La vie à Suna était plutôt douce était exactement ce à quoi pensait l'immigré de Yuki. Ce ninja n'avait pas connu les derniers tourments ayant frappés le monde des shinobi. Les terres glacées d'où il venait était bien à l'abri de tout ceci, un peu reclus dans le fond. Mais, même en pensant ceci, il n'oubliait quelle place il occupait dans ce village, celle d'un chuunin et cette d'un frère. Pour le moment il pouvait agir plutôt librement, n'était pas contraint aux missions qui incombaient normalement aux servants du village; était-il l'objet d'un traitement de faveur ? Il l'ignorait totalement et pour le moment ce n'était gère sa préoccupation première. En ce moment ce qu'il l'intéressait était d'observer la réaction des individus qui le croisaient, qui lui adressaient la parole. En fait, l'illusion "geminique" était presque parfaite, en effet la présence d'un appendice génital et l'absence de protubérances pectorales trahissaient leur scission. Mais c'était quand même très drôle...

Errant plus que se baladant dans les rues du grand village, il s'arrêta au détour d'un bar. Elle lui en avait parlé, ici on la connaissait, elle l'avait souvent fréquenté. Il entra et s'installa au comptoir attendant quelques secondes qu'on remarque sa présence. L'homme, massif, debout derrière le bar posa un regard en coin sur le nouvel arrivant, il se retourna pour remplir un verre d'un liquide ambré et le posa devant lui. Anseï observa étonné et repoussa délicatement le verre vers le vraisemblable patron. Un sourire amusé s'était fixé sur ses lèvres pâles alors que le tenancier le fixa lui, avec une attention interrogatrice. Il sourcilla, et parla.

-Vous ne prenez pas la même chose que d'habitude ?
-Que d'habitude ? Non, je ne bois pas d'alcool, merci quand même.

L'homme barbu observa plus longuement son interlocuteur à la longue chevelure écarlate, au regard si singulier et ses yeux dévièrent finalement sur sa poitrine, tout au moins s'il en avait eu une. L'Habashi était encore plus amusé par la situation, et en bon ami se retint de prolonger le plaisir. De plus, le tavernier devait s'être rendu compte de la supercherie, il fronçait maintenant les sourcils. Les blagues les meilleures sont les plus courtes.

-Je n'ai pas de seins, si c'est ce que vous cherchez.
-Je vois ça. Vous n'êtes donc pas..
-Une femme, non. Je suis le frère de celle-ci, Anseï. Et vous, vous êtes Tadaïchi. Je me trompe ?

Dit-il simplement en souriant. Le sourire était l'une de ses plus grandes vertus comme l'humour pouvait être son pire pêché, entre autre. Le barman esquissa à son tour un sourire plus fébrile que celui de son client farceur.

-C'est ça. Vous êtes donc le frère de Zanshi-sama, la ressemblance est frappante. Jumeaux je suppose ?
-Nous le sommes, oui.
-Elle ne m'a jamais dit avoir un frère, c'est étrange.
-Oh, mais qui parle de son passé dans ce monde ? Ha, ne vous inquiétez pas; ce n'est pas un piège. Sinon, vous pouvez me servir une de vos spécialités ? Non alcoolisée bien sûr. Puis, gardez le secret, je pourrais encore rire un peu comme ça.

Une autre personne entra alors dans le bar, le regard d'Anseï fut attiré par ce nouvelle arrivant. Un jeune homme aux cheveux blancs, comme il en avait rencontré des dizaines à Yuki no Kuni...

Le nouvel entrant, de son nom Kibō, faisait vraiment bonne figure. Il paraissait à l'Habashi comme un jeune homme correct, ne cherchant pas le conflit, une personne comme les aimait le voyageur. La question du jeune ninja le fit sourire, seulement sourire car cela ne l'amusait pas. Il avait directement fait le rapprochement, impossible pour lui de rire un peu dans ce cas. Le barman se retourna et lui versa un liquide aux allures exotiques. Anseï examina le contenu, le renifla discrètement et conclut qu'il n'y avait pas d'alcool dans ce breuvage. Il reporta aussitôt son intérêt sur le Sunajin qu'il observa quelques secondes. Il portait une plaque différente de celle des autres, il n'était donc pas un ninja lambda, comme les autres ou comme lui même. Tout en parlant, il attrapa son verre rempli d'un liquide verdâtre.

