Avant hier je m'étais réveillé d'un coma qui avait duré cinq jours. J'avais pris connaissance par l'intermédiaire de Kibo, Ema, Ogami, mon père, et d'autres personnes, de ce qui avait eu lieu à Suna pendant mon absence. Bien sûr ce n'était pas comme si j'avais été présent, je ne savais que ce qu'on m'en racontait et ça me coûtait vraiment de ne rien pouvoir faire pour participer à relever le village. On me disait même que j'avais une chance de « privilégié » d'être accueilli dans cette chambre alors que beaucoup de personnes devaient se contenter de moins. Je n'y pouvais rien et tentais de me rassurer en me disant que cela était justifié par mon état grave. Maintenant, même si j'étais réveillé, j'avais toujours nombre de bandages sur le crâne et le visage pour soigner ma fracture et mon visage encore tuméfié et plein d'hématomes. Une infirmière venait m'appliquer de la pommade sur le visage de temps en temps. Je ressentais souvent des douleurs à différents endroits entre ça et ma jambe cassée. Le médecin m'avait bien dit qu'il me faudrait un mois minimum pour remarcher et que mon état global soit arrangé. Quant à mon crâne, il ne savait combien de temps j'allais devoir subir ces maux de têtes et ses piques douloureuses qui me prenaient sans prévenir.
Du temps j'en avais en restant ici, trop. Je ne comptais plus le nombre de fois où j'avais regardé l'aiguille de la pendule en face de moi. Mes pensées étaient souvent tournées vers Yell et ce qu'elle devenait en étant rentrée à Konoha. Si je n'avais pas pu lui dire au revoir de moi-même c'était bel et bien à cause de cette foutue attaque-attentat sur le village, et plus précisément à cause de cette femme au marteau portant un numéro « V » en tatouage. J'y repensais tout le temps, en souhaitant la mort de cette folle un jour ou l'autre, si ce n'était pas déjà le cas. Tout comme la mort de tous ces criminels qui s'en étaient pris à Suna. Le jour de mon réveil, j'avais aussi pu découvrir un petit collier sur lequel était fixé un pendentif de cristal en forme de goutte d'eau et dans lequel il y avait du liquide. C'était une part de Yell, un présent de sa part que j'avais déjà accroché autour de mon cou comme pour m'y raccrocher. J'espérais qu'elle en faisait de même avec ce petit galet brillant que je lui avais trouvé à l'oasis. De cette manière nous étions liés par ces objets malgré la distance qui nous séparait. En parlant de ça, mon père avait aussi retrouvé pour moi, dans les débris du quartier Yamada, la peluche lionne cousue par la Gogyou et qu'elle m'avait offert le jour de mon anniversaire. Symbolique encore une fois, la lionne représentait ma mère qui avait possédé cet animal en kuchiyose de son vivant. Et oui j'avais eu dix-huit ans deux jours avant le drame. L'objet trônait sur la table de chevet à mes côtés. Tout comme le bouquet de fleurs déjà fanées apporté par Ogami. Ainsi que le mot écrit en lettres de sang sur une feuille et laissé par Yami, qui indiquait que mon état témoignait de mon incapacité à rejoindre le Kakumeigun. Dans un deuxième temps il indiquait aussi plus bas, après un long espace, que c'était une blague, aussi froide soit-elle même à la lecture. Pour finir, ça se terminait sur un « Je reviendrai. » bien mystérieux. Je ne pouvais lui en vouloir pour son humour, surtout en sachant que cette femme m'avait apporté les premiers qui m'avaient maintenu en vie avant de m'emmener ici en compagnie des autres, et de me garantir l'accès à des soins intensifs à temps. C'était à peu près ça de ce que l'on m'avait dit.
La chambre était sinon toujours aussi déprimante, sa peinture jaune sur les murs n'arrangeait rien. Une simple fenêtre apportait un peu de lumière. La nourriture était très sommaire ici aussi à l'hôpital. Tout ce que je voulais c'était quitter cet endroit et marcher à nouveau. Même avec des béquilles pour un temps, au moins je serais à l'air libre et me reposerais où je le voudrais en lisant des livres. Selon le docteur, il faudrait encore attendre quelques jours de plus même pour ça... Je soufflais de lassitude à cause de cette mauvaise passe dont j'étais prisonnier pour le moment. Reposer sur un lit d'hôpital limitait beaucoup les choses.
