Infiltration.
Un domaine dans lequel je me voulais prometteuse, un domaine que j’aimais particulièrement. J’avais pris un peu plus de risques en allant choisir une mission de rang C, car si je devais passer ma vie à déblayer la neige aux alentours du village, je finirais par devenir folle. Cette fois-ci, je n’avais pas à me plaindre de l’ordre de mission, une mission qui semblait délicate malgré tout. Une petite fille avait été enlevée, elle appartenait à une famille assez riche dans la région. Une petite pensée me vint à l’esprit, je me disais qu’il était beaucoup simple et sécuritaire de vivre pauvre que riche, personne ne peut envier ce que l’on possède pas. Cependant, la rançon restait également de taille. Un million de ryos, de quoi pouvoir me payer dix ou quinze ans de loyer. La folie des grandeurs ne leur faisait pas tourner la tête apparemment. Cependant, si ce genre de choses n’arrivait pas souvent, c’était pour une bonne raison. Qui dit famille riche, dit argent. En soi, kidnapper un membre de cette famille ou voler leurs biens, cela revenait au même. Cette catégorie de famille possède assez d’argent et d’influence pour payer des shinobis afin de traquer ces criminels. Si ces brigands n’étaient pas des ninjas, alors oui, ils prenaient un risque énorme qui pouvait leur coûter la vie.

Avec cet esprit libre et tranquille, je me rendis à l’endroit où celui qui avait contacté le Village Caché de la Brume avait donné rendez-vous. Une petite bâtisse suffisamment grande pour accueillir quelques personnes, un lieu discret pour un seigneur de grande envergure. La peur avait dû envahir son cœur, l’idée de perdre sa progéniture devait être insupportable. Si j’avais un enfant, aurais-je agi de la sorte ? Je pensais malgré tout que ma réaction aurait été bien pire, en mes qualités de kunoichi je n’y serai pas allée de main morte. C’était donc ce que je devais faire dans ce cas-ci, comme s’il s’agissait de ma propre fille. Etant la première sur les lieux, je m’installai sur une des chaises disposées dans la pièce. La table semblait avoir vécu les Grandes Guerres Shinobi, tailladée de toute part, tenant debout grâce à ses pattes bien construites. Un homme entra à son tour dans la salle, le kimono bleu orné de fleurs blanches ainsi que la qualité visuelle du tissu me confirmaient l’identité de cette personne, le père de la petite fille. La mine fatiguée, le teint livide, il n’allait pas très bien à première vue. Ses nuits avaient été courtes, cela ne faisait aucun doute. Quelques minutes plus tard, ce fut le tour d’un autre homme, ou plutôt jeune homme cette fois-ci. A peu près mon âge, les cheveux d’un blond pâli par le brouillard, le détail qui me marqua le plus fut sa grande taille. De quoi avais-je l’air maintenant ? Bref, j’avais pratiquement oublié que je n’étais pas seule sur le coup, les missions en dehors du village requérant minimum deux personnes. Il fallait que je m’y fasse, même si cela s’annonçait compliqué. J’aurai pu laisser mon partenaire du jour entamer la discussion, mais à mon avis le noble savait d’ores et déjà ce que l’on attendait de lui. D’un simple geste de la main, je lui fis mine de commencer.

-"B-Bien. Comme vous le savez, ma fille a été enlevée par un groupe de brigands. D’après le garde du corps de ma fille, ils étaient environ une vingtaine. Ils ont pris ma fille et quelques-unes de nos richesses, mais le plus important reste ma fille. S’il vous plait ! Sauvez ma fille ! Je vous en supplie…"

Au bord des larmes, sa voix tremblait quand il nous expliqua ce qui s’était passé. Un pincement au cœur vint ajouter de la compassion à ma réflexion, on n’avait pas droit à l’erreur. Mes yeux tournés vers mon coéquipier, je sortis mon petit carnet ainsi que mon crayon, afin de pouvoir communiquer avec lui en toute simplicité. Je me devais de lui demander ce dont il était capable.






"Je m’appelle Miyuki.

As-tu déjà exécuté une mission d’infiltration en forêt ?"


L’expérience primait sur la théorie, surtout dans ce cas-ci. Si le garde du corps de la petite fille était un shinobi, cela expliquerait pourquoi cette mission restait de rang C, malgré le fait que le commanditaire pouvait payer plus pour monter le rang de la mission. Ce garde savait donc que malgré le nombre de ces bandits, ils n’étaient pas des shinobis. Il fallait donc analyser la situation sur place.






"Que penses-tu de cette mission ?"


Avoir une bonne image de la situation évitait des erreurs et des hésitations, mettre les choses au clair restait un moyen fort simple et efficace d’évaluer le point de vue de chacun. Cette mission allait être un succès, il le fallait.

Louche, pour qu’elle raison il à recruter se garde et pourquoi il n’est pas ici ? Il semble cacher des choses.

Nous avons deux jours je ne suis pas doué sur les comptabilités, et donc si tu pouvais te charger de fouiner dans ses activité. Je n’ai pas envie de jouer hasardeusement la vie de cette petite.