-Kibō, c'est un nom simple à retenir. Moi, je suis Anseï. Vous avez donc remarqué que je ressemble -un peu- à votre chef. Inutile de le cacher davantage, puisque de toute façon je n'ai rien à cacher mais seulement de quoi m'amuser.. Ha... Je suis son grand frère.

Il sourit en annonçant son lien de parenté. Non pas qu'il tentait de faire jouer leur relation mais plutôt que cela l'amusait de se placer ainsi vis à vis de sa grande sœur. Anseï n'était en fait pas son grand frère ni même son petit frère à vrai dire, mais son jumeau. L'ordre de sorite de la jambe de Jupiter, soit lui en seconde position avec un espacement de tout au plus une minute le définissait comme "petit" frère. Mais ça, personne sauf lui et Zanshi le savaient. C'était d'ailleurs, à la belle époque, un vif sujet de conversation et parfois même de dispute, rien de grave au final. Mais ce simple ordre de naissance avait aussi porté d'autres "problèmes". En effet, Anseï n'avait pas bénéficié de la même attention que sa sœur ce qui lui avait donné plus de liberté sur bien des choses, mais qu'il avait aussi poussé d'autres choses.

Il porta le verre à ses lèvres et en avala une courte gorgée. C'était ça leur spécialité ? ça avait un léger goût de pomme, mélangé avec autre chose d'indéfinissable. C'était plutôt bon. Il reposa le verre avec une délicatesse qui lui était propre -Anseï était un homme que l'on pouvait qualifier de raffiné- et reprit simplement la parole avant que le Sunajin ne lui réponde. Le Yukijin était curieux de nature, un trait qui avait survécu de travers de ces nombreuses années passées dans les déserts de glace du pays de la neige.

-Je suis vraissemblablement un ninja de Suna moi aussi. Alors, que font deux ninjas de Suna dans un tel endroit ? Pour ma part, j'étanche une soiffe comme j'en ai rarement eu. Cette plaque n'est pas la même que celles des autres... Alors, qui êtes-vous, vous ?

Ajouta-t-il en prenant une nouvelle gorgée de cette boisson dont il ignorait tout, comme de ce ninja qu'il venait tout juste de rencontrer. Et une nouvelle fois il posa son verre, et fit directement face au ninja.

Les remarques du jeune ninja à la crinière opaline faisaient sourire le rouquin. Un homme perspicace se tenait à côté de lui. Il ignora sa question quelques secondes, le temps d'avaler une autre gorgée de cette divine boisson dont il ignorait tout. Il fixa la glace derrière les étagères sur lesquelles étaient empilées des verres et alignées des dizaines de bouteilles. Il s'observait. Ils se ressemblaient vraiment, lui et sa sœur; et pour quelqu'un qui ne le connaissait pas, c'était normal qu'un doute subsiste quant à sa véritable identité. Néanmoins, et malgré l'expression de son doute; le ninja spécial ne semblait pas complètement remettre ses révélations en doute. Celui répondant au nom de Kibo avait donc un lien avec la Kazekage, suffisamment pour qu'il pense qu'elle lui parlerait de tout son passé. Ça aussi l'amusait un peu. L'habashi comprenait sans peine pourquoi la jeune femme n'avait jamais évoqué ne serait-ce que l'ombre de son existence. Alors c'était à lui, le faux grand frère, d'apporter la lumière à faible lanterne du jeunot.

-Et bien, en fait j'ai menti sur un point; je ne suis pas son grand frère mais son petit frère.

Il lui sourit sympathiquement, en fait il voulait rire de cette situation, de cette explication; mais il doutait que cela soit bien perçu. En effet, le Sunajin pourrait interpréter ceci comme une moquerie, qui n'en serait pas une en fait. Le chuunin apprendrait à le connaître par la suite, ce n'était qu'une question de temps pour qu'il comprenne qu'Anseï était un éternel joyeux, pouvant rire de tout et de rien. Il porta de nouveau son verre à ses lèvres, et le reposant il reprit la parole. Il devait continuer son explication, continuer son histoire. Il devait vraiment éclairer son homologue, et puis, les blagues le plus courtes étaient toujours les meilleures et parfois être prit au sérieux n'était pas plus mal.

