Suna, une nuit d'été.

Je vagabondais dans les rues mal famées de ce village qui n'était plus si caché que ça. Des faux papiers et des sourires m'avaient assurés l'entrée ici, et je foulais les pierres blanches dallant les allées. Habillée de blanc, d'un voile qui ne laissait entrevoir que de mon visage une paire d'yeux dorés, c'était avec une certaine insouciance que je foulais les lieux. C'était dangereux, oui. C'était mal fréquenté. Je pouvais percevoir dans les ombres des reflets métalliques. Des yeux avides. Parfois je me stoppais, pour me concentrer sur eux; Ils disparaissaient à chaque fois. Comme si ils n'y avaient jamais été. Lubie de ma paranoïa, ou début de la folie ? Je ne saurai le dire. Ça me laissait dans le trouble, en tout cas. Et la pénombre qui m'enveloppait en rien me rassurait.

Qu'est-ce que je faisais ici, déjà ? Le travail. Toujours le travail.

Ce travail qui me fait voyager jusqu'aux confins du monde. Je soupirais, de façon presque imperceptible. Avant qu'une ombre folle dévale à toute vitesse les murs, me faisant pousser une exclamation de surprise. Ma main s'était posée avec une vitesse démesurée sur la garde de la lame à ma ceinture, un objet de décoration dont je ne savais me servir et qui je l'espérais me rendrait plus menaçante. Mais menaçante, c'était toujours difficile de le paraître, quand on était aussi fluette que moi. Et voilà que je vois le responsable de mes frayeurs, un chat de gouttière à la mine maussade, me lançant un petit regard en biais de ses yeux verts. Avant de quitter. Il devait avoir plus peur de moi que moi j'avais peur de lui.

Sotte Monza'.

Je soupirais, de soulagement. Riais aux éclats. Tu stresses pour rien, chère amie.

- Bah qu'est-ce qu'on a là ...

Ou pas.

Je me retourne lentement, pour voir un mec débraillé à la barbe mal taillée. Avec plein de petits amis derrière lui. Et maintenant que je regarde autour de moi, voilà qu'il y en a d'autres qui le rejoignent. Qui me cernent. Oh. Je n'étais pas si folle que ça, après tout. Ça me rassure. Un peu trop. Après tout, je suis un peu tombée dans une embuscade.

- Une aimable étrangère qui ne souhaite causer aucun problème.

J'avais répondu sur un ton plaisant, ce qui avait entrainé les rires gras de l'assemblée.

- On les aime bien, les étrangers. Tellement. Tu veux voir à quel point ?

Oh que oui, je veux le voir.

- Ne serait-il pas mieux que nous retournions, vous et moi, aux affaires qui nous pressent ? Un accident est si vite ... arrivé, après tout ...

Je croisais les bras sous ma poitrine, patientant. Mais je n'avais réussi qu'à redoubler d'intensité les rires qui s'étaient à peine tus. J'aimais bien donner une chance aux gens. Malheureusement, ils sont trop ignorants pour la saisir.

Une petite dizaine. Neuf pour être exacte.

Et pourtant, il me suffit de couper la tête du monstre pour l'abattre. Abattre celui qui s'improvisait chef de bande, pour que leur animosité s'évapore, tourne en pure panique et que j'ai le plaisir de les voir se disperser aux quatre vents. Ainsi il fallait que ce soit. J'avais affiché un grand sourire, alors que j'avais fait un unique pas en direction du malheureux élu. Le seul qu'ils auraient dû voir, après tout, ils n'étaient pas shinobi. Mais trop tard. J'étais devancée, alors qu'il tombait au sol, transpercé d'une aiguille aux cervicales. Si soudaine. J'avais haussé un sourcil parfaitement droit. Me faire agressée dans les rues était attendu, entendu. J'aurai été déçue si ça n'avait pas eu lieu, en somme. Mais être sauvée par un justifier des bas-fonds ? Moins commun. A vrai dire, je pensais que c'était une légende urbaine.