Au bout d'un moment de la journée, on frappa à la porte et quelqu'un entrait. C'était de la famille proche. Et même si j'étais content de le voir, je n'avais pas la force de lui offrir un sourire tant la situation m'abattait physiquement et moralement. Je me doutais que lui non plus n'était pas là pour plaisanter ou montrer sa bonne humeur car il y avait beaucoup de choses qui reposaient sur ses épaules aujourd'hui.
« Kioshi... » laissais-je entendre en le regardant alors qu'il s'avançait.
Savait-il tout ce qui m'était arrivé dernièrement ? Et pour Yell ? De même que je ne savais pas grand chose sur son vécu de l'attaque de Suna.
J’avais ouïe dire que mon cousin s’était enfin réveillé à l’hôpital. Cependant, je n’avais pu trouver le temps plus tôt pour lui rendre visite. D’ailleurs, quand il était dans le coma, je n’étais parvenu à le voir que l’espace de trois minutes avant de devoir me concentrer de nouveau sur la situation préoccupante de Suna.
Deux jours qu’il était éveillé, et je ne venais qu’à présent. Je faisais un bien piètre cousin… La coiffe à la main, la cape sur mes épaules, je pénétrais dans la chambre du Yamada. Un éventail sur le dos et un katana à la taille, afin d’être paré à toutes les éventualités. Mes traits étaient ceux d’un homme ne dormant pas beaucoup depuis plusieurs jours déjà, mais qui tenait encore sur ses deux pieds nus, droit comme un bon général.
« On dirait qu’ils ne t’ont pas raté… »
Evidemment, je connaissais déjà l’état de santé de Tetsuï. M’invitant dans la pièce, je m’installais au chevet du lit avant de souffler un peu. Le voir me permettait également de prendre une petite pause avant de retourner m’occuper du village et de sa reconstruction.
« Je suis désolé, je n’ai que dix minutes, bien que je serais volontiers resté la journée… »
Le devoir tout ça. Le genre de chose qu’on ne comprend pas vraiment avant qu’il ne s’écrase sur nos épaules. Si seulement le peuple avait voté pour quelqu’un d’autre… Je serais dans le désert, loin de tout ce vacarme sans fin, auprès de mes parents…
Une part du clan Yamada qui s’en était retourné dans le désert était d’ailleurs revenue pour prêter mainforte à la reconstruction du village. Evidemment, ils repartiront ensuite. Mes parents faisaient probablement parti du lot, mais ils ne vinrent pas me voir car ils savaient qu’il valait mieux que je me concentre pleinement sur les affaires du village.
Il avait sa tenue de Kage. Celle là même que j'avais en horreur tant elle me rappelait nos Kazekage passés, ainsi que celle qui ne l'étant pas encore avait donné sa mission suicide à ma mère alors qu'elle était cheffe du Kakumeigun (Zanshi). Mais bref, je ne devais pas repenser à ça à chaque fois ,car cela ne servait pas à grand chose. Au contraire il fallait avancer pour démêler l'affaire. Pour comprendre. Quand je serai de nouveau sur pieds ! Il avait son éventail et un katana. Ce premier me faisait penser à la relique ayant appartenu à ma mère, un éventail là aussi, de couleur rouge et noir, que mon père gardait bien au chaud dans un coffre renforcé. Nul doute qu'il l'avait de suite récupéré malgré l'état du quartier Yamada au vu de sa valeur sentimentale. Je possédais le fûton tout comme ma génitrice... peut-être qu'un jour cet objet aurait à nouveau son utilité. Kioshi avait l'air fatigué, son visage parlait de lui-même. Aussi fit-il remarquer qu'ils ne m'avaient pas loupé. On pouvait pas dire mieux en voyant ma tronche. Mes mèches de cheveux essayant de s'échapper des bandages ressemblaient à des ananas.