-Je suppose que c'est normal que vous ne me connaissiez pas. Je suis arrivé à Suna il y a peu. Et tout aussi normal que vous n'ayez jamais entendu parler de moi. Zanshi n'est pas du genre à étaler son passé, et jusqu'aujourd'hui je faisais partie de son passé. Sans doute me croyait elle mort. Ou peut-être est-ce pour une autre raison, je ne sais pas. Mais, je suis bien son frère; soyez sans craintes. Et puis, je ne suis pas du genre malintentionné.

Il marqua une pause pour boire à nouveau. Anseï restait face au miroir puis une autre idée lui vint, enfin, plus une pensée qu'une idée à vrai dire.

-Je suppose que vous ne lui avez pas posé la question directement... Zanshi a tendance à répondre aux questions qu'on lui pose. Si vous lui posez les bonnes questions, vous aurez des chances d'apprendre plus de choses à son sujet. Par contre, ça ne marche pas avec moi. Même si je ne suis pas un menteur invétéré, il y a peu de chance pour que je réponde sincèrement à une question que je juge inappropriée. Mais vous pouvez toujours tenter votre chance.

Ajouta-t-il en posant son regarde de braises sur le jeune ninja.

En plus d'être perspicace, le jeune homme était audacieux, n'hésitant pas à questionner son interlocuteur sur son passé. L'Habashi n'aimais pas parler de son vécu et préférait de loin laisser au passé tout ces désagréables souvenirs. Il vida le reste de son verre et soupira. Les raisons ayant poussé sa sœur à préférer le croire mort plutôt que vivant devaient être nombreuses, néanmoins l'une d'entre elle lui semblait ressortir d'entre les autres. Il n'allait pas lui jeter la pierre, en fait lui même, jusque récemment, n'avait pas tenté de la retrouver.

- Maintenant que nous abordons un sujet aussi personnel, je crois que nous pouvons nous tutoyer, non ?

Anseï n'attendit pas la réponse de son jeune camarade de conversation, en effet il parlait plus aisément de cette façon. Il jeta un rapide coup d'œil au barman, ce dernier était occupé à servir d'autres clients. Autant tenir la conversation à un étranger ne le dérangeait pas, que d'être écouté dans une telle discussion ne lui plaisait pas vraiment. L'homme reprit alors la parole.

- As-tu participé à la guerre contre les Uchiwa et les Senju ? Comme toutes les guerres, elle a été terrible, mais elle était bien plus... Dévastatrice humainement. Presque toute ma famille a été tuée durant le dernier affrontement, ceux qui ont survécu, comme moi, Zanshi et d'autres; ont été séparés. J'ai été gravement blessé, et lorsque je me suis réveillé j'étais dans un pays lointain, à Yuki. Je suppose qu'on a agit de la même façon, on a tourné la page et on avait certainement d'autre chose à faire.

Anseï était reparti de zéro à Yuki, avait rencontré l'amour et vivait tranquillement, rien ne l'avait poussé à retrouver les siens, ceux de son sang. Il avait toujours pensé qu'ils étaient tous morts, en fait il l'avait même espéré. Et c'était pour cette raison qu'il n'en avait pas voulu à sa jumelle. Alors pourquoi partir à sa recherche aujourd'hui ?

- Je crois que c'est une bonne chose qu'elle ne m'ait pas cherché. Et toi, qui es-tu pour parler aussi familièrement de ma sœur ? Laisses moi deviner... Tu ne peux pas être son fils, tu n'as ni l'âge ni les traits physiques... Hum, son mari, ou son petit ami ? Haha, non, l'âge ne correspond toujours pas... Hum... bon, je ne vois pas.

Fini-t-il en souriant. Il avait parfaitement réussi à sauter d'un sujet à l'autre, peut-être que, miraculeusement, il ne s'en rendrait pas comte.

Il souriait aux mots que prononçait le jeune ninja. Il allait d'excuse en excuse, justifiant sa façon de parler de la Kazekage. Anseï adorait provoquer ce genre de réactions chez les autres. Cela l'amusait. On pouvait se demander ce qui ne l'amusait pas au final. Son verre était maintenant vide, alors leur conversation devrait se terminer sur sa dernière réponse. L'Habashi reconnaissait ses dires, sa sœur était en effet mystérieuse pour ne pas dire cachotière. Il était sûr que toutes ces années séparées avaient dû creuser le gouffre de secrets de leur jardin respectif. Lui même était un mystère, peut être était ce en fait un trait de leur famille, cela devait être ça, oui. Alors, pourquoi sa sœur n'était elle venue à sa rescousse ? Pourquoi ne l'avait elle pas recherché ? Une grande question à laquelle le rouquin pouvait finalement, facilement répondre.