Je levais le regard, pour croiser le regard du sauveur qui n'était guère demandé. Oh. Une jeune demoiselle. Au regard et visage qui me plaisent. Elle me rappelle moi, y'a longtemps. Longtemps à l'époque où j'errais dans les rues. J'avais appris avec le temps à prendre les choses avec plus de légèreté. Qu'importe, elle s'exprimait d'une voix aux relents agréables. Vicieux. Confirmant que l'homme ne mourrait pas, mais ne pourrait plus jamais se déplacer. Handicapé à vie, un sort cruel. Je n'étais plus dans ça. Enfin, je ne l'étais plus si ça ne m'apportait rien. Les cadavres attirent moins de problèmes de façon générale, c'est pour ça que je les préfère.

Quoi qu'il en soit, la douce brise du marasme parcoure l'assemblée de caïds. Jusqu'à ce qu'un décide de crier, pour faire genre que c'est un bonhomme. Dommage que ça me laisse insensible. Dommage que cette pollution sonore ne soit pas à mon goût. En une fraction de seconde, j'étais à coté de lui. Je m'étais saisi de son visage. Et l'avais fait explosé dans une déflagration de flammes.

Sur une voix plaisante, je m'étais contentée de dire.

- C'est le moment de fuir, maintenant.

Et je n'avais pas besoin de rajouter quoi que ce soit pour que le groupe se disperse à une vitesse ahurissante, certains en silence d'autres dans un vacarme assourdissant. Nous n'étions plus que nous deux, maintenant. Je me retournais pour lui jeter un nouveau regard, de mes prunelles or. Quelques secondes durant, je la contemplais. Avant de lui adresser un sourire en coin. Je me déplaçais d'une démarche aérienne vers le cadavre de l'handicapé, et je m'accroupissais à ses cotés. Sortant une dague de sous ma manche, à la garde élégante et à la lame ciselée, je la plantais une unique fois dans sa gorge, sous son regard effrayé. Il n'a eu le temps que de pousser un soupir étouffé, avant que la vie ne s'échappe de son enveloppe. Le forfait commis, j'allais du coté de ma victime, et accomplissait le même geste précis et mécanique. Avant de me redresser, sortir de sous mon ample manteau deux parchemins et de chuchoter.

- Ninpô - Le scellement.

Et dans un nuage de fumée, plus de cadavre au sol. Même pas une goutte de sang. C'est pas comme si ils n'avaient jamais été là. Comme si ils n'avaient jamais existé.

Satisfaite du ménage, je me retournais vers la petite demoiselle qui avait dû tout observer. Je lui adressais un sourire plaisant, alors que je l'invitais d'un geste de la main à me rejoindre. Elle et moi avions un fond semblable. Ou tout du moins, mon intuition me le disait. Quelque chose me disait que cette fortuite rencontre serait ... intéressante.

- N'ai pas peur, belle Sunajin. Je ne vais pas te ... manger.

Le tout dit sur un ton narquois, alors que je révélais ma dentition parfaitement blanche.

La demoiselle ne tarde pas à me rejoindre. D'un saut gracile, la voilà à mes cotés, main posée sur la tienne. Agréablement tiède. Elle me regarde, je la regarde. Ses yeux dorés, les miens. J'étais tentée de lui demander si elle avait peur. Après tout, elle avait vu à quel point mes manières étaient brutales et mes agissements froids. Mais ce serait inutile. Elle usait de méthodes semblables aux miennes, voir pire. Si je supposais juste. Mais quelque chose me disait que sa façon de penser était semblable à la mienne. Elle devait se douter que si je préférais le dialogue, c'est qu'il n'était pas encore question de la supprimer. Pas encore. Tout dépendra de son attitude, de ses réponses. De ses éventuelles exigences. Sa vie lui appartenait, et il ne dépendait que d'elle qu'elle la garde la nuit passée.

Elle me sourit. S'adresse à moi de façon malicieuse. Ce qui me fait sourire à mon tour, à nouveau.

- Fais attention, cela risquerait de me plaire, petite nymphe du désert.

Elle était un brin malsaine. Ce sont ces gens qui me plaisent le plus. Assez borderline pour être intéressants et à la fois assez censés pour travailler dans des buts communs.

Quoi qu'il en soit. Elle se présente. Clan Ketsueki ? Ooh, ces gens là. Pas très fréquentables. Je ferai mieux de la regarder avec dégoût et de lui dire tout le mal que je pense d'elle. Mais pour ça, il faudrait que j'en pense, du mal sur les gens comme elle. Et malheureusement, je n'avais pas grand intérêt à se faire. C'était des gens comme des autres, plus fascinants que le commun du mortel si vous me demandez.