« Pff ouais... »
Il s'installa à mon chevet et s'excusa déjà en me prévenant qu'il n'aurait que dix minutes de son temps à m'accorder. Je comprenais pourquoi, le village avait besoin de lui en tant que leader. C'était un fait, il fallait faire avec. Ce n'était d'ailleurs nullement la période pour fuir ses devoirs de Kazekage. J'osais un faible sourire désolé à son encontre en m'exprimant :
« C'est rien, Suna a besoin de toi je le sais. »
Il me demanda sans attendre comment j'allais. J'aurais pu répondre par un long discours détaillant toutes les raisons que j'avais d'aller mal. Mais il en connaissait déjà une partie par mon diagnostic médical. Je lui répondis légèrement blasé en regardant un instant par la fenêtre.
« Mal. Je ne sortirais d'ici qu'en fin de semaine, et même là je ne pourrais pas aider convenablement les autres à reconstruire... Cette femme qui m'a fait ça, elle portait le numéro 5 et elle était d'un niveau cent fois supérieur au mien. Je m'en veux de n'avoir rien pu faire. Une jeune sunajin est même morte alors que je lui répétais de fuir pour se rendre utile ailleurs. »
Et puis ce n'était pas la seule raison de ma frustration. Sans expliquer pourquoi, je lui posais une question intéressée après un temps lourd de signification quant à ce que je venais de lui exprimer.
« Sais-tu ce qu'il en est des Konohajins, sont-ils bien rentrés ? »
Ce n'est qu'après ça que je pourrais lui demander s'il allait bien et évoquer d'autres sujets. Dix minutes était un laps de temps bien trop court pour ne pas récupérer des informations qui m'indiqueraient si Yell était en sécurité à l'heure actuelle. Et en plus d'elle, je pensais aussi à Hayashi Kihran, puisque ce dernier devait actuellement prendre soin d'elle.
Peut-être que d’en parler aiderait le jeune Sunajin à en faire le deuil ? A moins que ce ne soit encore trop tôt pour cela ? Après tout, l’esprit de camaraderie étant grand chez les Yamada, il peut parfois aisément nous desservir. N’est-ce pas, mon bras droit disparu qui me rappelle sans cesse son sacrifice ? Comment quelque chose qui n’existe plus peut faire plus de mal que lorsqu’il était encore là ?
Ma main gauche vint se poser sur l’épaule de mon cousin. Une main chaude et chaleureuse, comme toujours dans notre clan. Une main apaisante et rassurante.
« Ca n’est pas de ta faute. »
Ton rôle n’est pas de protéger tout le monde, contrairement à moi. J’expirais longuement, encore une fois, alors qu’il me posait une question qui m’étonna quelque peu. Si les Konohajins sont bien rentrés ? Pas d’interrogation sur les notre mais sur d’autres ? Aurais-je manqué un chapitre ?
« Dans l’ensemble, une bonne part de leur force avait déjà quitté le village avant le début des hostilités. Pour ce qui est des autres, il y a évidemment des victimes également, mais c’est la population la moins touchée, vu que la moins présente. Comme cela fait plusieurs jours déjà, ceux qui se trouvaient dans un état lamentable ont déjà pu être rapatrié à Konoha, malgré les risques d’un tel voyage pour certains. Ils ont sans doute plus de place pour prendre soin des leurs que nous… Pourquoi ? »
Après, peut-être ont-ils subis des dégâts en-dehors de nos terres également, un peu comme l’Empire qui avait vu sa capitale détruite deux semaines plus tôt. Mais en ces temps troubles, je n’avais pas vraiment l’occasion de me renseigner sur la situation internationale, laissant plutôt cette affaire à la nouvellement Seigneur dans l’immédiat.
À la question « qui était-elle » je répondis l'air grave. Dire le nom d'une morte n'avait rien de positif. Cela rappelait au contraire la cruauté vécue il y a peu dans tout le village.
