HRP a écrit:

Lieu du RP: Heaven's Night

- Ça suffit Tawako, t'es ronde comme une pelle.

- Je suis surtout MAJEURE, sombre autruche ! Et je te paie, avec ces ryos que je gagne à la sueur de mon front. Je VEUX mon vin de palme.

La tavernière n'argumenta pas davantage, mais ne céda pas pour autant. Elle se décala le long du comptoir pour s'occuper d'autres clients mâles plus à son goût, laissant le verre de Tawako vide. Tawako, en revanche, était pleine.

- C'est un scandale !!

Son cou s'allongea brusquement de plusieurs mètres et sa tête parcourut toute la longueur du comptoir, se hissant à la hauteur du client que la tavernière était en train de servir.

- OUUUI, UN SCANDALE ! Hurla-t-elle à la figure de cet inconnu, sans savoir qu'il n'en était pas vraiment un.

Le cache-oeil fut son premier indice. L’éthanol et l'heure rendant sa lucidité particulièrement approximative, elle ne put pas mettre un nom sur ce visage, mais les neurones que la boisson lui avait épargnés lui signalèrent l'air de famille qui les rapprochait.
Alors elle rétracta son cou, se déplaça en deux grandes enjambées gracieusement instables puis s'assit à ses côtés, réajustant ses lunettes. La réputation de ce garçon lui revenait en mémoire à mesure qu'elle le dévisageait, non sans quelque mépris.

- Ne sois pas jalouse, saoularde ! L'interpella la barman.

- Je ne jalouse pas, j'étudie mes semblables. Puisque ce déchet familial arrive à se faire servir, aucune raison que je n'y arrive pas.

Elle se retourna vers la tavernière, aboyant avec fougue :

- AVOUE, c'est le côté borgne darko-sociopathe qui te chatouille les ovaires ! Et moi alors ? SEXISME !!!

Quelques personnes se turent autour pendant un instant, mais la musique continuait de couvrir le brouhaha ambiant.

- Je suis pas jalouse. Ni saoul.

Ni scandaleuse, ni dépravée.

La nuit était déjà tombée mais la soirée n'était pas encore très avancée. Ce qui laissait à Shinji au moins quelques heures avant de rejoindre la cave de Jigorō et s'adonner à son passe-temps favori: casser des pifs. Mais tout ceci méritait une mise en condition et puisque le brun s'était levé à peine deux heures plus tôt - bah oui, il vit la nuit - il en était encore au stade "je me réveille gentiment vient pas me faire chier". Son petit déjeuner devant lui, à savoir un pichet d'alcool et un simple sandwich duquel dépassait une feuille de salade, il jetait de temps à autre des regards vaseux aux autres clients sans pour autant leur prêter attention.

Il avait tellement l'habitude des alcooliques et de leurs frasques qu'il ne remarqua pas vraiment la femme qui faisait un pseudo-scandale parce qu'on refusait de la servir avant les autres. Et puis lui, il était justement en train de se faire resservir par la tavernière. Alors il avait toutes les raisons d'être satisfait et de subir sa gueule de bois en silence. Il prit une morse de son sandwich puis leva le pichet vers sa bouche pour faire passer le goût. Il savoura l'alcool qui se déversait entre ses lèvres et la douce sensation de chaleur qu'il procurait en coulant dans sa gorge. Il n'y avait pas besoin d'aller chercher le bonheur bien loin si on savait se satisfaire du nécessaire. Et là, pour le coup, il était heureux le brun...

- "OUUUI, UN SCANDALE!"

Il fut tellement surprit qu'il lâcha son pichet qui rebondit sur le comptoir avant de s'écraser sur le sol. Shinji resta immobile avant de tourner un regard mauvais vers l'origine de ce cri puissant qui lui avait défoncé les tympans. Pour un peu ça ne l'aurait pas étonné de saigner des oreilles. Encore partagé entre la surprise et la colère qui s'insinuait lentement dans toutes les fibres de son corps, il fronça les sourcils lorsque son œil valide se posa sur un visage tout prêt du sien, relié à un coup qui faisait la longueur du comptoir. Qui c'était déjà celle-là? Une Akuzu bon d'accord mais vu l'absence de lien avec son clan depuis plusieurs années il ne la remettait pas totalement. En tout cas c'était une sacrée dégénérée! Même lui il ne faisait pas ça! Et lorsque l'intéressée utilisa son élasticité pour venir s'installer à côté de lui, il fit de même pour garder le même espace entre elle et lui.

- "Qu'est-ce qu'elle veut la binoclarde? Elle a pas encore reçu sa pétée aujourd'hui?" râla-t-il avant de recommander un second pichet. "Putain c'est pas vrai, ça! Il y en a pas un pour rattraper l'autre dans ce clan!"

Il approuva ensuite d'un vague signe de tête lorsque le barman intima à la soularde de ne pas être jalouse. Ce à quoi elle rétorqua qu'elle ne faisait qu'étudier ses semblables. Comme s'il était une sorte d'animal en cage! Cette simple idée augmenta d'un cran la rancœur qu'il avait envers elle. Mais lorsqu'elle ajouta que si un déchet familial comme lui pouvait se faire servir il n'y avait pas de raisons qu'on ne la serve pas, elle, il se tourna d'un mouvement rapide vers sa cousine. Ou peu importe ce que c'était...

