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 Renaître de ses cendres. [Yoru ♥]

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Mitsuharu Yuka
Mitsuharu Yuka
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Message(#) Sujet: Renaître de ses cendres. [Yoru ♥] Renaître de ses cendres. [Yoru ♥] EmptyMer 23 Jan 2013 - 18:26

Tic, tac, tic, tac.
Ses yeux s’attardèrent sur la neige. Le village de Kiri était recouvert d’un épais manteau blanc. Tout autour d’elle semblait englouti, totalement disparu sous cette gigantesque couche opaline. Un sourire enfantin naquit sur ses lèvres. Beaucoup de souvenirs refirent surface. L’image d’un Kyurei tout fou qui lui courait après la submergea. Elle le revoyait, ce petit homme euphorique qui lui jetait des boules de neige dans le but de remporter cette petite guerre fraternelle. Sa voix criarde lui revenait encore. Yuka l’entendait lui hurler de revenir, d’arrêter de courir. L’image d’une jolie cascade maladroite lui frappa l’esprit. Elle se mit à rire. Tous ces souvenirs, toutes ces images lui montraient à quel point cette époque candide lui manquait. Ces moments où les conflits n’existaient pas, où il n’y avait aucune larme et où les fraises importaient plus que toute autre chose. Désormais, Yuka plongeait de pleins pieds dans un univers totalement différent. Les fraises n’étaient plus qu’un plaisir éphémère, un moyen d’échapper quelques secondes à la réalité. Ah, quelle tristesse … La brunette exhala un long soupir. Kyurei lui manquait, à vrai dire. T’aurais dû y penser avant de le traverser de ta lame, non ? Maintenant, tu ne peux qu’en vouloir à toi-même, cocotte. Haha. Ses propres pensées la violentaient. Son cœur se pressa contre sa poitrine. Il s’écrasa, comme prêt à exploser. Sa respiration s’arrêta brutalement et repartit de la même manière. La demoiselle ferma les yeux.

Un autre souvenir la sortit de sa détresse. Elle vit le visage d’Akishi. Cet être absolument incroyable, qui lui permit de se comprendre elle-même. Qui lui permit de donner une raison, une solution à un problème apparemment sans résolution. Il lui offrit une introspection telle que ses questions trouvèrent des réponses. Ou des possibilités de réponse, des hypothèses.
Yuka rouvrit les prunelles, contemplant de nouveau l’extérieur. Il lui fallait du courage. Une énorme dose de courage. Suffisamment pour vaincre ses peurs, les cacher sous ce besoin d’accomplir, d’expier définitivement ce pourquoi son propre esprit la condamnait. Cela lui paraissait absolument impossible. Inconcevable. Vaincre cette peur irrationnelle, enfouie au plus profond de son être. Oui, cela l’effrayait. Revoir son passé, l’affronter. Livrer bataille contre ce qui semblait totalement disparu, oublié. Yuka exhala un nouveau soupir. Décidément. Même ce qui lui paraissait totalement vaincu parvenait à refaire surface à taper plus fort que n’importe quel souvenir. Mais peu importait, désormais. La brune se basait majoritairement sur ce nouvel objectif. Pas le temps de se questionner sur le pourquoi ou le comment. Il fallait agir. Alors, Yuka quitta son petit cocon. Il était temps de se réveiller.

Ses pas foulaient le sol avec rapidité. Elle traversait le village sans se préoccuper de ce qui l’entourait. Le paysage, les gens. Rien n’effleurait son esprit, ni ne l’arrêtait dans sa course. Elle en slalomait presque entre les villageois. La foule, aussi dense qu’à l’habitude, ne la ralentissait même pas. Sa route fut alors très courte, jusqu’à s’arrêter brutalement. Ses jambes s’immobilisèrent. Ses yeux suivirent le même parcours plusieurs fois : elle regarda la grille du cimetière de haut en bas, bloquée durant un long instant. Le vent souffla, caressant son dos, lui arrachant un frisson. Yuka revint subitement sur terre. Je ne peux pas, je ne peux pas, se murmura-t-elle. Tout était tellement … Difficile. Impossible. Yuka se sentit impuissante. Terriblement faible. Quelle incapable … Elle allait se dégonfler quand l’image du cadavre de Kyurei frappa son esprit. Cela lui arracha un long frisson. Allons, allons ! Il est temps ! Elle se mit un coup de fouet et poussa la grille.

Une sensation étrange s’empara d’elle. L’adolescente frémit, sentant une brise froide remonter le long de son dos et lui courber l’échine. Brr … Ses yeux se posèrent sur chacune des tombes. Les épitaphes différaient toutes. Certaines montraient l’amour que leur portaient leurs proches ; d’autres mettaient en valeur leurs mérites. Cette vision glorifiante avait tout de même ce petit quelque chose de macabre, de glauque. Cela la mettait terriblement mal à l’aise. Une envie de s’enfuir la prit jusqu’aux entrailles. Cette sensation la brûlait et réduisait son courage à néant. Ses jambes semblaient se ramollir à chaque pas. Qui plus était, la tristesse régnait en ces lieux. Personne ne se trouvait ici. Personne, hormis elle et tous ces gens, là, enterrés. Tous ces morts. Ces coquilles sans âme qui hantaient le cimetière, qui lui donnaient cet aspect si terrifiant.