Je faisais mine de grimacer, avant d'éclater de rire.

- Le grand clan Ketsueki ? Beurk. Beurk. Et rebeurk. Il parait que vous utilisez le sang pour vous battre. Juste dégoutant.

Je lui adressais un sourire chafouin, provoquant.

- Mais je veux bien discuter avec toi un peu. On me connait sous le nom de Monza', mais tu peux m'appeler comme tu le souhaites.

Grand sourire. A peine moqueur.

- Et ce que je fais là ? Ooh si peu. Beaucoup. Le travail. Tu sais ce que c'est, le travail, pas vrai ?

Petit clin d'oeil, malicieux.

- Une aussi mignonne demoiselle n'en chercherait pas, par hasard, du travail ?

Je dardais mes prunelles dorées sur les siennes.

La petite Anko ne semblait pas avoir le genre d'humour que j'avais. Quand je lui ai dit en me moquant que son clan me dégoutait, elle semblait effondrée. Oh ? Pauvre petit chaton ... Je t'ai blessée ? Aurai-je été ... désagréable ? J'en suis si navrée. Elle pose alors sa tête contre mon épaule, comme anéantie. Elle saignait de la lèvre, alors qu'elle me demandait de quel type de travail je parlais. Le poisson a mordu à l'hameçon. Maintenant, tentons de faire passer cela le plus en douceur possible. Mais le temps ne pressait pas. J'avais tout mon temps. Et cette adolescente paumée en mal de reconnaissance ? Elle valait tout le temps dont je pouvais profiter.

Il me la faut. Je la veux. Avec obsession.

Je me penchais vers elle, alors que je sortais un mouchoir de ma poche. Que j'épongeais le sang de sa lèvre, avec tendresse. Elle cicatriserait vite, je n'en inquiétais pas. Le geste en soit était futile, si vous me posez la question. Mais vous savez. Les réussites se jouent à des détails comme ça. Je lui adressais un sourire agréable, une fois le sang nettoyée, pour lui dire sur un ton agréable.

- Oh, si peu, si peu ... Quelque chose dans tes cordes, charmante Anko. Mais nous avons le temps. Je l'ai tout de moins. Pourquoi ne pas nous assoir quelque part, en terrasse ? Nous pourrions discuter. Parler de rien. De tout. De qui tu es. De qui je suis. De qui on est. Tu ne veux pas ?

J'avais entrelacé mes doigts aux siens, alors que je la regardais avec insistance.

- Naturellement, je te laisse choisir les lieux. Ce serait mal vu qu'une étrangère comme moi connaisse son chemin, tu sais ce que c'est ...

J'émettais un petit gloussement, alors que malgré tout, je la tirais par la main et la guidais droit devant. Pour aller où ? Je ne sais pas. Ca n'a pas tant d'importance. Chère Anko, prend les devants, ouvre la voie. Prouve-moi que tu es maîtresse de ton destin, et que j'ai raison de t'accorder mon attention, mon temps, et peut-être plus tard mes faveurs.

Car si ce n'est pas le cas, je risquerai d'être très, très en colère. Et tu ne veux pas voir le dragon quand il se réveille, pas vrai ..?

Comme je m'en doutais, la demoiselle prenait les devants. Elle m'attirait je ne sais où, mais ça ne me dérangeait pas. Après tout, je n'avais pas peur. J'avais réussi à la captiver, à faire en sorte que l'histoire que nous écrivions d'une plume partagée perdure. C'est pour ça que quand elle me dit qu'elle ne devrait pas faire ce qu'elle fait, qu'elle devrait plutôt me confier aux autorités compétentes, je m'étais contentée de glousser en lui répondant sur un ton taquin.

- Nous sommes au-delà de ça, toi et moi, n'est-ce pas ?

Mais nous voilà parcourant des rues que je ne connaissais pas, sous son pas assuré. Où allions nous ? Le mystère était entier. Si ça se trouve, elle m'amenait à ma perte. Elle aurait pu. J'aurai pu aussi me défendre, de la même façon. Mais je ne sais pas. J'étais sûre qu'elle voulait entendre ce que j'avais à lui dire. C'est pour ça qu'en silence, je continuais de la suivre, parcourant plus et plus de rues. Avant que l'on s'arrête à une porte. Ca ne ressemblait pas du tout à un bar en terrasse. Peut-être qu'il y avait de l'activité, à l'intérieur ? Mais voilà qu'elle me disait que c'était chez elle.

