C'était il y a quelques mois déjà, Koutetsu menait une vie tranquille et à l'abri de tout danger à Kumo, il ne voulait pas tenter des missions trop périlleuses et se cantonnait à des petits services, mettait de temps en temps sa tenue de mission et faisait occasionnellement le livreur pour un restaurant qui avait ouvert près de chez lui.
Seulement, la routine monotone qu'il vivait lui plaisait de moins en moins et, comme pour confirmer cette lassitude, Kuro et Inori lui faisaient sans cesse des reproches sur la manière dont il se comportait en tant que shinobi. Le Kumojin n'arrivait pas à accepter ces critiques sur sa vie, même s'il savait qu'elles étaient parfaitement fondées : il était un lâche incapable de se battre sans y être forcé. Il se haïssait pour ça mais n'arrivait pas à se décider à changer, quoiqu'il advienne, il restait et resterait un couard selon lui-même.
Et pourtant, le destin voulut que Koutetsu réussisse à changer, pas par lui-même, certes, mais grâce à l'aide plus ou moins directe que lui avaient apporté deux personnes...
Pendant une semaine environ, Kuro avait envoyé son fils adoptif dans un village aux alentours de Kumo pour que le jeune homme se reprenne un peu en main et se mette réellement à travailler.
Il était tôt ce matin, lorsque le shinobi, habillé en civil, se dirigeait chez l'épicier pour acheter de quoi cuisiner les repas du jour. Il eut la surprise de trouver du riz d'excellente qualité dans les rayons ainsi que du thon livré la veille, et donc encore frais. Avec tout ça, il acheta le reste des ingrédients pour un riz cantonais et rentra chez lui après avoir payé les courses. À un croisement entre plusieurs rues, Koutetsu aperçut un homme qui courait avec une bourse dans la main alors qu'une femme le poursuivait en hurlant "au voleur !". Le kumojin se résolut à pourchasser le fuyard qui semblait se diriger vers les portes du village. Heureusement, Koutetsu était suffisamment rapide pour le rattraper, mais avec ses sacs de courses dans les mains, il avait l'air malin et ralentissait un peu pour éviter de tout faire tomber bêtement. Toujours est-il que le coupable du larcin effectua un bond prodigieux et se réceptionna directement sur un toit avant de continuer en accélérant encore plus, le shinobi avait donc été détecté... les conserves s'entrechoquaient dans le sac... pourquoi tant de haine de la part de la malchance envers les "justiciers" ?

De toute façon, la discrétion n'était qu'une option, un luxe au vu des circonstances et c'est en escaladant les toits à son tour qu'il le comprit : toute la population qui se trouvait dans les rues les avait aperçu et, certes, le fugitif pouvait savoir où son poursuivant était en regardant la direction dans laquelle regardaient les passants, mais le traqueur pouvait aussi se servir de cette astuce. Aussi, alors qu'il venait de perdre de vue sa cible, Koutetsu se rendit compte qu'une seconde sans regarder son chemin équivalait à rentrer dans quelqu'un, et ce fut le cas lorsqu'il percuta une personne qui se trouvait sur son chemin de plein fouet. C'était bête d'être redescendu sur la route, même si un accident similaire sur les toits aurait pu être plus dangereux. Ses courses était éparpillées par terre, avec une ou deux conserves de cassées, dommage ! Toujours est-il que le kumojin, après avoir fait passer l'étourdissement, s'excusa en regardant le sol, honteux, et toujours assis par terre.

-Je suis désolé... vous avez pas vu quelqu'un passer en tenant une petite bourse dans sa main par hasard ?

Dit-il en s'époussetant et en regardant les dégâts qu'avait subi son repas.

HRP:

Flâner. Se laisser-aller au milieu des vagues de gens baignant sous un soleil radieux. Peu de monde, le calme était agréable il fallait le préciser. On respirait la bonne humeur, et Mikami naviguait au travers de petites assemblées éparses aux mouvement aléatoires et insouciants, slalomant entre les essaims papillonnant. Toutes les conditions étaient favorables pour vivre ce moment de détente en orientant ses pensées vers des instants moins sombres. Planer. Sentir ses traits se plisser sous la brise adoucissant les rayons du soleil et ses épaules se détacher de leur tête qui se soulevait doucement. Se libérer de tout son poids, trainant des pieds pour ressentir les variations du sol, un moment d'abandon absolu, une élévation divine pouvant aboutir à une rémission totale. Une contemplation basée sur les sens permettant de faire abstraction de tout brouahaha, pour n'entendre plus que le doux chant des oiseaux et le paisible écoulement d'une rivière lointaine.

Un moment de sérénité inébranlable, vous croyez que c'est possible en ville ? Cette jeune âme errante se sentit soudainement déroutée, le système nerveux transmit l'alarme comme un éclair s'abattant sans crier gare sur une branche de lierre ou un saule pleureur. Il retrouva ses sens juste à temps pour sentir le sol encore frais de la rosée du matin se placarder en s'enfoncer dans son faciès innocent. Pendant deux secondes ce fut le noir complet, le silence implacable. Ç'aurait pu durer des heures que Mikami n'aurait pas lever un petit doigt, il y était trop bien. La fraicheur du pavé lui caressait l'épiderme alors que les bruits et l'agitation alentours remontaient des profondeurs. Une question se glissa au milieu de ce qui ressemblait au réveil d'une sieste. Mikami essayait de se rappeler de la dernière chose qu'il faisait alors qu'il se demandait où il était.

*Hmmpf...* Il allait falloir se lever, il s'en rendait compte au fur et à mesure que son champs de conscience s'étendait. Lui, là, allongé par terre et quelques personnes autours, les rues, le village. Quand même... L'espace d'un instant il avait oublié tout ça, la redescente avait du être brutale. L'esprit loin des foules, il s'assit en tailleur en se frottant les yeux d'une main emportant la brume sur son passage. Le flou se dissipait peu à peu, dessinant d'abord de vagues formes hautes en couleur puis la silhouette d'un jeune homme assis au milieu de ses courses, qui aurait pu balbutier toutes les mondanités de la Terre en guise d'excuse que ça aurait été fait en vain ; Mikami n'accordait aucune importance au peu de gravité que peut représenter une malencontreuse bousculade, et de toute façon, sa conscience n'avait pas encore rejoint le monde extérieur. Puis il recouvrit l'automaticité de ses fonctions sensitives et enfin se mit à écouter rattrapant le flux des mots comme prenant le bus en route :

- ...vous avez pas vu quelqu'un passer en tenant une petite bourse dans sa main par hasard ?
- La moitié... La moitié des personnes que j'ai croisé en avait une entre les jambes, mais je suis pas sûr que ce soit de ça que tu me parles...