-Finalement nous avons ce point en commun. Avec toutes ces années passées loin d'elle, je ne la connais plus vraiment. J'ai appris des choses de la bouche d'autres personnes, mais elle ne m'a rien dit encore. Il faut que je sois à Suna depuis une semaine seule, et qu'elle est occupée. Tu dois te douter que si elle me croyait mort, il y avait peu de chance pour qu'elle parte à ma recherche. Je suis sûr que si elle avait su, nous nous serions retrouvés plus tôt.

Peut-être leur discussion ne se terminerait pas maintenant. Anseï aimait bien répondre aux questions, mais il aimait bien en apprendre sur les autres aussi. Et ce Kibo l'intéressait, aussi étonnant cela puisse paraître. En effet, il était celui qui en savait le plus sur sa soeur après lui, il la qualifiait même, justement, de grande soeur. Le nouveau Sunajin se remémora une scène de leur passé, lorsqu'ils étaient encore à Kusa. Il se souvenait d'une jeune fille, ou femme... Enfin, d'une grande soeur attentionnée, pas si secrète, énergique et joyeuse et pour le moment il ne l'avait pas revu sous cet angle. Il se demandait quelle genre de personne elle était devenue. Il se demandait aussi quelle genre de personne était son jeune comparse.. Il fit un signe au barman et redemanda la même chose qu'avant. Un nouveau verre, une nouvelle discussion.

-Et toi, Kibo que fais tu ici ? Je veux dire, à Suna. Un ninja du Kakumeigun, l'unité spéciale donc ? Tu dois avoir certaine qualité, en dehors de savoir parler correctement. Hum... Tu as de la famille ici ? Une femme ? Bien que... Tu sois un peu jeune pour être marié. D'ailleurs, tu es bien jeune pour faire partie d'une unité d'élite, non ? Enfin... On n'est jamais trop vieux ou trop jeune pour... Devenir quelqu'un.

Sourit il une nouvelle fois. Allait il lui en dire plus ou se méfierait il de son aîné ? Ceci aussi ne dérangeait pas le voyageur, quoi de plus légitime que de vouloir garder pour soit des informations aussi personnelles ? En tout cas, une chose dont il était sûr : ce jeune n'était probablement pas à prendre à la légère. Il aimait vraiment ça, faire de nouvelles rencontres et Suna n'allait pas manquer de lui faire découvrir bien des personnalités.

Pour son jeune âge, Kibo semblait déjà être une personne qui avait vécue beaucoup d'événements aussi passionné que triste. Le voyageur l'écoute avec une attention toujours aussi grande. Il ne saurait ignorer un tel personnage. Au début il lui était apparu comme un garçon lambda sans grand intérêt; même si Anseï était étonnamment capable d'accorder son attention à tout et n'importe quoi. Il avait raison, l'âge ne définissait ce que nous étions, bien qu'une personne plus âgé devait disposer d'une expérience de vie plus importante. Mais était-ce vrai dans cette situation ? Etait ce vrai pour les shinobi ? A moitié seulement. L'Habashi était persuadé qu'en se monde vivait des shinobi menant une vie aussi linéaire et banal qu'un simple citadin. La question n'était pas là.

Comme il le comprenait! Mais il ne pouvait pas grand chose pour lui, si ce n'était lui apporter quelques sages paroles tirées de sa propre expérience. Entre la perte de sa sœur, de sa femme, de ses familles; il avait engrangé beaucoup, peut être trop, d'expérience. Le jeune homme singulier était bien perspicace, prendre le temps de discuter avec Zanshi était certainement bien pensé, comme s'il n'y avait pas pensé lui même. Anseï sourit en entendant cette phrase, ce n'était pas idiot mais... C'était amusant simplement. En fait, ne pas lui parler n'était pas si terrible que cela, il ne courait plus après sa sœur, il savait où elle était et un moment se présenterait, plus propice que les autres.

