie que – j’en suis sûr – nombreux ont découverte ici. Mais oser me parler de paix, lorsque je ne veux que l’indépendance des miens pour éviter votre guerre ; me comparer à un homme avide de pouvoir, alors que vous êtes le pire exemple en la matière… Vous ne m’inspirez que du dégoût.

Il s’écria alors, faisant une nouvelle fois un tour de l’auditoire.

─ Je fais le serment comme dès mon plus jeune âge que je me battrai encore et toujours pour la liberté et la paix de mes terres et de mon peuple. J’ai tenté la voie de la diplomatie, voyant qu’elle a échoué, j’en trouverai une autre… Je reviendrai mes frères, j’en fais la promesse !

Sa poigne vint extraire sa lame de la terre froide. Il la rangea ensuite dans son fourreau. Puis il marcha d’un pas ferme, mangeant progressivement la distance qui le séparait du Kamui et de son cousin.

─ J’invite tous ceux qui se tenaient prêts à intervenir sur mes ordres à me suivre…

Ce ne fut que lorsqu’il colla presque l’épaule à l’Empereur qu’il termina sa phrase, en plongeant son unique œil dans celui du Samui.

─ … nous avons assez entendu de mensonges pour aujourd’hui.

Sur quoi il continua, réfléchissant d’ores et déjà à la suite. Et cette dernière était connue. Probablement l’un des rares avantages à avoir été retenu captif et torturé pendant des années dans les geôles de Kiri la Sanglante…

Spoiler:

M'étais-je un peu trop emporté ? Les propos du Suzurane et la proposition qu'il venait à nous faire m'avait sorti hors de moi, et j'avais décidé de mettre les points sur les i et les barres sur les t afin de lui faire comprendre que Yuki no Kuni ne se soumettrait pas à un seul homme. A personne d'autre. L'Empereur posait sa main sur mon épaule et je me calmais rapidement en sentant la main froide du vieux sur mon épaule. En tout, en plus de m'être calmé, je m'étais rapidement mis en retrait laissant ainsi la parole au Kamui. C'était à lui de décider ou non si le pays de la Neige serait cédé à cet homme. Je le laissais sortir son plaidoyer, me préparant à une eventuelle attaque du Suzurane. Il essuyait un refus, et il était possible qu'un combat s'engage suite à ce débat politique qu'il venait de se passer.

En tout cas, l'homme ne se sentait pas pour autant abattu et il faisait clairement comprendre qu'il reviendrait. Mon regard azuré ne le quittait pas d'une semelle, et il allait comprendre la puissance de l'Empire et de Yuki no Kuni s'il venait à nous attaquer. Il devait connaître les ressources de l'Empire, et il est vrai que nous ne connaissions pas vraiment ses ressources à lui. Avait-il une grosse armée ? Avait-il même une armée ? Les questions se posaient dans ma tête, et cela allait être sujet à débat lors du prochain rassemblement du Triumvirat. Suzurane Hakyô était un cas à gérer ! Et cela dans l'urgence. Il partait, et il ne partait pas seul quelques habitants le suivaient. C'était triste à voir pour moi, certains n'avaient décidemment pas confiance au Triumvirat qui avait été instauré pour suivre cet homme. Ils étaient une minorité, mais cela me faisait mal au coeur de les voir s'en aller...

Kamui-sama, que devons-nous faire maintenant ?

Oui, parce qu'il était logique de penser à la suite des évenements. Il était logique de penser que Hakyô ne s'arrêterait pas là, pas à un refus de notre part de céder Yuki no Kuni. Il allait se venger, et rester à savoir où et quand tout cela se passerait. En tout cas, Yuki no Kuni était prêt. Il y avait l'assistance de l'Empire, et la milice récemment crée pour protéger le peuple.

Spoiler:

Malgré les accusations et les menaces de l’Homme, l’Empereur demeurait silencieux. Il avait déjà fait savoir le fond de sa pensée, et ne comptait pas renchérir. Le Suzurane venu l’attendre à l’arrivée avait recherché la provocation ; très certainement l’affrontement ! Car c’aurait été l’occasion de prouver que le Samui dominait ces terres non par consensus mais par la force et la terreur. Entrer dans ce jeu n’aurait provoqué qu’un fiasco, et aurait détruit une grande partie des environs déjà affectés par les destructions de l’année précédente. L’homme sage savait faire preuve de retenue … pour accumuler des forces !