Yuka se sentait comme une enfant. Une petite fille livrée au démon Thanatos, comme une offrande. Un cadeau empoisonné, puisque la Mitsuharu s’accrochait à la vie comme une petite fille à un rêve. Malgré son côté un peu dépressif et malade mental, la brune ne se sentait jamais traversée d’idées suicidaires. Au contraire. Son existence, bien que très compliquée, lui plaisait au plus haut point. Après tout, le plus malheureux des hommes vivait dans le malheur puisqu’il n’avait pas la chance de connaître les petits plaisirs, non ? À nager dans un plaisir permanent, il en oubliait peu à peu ce que signifiait, réellement, le bonheur. Il se contentait de vivre dans son cocon délicieusement sucré, aux allures de paradis, en s’enfonçant doucement dans une longue tristesse, une dépression irrémédiable. Un sanglot inconsolable. Alors, vu ainsi, Yuka était heureuse. Oui, véritablement. Cette pensée lui arracha un sourire et balaya ses mauvais songes. Le bonheur se trouvait à portée de ses mains, il fallait juste l’attraper.

Sa marche s’arrêta lorsque ses yeux se posèrent sur la tombe. Elle eut l’impression que son rythme sanguin s’accéléra, ainsi que les pulsations de son cœur. Ce fut extrêmement désagréable. Un peu comme si quelqu’un appuyait sur un bouton pour lui faire perdre pieds. Peu à peu, la brune se sentit à la fois totalement vide et, à la fois, débordante de remords. Les questions s’enchaînaient, dénouées, aléatoires. Aucun lien ne les rassemblait pour en faire une suite logique. Au contraire. Tout semblait conditionné de manière à ce que cela fût totalement incompréhensible. Yuka se calma un instant, prenant une longue respiration. Allons, ce n’est pas dramatique, il ne s’agit que … que d’une … une tombe. Glauque. Lugubre. Macabre. Frissonnant. Terrifiant. Elle ferma les yeux. Son univers ne flancherait pas. Les miroirs ne deviendraient pas les fragments brisés d’un tout. Son reflet ne se modifierait pas. Pas cette fois, elle ne pouvait le tolérer.

Des souvenirs lui revinrent par bribes, apparaissant dans sa tête comme de petits flashs. Toutes ces images, qui surgissaient subitement dans son esprit. Ces paroles, ces promesses. Tous ces mots envoyés au hasard, délivrés comme des prières. Ne t’en va jamais, hein ? Oui, elle l’avait formulé de cette manière. Une question innocente et qui, pourtant, à cette période-là, fut prise comme une violente attaque. Elle l’avait vu se défaire, ce visage si beau et souriant. Le blanc qui lui monta aux joues, qui effaça chacune des marques heureuses qui pouvaient passer par-là. Oui, elle l’avait vue, cette réaction des plus étranges qui le trahit, qui lança la première suspicion. Cette voix tremblante, fausse, pleine d’accents menteurs. Mais ce jour-là, Yuka ne comprit pas. Non, pour elle, il ne s’agissait que de pensées néfastes venues d’ailleurs. Après tout, comment une enfant pouvait seulement s’imaginer ce qui se déroulerait, quelques mois après, sous ses prunelles ? La mort de ses parents, assassinés par Kyurei, cet être parfait, intouchable, qui lui paraissait absolument merveilleux. Aucun défaut, rien à lui blâmer. Et puis un jour, leur monde s’écroula, chamboulé. Détruit du début à la fin.

Il n’y avait plus que des lambeaux.
La fin d’un univers, la fin d’un tout.
La fin de son monde.

Yuka s’accroupit et caressa le sépulcre du bout des doigts. La pierre était froide, voire gelée. L’épitaphe disait : « Mitsuharu Kyurei, victime de sa victoire. ». La brune ne se souvenait pas avoir écrit, ou demandé une quelconque écriture sur cette stèle. D’ailleurs … Elle n’avait pas en tête le moment où elle eut demandé un enterrement pour son frère. Alors qui ? Les passants qui la surprirent lors de cet acte sanguinaire ? Possible. Ou alors … De la famille éloignée. Des cousins. Forcément, puisqu’ils connaissaient le contexte familial de la branche principale des Mitsuharu. Ils prévoyaient depuis longtemps le dénouement de cette histoire. Et, même s’il s’avérait possible de changer la donne, ils choisirent de ne rien dire, de laisser faire, par superstition. Pour eux, s’interposer face au cours du destin revenait au suicide. Pffrt, pauvres cons. Désormais, ils ne vivaient plus sur les terres de Mizu no Kuni, mais dans quelque part, ailleurs. Tant mieux. Ça m’enlève du travail. Quoique. Un jour, je leur ôterai la vie à eux aussi. Ça peut être drôle.

Le vent souffla de nouveau, comme s’il s’acharnait à lui rappeler la présence de Kyurei. Oui, il se trouvait là, enterré. Dans un cercueil. Enfermé dans une boîte. Séparé de tout, même du Paradis. Il était là, reposait dans ce coffre. Loin de tout. Yuka posa ses yeux sur la stèle et exhala un long soupir. Pourquoi dénouer un lien aussi beau ? Pourquoi détruire l’indestructible ? Pourquoi rompre la plus belle alliance ? Ses pourquoi ne trouvaient pas de « parce que » et cela l’attristait. Une plaie béante s’ouvrait en son cœur et semblait la détruire à petits feux.

