Aujourd'hui, comme souvent, je glandouille. Je n'ai rien à faire et je n'ai rien envie de faire. Ils sont rares les jours où je peux rester assis des heures durant en ne pensant à rien mais croyez-moi lorsqu'ils sont là, j'en profite à cent pour cent. En ce moment même, je suis tranquillement assis dans le froid, au pied de mon arbre. J'insiste sur le pronom personnel "mon". Car oui, ce végétal est mien. Il s'agit de ma propriété au même titre que ma maison ou mon sabre. J'y tiens énormément ! C'est sur ce vieux chêne que j'ai passé des jours entiers il fut un temps. C'est sur cet arbre que j'ai glandouillé au lieu de travailler. C'est sur ce même végétal que j'ai rencontré des personnalités importantes - et d'autres dont on se fout complètement. Bref, cet être vivant forme une partie de mon histoire et c'est pour cela que j'ai inscris mon nom et prénom sur son écorce. Comme tout être censé, je n'aime pas qu'on touche à mon histoire, à une partie de mon être. De fait, je n'aime pas qu'on touche à mon bien. Si je n'aime pas qu'on touche à mon bien, cela implique que je n'aime pas ceux qui touchent à mon bien. Vous avez compris la logique ? Non ? Ce n'est pas grave. En gros pour faire simple, touche à mon arbre et je te bute. Je suppose que dorénavant cela vous parle plus ?

A ce stade de la narration, vous devez certainement vous demander pourquoi je vous raconte tout cela ? Et bien c'est car en ce jour funeste quelqu'un a essayé d'attenter à la vie de mon végétal préféré. Cette personne, c'est une petite fille horrible manipulant la glace, sûrement une Samui donc. La prenant sur le fait, je la regarde, elle me regarde, nous nous regardons. Cette vermine s'exclame et me demande ce que je lui veux. Se fout-elle de moi ? Elle n'a pas encore compris ce que je lui voulais ? Mais dis donc, il y en a dans ce bas monde qui n'ont pas la lumière à tous les étages ! Dans tous les cas, c'est sûr, ce jour restera celui de l’infamie.

« Je t'explique ; t'es sur mon territoire. Et enlève ta glace de merde de mon arbre. Tu vois, y'a écrit Kitase Shinichi. C'est mon prénom. Je suis Kitase Shinichi. Kitase Shinichi c'est moi. Moi. Ki-Ta-Se Shi-Ni-Shi. Toi comprendre ce que moi dire ? Tu touches à ma propriété là. Tu sais que je pourrais te coller un procès et gagner plein d'argent car ton délit, on appelle ça un meurtre avec préméditation ! Mieux, je peux réclamer justice par moi même et te botter l'arrière train alors je t'ordonne de réparer ta connerie et de remettre ce pauvre végétal dans son état initial. Allez plus vite et que ça saute ! »

Si elle n'y arrive pas, je me vois déjà lui infliger une sévère correction. Non mais les jeunes de nos jours. Ils touchent à tout, y compris aux choses qui ne leur appartiennent pas. De mon temps, on faisait preuve de bien plus de respect et d'égard envers les autres. Respect ... Un mot dont les bambins ne connaissent plus le sens désormais. Quelle triste jeunesse. Il n'y a pas à dire, cette génération est foutue. Totalement foutue vous dis-je. En d'autres termes pour nos amis billingues, es una generacion jodida.

Elle se fout de moi ? La gamine veut que je paie son bouquin en échange de la guérison de mon arbre ? Mais ma foi, c'est du chantage ! C'est mal ! Très mal même ! Moi, le noble lutin, je suis contrains de me plier aux exigences d'une gamine de … Euh … Elle a quel âge elle ? À vue de nez, je dirai quinze ans grand maximum. Cette face de cake va payer. Pour l'heure, je suis bien obligé de céder à ses caprices – car je vous rappelle que la vie de mon précieux végétal en dépend – néanmoins croyez-moi, je trouverai un moyen de me venger. On ne se fout pas impunément de ma sainte personne. Ensemble, nous allons à la première librairie du coin. Là-bas, les prix volent haut, très haut, beaucoup trop haut. Je commence à paniquer en voyant ces étiquettes. Je ne sais pas pourquoi, je sens que je vais devoir raquer. Son foutu bouquin n'aurait pas pu être un simple livre de contes pour enfant, non ? À ce prix là, j'espère pour elle que l'histoire narrée lui plaît parce que bon … Mettre autant de billets dans cette affaire est pour moi une hérésie.

Fort heureusement, le livre n'est pas dans la boutique. Ouf. Soulagé, je souffle un bon coup et repars pour une autre librairie qui, je l'espère, adopte des tarifs plus modestes. Grand mal m'en fasse, il n'en est rien malheureusement. Le second lieu que nous visitions est aberrant. Les livres coûtent cher, très cher, trop cher, bien plus cher qu'auparavant. Je me gratte la tête en regardant cette folle de Samui chercher dans les rayons. Elle prend un malin plaisir à me narguer celle-là, ça se voit. Tu vas voir ma vieille. Rira bien qui rira le dernier comme dit le dicton. Je ne sais pas encore comment mais je vais bien trouver un moyen de te rendre la pareille au centuple. Le temps passe et la Samui trouve enfin ce qu'elle cherche. Elle me fait payer sa merde, le sourire aux lèvres. Personnellement je bronche un peu mais ce n'est pas grave. Je viens d'avoir une idée brillante. Une fois la monnaie donnée au commerçant, je garde le bouquin en main et me tourne vers Anabi

« J'ai acheté ton livre. Il ne me sert à rien alors dégèle mon arbre et je te le passerai. »

Dans le pire des cas, si elle refuse j'ai la garantie et je peux le rendre. À moins qu'ils ne rendent pas les livres dans ce genre d'établissement ? … M'ouai. Dans tous les cas, je m'en fiche. S'ils ne les rendent pas, ils feront une exception pour moi. En effet, il me suffira de gueuler un coup et de faire peur au libraire que ce dernier accède à mes moindres désirs. D'ailleurs quand j'y pense, j'aurais peut-être dû lui demander une réduction sur sa camelotte au bougre. Mieux, j'aurais dû exiger qu'il me file ce livre gratos. Qu'est-ce que je peux être idiot parfois. Je suis haut gradé, j'ai un titre prestigieux et je ne m'en sers même pas pour avoir quelques avantages. Honte sur moi. Bref. Nous retournons sur le terrain d'entraînement numéro onze. Là-bas la gamine doit dégeler mon arbre si cette dernière veut son livre. D'ailleurs histoire que nous soyons bien clair sur les termes du contrat :

« A toi de jouer. Et tiens le ticket d'achat. Ainsi je te prouve que je ne vais pas rendre le livre après que tu aies dégeler mon arbre. »

Je ne sais pas pourquoi, je sens Anabi suspicieuse. C'est pourquoi je préfère prendre les devants. Dès qu'elle aura dégeler mon arbre, je lui passerai son précieux livre – qui m'a d'ailleurs coûté une fortune. Il faut encore que je cherche comment lui faire payer. Hum. Je peux ne pas lui rendre le bouquin quand on y pense et essayer de me faire rembourser sans ticket. C'est une possibilité, oui. Finalement et en réfléchissant bien, je ne sais pas si je vais lui rendre son truc moche à cent mille ryos. J'y songe encore.