- "Déchet familial, moi?" releva-t-il sur un ton aussi glacial que la neige de Yuki no Kuni. "Tu t'es vue ou quoi? On dirait une clocharde en manque!"

Bon, il pouvait comprendre ce que ça faisait d'attendre sa boisson quand on avait le gosier sec. Il le comprenait même parfaitement! Et puis il était au moins autant chiant qu'elle lorsqu'il s'agissait d'alcool mais là, lui, il était pratiquement à jeun. Et avec le mal de crâne qu'il se tapait, il n'était pas vraiment prêt à subir longtemps ce genre de remarques. Déjà parce que la patience et lui, ça faisait deux. Ensuite parce qu'il ne voyait pas le moindre inconvénient à fracasser une femme, fusse-t-elle de son clan...

Aussi lorsque qu'elle le qualifia de borgne darko-psychopathe, il ne se fit pas prier pour allonger son bras dans sa direction et lui renverser une bouteille d'eau sur la tronche. Ça, au moins, ça risquait de lui remettre les idées en place. Et comme il était parfaitement conscient qu'elle ne risquait pas d'en rester là, il se leva pour lui faire face.

- "C'est toujours mieux que d'être une bigleuse hystéro-sociopathe!" renchérit-il, les poings serrés. "D'habitude je ne me bats pas le ventre vide mais pour toi je vais faire une exception! Ho que oui! T'iras gueuler à l'hosto comme ça!"

La tension semblait évidente et le barman commençait déjà à ranger soigneusement ses bouteilles. La clientèle, quant à elle, faisait ce que toute bonne clientèle faisait: elle buvait en observant la scène avec une curiosité malsaine.

- "T'es qui, toi, d'abord?"

Fallait toujours demander le prénom des gens avant de les taper, quand on était poli...

Douche froide pour Tawie. Elle pencha la tête.

- Pose-toi les bonnes questions, vermisseau. « Quoi », pas "qui"...

Sa tête se déroula encore, et se mit à serpenter autour du borgne.

- Je suis la balle rebondissante, la furie du désert, le cartoon hors du poste, la fougue du chien dans le corps du chat... miaouaf.

Son corps suivit brusquement, elle se retrouva au dessus de lui, debout sur le comptoir.

- Je suis aussi ton aînée, ta supérieure hiérarchique, ton modèle en terme de souplesse, ton ombre géante au crépuscule...

A mesure qu'elle parlait, son corps s'allongeait, prenait de la hauteur comme un chewing-gum qu'on étire.

- Je suis enfin l'espoir d'une génération de loques, la rescapée d'une époque où le désert n'appartenait qu'à nous, le dernier produit à la mode sur le marché de l'évolution...

- Elle s'appelle Tawako, fit la barman au jeune homme.

- SILENCE, MALHEUREUSE ! T'as pourri mon groove ! T'es virée.

Tawako était loin d'être la mieux placée pour virer qui que ce soit. Aussi, des videurs commençaient à se frayer un chemin à travers les curieux dans sa direction.
Dans un élan d'humilité, elle se dit qu'aucun d'entre eux ne serait assez agile pour l'attraper. Restait à voir si l'on pouvait en dire autant pour son crétin de cousin...

Alors elle bougea la tête en l'air, se mit à étudier l'ensemble de l'architecture du bar en une fraction de seconde. Pas par rêvasserie, mais pour constater l'ampleur du terrain de jeu qui s'offrait à elle à partir de cet instant.

- Bon, vermisseau. Soyons sérieux, un vrai Akuzu ne finit jamais à l'hosto, il se relève et rebondit à la charge. Le seul endroit où tu arriveras à m'envoyer, c'est... euh... BWAAAH, flemme de finir ma vanne. T'en vaux pas la peine t'façon, tocard.
A la mienne.

D'un seul geste du bras, elle attrapa une paire de chopes à moitié remplies sur le comptoir, ouvrit une large bouche pour les vider toutes les deux en une seconde, et les balança énergiquement dans la direction de son bien-aimé cousin dont elle se moquait du nom.

Après quoi elle bondit vers le plafond en hurlant un rire moqueur à travers toute la salle, s'accrochant aux poutres avec ses longs bras et rebondissant contre les murs comme une savonnette.

Cette fille était vraiment une sociopathe, rien à redire là-dessus. Mais il arrive parfois que l'humour - même involontaire - soit un puissant antidote à la colère. Et même si Shinji était prodigieusement agacé par sa cousine, il n'en restait pas moins qu'elle avait au moins le don de l'amuser. Le jeune homme réprima avec peine un sourire lorsqu'elle commença à déblatérer une série de titres aussi pompeux que ridicules. Et le tout en faisant serpenter sa tête autours de lui à la manière de l'un de ces reptiles qui aurait décidé de jouer avec sa proie...