« Saibogu Yae, une simple novice si je ne dis pas de bêtises... Même si je ne la connaissais pas, c'est une vie qui a été prise. »
Ce n'était nullement un reproche à la défunte. Simple état de fait. Nos assaillants s'étaient même attaqués aux plus faibles et aux plus innocents. Pour moi c'était un signe qu'ils ne valaient pas mieux que des animaux dans leur bestialité la plus sommaire. Les pires des animaux. Mes éléphants étaient sans doute plus intelligents. Ces gens en noir avaient-ils ne serait-ce qu'un peu de bon sens et des neurones pour réfléchir ? Ou n'étaient-il que des armes sans rien dans la boîte crânienne ? Pour espérer la paix un jour, il faudrait éliminer ceux de leur espèce. Un par un. Pour moi c'était une certitude aujourd'hui. Le bras gauche de Kioshi vint se poser sur mon épaule. Sa main chaleureuse comme l'était la mienne avec les autres. Il me rassurait par une phrase simple. Je ne répondis que par un silence avant de poser ma question sur la délégation konohajin. Sa réponse, même si un peu floue, me rassurait quelque peu.
« D'accord. »
Comment répondre à son « pourquoi » ? C'était le genre d'interrogation qui prenait par surprise et qui nécessitait de se justifier. D'abord hésitant, je me risquais au franc jeu, entre cousins.
« Certains des genins de Konoha sont devenus plus ou moins des proches. L'une d'elle surtout, sans qui je ne serais plus là aujourd'hui. Des Konohajins ont participé à me sauver la vie, alors je voulais savoir ce qu'ils étaient devenus. Bien sûr je ne remercierais jamais assez Ema et Yami aussi ! »
Je voulais continuer à parler mais une vilaine douleur me prenait au dépourvu à l'arrière du crâne. Je ne pus éviter de pousser un cri étouffé de surprise et de douleur en me tenant le visage de la main. Grimaçant par la même occasion. Cela dura cinq secondes avant de commencer à s'estomper. Après quoi je laissais retomber ma main en lui souriant par dépit.
« Ces douleurs préviennent pas... c'est chiant. »
Il me fallut encore quelques secondes avant de reprendre là où j'en étais.
« … J'ai cru comprendre que Konoha avait quitté le navire bien vite. Pourtant c'est en s'alliant que l'on tiendra tête à ces nouveaux ennemis. Pas autrement je pense... »
Puis quand nous eûmes terminé sur ce sujet je lui posais la question que j'aurais dû lui poser en premier à son arrivée. Bien conscient d'avoir pensé à rassurer mes craintes en premier. Mon ton était chaleureux :
« Toi, comment te sens-tu ? Tu tiens le coup ? N'hésite surtout pas à reléguer à mon père certaines choses, il sera toujours présent pour toi et pour le clan... tu n'es pas seul. » lui rappelais-je aussi.
Le savait-il seulement ? Et même s'il le savait, il lui fallait l'accepter.
Saibogu Yae… Il s’agissait d’une Genin dont je voulais m’occuper récemment, mais le destin semblait en avoir décidé autrement. Je n’avais pas eu suffisamment l’occasion de la côtoyer pour être vraiment affecté par sa perte, mais ce genre de nouvel n’égaye jamais personne. Nouveau soupire. Le bilan humain avait été dressé depuis quelques jours, mais je n’étais pas forcément au courant de chaque individu perdu. J’avais surtout des nombres en tête, et non des noms. Pouvait-il en être autrement ?
Ainsi donc, le Yamada s’était rapproché de plusieurs Konohajins, et d’une en particulier ? Au moins l’examen international n’aura pas servi à rien dans ce cas. Après tout, le but était de provoquer un rapprochement, de nouveaux liens. Officiellement, rien de nouveau sous le soleil. Nous avions toujours l’alliance économique avec le pays du Feu, mais nous n’avions pas parlé militaire.
« Proche à quel point ? »
La curiosité d’un cousin. Se serait-il entiché d’une de nos invitées ? Suna et Konoha, deux villages différents… Le précédent cas de romance inter-village connu était celui de Kibõ. Hélas, ça ne s’était pas très bien passé. Mais ce n’était pas le moment encore pour le lui faire remarquer ou lui demander quel camp il choisirait si Konoha devenait notre ennemi un jour. Cette interrogation se posera d’elle-même, ou pas du tout, dans les années à venir.