Je la regardais en haussant un parfait sourcil. Chez elle ? Hmm ... Je ne savais pas pourquoi elle faisait ça. J'étais un peu troublée. Parce que ce n'était pas le genre d'endroits où moi je me serai amenée, confrontée au même genre de situation. Plus sur ? Ca ne l'était pas. Pas pour elle, en tout cas. Plus confortable, ça restait à voir. Je m'étais contentée de hausser les épaules, et je m'engouffrais à l'intérieur. Un intérieur qui se révélait être en parfait désordre. Ce qui ne me dérangeait pas plus que ça. Le désordre, c'était une chose que j'adorais. Elle semble gênée, s'excuse, m'invite à m'assoir. Je ne me suis pas gênée pour m'assoir sur le premier truc qui pourrait accueilir mon illustre fessier, et je ramassais un sous-vêtement rose en le levant en l'air.

- Très charmant ... Je prendrai un quelconque alcool que tu as à proposer, ma chère demoiselle.

Je gloussais, alors que je reposais le vêtement là où je l'avais trouvé. Elle me demandait de quoi je voulais lui parler, ensuite. Elle semblait si timide, si ... fragile. J'avais souri de façon tendre. Pourtant, je lui avais répondu quelque chose dont elle ne pouvait s'attendre.

- N'empêche, je ne sais pas quoi penser de toi ... Je te propose une entrevue dans un endroit sûr, où il y aurait bien des gens qui auraient pu se porter à ton secours si jamais notre discussion dérapait, et à la place, tu m'invites chez toi, où seuls toi et moi sommes ...

Je la fixais longuement de mes prunelles dorées.

- Je ne sais pas si tu es courageuse, ou complétement inconsciente ... Mais quoi qu'il en soit, ça me plait. Un peu.

Dit sur le ton qui voulait dire *Beaucoup*.

- Ce dont je voulais te parler ? Ca peut attendre. Et si tu me parlais plutôt de toi, Anko ? De ce que tu fais, de ton village, de ta famille ... J'éprouve beaucoup de curiosité à ton égard, tu sais ? Ce n'est pas tous les jours qu'on a l'honneur de parler à un vénérable membre du clan Ketsueki.

Je m'étais emparée de ses mains, les avais prises entre les miennes, avec douceur mais pourtant avec fermeté. Je lui adressais un petit sourire en coin, avant de continuer.

- Après, si tu préfères que ce soit moi qui fasse des confidences en premier, ça ne me dérange pas ... Et je comprendrai, tu sais. C'est moi l'étrangère après tout, n'est-ce pas ..?

Je lui adressais un sourire malicieux, mes prunelles dardées sur les siennes.

Je la sentais refroidie suite à mon commentaire. Elle s'était renfrognée. C'était l'attitude à avoir. Après tout, il faut qu'elle se souvienne que je suis dangereuse. Pour son bien, pas le mien. Si je faisais la chose au mieux, je continuerai à garder mon agréable minois et mon plaisant paraître. C'est plus pratique. Pour elle et pour moi. Elle me servait l'alcool en silence, et elle vida le sien d'un coup. Besoin de courage ? C'est mignon. Mais tout l'alcool que tu boiras ne te sera d'aucune aide pour me confronter. Je trempais les lèvres dans le sake, en buvant une seule gorgée. Elle me dit qu'elle veut en savoir plus sur moi, qu'elle n'aimait pas beaucoup parler de sa personne. Ça me convenait.

J'aimais bien m'entendre parler.

- Moi ? Oooh. Une longue histoire ... Qui pourtant se résumerait à une chose : La recherche de la liberté.

Je lui souriais, mains posées sur les siennes, iris dardés sur les siens.

- Je viens d'Ame, mes parents étaient de petits bourgeois. Ils m'ont élevé afin que je devienne une parfaite et charmante demoiselle. Et que j'épouse un nobliau local. Tu sais ce que c'est, la bourgeoisie et ses complexes ... Riches, mais toujours méprisés. Et ils voulaient une meilleure vie pour moi. Et mes enfants. Malheureusement, ce n'était pas dans mes plans.

