Tic tac... La pendule relevait le silence installé dans la pièce. Tic tac, le temps passait pourtant bien. Quelle est cette sensation ? La vie se joue bien souvent sur un coup de poker, à cette loi obéissent les mains les moins bien fournies. Tic tac, une paire de deux. Un jeu bien maigre pour celle qui avait l'outrecuidance d'affronter un carré d'As en misant tout. Sa sainteté du corps médical, comme à sa grande habitude, laissait le silence percer son patient, ajoutant quelque artifice réthorique à son discours plat et technique. Fallait-il autant de temps pour dire "oui" ? Ou peut-être en fallait-il plus pour se décider à ne pas dire "non" ? La force n'était pas du côté de la jeune Hayashi. Tic tac, surdité ? Tic tac, perte momentanée d'aptitudes cognitives ? Tic tac, cécité ? Tic tac, oui ? Tic tac, non ?

-Alors ? Fit-elle d'un ton impatient. On ne la changeait pas.

-Eh bien... commença le docteur avec l'indécision légendaire du verdict arrêté du corps médical ... vous êtes bien remise, c'est indéniable. Quant à votre avenir dans les forces armées, en revanche... à se demander si ils y prenaient plaisir ...il va falloir que vous vous ménagiez. Je ne peux consentir à un retour inconditionnel, j'en suis désolé.

Le monde ne s'écroula pas ! Maho' entrevoyait toujours ce petit espoir d'obtenir gain de cause. Mieux valait laisser la charge venir et l'harceler par le feu des canons du désespoir. Mouvement arrogant que cette charge victorieuse, c'était du moins sans compter sur la hargne qui animait l'esprit de l'Hayashi en cet instant précis.

-Quelles sont vos conditions, dans ce cas ? Lâcha-t-elle sèchement.

-Vous êtes autorisée à réintégrer les rangs mais vous viendrez effectuer un contrôle complet tous les mois. Il riva son regard sur son dossier. Vos dernières pertes de sens remontent au mois dernier, de même que vos pertes partielles, parfois violentes tout de même, de... d'activité complexe, de conscience, je ne sais pas vraiment comment vous expliquer cela. La perte de facultés cognitives est supposée être établie parmi les rares séquelles de la méningite mais dans votre cas, ladite perte est épisodique et presque totale. C'est du jamais vu ! Nous avons bien étudié votre dossier et nous tenons chez vous un moyen d'étudier en profondeur le comportement de votre cerveau, c'est extraordinaire, quelque part. Il en va de même pour la surdité et la cécité épisodiques que vous éprouvez.

Bref, la commission vous autorise à retourner à la vie militaire mais garde l'éventualité de vous en démettre à tout moment. Votre situation restera donc incertaine jusqu'à nouvel ordre.

-Très bi...

-Parfait fit-il en se levant. Un mauvais moment négocié de la sorte, ça relevait de l'art ! Mademoiselle Hayashi il tendit sa main à dans un mois, et d'ici-là, ménagez-vous, et rapportez-nous tout incident anormal et n'oubliez pas de bien noter les apparitions abruptes de séquelles.

Prise de main. A dans un mois.