    « Je t’aimais, Kyurei. Tu étais mon plus beau joyau. J’aurais donné ma vie pour te sauver de la mort, sans aucune hésitation. Je pouvais tout faire pour toi. Jusqu’à vaincre l’adversité de mes petites mains d’enfant. »

Ses yeux larmoyèrent. Le vent souffla derechef, la couvrant d’une sensation absolument unique. L’impression qu’il se trouvait là, à côté d’elle. Qu’il la protégeait. Que ses bras l’enserraient. Il pleurait. Yuka le sentait comme s’il s’agissait d’elle. Cela lui serra le cœur, mais elle ne pouvait plus s’arrêter, désormais. Le processus d’expiation avançait trop bien pour être coupé en plein cours.

    « Je pouvais décrocher la Lune pour toi. L’arracher du ciel et te la donner, pour te montrer l’étendue de mon amour. Oui, mon Kyurei. Tu étais mon oxygène. Mon essentiel. Je te mettais au-dessus de tout. Même au-dessus de mon propre univers. Je pourrais te demander pourquoi, pleurer à chaudes larmes en priant ton retour, mais … ne t’ai-je pas tué de moi-même ? J’ai ton sang sur les mains et tes chaînes autour du cœur. Cela m’oppresse, me détruit. J’ai eu des illusions, l’impression de ton retour, de ta rancune. Me détestais-tu ? Pourquoi me forcer à répandre ton sang ? Je me suis longtemps interrogée à ce sujet, tu sais. À ce jour, je n’ai toujours pas répondu à mes questions et je sais que je n’y parviendrai jamais. Je sais juste que je ne peux pas effacer le cours du temps, ni même ce qui est arrivé. Oui, je t’ai arraché ton dernier souffle, mais n’attendais-tu pas de moi que je le fasse ? Ne voulais-tu pas mourir de ma main ? Tu m’as donné une chance de survivre et d’avancer. Je l’ai saisie. Je ne sais pas si tu en es fier ou si tu m’en veux, mais nous ne pouvons reculer. Et tu le sais sûrement mieux que moi. »

Un sourire attristé naquit sur ses lèvres. Ses prunelles dérivèrent, jusqu’à se poser sur le ciel. Elle rêvassait.

    « Tu pourrais être là, aujourd’hui, à veiller sur moi comment tu avais promis de le faire. Oui, tu le pourrais. Mais que serions-nous, si tout s’était déroulé autrement ? Je ne verrais pas le monde de la même manière, je rêverais d’autre chose. Je n’aurais pas les mêmes objectifs que je tends à accomplir désormais. Et surtout, Kyurei, nous ne ferions que retarder l’échéance. Peut-être ne nous aimerions plus ? Nous nous serions déchirés, détruits pour une histoire d’héritage. Les choses sont mieux ainsi, je pense. Je préfère nous savoir presque intacts plutôt que haineux l’un envers l’autre. Il fallait faire un choix. Une étrange concertation a fini par aboutir à ma propre survie. D’une certaine manière, il s’agit d’un cadeau, non ? Ah, Kyurei … »

Yuka poussa un long soupir. La plaie se refermait lentement. Contrairement à ce qu’elle crût, se confronter à son passé s’avérait plutôt simple. Une facilité qui la rassérénait. Étrangement, Yuka se sentait mieux. Libérée d’un poids incroyablement lourd. Le vent se calma. La brune ferma les yeux. Deux petites larmes roulèrent sur ses joues. Il ne s’agissait pas de tristesse ni même de peur, non. Elle pleurait de bonheur. Une joie douce, calme. Pas d’euphorie, juste une impression d’être à nouveau vivante. Comme un phénix renaissant de ses cendres.

    « Je t’aime. »

Yuka rouvrit doucement les yeux. Un sourire était apparu sur ses lèvres. Un joli ris, innocent, candide. Elle se redressa, prête à repartir. Totalement ailleurs, la brune ne remarqua pas la présence nouvelle qui se trouvait dans le cimetière. Elle le heurta maladroitement.

Mon cœur s’accéléra brutalement. Je le sentais cogner contre ma poitrine. Il tambourinait, battant à tout rompre. Les battements ressemblaient à un requiem mortuaire, une effroyable mélodie qui m’amenait aux portes du trépas. Pourtant, je ne mourais pas. Au contraire. Je revivais. Mes ailes se déployaient de nouveau. Elles battaient. Aussi vite que mon cœur. J’avais l’impression de pouvoir m’envoler, de pouvoir grimper jusqu’aux cieux. Je me sentais merveilleusement bien. Mieux que jamais. Je sentais ma vie reprendre son cours, mon cœur battre de nouveau. Pour de vrai.

Il était là, contre elle. Une folle intuition lui intimait qu’il s’agissait bien de lui. Yuka le serra contre elle. Les souvenirs déferlèrent dans sa tête avec une rapidité telle que les images lui apparaissaient par flashs. La prison. Les larmes. Les sourires. Les caresses. Le baiser, presque volé. Les cris. Cela ressemblait à un songe. Comme si toute cette vie n’était qu’un rêve. Une fausse réalité. Pourtant, elle l’avait percuté. Une bousculade, une sensation violente. Réelle. Véritable. Il était là. Yoru. Celui qui se trouvait dans la prison avec elle. Le fou pourpre de Kiri. La merveille de ses songes. L’idéal. Le souvenir. La réalité ?