Le Kusajin se reconnaissait encore un peu plus dans les mots de son jeune compatriote, à quelques exceptions prés. Lui, n'avait jamais eu dans l'idée de changer le monde; à vrai dire ce fut plutôt ce dernier qui le changea, le transforma en ce qu'il était aujourd'hui. AnseÏ était à présent un homme aguerri, calme et malgré tout très intentionné. Il avait vécu des moments durs qui auraient certainement assombris la plupart des hommes, mais lui, pas vraiment. Il avait apprit à tirer le positif de ce qui lui arrivait et ne plus ressasser ce qui était négatif. Cependant, aussi lumineux pouvait il être, il n'en restait pas moins un être capable de tuer et davantage lorsqu'il était animé par la vengeance et la tristesse. Deux sentiments dont il n'arrivait pas à se défaire, aussi optimiste était il.

-L'amour est une chose dont on ne revient jamais indemne, quelle que soit la situation. Il est merveilleux quand on le ressent et partage chaque jour, et désastreux lorsqu'on le perd. La famille sert de soutien dans ces moments là, c'est dont une bonne chose que tu considères les habitants de ce village comme ta famille. J'ai perdu ma famille plusieurs fois, mais aujourd'hui j'en retrouve une partie. J'ai eu des frères et sœurs, je ne me suis jamais mieux entendu avec eux, qu'avec Zanshi. A l'époque...

Il se souvenait en effet de cette partie de son enfance. Il avait comprit pourquoi il avait été si difficile à gérer. Il avait été jaloux de sa sœur de nombreuses années, elle avait reçu plus d'attention que lui, peut-être aussi plus d'amour, et à bien y penser; peut être trop. Lui, jeune, ressentait à peu prés tout ce que sa sœur ressentait, joie, peine... Mais jamais il ne les avait vécu directement, à Kusa, au temple. Aujourd'hui, et depuis l'année précédent la grande guerre, il n'avait plus ressenti cette jalousie, au contraire, ce qui n'était pas mieux. Puis, il l'avait perdu de vue, et avait longtemps perdu l'espoir de la revoir jusqu'à ce que cette fameuse pierre s'illumine pour une raison qui lui était inconnue.

-...Et bien, c'était une fille joyeuse, bien vivante, gentille et... comment dire... empathique ? Mais à côté de ça, elle était très, très autoritaire. Et moi, j'étais à peu prés son opposé; toujours à faire des conneries qu'elle essayait tant bien que mal de rattraper. Je pense que, quelque part, elle veillait sur moi. Nous sommes jumeaux, mais c'est quand même elle l'aînée de notre fratrie. Rigolat-il.

Bien sûr il n'en raconta pas plus, autant pouvait il répondre sans problème, qu'il préférait préserver certaines zones de son passé et ne les garder, égoïstement, que pour lui et lui seul.

-Aujourd'hui, ici, toi: tu la perçois comment, Zanshi. En dehors d'une sœur, Kazekage, ou je ne sais quoi. Elle te paraît correspondre à ce que j'ai raconté ? Y a t il quelque chose que je devrais apprendre de quelqu'un d'autre qu'elle même ?

Le portait que peignait là le jeune Kibo ressemblait fort à celui qui était resté gravé dans la mémoire du voyageur. Cependant, il avait peine à croire que sa sœur puisse être toujours la même qu'auparavant. Il avait en effet ressenti chez elle quelque chose de changé qu'il n'arrivait pas à préciser même avec l'aide indirecte de son interlocuteur à la tignasse d'opale. Il réfléchit un instant, mais non; cela ne lui venait pas. Il laissait donc ce souci de côté, chaque chose en son temps. Les deux hommes continuaient donc leur discussion sans tarissement, tout au moins pour l'instant. Même s'ils avaient certainement beaucoup à se dire, à apprendre l'un de l'autre, subsistait toujours une contrainte et non des moindres : le temps. Oui, parce que l'Habashi avait autre chose de prévu cette journée.

Pour le moment il pouvait se permettre de continuer leur conversation. Plusieurs sujets se développaient donc et de nombreuses réponses restaient à apporter. Cependant, il ne se considérait pas tout à fait comme une tête brûlée. Par le passé peut-être était il assez irréfléchi, immature; oui il faisait pas mal de connerie même, mais être une tête brûlée... En fait il ne savait pas. Le Sunajin avait sans doute en partie raison. En tout cas aujourd'hui il ne l'était plus, plus depuis qu'une femme l'avait assagi, même si cette dernière n'était plus. Après quelques secondes de silence il répondit à Kibo avec cette même sincérité qui lui était propre. Sa réponse n'était pas faite pour l'apitoyer, mais simplement pour montrer sa réalité.

