Même si la ville portuaire avait changé, ses ruelles et bâtiments principaux restaient familiers à l’homme qui avait grandi ici. Retrouver Yamada Kioshi ne fut pas une chose difficile, tout premièrement car le jeune Kirito n’avait pas fait de vague, mais aussi parce qu’il n’y avait pas trente auberges ici. On lui indiqua la chambre dans laquelle le Nukenin s’était installé, et le Suzurane se contenta de grimper les quelques marches qui séparaient l’accueil aux chambres. Il entra.

Son compagnon de route était là. Sans doute avait-il terminé de s’installer. Là-bas, quelques affaires posées sur un lit indiquaient à Hakyô qu’il dormirait là. Kioshi ne s’était vraisemblablement pas inquiété. Remarque, à quoi bon ?

─ J’ai rencontré un Samui. Kirito que ce jeunot s’appelle. Un toutou du Shûkai, comme tu t’en doutes...

L’Héritier du Nord n’était pas resté insensible aux paroles prononcées par cette jeune recrue. Le Triumvirat, qu’est-ce que c’était que cette histoire ?

─ Il semble que le pays soit gouverné par un Triumvirat. Si c’est vrai, quelle ironie. T’imagines-tu l’Empereur instaurer un régime politique sur ces terres alors qu’il l’a balayé d’un revers de main quand il en faisait partie au sein de son Alliance ? Mais j’ai tout de même du mal à y croire.

Trois têtes pour diriger le pays ? Une mascarade qui ne visait qu’à camoufler la main mise du Kamui. Mais si c’était bel et bien vrai, quelles étaient-elles ? La vieille harpie sûrement. Un Samui ? Possible. Mais quant au troisième, il voyait mal quelqu’un d’autre qu’un Suzurane pour siéger parmi ce trio. Mais quel membre de son clan pourrait bafouer son honneur et participer à cela ?

Le fils de la Montagne s’assit sur son lit. Il empoigna ses genoux.

─ Ces Samui se sentent ici chez eux... Tu ne peux pas savoir à quel point cela m’exaspère. Leurs terres sont à Mizu et nulle part ailleurs !

On pouvait facilement voir les doigts du Borgne se crispaient. Les plis de sa tenue se faisaient plus graves. Sa haine était presque palpable.

─ L’Empereur Samui Kakeshuou va venir ici, dans quelques jours, quelques semaines. En attendant, nombre d’hommes et de femmes du pays seront mis au courant. Notre face-à-face sera connu de tous ici.

Il regarda pour la première fois de façon insistante son compagnon d’armes. Yamada Kioshi, s’il avait prêté allégeance pour la suite, c’était bel et bien pour des occasions comme celle-ci. Le Suzurane se leva.

─ Lorsque je ferai face à l’Empereur, fonds-toi dans la foule et veille à ce que personne ne vienne nous gêner. Je reviens, je vais m’entraîner.

Le fils du dernier chef Suzurane claqua la porte derrière lui. Les instructions pour le jour déterminant avaient été données. Et tout laissait à penser qu’Hakyô semblait décidé à affronter l’Empereur du Shûkai.