    « Yoru … »

La demoiselle n’osa pas même bougé le petit doigt. La tête posée contre le torse du jeune homme, elle resta immobile pendant une bonne minute. Sa respiration était plus forte, plus longue. Sa main s’éleva doucement pour le serrer contre elle mais, juste avant de se poser, Yuka reprit conscience. Ses yeux se rouvrirent et, très rapidement, elle déchanta. Peut-être que tout ce qui s’était passé dans la prison restait … Un souvenir ? Une part de sa mémoire qu’il ne cherchait pas à retrouver ? Pourquoi se trouvait-il là, alors ? Revoir un être défunt … Yûna ? Cette idée brûla les espoirs de Yuka, qui recula d’un seul coup et le regarda de ses grandes prunelles incarnates. Leurs regards se mêlèrent et elle se perdit à la contemplation de son visage. Cet unique saphir, là, qui avait tant marqué son esprit, à tel point qu’il en devenait son souvenir le plus vivace. Une ombre vint ternir ses yeux. Elle les baissa.

    « Pardon … Je … »

Faiblesse. Jalousie. Idiotie. La brune ferma les yeux et exhala un soupir. Une sensation d’être totalement ridicule s’empara d’elle. Il était là, lui, cet être qui hantait ses pensées depuis si longtemps et la voilà, incapable de faire quoi que ce fût de plus intelligent que fuir. Enfant paniquée face à la douceur de ses rêves. Paranoïaque. Terrifiée par l’absence et le changement. Elle espérait, du plus profond de son cœur, qu’il n’eût pas changé. Qu’il fût toujours Yoru. Son Yoru. Celui de ses souvenirs. En grandi, certes, mais avec la même essence. Yuka n’osa pas reprendre la parole, cloîtrée dans son mutisme, gênée.
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Message(#) Sujet: Re: Renaître de ses cendres. [Yoru ♥] Renaître de ses cendres. [Yoru ♥] EmptyLun 18 Mar 2013 - 19:43

Yuka avait quitté la cellule. Trop instable, bien plus que moi. Il fallait avouer qu'à chaque fois qu'elle évoquait ce spectre, ce Kyurei, elle perdait complètement les pédales. C'était l'élément déclencheur de ses psychoses, la clé qui ouvrait la porte des tares mentales. A contrario, il me suffisait d'après peu près tout et n'importe quoi pour provoquer mes crises de démence. Mais qu'importe, car pour l'heure, je n'éprouvais pas le besoin de me faire violence pour inhiber instantanément la véhémence de mon esprit. Au contraire, le départ prématuré de la Mitsuharu m'attristait, néanmoins je restais sain d'esprit. Étrange paradoxe à mes yeux, ou plutôt à mon oeil. Qu'importe. Il fallait que je profite de ce moment de "repos" mental. Ce n'était pas tout les jours que la chance me souriait à ce niveau-là ! Histoire d'agrémenter ce moment de quiétude, je fouille ma poche, afin d'en sortir mes fameux médicaments.
Sauf qu'on m'avait tout confisqué: paquet de cigarettes, zippo, sacoche ninja…
Et bien entendu, mes cachets.

Quelle intelligence, ces matons ! Quoi de mieux pour un fou prenant des médocs que de purger sa peine dans les meilleures conditions en lui retirant tout ce qui pourrait lui permettre de conserver sa lucidité, et d'assurer le bien-être de ses camarades ! Et comme si cela ne suffisait pas, la bête se réveille. Je sens ma main qui tremblote à nouveau, et la peur gagne mes pensées. Que va-t-il m'arriver ici ? Je n'en sais trop rien. Toutefois, s'il y a bien une chose dont je suis assurément sûr, c'est que le bonhomme qui tentera de me raisonner aura bien du mal. Je croise même les doigts pour que ce soit le troufion de tout à l'heure. Ça vengera Yuka-chan, comme ça, tout en le faisant descendre de son piédestal. Certes, ma cellule est consolidé par un sceau qui paralyse l'expulsion de chakra, et donc par extension l'usage de jutsus. Mais un fou, contrairement à un shinobi, peut se passer de jutsus pour exprimer ses pensées confuses. Mes spasmes se propagent de façon gangreneuse. Mon esprit devient trouble. La rivière du flux de mes pensées devient boueuse, corrompue par l'algue de la Folie. Il est trop tard, impossible. Trop tard pour revenir en arrière. Impossible pour le garde de s'en sortir sans blessures. Un premier hurlement explose de ma gorge. Long, strident : c'est le hurlement du loup, qui dans la pleine lune, annonce l'ouverture de la chasse. Avant que la suite acoustique n'arrive, mon corps se plie sous la pression névrotique : mes bras se frottent frénétiquement contre les murs, puis contre les barreaux. Je joue du xylophone avec le fer rouillé et mes coudes, sans prendre en compte la douleur. Elle n'est plus mienne, et est impuissante dorénavant face à la Folie. Au second hurlement, le maton de tout à l'heure est de retour. Parfait. De façon occulte, ma Folie s'accorde à moi-même, le temps d'un rire guttural.

J'ai l'impression de passer un pacte avec le diable. Du peu d'espace qui m'est laissé dans mes pensées, j'ai l'impression de parler avec cette Folie. Non pas par des médiations conventionnelles et habituelles. Notre discussion brisait toutes les lois universelles, déformant toutes les réalités communes, ignorant la raison et la logique. Parfois, j'avais la sensation de parler avec ce diable appelé Folie. Il avait un visage diabolique, et le sourire de l'ange… ainsi qu'une voix sordide. Mais à quoi bon essayer de résister à son emprise trop puissante, quand on peut s'associer avec lui, provisoirement ?