Je faisais une moue coupable, avant de sourire malicieusement.

- Je me suis enfuie à mes dix-sept, dix-huit ans ... Et j'ai vécu de travaux et d'autres. Pas ceux auxquels tu pourrais imaginer, j'ai un reste de décence.

Gloussement.

- Tu sais ... J'ai été beaucoup de choses. Une étudiante. Une émissaire. Une voleuse. Un soldat dans les vieilles guerres. Une servante de grandes puissances, actrice de grands évènements. Et maintenant ? Maintenant ..? Il faut croire que je suis une femme qui règle les comptes des autres.

Je lui adressais un nouveau sourire, alors que je pressais ses mains des miennes. Un brin inquiétante.

Je m'étais contentée de faire une moue contrite. Mercenaire ? C'était bien réducteur. J'étais bien plus qu'une simple mercenaire. J'étais à la fois espionne, assassin, éclaireuse, guerrière, et bien d'autres choses que je ne prends pas la peine de citer car je pourrai y passer des journées entières ! Malgré tout, je me contentais de hausser les épaules, et répliquais d'une voix un peu boudeuse.

- Je préfère ma définition.

Je gloussais, doucement.

- Mais en quoi est-ce dégradant ? Pouvoir faire ce qu'on veut, pour qui l'on veut, n'est-ce pas là la liberté ? Alors que dans un village tel que le tien, tu dois servir des supérieurs incompétents et faire des travaux qui ne mettent pas en valeur tes qualités ?

Mensonge à peine éhontée. Il m'arrivait plus souvent que je ne le voudrai de travailler pour des incompétents et de faire des travaux qui ne mettaient en rien en valeur mes immenses qualités.

- Tu as la liberté d'aller où tu veux. De découvrir les plus beaux paysages. De faire des rencontres uniques. Et d'accomplir des grandes choses. Tu as l'impression de pouvoir tout ce genre de choses, ici ..?

Je la regardais avec beaucoup de sérieux.

- Anko, je ne te connais pas, mais je sens que tu as de grandes qualités. Alors, pourquoi perds-tu ton temps avec des gens qui ne t'apprécient pas ..?

Je l'avais attirée contre moi, l'enlaçant de façon tendre.

- Est-ce à cause de cette personne dont tu as parlée ? Est-ce à cause d'elle que tu supportes tout ces tourments ?

D'un main, j'écartais une mèche de cheveux de son front.

- Une aussi belle et brillante demoiselle, au potentiel gâché de cette manière à cause du passé, ça me désole ...

Dis dans un chuchotement presqu'imperceptible, glissé au creux de son oreille.

Je ne m'attendais pas à ce qu'elle craque aussi vite.

Et je devais avouer que ça me dérangeait un peu. Elle était un peu en train de mouiller mes vêtements, avec ses sanglots déchirés. Mais c'était un moindre mal. J'avais touché là où ça faisait mal. J'avais fendu le rempart, et m'étais engouffrée au sein de l'enceinte. Elle ne pouvait pas me voir, son visage posé contre mon cou, mais j'avais passé longuement ma langue entre mes lèvres, un sourire satisfait. Elle avait craqué. Mais ce n'était pas assez. Elle n'était pas encore au fond du trou. Ou tout du moins, je ne pensais pas qu'elle le soit encore ...

Elle avait essayé de s'excuser, je m'étais contentée de poser un unique pouce sur ses lèvres pour l'intimer au silence.

- Tu n'as besoin de te justifier, je connais cette douleur, moi aussi ...

Je me redressais, la gardant dans mes bras, pour m'assoir à coté d'elle, pour que la position soit plus confortable pour elle et moi. L'humidité me dérangeait, mais je faisais comme si ce n'était pas le cas. Je caressais doucement sa chevelure courte, alors que je continuais.

- Tu n'es plus toute seule. Je suis là. Tu peux me faire confiance. On est semblables, toi et moi, tu le sais ? Quand je te regarde, je sens tous ces points communs que l'on partage. Ce passé compliqué, cette souffrance enfouie ... Tu peux m'en parler. Dis-moi tout. Confie-toi à moi.

Je la serrais un peu plus contre moi, alors que jubilais de l'intérieur.