- Aujourd'hui, même si j'aime blaguer, rire et m'amuser; je crois que je suis l'une des personnes les plus sages de monde, enfin, sage dans le sens où je réfléchis à ce que je fais. Mais autrefois j'étais sans doute une tête brûlée, enfin, peut-être, je ne sais pas exactement ce qu'est une tête brûlée pour tout dire. C'est une femme qui m'a fait changer, qui m'a fait devenir ce que je suis aujourd'hui. Son sourire s'effaça pour laisser place à une mine un peu plus sombre. Et il reprit.
- Je ne devrais pas dire ça, je devrais être content que Zanshi soit toujours la même. Mais, elle est une grande shinobi connue jusqu'au pays de la neige. Alors, si moi j'ai changé... Ma sœur a du changer aussi, maintenant, il me reste à découvrir comment. Ajouta-t-il en en buvant une gorgée du verre que venait de lui resservir le barman.

En effet, lui n'avait connu que l'amour et la mort d'une femme, ainsi que la haine et la vengeance qui en découlèrent. Mais il n'avait participé à aucune autre guerre, n'avait que rarement combattu, n'avait pas rencontré toutes ces menaces qui habitent le monde shinobi, et n'avait pas été exposé à autant de... mystère qu'elle. Alors, comment était il possible qu'elle n'ait pas changé, qu'elle soit toujours la même ? De plus, comme tout bon Habashi, Anseï connaissait parfaitement les arcanes de sa famille, de son clan, et de leur pouvoir; il savait exactement quelle sensibilité les habitait tout comme leur faiblesse face aux sentiments, quels qu'ils soient qui pouvaient soit les rendre bon, ou mauvais...

Enfin, il passa sur ce sujet; rebondissant sur un autre.

- J'ai une question à mon tour, tu as parlé d'un Kioshi; est ce le même que celui dont ma sœur m'aurait parlé ? Peut-être y a t il plusieurs Kioshi dans ce village. Hum... Yamada Kioshi ? Tu pourrais m'en dire un peu sur lui ?

C'était la question à un million de ryos. Dans quel sens avait elle changé ? Anseï n'aurait su dire qu'elle était plus mauvaise, ou meilleure, ce n'était pas à ce type de changement qu'il pensait mais à quelque chose de plus complexe. Visiblement, ce jeune homme ne lui serait pas plus utile que ça dans le cheminement de l'enquête qu'il venait de commencer. Qu'à cela ne tienne, ce n'était pas si grave. Finirait un jour où il apprendrait, et il était déjà sûr que les réponses à ses interrogations ne seraient pas plaisantes. Mais il n'était plus à ça prés.

Il ne répondit pas à sa question et préféra se concentrer sur ce Kioshi. Il se demandait ce qu'il pouvait apporter à sa sœur. Il ne l'avait jamais vu mettre les pieds sans sa maison, et Zanshi ne semblait pas passer ses nuits ailleurs que chez elle. Et si elle s'était éclipsée une nuit, il l'aurait su. Ses sens étaient toujours en activité, sur le qui vive. Il vida son verre avant d'apporte une réponse au second questionnement du ninja.

-Je ne veux rien savoir de particulier sur ce Kioshi, tu me dis que c'est un homme bon, je veux bien te croire. Mais, vois-tu, si Zanshi est la Kazekage, un personne que tu apprécies et que ce Kioshi aime -apparemment- moi, je suis son frère, sa vraie famille. Ça peut te paraître rude, mais je tiens certainement davantage à Zanshi que quiconque ici présent, et je ne laisserai personne la faire souffrir quoi qu'elle ait pu faire. Ne t'inquiètes pas, je ne compte pas non plus faire de mal à ton Senseï, enfin, tant qu'il n'en fait pas à ma sœur.

Il posa son regard incandescent sur le jeune homme, son intonation et son faciès avaient sensiblement changé. Le voyageur semblait plus sérieux, plus dur. S'il y avait bien une des choses avec lesquelles il ne plaisantait pas c'était bien ça. Il venait de retrouver la jeune femme après des années de séparation, et il ferait tout, le meilleur comme le pire, pour la protéger. Il ne voulait pas retomber dans les travers qui l'avaient poussés à quitter Yuki no Kuni. Sous ses apparences d'homme posé, calme et bienveillant se cachait une espèce de monstre animé par des instincts plus sombres que la nuit elle même...