En plein délire, je suis dérangé par le gardien de tout à l'heure. Son sourire narquois m'amuse : il est armé d'une matraque, et se donne l'illusion de pouvoir dominer comme à chacune de ses interventions la situation. Il pense que son gourdin peut réprimer l'esprit, peut oppresser la conscience. Il croit faussement que son autorité écrase celle des autres, que sa personne est supérieure, comparé à celles des pions, voire des pièces brisées qu'il collectionne dans ses cachots. Sauf qu'il ne peut s'en prendre à un préconscient délirant. Il croit savoir à qui il a à faire. Un taulard réprimé par la force. Sauf qu'en réalité, voilà qu'à présent il se heurte à un fauve, un monstre, Orthos aux têtes démoniaque et psychosomatique. Son premier coup me brise une côte, blesse mon bras. J'ignore la douleur, elle n'est plus mienne. Elle est soumise à ma Folie. Cette dernière réplique, d'un geste brusque, dont la brutalité aléatoire projette violemment le maton contre le mur. Ma dextre glisse le long des barreaux pour jouer un requiem au xylophone de fer. Elle se plait à passer le long de ses barreaux, plus orgues que lames de bois. Le garde tente une dernière approche, avant que d'un revers de la main gauche, je le désarme. Sa matraque glisse dans l'angle, au fond de ma cellule, avant que ma Folie se plaise à le dévorer du regard. Contrairement aux rumeurs populaires, elle ne s'abreuve pas de sang : au contraire, le sang est son maquillage. A la place, elle se délecte de la peur d'autrui. Elle aime voir le gardien trembler de peur, effondré au sol, et voyant l'horrible réalité en face. La suite ? Il n'y a qu'à tendre l'oreille : des bruits de coups de poings, des cris de douleur, et des barreaux qui claquent, dans une agitation inédite. Mes cris alimentent cette ambiance chaotique qui m'a paradoxalement permis de sortir de ce trou à rats.
Loin de l'humidité, de l'obscurité et de l'odeur de moisissure dominant l'ergastule de Kiri, Yoru évoluait en terrain platiné. Kiri était dominé par l'élément nivéen. Un monde monochrome, de pureté et de gel, s'offrait aux habitants de la Brume. Le frimas avait fait un coup d'état au Soleil : seul son éclat diaphane couvrait l'empyrée. Et dans ce microcosme opalescent, il y avait une silhouette. Celle d'un homme, tourmenté autrefois par son passé. Celle d'un borgne, tourmenté aujourd'hui par sa tare psychique. Celle d'un guerrier retournant sur les traces d'un passé déchiré par la guerre.
Yoru avait fui provisoirement ses responsabilités. Il avait séché la paperasse, le devoir de l'administration en tant que Régent de Kiri. Le tsar avait d'autres préoccupations plus urgentes en cette journée neigeuse. Aujourd'hui, c'était un anniversaire funeste qui se devait d'être commémoré. L'anniversaire d'une rencontre. Presque dix ans à présent. A cette époque, cette rencontre paraissait futile : Yûna et Yoru s'étaient rencontrés sur le front. Lors de la Grande Guerre, même l'espérance de survie des jeunes étaient basses. Et pourtant… ils s'étaient rencontrés, s'étaient revus. Et à force de retrouvailles, ils s'étaient promis de rester ensemble, et de s'aimer. Ils voulaient oublier le passé, douloureux, et construire un présent plus radieux. Et ils s'étaient abandonnés, sur les terres aujourd'hui soumises à l'Impératrice des Flammes. Fini l'espoir, fini l'amour. Yûna partie, le vide fut comblée par la Némésis de cet être de bonté. Une entité horrible, nommée Folie par son hôte. Un parasite infâme, née de la haine, de la colère, et de la tristesse du blondin. Ils s'étaient alors rencontrés, s'étaient recroisés. Et à force de retrouvailles, Yoru s'était promis de dominer ses pulsions. Dorénavant, sous l'identité de Régent de Kirigakure no satô, il avait dominé son esprit dans sa presque totalité. C'était un homme à l'esprit fort, dans un corps robuste.

Toutefois, l'esprit fort a parfois ses moments de faiblesses. Et il faut dès lors l'écouter, comme l'enfant gémissant de douleur.
En marche vers le temple de Sanbi, déité démoniaque de Kiri, l'oblat fou de Kiri allait braver la froidure. Il lui paraissait tout nécessaire de retrouver tout ce qui restait de l'Aoyama. Cette tombe, tout sauf personnelle, érigée en hommage aux disparus de Hai no kuni. Yoru était désappointé de cette dépersonnalisation funéraire. Il y avait davantage de difficulté à se recueillir sur une pareille tombe. En outre, cela alourdissait le malheur affligé à ces morts. En effet, le Kirijin estimait que leur simple trépas était déjà assez lourd pour eux. Ils avaient subi une mort noire, sordide. Une mort aléatoire, anonyme. Elle ignore votre identité, elle ignore votre personne. C'est une faux joueuse qui se balade dans les rangs, serpente dans les airs comme une peste invisible et frappe par hasard. Yûna faisait partie de ce lot de personnes qui avaient été fauchées ainsi. Yoru avait mis beaucoup de temps avant de digérer une telle mort, surtout sous cet aspect.