Kyu Shord.
Un nom peu commun dans cette région, un nom qui ne trouvait aucune signification dans les innombrables kanji que je connaissais. Il n’était sans doute pas de ce pays, toutes les personnes que j’avais rencontrées jusque-là possédaient une étymologie commune à notre langue. Un fait étrange qui retint mon esprit plus d’une seconde quand même. Bref, là n’était pas la question. La manière. Oui, la manière dont il me fit passer cette information me laissa perplexe. D’un geste tout à fait normal, il empoigna mon carnet et prit la feuille sur laquelle j’écrivais pour y écrire à son tour. Totalement perdue, je ne comprenais pas pourquoi il agissait de la sorte, mais en lisant la suite de ses écrits, tout devint clair. Ce carnet, il croyait que je tentais de dissimuler notre conversation à notre commanditaire, que je tentais de communiquer dans la plus grande discrétion. Ses yeux le montraient, toute sa conviction reposait sur cette croyance. Je ne pus m’empêcher de sourire, c’était la première fois que quelqu’un agisse ainsi face à mon handicap. Je me devais de le lui indiquer, pour nos interactions futures.

Avant de pouvoir reprendre mon carnet, il continua d’écrire d’autres mots. Il se demandait pourquoi il avait engagé un garde du corps, et pourquoi celui-ci ne se trouvait pas ici, avec nous. Ce shinobi, se disant lui-même bon chasseur, n’avait encore pensé aux raisons de cette situation. Devant nous se trouvait un homme riche du Pays de l’Eau. Un seigneur parmi tant d’autres, sans doute un peu plus prudent que les autres. S’inquiétant pour sa propre famille, surtout pour son enfant, il se décida d’engager un mercenaire, ninja ou pas, pour la protéger d’un éventuel malheur. Malheureusement, cette tragédie arriva, et, selon mes suppositions, un seul garde contre une troupe de brigands, cela faisait limite. De ce fait, étant donné que ces bandits demandaient une rançon, cela signifiait que ce garde n’avait pas été suffisant pour les arrêter, qui sait dans quel état il se trouvait maintenant. Ceci expliquerait la raison pour laquelle il ne pouvait assister à cette entrevue avec son patron. Cette réflexion aux allures de vérité ne restait qu’une réflexion, ce qui m’empêcha d’arrêter les propos assez durs de mon partenaire envers notre client désespéré. Mon mutisme ne pouvant faire office de barrière, il put terminer sa phrase sans aucun souci. Le noble, quant à lui, devint un peu livide, ne comprenant pas trop ce qui se passait en ce moment. A la fin de son discours, mon coéquipier me remit mon carnet, avec comme requête écrite dessus une inspection des activités de cet homme qui était venu nous demander de l’aide. Non, je ne devais pas m’emporter, je ne devais pas. Trop tard. Mon regard fixant Shord avec insistance, je me mis à écrire de nouveau sur mon carnet.






"Bon, pour commencer, si j’écris au lieu de parler, c’est simplement à cause du fait que je sois muette."


J’arrachais une autre feuille.






"Concernant notre client, il est seigneur. Un seigneur n’a pas de travail, il nait riche, garde des terres et emploie des gens à son service. Le garde du corps doit sans être doute un mercenaire attiré par une bonne paie. A l’heure qu’il est, vu que la petite a été enlevée, je doute qu’il soit en état de marcher."


Je repris légèrement mon calme, mon impulsivité ne faisait pas bon ménage avec ma coopération.






"Tu douterais de la sincérité d’un père qui veut sauver sa fille ?"


Mes yeux, ou plutôt mon œil, devenait un peu plus humide, montrant toute l’émotion que je ressentais en parti à cause de l’enjeu de cette mission. Un mélange de peine et de rage m’envahissait, je ne rêvais que d’une chose, éclater chaque tête de roublard qui s’en était pris à une petite fille pour parvenir à leurs fins. Ce que je n’avais pas prévu, c’était la réaction du père en question.

-"Je ne cache rien du tout, je vous le jure ! J’ai engagé un homme qui se disait bon en arts martiaux pour protéger ma fille d’un gang connu dans la région. Leurs chefs étaient deux frères shinobi, ils avaient déjà tenté d’enlever un seigneur du pays, mais il ont été arrêtés par une petite femme blonde et une kunoichi de votre village. Malgré tout, ils ne se sont pas dissous, et comme je le redoutais, ils s’en sont pris à ma maison. Je vous en supplie, sauvez ma fille, c’est la seule chose qui compte pour moi !"

Ah, oui, effectivement. Le noble désormais à genoux et nez au sol face à nous, je lui demandais de se relever, en lui tapotant l’épaule. Cette approche brutale et directe de Shord nous avait quand même servi à identifier les ravisseurs, une bande de brigands qui suivaient les ordres de leurs anciens chefs shinobis, les frères Grim. Comment je le savais ? Je m’intéressais à la vie de la plupart des shinobi de Kiri ayant possédés un sabre particulier, et c’était le cas de Koken Jaden, celle qui arrêta ces deux zigotos. Les yeux emplis de dynamisme, je contemplais Shord, comme si j’attendais qu’il dise que c’était bon, que l’on pouvait élaborer un plan à partir de maintenant. J’étais tenace comme fille, tenace et motivée !