- "Tu es surtout une emmerdeuse de première, ouais!" lâcha-t-il au milieu de ce flot de paroles. "Peut-être même la plus grande, tiens!"

Il la regarda se déformer comme un chewing-gum d'un œil appréciateur, comprenant assez rapidement qu'elle n'avait pas tout à fait tort lorsqu'elle disait être son modèle en terme de souplesse. Ho bien sûr il arrivait aussi se déformer mais pas avec tant de facilité ni à une telle vitesse. Pour un peu il aurait presque poussé un petit sifflement admiratif s'il n'avait pas encore à l'esprit le gueulée qu'elle lui avait poussé dans les oreilles. Il se montra néanmoins mon agressif dans sa gestuelle et retourna prendre place au comptoir tandis que l'autre poursuivait sa démonstration. Une chope de bière et quelques grandes gorgées plus tard, Shinji se rappela enfin du nom de l'autre Akuzu! Et pas grâce à l'aide providentielle de la barman, non non!

- "Tawako, hein? Je me disais bien que j'avais déjà vu cette tronche quelque part!"

Si l'on en croyait les récits de feu ses parents, Shinji était même plutôt proche de sa cousine alors qu'il n'était qu'un enfant. Mais les années s'écoulant et la distance entre lui et le clan augmentant, il n'avait dès lors plus eu de contacts avec elle. Mais il n'avait pas oublié ce regard espiègle qu'elle portait encore aujourd'hui, tout comme la légèreté qui semblait guider ses paroles et ses actes. Mais il ne fallait pas confondre engouement et stupidité! Tawako était une emmerdeuse, soit! Mais une emmerdeuse habile et maline, quoique un brin alcoolisée en l'occurrence...

- "À la bonne heure!" s'enthousiasma-t-il lorsque sa tarée de cousine ouvrit les hostilités. "Il n'y a rien de mieux qu'une bonne vieille bataille façon Akuzu!"

Le jeune homme leva les deux mains devant lui et élargit ses paumes de manière à bloquer les chopes utilisées par l'autre comme projectiles improvisés. L'une tomba au sol mais il réussit à attraper l'autre tant bien que mal avant de la retourner à l'envoyeuse après un demi-tour sur lui-même pour lui donner plus d'élan. Il ne s'attarda néanmoins pas sur le résultat de ce tir de riposte puisque un videur s'approchait déjà de lui pour... bah, le vider quoi! Habitué des bars - pour ne pas dire carrément pilier - le brun savait très bien qu'il ne servait à rien de parlementer. Et puis, il n'en avait pas envie de toute façon!

Il allongea donc son bras droit pour décocher un coup de poing en pleine face du nouvel-arrivant tout en usant de son bras libre pour vider la fin de sa chope de quelques longues gorgées. Vu la manie de sa cousine à casser les chopes, il avait tout intérêt à agir ainsi s'il ne voulait pas en retrouver le contenu sur le sol. Puis, un large sourire sur le visage, il se glissa derrière le comptoir avant de se servir de tout ce qui lui passait sous la main comme d'un projectile. Ce fut donc un véritable flot de chopes, cendriers, services de tables et autres ustensiles en tout genre qui traversèrent la pièce pour cueillir les videurs qui durent s'abriter derrière des tables tandis que les clients commençaient à s'agiter. Certains décidèrent même de se joindre à la bataille ce qui ne fut d'ailleurs pas pour déplaire au borgne qui se fendit d'un long rire enfantin.

- "Je t'ai pas oublié toi là-haut!" invectiva-t-il sa cousine avant de lui balancer la caisse enregistreuse. "Mais chaque chose en son temps! S'il y a bien une chose que je déteste plus que les affreuses dans ton genre, c'est encore les videurs!"

Il regarda un instant la jeune femme rebondir partout dans la salle, s'aidant des poutres comme appui. Une vrai furie! Une furie qui avait le don de réveiller la fibre clanique en lui puisqu'elle utilisait des mots comme "'une époque où le désert n'appartenait qu'à nous" ou encore "un vrai Akuzu ne finit jamais à l'hosto!". Flattant la fierté qu'il croyait perdue d'appartenir aux Akuzu, Shinji retrouva cette sensation d'appartenance qui lui avait si souvent fait défaut ces dernières années. Et rien que pour ça, il avait déjà nettement moins envie de lui taper dessus alors qu'ils pouvaient faire front communs contre ces salauds qui entendaient les éjecter du bar. Et tant pis si ça devait entraîner des sanctions de la part des autorités! Après tout les bagarres de bar, c'est le panard!

- "Taïauuuuuuuuuuuuuuuuut!!!"

Vociférant comme un imbécile heureux, le brun se rua hors de son abris improvisé pour charger le groupe de videurs et agripper le premier d'entre eux qui se porta à sa rencontre. Il enroula ses mains autours de ses poignets avant de tourner rapidement sur lui-même à la manière d'une toupie avant de relâcher l'homme à l'allure patibulaire en direction de Tawako. Tentative de coopération pour se débarrasser de ces empêcheurs de tourner en rond ou énième projectile à destination de sa cousine? Sans doute un peu des deux...