Une fois arrivé au monastère du démon tortue à trois queues, le cyclope du frimas suivit presque instinctivement le chemin. Récemment il n'avait pas l'habitude d'emprunter ce sentier, aujourd'hui recouvert de neige, toutefois, sa mémoire était obligée d'enregistrer le chemin menant à un lieu important à ses yeux. Quelques instants plus tard, la silhouette blasée se figea face à une stèle. Il était arrivé à destination. Avant de se mettre à faire quoique ce soit, le drille leva la tête au ciel, recouvert d'un manteau d'argent. Il souffla, laissant un embryon de frimas monter au ciel comme une âme désincarnée. Pour une fois, il n'y avait nulle substance nocive dans son expiration, seulement quelque onde qui parut visible grâce au froid extérieur. Il ferma son dernier oeil, et respira profondément. On aurait dit qu'il était nerveux, comme pour son premier rendez-vous. Pourtant, il n'y avait que sa tête qui trahissait cette impression : son corps entier était inerte, attendant une réaction de sa conscience.

Après un moment dans le vacuum marmoréen, le jeune homme fixa la stèle, silencieux. Divers noms étaient gravés sur la tombe, mais la plupart était flouté par une pellicule de gel et de neige. Avec sa dextre droite, le blondin balaya autant de neige que possible, y compris sur le dessus du prisme minéral. Suite à cet effort, il frotta sa main contre son vêtement pour la débarrasser du givre, et laissa son oeil balader son regard à travers les inscriptions. Il était enfin là. Aoyama Yûna. Son corps frissonna. Était-ce du au froid, ou à la simple lecture de ce nécronyme ? Pas même le concerné en question ne put donner une réponse à cette interrogation. Histoire de se réchauffer, et de se rassurer, afin de couvrir les deux possibilités, le Ryûzoji se grilla une cigarette. Yûna n'aimait pas l'idée que son amoureux puisse fumer. Toutefois, suite au trépas de la kunoichi, il avait brisé cet interdit, pour se sentir mieux en l'absence de la décédée. Une fois sa clope achevée à moitié, il posa le tout devant la stèle, comme à son habitude. Ce petit rituel, aujourd'hui engourdi par la neige, était les préliminaires aux aveux. Yoru discutait souvent, à voix basse, avec Yûna. Peut-être elle n'était pas là. Peut-être elle ne l'entendait pas, de là où elle était maintenant. Peut-être Yoru passait pour un imbécile. Mais au moins, parler avec elle lui faisait du bien.
— Désolé de venir de moins en moins souvent… mais tant pis. Je tiens encore à te remercier, Yûna. Une bonne fois pour toute. Je tiens à te remercier, contrairement aux autres fois où je n'ai pas eu le courage de te le dire en face, morte, ou vivante.
Une bourrasque de vent marqua un silence. La fin de sa dernière phrase était dure. Yoru avait du mal à passer par des euphémismes, ou une quelconque formule de style pour masquer le fait. La raison en était simple : il avait grandi dans la mort, à y assister, ou l’entraîner. Il ne pouvait nier ce qu'il vivait au quotidien. Ce serait une trop grande hypocrisie de sa part.
— Grâce à toi, j'ai pu avoir un but dans ma vie. Le réconfort, la présence que tu m'offrais, tout ce que tu représentais à mes yeux… c'était autant de raisons pour me pousser à me surpasser, afin de prolonger ça. Haha, je suis tellement égoïste au final… mais au moins, j'aurai reconnu ta bienfaisance. Et étrangement… même après la mort, tu sembles m'aider, Yûna. Le vide que tu as créé a été un formidable moteur de puissance. J'ai longtemps souffert avec ce vide, comblé par le vice, avant d'en comprendre le sens. Ma Folie a été créé pour ne pas que je t'oublie. Dans le cas contraire, elle ne ferait que croître dans la haine et la tristesse. Et il a fallu attendre que je dirige un village de barbares sanguinaires, que je sois reconnu par les miens à cause de ma Démence, avant que je ne vienne ici…
Il se tût à nouveau. Aucun souffle de la nature cette fois-ci pour couvrir le mutisme évident du djinn. L'émotion submergea le shinobi. Il ne pleurait peut-être pas, mais n'avait actuellement pas la force de continuer à parler. Ses pensées s'adressèrent alors à sa place à l'Aoyama. La fumée de sa cigarette montait à son tour dans les cieux, comme une communication avec l'au-delà, comme une offrande, symbolisant à la manière du souffle algide du guerrier la montée dans un monde réservé aux morts. Pendant un certain moment, plus long que le précédent, il resta coi, face à la pierre taillée. Il s'adressa dès lors à l'Aoyama, par une langue de l'esprit que nul autre être ne pouvait déchiffrer. Une télépathie particulière à sens unique en quelque sorte. Et après cet entretien nécromancien, il vint recouvrir l'usage de la parole, pour clore la conversation.
— Je crois… je pense que… que malgré ta mort, tu aurais voulu que je sois heureux. Tu aurais voulu, malgré la fin de notre union, que je continue à être heureux. Que je vive le bonheur pour nous deux. Que je connaisse à nouveau l'amour. Tu n'aurais peut-être pas souhaité que je trouve quelqu'un pour te remplacer, trouver un substitut à ta chaleur. Non… tu aurais souhaité que je tourne la page, et que j'écrive un nouveau chapitre dans le livre de ma vie.
Il avait manqué de hocher la tête. Au même moment, la combustion de son mégot s'estompa, et la fumée qui résultait de cette réaction se dissipa. Elle marquait la fin de cette conversation métaphysique.
Yoru sourit légèrement, et fit volte-face à la tombe. Il avait fait ce qu'il avait à faire.