Alors que Tetsuï souffrait, j’usais de mes compétences médicales afin de le soulager au mieux, attendant qu’il reprenne la parole. Il parlait d’alliance et d’union face à l’adversité. Je tournais alors mon regard vers la fenêtre, vers l’horizon lointain.
« L’histoire de ce monde est un cycle, et la chaîne alimentaire est un cercle où on trouvera toujours un prédateur. Ca ne changera que lorsque les hommes apprendront à s’unir pour un même rêve et non contre un même ennemi. »
Et seulement alors, peut-être briserons-nous ce cycle infernal. Mais ça n’était pas pour aujourd’hui, et sûrement pas pour demain. De nouvelles batailles se profilent à l’horizon. Nous devrons combattre à nouveau, comme toujours. Le seul mystère est : aux côtés de qui cette fois ?
« J’y suis bien obligé. »
De tenir le coup. Après tout, si le capitaine sombre, son navire en fait de même. A moins que ce ne soit l’inverse ?
« Ton père travaille déjà beaucoup, notamment pour les notre. Heureusement que nous n’avons pas besoin de grandes maisons et d’un toit pour survivre nous. Bien que beaucoup se sont habitués à la sédentarité, nous dormons de nouveau tous ensembles, à même le sable, autour d’un feu qu’il ne cesse d’alimenter chaque nuit. A dire vrai, ça me rend un peu nostalgique, mais cette situation n’est que temporaire. Des vrais, ceux qui avaient rejoint le désert, certains étaient revenus nous filer un coup de main également. Sans nul doute repartiront-ils de nouveau ensuite… Si tu préférais notre vie d’avant, toi aussi, peut-être peux-tu repartir avec eux ? Après tout, tu n’es pas relié par autant de chaînes que moi ici. »
Pas le même titre, ni les mêmes devoirs. Tu pourrais être libre de nouveau si tu le souhaitais. Libre de vivre.
C'était toujours ça quand on voulait rester évasif sur un sujet, l'autre demandait encore plus de détails. C'est ce qu'avait fait mon cousin en demandant à quel point j'étais devenu proche de « la » konohajin que j'avais mise à part sans la citer un peu avant. Grand curieux celui-là. Ma douleur au crâne m'avait évité de répondre à sa question. Et il avait même essayé de me soulager en usant de chakra médicinal.
Quand j'évoquais plus tard mon point de vue selon lequel une alliance était préférable avec Konoha, Kioshi regarda par la fenêtre. Son air était celui d'un penseur expérimenté qui allait vous insuffler une leçon à méditer. Ses paroles définissaient l'histoire du monde comme un cycle dans lequel on trouvera toujours des prédateurs. Et bien aujourd'hui, ces derniers s'en étaient pris à Suna en plein examen chûnin. Je l'écoutais avec attention dire que cela ne changerait que lorsque les hommes s'uniront autour d'un même rêve et non contre un ennemi. Ainsi venait-il de contredire ce que je pensais en mon fort intérieur en voulant les éliminer un par un. Comme j'étais d'accord avec lui, mais aussi avec moi-même, je ne savais plus quoi penser sur la solution à adopter... Je gardais le silence pour enfin demander comment il allait.
De sa réponse, on sentait qu'être Kazekage était une obligation pour lui. C'était comme moi avec le fait d'être un shinobi. Mes parents l'avaient choisi, et parce qu'ils avaient fait ce choix il y a longtemps, je me devais de l'honorer. C'était ainsi. J'apprenais qu'une partie des Yamada partis vivre dans le désert par tradition étaient ici à nous prêter main forte pour reconstruire notre quartier. Quand je sortirais d'ici, j'irai les aider avec ma faible condition, et je chercherai aussi quelques unes de mes affaires envolées, éparpillées, comme mes livres auxquels je tenais... Ce n'était certainement pas un Bijuu qui allait m'en priver. La proposition que mon cousin me faisait de repartir sans chaînes vivre dans le désert me prit pour finir au dépourvu. C'était là la solution idéale pour vivre une vie tranquille faite de voyages et partir retrouver Yell. Pourtant...