Si certains décidaient de suivre l’ancien Chef Suzurane, le Kamui observait le départ avec un œil intéressé. C’était là un double test. Non seulement de sa popularité mais aussi de la confiance que les gens plaçaient dans le Triumvirat et dans l’Empire. Certains partiraient, montrant ainsi leur opposition au Shukaï. Quelque part, c’était inévitable. Mais d’autres resteraient ! Ils seraient d’ailleurs nombreux ! Et prouveraient aux opposants comme aux indécis que le système était fiable ! Ils pouvaient craindre la guerre, c’était une évidence ! Mais tout n’était pas encore joué … .

Son neveu semblait inquiet. Il percevait bien la menace que représentait cet homme surgi du passé. Un personnage aigri de ses défaites passées et qui ne rêvaient que de redorer son blason. Et ce genre de personne avait de nombreux points faibles. A commencer par son discours. En proposant certes une solution, il avait également démontré qu’il était prêt à tout, même au pire. Afin de répondre aux interrogations de son neveu, l’homme resta silencieux. Il restait de plus assez perplexe sur ce mouvement qu’il avait senti contre lui. Restant impassible, il attendrait quelques instants pour voir de quoi il retournait.

~ Pour l’instant, restons impassibles. Nous avons déjà été suffisamment clairs ; si cet homme veut détruire ce Pays pour son profit personnel, il nous trouvera sur sa route. Fais le surveiller, et informes-en les membres du Triumvirat. Il est important que les Suzurane réalisent le danger que cela peut représenter … et qu’ils décident de leur camp.

Kakeshuou Samui savait en revanche que certains mots avaient pesé dans la conscience de la foule. Et l’affrontement entre les deux hommes avait réveillé de mauvais souvenirs, et ouvert de nouvelles craintes pour l’avenir. Le débat sur la guerre contre Kumo était chose courante dans les lieux de boisson ou de discussion. Quand on est soldat, on s’attend à tomber un jour ou l’autre sur le champ de bataille ; mais quand on est simple civil, avec de petites ambitions pour une petite vie sans folies ni aventures, ce genre de chose a de quoi pétrifier le plus intelligent et le plus confiant des hommes … .
Le Maître du Shukaï fit un pas en avant et leva le bras pour attirer l’attention de ceux qui restaient sur place.

~ La guerre est à nos portes. Un adversaire qu’on peut qualifier d’éternel souhaite une nouvelle fois nous menacer. La Paix que nous avons pu protéger en protégeant nos valeurs, nos proches et nos rêves, est aujourd’hui en danger par la faute d’hommes incapables de penser aux intérêts du plus grand nombre, et avides de conquête … .

Sa voix devint plus forte, et son regard plus déterminé.

~ Mais il existe bien plus dangereux que cela ! Il s’agit de ceux qui s’enferment dans le passé ! Qui font querelle et rancœur de la moindre pierre lancée pour faire dévaler une montagne, peu importe que d’innocentes victimes soient emportées dans la tempête ! Les Samui et les Suzurane se sont livrés bataille pendant de nombreuses années … et aujourd’hui, grâce à vous et à ce Triumvirat ! Ils ont dépassé ces rancoeurs ! Ils se sont décidés à s’unir pour agir de front face à l’adversité et pour cette Nation des Neiges !

Les clameurs s’élevaient à mesure que les gestes du Kamui s’amplifiaient.

~ Si ces terres sont effectivement menacées par la Foudre ; ou par un fou venu du passé ; ce ne sont pas les forces de la vieille Alliance, dissoute et tiraillée, qui vous protègeront ! Mais celle d’une Nation qui s’est retrouvée ! Et d’un Empire plus puissant que jamais, après avoir renforcé ses effectifs et son influence notamment avec la reconstruction du Village de la Brume ! Et si tout cela ne doit pas suffire pour vous rassurer … je serais moi-même sur ces terres pour faire rempart contre tout ennemi assez téméraire pour menacer cette Paix que nous voulons préserver à tout prix !

Les hourras et applaudissements qui suivirent confortèrent le sextagénaire dans ses positions. Avec sa présence sur le champ de bataille, il se ralliait les craintifs et les méfiants. Et loin de jouer la carte guerrière, il n’oubliait pas de rappeler pourquoi cet Empire existait et comment il avait avancé depuis sa création.
Posant une main forte et fière sur l’épaule de Kirito pour lui laisser congé, l’homme s’attarda enfin sur la note qu’on lui avait confié … .

Son regard changea dès qu’il lut les quelques lignes qui y figurait.

~ Kirito … trouve-moi Ketsuen … . Et contacte également le Sengoku pour moi, il va y avoir du travail sur place … .

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