Et soudain, il n'eut pas le temps de repartir, de faire quelques foulées vers la sortie, qu'il fut heurté par une présence humaine. Cette silhouette, pour l'heure anonyme, brisait cette vacuité hivernale, dans laquelle Yoru résidait. Elle apportait subitement un peu d'humanité, de chaleur. Et ce personnage n'était autre qu'une connaissance du Ryûzoji.

Elle était revenue à lui, grâce au hasard, ce même hasard qui avait fait disparaître Yûna.
Cette apsara, descendue du paradis, et qui autrefois l'avait suivi en Enfer. Cette archange, qui avait utilisé ses ailes opalescentes de lumière de réconfort et de bonté, pour former une camisole le protégeant de sa Folie destructrice. Elle était revenue à lui, dans un monde de neige et de vide. Dans sa tête, Yoru se sentait à son tour vidé. Il ne pensait plus à ces souvenirs répétitifs de la disparition de Yûna. Il ne songeait plus à quelque pulsion paraphrénique. Il ne sentait plus que la chaleur séraphine de la kunoichi, le libérant du gel. Il ne voyait plus que cette silhouette onirique, qui l'apaisait. Au final, ce ciel si blanc, si pur, dénudé de tout astre solaire, l'était ainsi, car tel était le fait : le Soleil était dans les bras de Yoru. La demoiselle à l'aura stellaire apaisait de sa lumière angélique le jeune homme, et de ses rais chaleureux, elle chassait, aveuglait tout les doutes du guerrier. Elle éclairait son monde, illuminait son esprit de choses radieuses. Désormais Yoru était vidé. Épuré du tourment, stérilisé de toute douleur. Sa main glissait presque mécaniquement le long du corps de Yuka, pour l'enserrer contre lui. Il ne pensait plus : son corps, son âme voire même sa Folie entraient tout trois en parfaite harmonie. Il vivait sans se préoccuper du passé, sans songer au futur. Son essence même, sa substance psychosomatique se mouvait uniquement dans le kairos.
Et si c'était ça, ce qu'on appelait le Bonheur ?
Pourquoi pas ? Une alchimie idéale, entre corps et esprit. L'enveloppe et le résidant en paix. Un polymère infini d'ataraxie et d'aponie. Le tout conservé, maintenu par la simple présence de cet ange féminin, cette Némésis de succube au regard andrinople.
— Ne pars pas s'il te plait, cette fois…
Et il plongea son saphir dans ses rubis, avant de l'enlacer. Yûna devait sourire, au paradis. Elle devait être heureuse, que son ancien protégé retrouve le bonheur, cet état qui faisait de lui un être à part entière…
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Mitsuharu Yuka
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Message(#) Sujet: Re: Renaître de ses cendres. [Yoru ♥] Renaître de ses cendres. [Yoru ♥] EmptyVen 29 Mar 2013 - 14:15

Son cœur battait la chamade. Il violentait sa poitrine plus fort que jamais, tambourinant à un rythme irrégulier, précipité, comme si elle courait droit vers la mort. Pourtant, Yuka le sentait. Il ne s’agissait pas de la mort, là, face à elle, mais bien de la renaissance. Ses ailes se déployaient de nouveau, et l’aura nébuleuse que Kyurei lui attribuait disparaissait peu à peu. Il n’y avait plus de haine, plus de crainte. Juste une intense sensation de vivre, véritablement. Plus que jamais, la brune se savait présente sur Terre. Plus aucune brume néfaste ne l’atteignait, les poisons du passé ne l’affaiblissaient plus. Une force inconnue l’enivrait, la recouvrait toute entière et lui donnait le courage de se relever, de détruire tout ce qui, jusqu’ici, la détruisait morceau par morceau. La barrière se brisait doucement, laissant place à un nouveau monde. Plus rien ne lui apparaissait comme impossible. Tel le phénix, Yuka se voyait revivre. Elle se regardait, de loin, veillant sur elle-même comme Kyurei le faisait. Elle n’avait plus peur. Les cauchemars s’effaçaient pour devenir de doux rêves. Les songes, les idéaux, se matérialisaient désormais sous forme de réalité. Sa réalité. La leur ? Peut-être aussi.