« Ce que tu me dis me rappelle mon enfance passée dans le désert haha. Cela prouve bien que nous sommes l'un des clans les plus unis de Kaze et de Suna, même dans la détresse et séparés en deux groupes. »
Je souriais à cette idée, puis marquais un silence avant de reprendre :
« Merci pour ta proposition, mais je ne vais pas l'accepter aujourd'hui. Le désert m'a enlevé un petit frère tout juste né, la faute à un scorpion et son venin. Et même si Suna m'a enlevé une mère, j'y ai mon père, toi, une famille, et des amis que je ne vais pas laisser tomber. C'est ennuyant mais c'est comme ça hein ? Je suppose... j'ai encore des choses à faire ici. » terminais-je en soufflant comme si cela me coûtait de justifier ma présence à Suna par des sentiments tels que l'amour et l'amitié.
Maintenant il me semblait que je pouvais au moins l'éclairer sur le type de relation que j'entretenais avec une Konohajin. Qu'il sache était la moindre des choses. Je considérais Kioshi avant tout comme le grand frère que je n'avais jamais eu que comme le Kazekage ou le chef de notre clan. Là je me montrais moins sûr de moi avant de me lancer en revanche.
« Pour la Konohajin, j'en suis proche au point de partager des sentiments avec elle. Crois moi Kioshi, je ne pensais pas ça possible un jour venant de moi. Mais s'il y a bien une personne ailleurs qu'à Suna à laquelle je tiens, c'est elle. Bien ou mal, là n'est pas la question, mais je sais que c'est compliqué... D'ailleurs si je te la nomme, c'est à toi et pas au Kazekage... »
Comment allait-il prendre la nouvelle ? Ou même encore le fait que je décide de rester à Suna pour le moment ? Si je lui disais son nom, ce n'était qu'à lui, et je ne voulais pas que d'autres utilisent cette situation à des fins mauvaises. D'où le fait qu'en dehors d'un cercle restreint de personnes, je n'en parlerais jamais.
La justification de Tetsui pour son refus de retourner dans le désert me toucha plus que ce à quoi je m’attendais. En vérité, j’ignorais quelle serait sa décision, et j’aurais accepté les deux. Mais il s’avérait que nous étions bien plus proches que ce que je pensais. Tous deux ayant perdu un frère avant Suna. Tous deux restants là pour les mêmes raisons. J’étais devenu chef du clan et Ombre pour ces mêmes arguments. Ces mêmes chaînes. Elles empêchent de vivre heureux, mais les briser rend à coup sûr malheureux.
Tetsui était devenu bien mature avec le temps, sans même que je ne le remarque grandir autant.
Un homme mature, mais un homme amoureux également. Un paramètre pouvant se révéler bien dangereux, ou être la solution de tous les maux. Pourtant, il semblait incertain quant au fait d’en parler. Mon titre nous avait-il séparés ? Je levais alors mon unique main comme pour lui intimer de se taire.
« Je n’ai toujours été rien d’autre que ton cousin, mais tu n’es pas obligée de la nommer si tu ne veux pas en parler. Après tout, ça n’est pas un interrogatoire : tu n’es coupable en rien. »
Je me levais alors de son chevet pour me rapprocher un peu plus de la fenêtre, observant le paysage d’un village en ruine mais en pleine reconstruction. Le temps imparti à cette discussion ne tardera pas à toucher à sa fin. Pourtant, il y avait encore un sujet des plus importants dont je devais traiter avec le Yamada. Un sujet, mais également un présent.
« Puis-je te demander une faveur, et ce sans que tu ne me poses la moindre question en retour ? »
Le fait que je le lui demande démontrait que je ne parlais ni en tant qu’Ombre ni en tant que chef de clan, mais bien comme son cousin, son égal. Le choix lui appartenait.
Je savais pertinemment que mon cousin et moi nous ressemblions beaucoup. Ce n'était pas pour rien qu'on me surnommait le sosie, d'une certaine façon. L'expérience du désert et la perte d'un frère avant Suna nous avait lié plus qu'on ne le pensait. Et pourtant nous avions aussi des différences et chacun notre propre personnalité, nous n'étions pas de simples clones l'un de l'autre. Juste deux cousins soudés entre eux et tenant l'un à l'autre. Je voyais dans ses yeux qu'il comprenait mes raisons de rester ici, à Suna.