- Regarde-moi. Mes yeux semblent-ils ceux d'une menteuse ? Celles d'une traîtresse ?

Je posais des prunelles dorées sur les siennes, solennelles. Puis mon bras qui l'enlaçait se retirait, je posais ma main sur sa joue pour la caresser avec tendresse.

- N'ai pas peur ... A partir de ce soir, c'est toi et moi. Juste nous deux. Et que le monde prenne garde, car si il tente de rompre le lien qui est le notre ... Le sang ne sera pas suffisant pour apaiser ma colère.

Je lui souriais, agréablement. Mais ma voix s'était faite menaçante, semblable à la lame d'un couteau.

Appartiens moi, Anko.

Elle ne voulait pas parler de son passé. C'était son choix, pas le mien. Mais un choix de faible.

Mon passé était sûrement aussi tourmenté que le tien, petite demoiselle, mais moi il ne m'effraie plus. Je m'en sers comme une égide, le garde douloureux et à fleur de peau. Pour plus jamais y retomber. Les échecs et frustrations restent latentes, car ainsi je fais en sorte de ne plus jamais les éprouver. Son passé, je pouvais l'imaginer. Maltraitée, abandonnée par sa famille. Et le traumatisme ? La mort de cette personne qu'elle semble tant aimer. Une grande soeur, une amie, un senseï ? Qu'importe. Cela a dû sûrement se faire de façon sordide, devant ses yeux. Je souriais, continuant le câlin.

Elle se serrait contre moi un peu plus. Me suppliait de rester à ses cotés. Qu'elle était mienne. Douce mélodie à mes oreilles. C'est pour ça que je lui chuchote.

- Mienne ? Vraiment ? Comment puis-je te croire ?

J'attends des preuves.

- Tu es si mignonne, petite Anko ... Mais, je veux savoir ... M'aimes-tu ..?

Je laissais les mots flotter dans l'air, avant de continuer dans ce même murmure.

- Me désires-tu ..?

Je humais la fragrance de sable de sa chevelure, alors que mes ongles se plantaient dans son dos.

- Exprime tes émotions, avoue l'interdit ... Il n'y a que toi et moi, ici ...

Je frottais ma joue à la sienne, me collant un peu plus à elle.

- Nulle peur, nul jugement ...

J'approchais mes lèvres des siennes, lui soufflant dessus.

- Dis-le, et je resterai avec toi pour toujours ...

Petite déviante.

C'était presque trop facile.

J'étais un peu déçue, qu'elle s'offre à moi aussi vite. Pas que j'aurai aimé qu'elle résiste beaucoup, je n'aime pas faire d'efforts. Mais elle aurait pu au moins faire semblant d'y réfléchir. Je ne sais pas. Ce n'était plus si satisfaisant, pour le coup. Elle effleure mes lèvres une première fois, alors qu'elle tente vainement de se raisonner. Je ne t'aime pas, en effet. Mais à aucun moment j'ai dit que c'était le cas. Et tu ne m'aimes pas plus que moi je t'aime. Tu es juste une gamine paumée, en manque d'affection, qui se jette dans les bras de la première personne à être compatissante. J'éprouvais un peu de dégoût, en fait.

Mais je ne faisais rien paraître, je souriais alors que nos lèvres se rencontraient à nouveau, qu'elle me disait qu'elle m'aimait.

- J'espère que tu n'es pas une menteuse, petite Anko ...

Je déposais un petit bisou sur son nez, alors que je lui adressais un sourire espiège.

- Cette nuit est notre, profitons en autant que possible ...

Enfin, moi je comptais en profiter ailleurs qu'ici. Et si tu es une sage fille, toi tu en profiteras sous tes draps, dans un sommeil sans songes. Je prenais la bouteille de saké, et en buvais une longue gorgée. Qui a eu du mal à passer dans ma gorge. C'était limite si je ne lui crachais pas dessus tout le liquide. Et, je ne sais pas. Intuition féminine, mais quelque chose me disait que ça ne serait pas vraiment apprécié. Je la lui tendais, attendant qu'elle fasse de même que moi. Et ainsi de suite, alors que je caressais son dos, déposer des baisers sur son cou, lui chuchotais des paroles tendres.