Et lorsque je parlais de Yell sans la nommer et évoquais la différence entre mon cousin et un Kazekage si je lui donnais son identité, Kioshi leva sa main pour m'arrêter. J'écoutais ses paroles pleines de sens. Rien d'autre que mon cousin. Pas obligé de la nommer. Coupable de rien. Il avait raison. Pourquoi doutais de sa compréhension ? Il savait différencier son rôle de Kazekage et celui lié à sa famille. S'il le confirmait à sa manière, alors je n'avais pas à craindre pour ma relation avec Yell, du moins pas avec lui.
« Elle s'appelle Yell. »
D'une manière aussi simple que celle-ci, je venais de mettre un nom sur celle que j'aimais. Au moins à l'avenir il saurait de qui je parlerais et c'était à mon sens mieux comme cela. Il se levait alors pour se rapprocher de la fenêtre tandis qu'il en prenait sûrement note. Puis il demanda s'il pouvait me demander une faveur sans que je ne lui pose la moindre question en retour. J'avais beau être allongé dans un lit d'hôpital peu confortable, je me demandais avec beaucoup de curiosité ce qu'il pouvait bien avoir à me demander... Aussi, parce qu'il était comme un frère pour moi, je répondis avec mon air embarrassé et nonchalant :
« Oui pas de soucis, je t'écoute. »
Qu'avait-il à me dire ? Je me doutais que notre entrevue allait bientôt toucher à sa fin, alors j'avais attrapé le mot laissé sur la table par Yami pour le lui montrer et l'interroger à ce sujet. Parce que moi j'étais dans cette chambre hideuse peinte en jaune et il y avait beaucoup de choses pour lesquelles je n'étais pas ou qu'à moitié au courant... Ce "Je reviendrai" écrit en lettres de sang était un mystère.
Yell donc. Ainsi il s’agissait de son soleil à lui. J’espérais qu’il avait trouvé la bonne. Quelque part, j’espérais la même chose pour moi. Yami portait ma bague, mais pas comme je l’avais souhaité. Elle avait d’ailleurs laissé un mot à Tetsui. Elle reviendrait… Probablement avant qu’elle ne m’ait demandé de partir à la recherche d’Oniri et que j’ai refusé. Certainement avant qu’elle ne se fasse kidnapper. Qu’elle revienne ? Oui, mais sans doute pas seule. Après tout, c’était le Nidaime qui l’avait capturée. Comme le Yamada venait de se réveiller, peut-être n’était pas encore aux faits de sa disparition ? Cela fait trois jours déjà.
« Tout est dit dans cette phrase : elle reviendra. Donc elle n’est pas là pour le moment. Mais ne t’inquiète pas pour ça, je m’en charge. »
Ma main remua sous ma cape alors que je continuais d’observer à travers la fenêtre. Dos à lui, je présentais plusieurs lettres plus ou moins épaisses par-dessus mon épaule.
« Tu vas devoir livrer ceci pour moi… »
Je me retournais alors pour retourner auprès de lui, déposant trois enveloppes scellées sur son lit. Deux portaient le nom de Kibõ, et un celui de Tetsui. Du doigt, je pointais l’un de ceux pour mon élève, le plus fin des deux.
« Demain, tu iras lui apporter ceci en lui demandant qu’il en fasse la lecture publiquement, devant tous le village… Il s’agit de directives cruciales que je n’aurais pas le temps de fournir car il me faut retourner à la capitale dès ce soir. Un problème au sujet d’une cargaison de ressources primordiales pour la suite des reconstructions mais qui semble avoir pris un grave retard. »
Mon doigt pointa alors la seconde missive portant le même nom.
« Celle-ci est pour lui, en privé, mais qu’il ne devra en prendre connaissance qu’après le discours. »
Et enfin, la dernière portant le nom de mon interlocuteur.
« Et ceci est un présent. Il contient ce que tu recherches depuis le début, tu en es digne d’après la réponse que tu m’as fourni toute à l’heure. Seulement, je te demanderais également de ne la lire qu’après le discours. »
Je n’attendis aucune réponse de la part de mon cousin, après tout il m’avait donné sa parole. Je me dirigeais alors vers la porte, le temps était écoulé.
Pour en finir avec ce mystère concernant le mot laissé par mon amie Ketsueki, et son amante à lui, Kioshi décida de m'éclaircir d'abord à ce sujet. Enfin... je ne savais toujours pas de quoi il retournait, il disait juste que tout était dit dans cette phrase et qu'elle allait revenir. Elle n'était donc plus là, et avait sans doute quitté Suna d'après ce que je comprenais, mais je ne devais pas m'inquiéter car il allait s'en charger.
« D'accord, à toi de t'en charger alors. » lui dis-je en un sourire de confiance que j'accompagnais d'un clin d'oeil.
C'était son affaire. Malgré l'affection que je portais à Yami, si il fallait l'aider maintenant c'était à lui de s'acquitter de cette tâche. Mes options étaient à moi étaient limitées : rester à Suna pour me soigner. Monter en grade ensuite. Le village, que j'avais appris à apprécier non sans difficulté suite à la mort de maman, avait besoin de bras pour se reconstruire. Et plus que de bras il lui fallait des cerveaux. Je pensais être l'un d'eux dans un futur plus ou moins proche. Au fond, il y en avait marre de voir que trop peu de shinobis utilisaient mal leur matière grise ou pas assez pour le bien de tous.
Maintenant nous revenions à la faveur qu'il avait à me demander. Une mission personnelle pensais-je ? Il sortit de sous sa cape trois enveloppes scellées, puis les déposa sur mon lit en expliquant que j'allais devoir livrer ça pour lui. Je regardais les objets pour y voir inscrits les noms de Kibo ainsi que le mien. Mon air se fit plus interrogateur encore avant qu'il ne m'explique de quoi il s'agissait et ce que je devrais faire concernant chacune des enveloppes. Je gravais ces informations dans mon crâne comme ça j'étais sûr de ne rien oublier. Ce qui m'avait donné un coup au cœur en revanche, c'était la lettre à mon intention qu'il définissait comme un présent qui contenait des réponses aux questions que je me posais sur le mystère entourant la mort de maman. J'étais enfin digne d'en avoir connaissance mais ne pourrais en lire le contenu qu'après le discours que Kibo allait devoir tenir. Mon cousin ne semblait pas forcément attendre de réponse de ma part, il savait qu'il pouvait compter sur moi. Je l'en remerciais avec le coeur.
« … compte sur moi ! »
Il se dirigeait vers la porte de sortie et me souhaita de prendre soin de moi. Le temps était semble-t-il écoulé. Cela sonnait presque comme un adieu ou un au revoir pour une durée indéterminée tel que je le connaissais... Pourtant je restais là à le regarder partir, sans doute compréhensif même en ne sachant pas ce qu'il allait faire ni ce qu'il avait en tête. Je lui faisais confiance comme n'importe qui ne pouvait le faire ici dans le village. La dernière chose qu'il entendit de ma part fut sans doute :
« Toi aussi, prends soin de toi Kioshi... »
Peu importe ce qu'il se passerait demain et à partir de ce jour.
...
Je gambergeais les heures qui suivirent pour trouver un moyen de porter ces lettres scellées à Kibo. Finalement, à la première heure le lendemain, j'avais fais mine de vouloir essayer à nouveau de marcher à l'aide de béquilles et on m'en avait apporté. On me laissa m'exercer seul car il y avait du monde à s'occuper en dehors de moi. C'est comme cela que je parvins à quitter les lieux sans alerter aucune infirmière ni aucun médecin. Chaque mètre parcouru nécessitait beaucoup d'efforts de ma part et je devais tirer sur mes muscles, avec ma jambe dans le plâtre. Ma destination n'était autre que la demeure de Kibo qui n'était pas bien loin de l'hôpital. Je frappais chez lui et lui rapportais de vive voix entre ses murs les instructions de Kioshi sur ce qu'il fallait qu'il fasse. Après quoi je m'écroulais par terre devant lui à cause de mes muscles tétanisés... simplement à bout de force. Il devrait me reconduire à l'hôpital et peut être m'engueuler au passage, mais ma mission à moi était accomplie.