Jusqu'à-ce que tu t'effondres. Ou que je m'effondre. Ma vue se troublait plus et plus, mon sens de l'orientation se perdait, la pièce tournait autour de moi. Mais j'avais de l'expérience. J'avais souvent fait des soirées arrosées. J'avais une certaine endurance, hein. Puis j'avais quelque chose d'autre ... Mais je ne pouvais pas l'utiliser. Pas maintenant. J'avais ma tête posée sur l'épaule de la petite Ketsueki, alors que le sommeil me prenait.

Dans quel état était-elle ? Aucune idée. Mais quoi qu'il en soit, je me redressais avec de grandes difficultés, m'appuyant sur la petite demoiselle. Et je disais sur une voix déroutée.

- Toilettes ..?

Elle s'était effondrée contre moi, enfin.

J'aurai adoré rire, me sentir soulagée. Mais là tout de suite, j'avais juste envie de vomir. De rejoindre la petite demoiselle dans son sommeil sans rêve. Son poids et mon sens de l'équilibre précaire m'ont mis à genoux. Anko était dans mes bras, alors que je la regardais avec des yeux vitreux. Était-elle confortable ? M'endormir contre elle serait-il agréable ? Probablement pas. Elle n'avait pas beaucoup de chair sur les os, et par expérience, je savais que m'endormir contre elle me vaudrait juste des courbatures le lendemain. Mais c'était si tentant. Je m'étais jamais endormie contre une fille. Enfin, presque jamais. Juste une ou deux fois. Mais c'était pour les affaires. Il n'y avait pas d'amour, là dedans.

Cela dit, il n'y en avait pas plus ici. Et c'était toujours pour les affaires.

Je me fais violence. Réussis à m'assoir tant bien que mal sur un sol qui ne cesse de bouger. Soulève mon haut et appose mes deux mains sur mon ventre. Le sceau se grave, je prends une grande inspiration. Un immonde goût de bile envahit mon palais. Mais les choses étaient plus et plus claires. La pièce s'arrêtait de tourner lentement, alors que j'arrivais à me redresser avec facilité. La pièce était toujours en désordre, la demoiselle Ketsueki sommeillait doucement.

Je souriais. Avant de grimacer. Goût ô combien désagréable. Mais ça en valait la peine.

Maintenant ... Huhuhu. Préparatifs avant de partir, hmm hmm ...

Assurer mes arrières. Je passais mes mains sous les vêtements de la petite Anko, et joignais mes doigts sur son dos nu. Un sceau se dessinait, couvrant une partie non négligeable de celui-ci. Les précautions, toujours. Ensuite, je prenais la petite demoiselle dans mes bras et la couchais sur son lit. Après m'être débarrassé de toutes les affaires traînant sur celui-ci. Je vous jure, quelle souillon ... Ça m'agaçait. Du temps perdu à cause de l’incompétence d'une tierce personne. Et finalement, j'écrivais une petite lettre. Qu'elle trouverait à son réveil. Qui serait sûrement suffisante pour la faire patienter, jusqu'à ma prochaine visite.

Me voilà désormais au seuil de la porte, jetant un dernier regard à la belle aux bois dormants.

Le tout avec un magnifique sourire, une lueur cupide dans le regard.

Lettre à Anko a écrit:

Ma belle Anko,

J'espère que tu as bien dormi. Tu étais si mignonne que je n'ai pas osé te réveiller hihi.

Ne m'en veux pas d'être partie comme une voleuse, mais, tu te rappelles ? Je t'ai dit que j'étais venue pour le travail. Et le travail a fait que je me suis attirée quelques ennuis, et voilà ... Je ne pense pas que ce serait bon pour toi si on nous voyait ensemble, dans les jours et semaines à venir. Mais crois-moi, j'aurai tant aimé rester à tes cotés un peu plus, profiter de ta timidité hihi.

Je reviendrai bientôt, sois en sûre. Je t'aime, je t'aime, je t'aime. ♥

Tendrement tienne, Monza'

PS : Tu remarqueras sûrement assez vite un tatouage sur ton dos. C'est un sceau qui m'appartient, il me permet de savoir si tu es en danger. Tu peux être sûre que je remuerai ciel et terre pour te rejoindre si jamais quelqu'un ose lever la main sur toi.

PS 2 : Je t'ai laissé le petit déjeuner de prêt. J'espère que tu aimes la confiture à la fraise hihi.