L’étreinte se resserra. Plutôt que de la repousser, il l’avait accueillie entre ses bras. Il la gardait, la protégeait. Yuka ferma doucement les yeux et exhala un long soupir. Yoru ne s’en était jamais allé. Au creux de ses songes, il se frayait un chemin pour lui revenir. Elle se sentait enfant, une véritable petite fille face à la réalisation de son plus grand rêve. Tout cela ne paraissait pas réel, tant elle n’y croyait plus. Pourtant, là, au creux de ses bras, se trouvait celui qui, malgré tout, était resté le même. Habituellement, les temps changeaient les gens. Ils se transformaient avec ce dernier et oubliaient ce qui faisait leur passé. Pas lui. Ni elle. Et par-dessus tout le reste, enfin, ils se retrouvaient. La brune laissa ses mains s’aventurer le long de son dos, pour le serrer plus fort, comme si elle cherchait à s’assurer qu’il s’agissait bien de lui, pas d’un rêve.
    — Plus jamais, plus jamais …

Plus rien ne les séparerait. Ni les crises, ni un stupide maton aux tendances violentes. Non, aucune crise ne s’interposerait. Yuka n’y pensait même plus, à dire vrai. Kyurei s’en était allé rejoindre le monde des Anges et, avec lui, emportait les voix. Qui plus était, entre les bras de Yoru, la brune ne ressentait ni peur, ni haine. Aucune animosité ne la transportait. Il n’y avait qu’une joie intense, qui lui donnait des frissons ; et une étrange sensation de n’être plus menacée. La Mitsuharu se recula doucement, rompant l’étreinte. Ses prunelles se baladèrent sur le séraphin pendant un long moment, faisant de longs allers-retours, avant de se poser sur son visage.
Une merveille. Une véritable merveille. J’aurais pu le contempler des heures et des heures, sans me lasser. Il se trouvait là, devant moi. En dix-sept années d’existence, je comprenais enfin la signification du Bonheur, ce terme abstrait que personne ne pouvait décrire objectivement. Chacun le voyait à sa manière. Dans mon cas, il s’agissait de lui. De loin, sans me voir, sans me toucher, il avait bâti l’existence que je menais. Je puisais mon courage dans ce souvenir, impossible à effacer de ma mémoire. Je vivais à travers ce songe, sans jamais m’en détacher et, désormais, il se trouvait là, entre mes bras. Que faire, que dire ? Je n’en avais aucune idée. Je voulais simplement qu’il reste, que le temps s’arrête et que nous ne bougions plus. Je ne voyais plus que lui à ce moment précis, le reste n’existait plus. Le monde pouvait brûler, autour de moi, je me sentais en sécurité. Je n’avais plus peur.
Sa main remonta tout au long de sa joue, qu’elle caressa du bout des doigts. Un sourire attendri naquit sur ses lèvres. Son cœur se calmait doucement, mais elle se savait encore instable. D’un moment à l’autre, Yuka pouvait lui sauter dessus en pleurant comme une gamine ayant retrouvé son plus beau trésor, parti à loin, si loin d’elle. En réalité, la brune ne se contenait pas. Ses jambes refusaient tout simplement de bouger. Après tout, en faisant volte-face, ne s’en irait-il pas ? Comme un songe. Un rêve effacé par la réalité. Son autre main vint attraper la sienne, qu’elle serra tendrement. Le contact chaud entre leurs deux dextres lui rappela qu’elle se trouvait bien sur Terre, qu’elle ne dormait pas, qu’elle ne rêvait pas. Ou presque pas. De petites étincelles pétillèrent dans ses prunelles andrinoples.
    — Je te croyais parti à jamais, effacé par le temps … Je croyais que tu … que tu ne me reviendrais plus, qu’il n’y avait aucun espoir. Mais maintenant tu es là et …

Yuka se mit à rire nerveusement, tandis que de petites perles roulèrent sur ses joues. L’émotion la submergeait, l’engloutissait dans un tourbillon de sentiments disparates, mais tous liés à la même chose. Elle se sentait à la fois euphorique, terriblement heureuse, mais aussi extrêmement idiote, incapable de réagir ou même de placer une phrase sans bégayer. Cela l’embarrassait terriblement.
    — Je ne sais ni quoi dire, ni quoi faire … Enfin … C’est surtout que je ne sais même pas par où commencer …

Yuka frémit doucement, une brise hivernale remontant tout au long de son dos. Sa main serra un peu plus fort. Elle baissa la tête et respira longuement. Son autre patte tremblait. Le froid la gagnait peu à peu, lui rappelant que, malgré tout, il restait certaines sensations qui ne disparaissaient pas. Un sourire amusé naquit sur ses lèvres, remplaçant le dernier. Elle releva les yeux, mêlant ses rubis au saphir de Yoru. De petites rougeurs prirent place sur ses joues.
    — Tu m’as … tu m’as tellement manqué …

C’en devenait difficile. Dans sa tête, les mots se chevauchaient, se heurtaient, s’emmêlaient. Ils en perdaient tout leur sens, devenant de simples palabres perdues dans un esprit troublé. À nouveau, Yuka dévia le regard, presque incapable de le soutenir.
Je lui aurais bien crié tout ce que je ressentais, là, tout ce qui se trouvait sur mon cœur. J’aurais pu lui montrer, lui expliquer, faire tout ce que je pouvais pour voir à quel point il m’avait manqué, à quel point j’étais heureuse de le retrouver ; mais rien ne venait. Tout se bousculait dans ma tête, et me donnait juste envie de fuir. Comment lui dire ? Comment lui montrer ? Je me sentais perdue. Perdue dans mes propres songes, eux qui, habituellement, me guidaient et me menaient toujours sur des réflexions extrêmement posées. Là, il n’y avait plus rien. À croire que mon calme s’envolait, emportant avec lui ma capacité à réfléchir posément. Je voulais simplement lui sauter dessus et …
    — Je …

Yuka ne parvint pas à s’exprimer de nouveau. Frustrée, elle décida de se serrer contre Yoru, sans rien dire de plus. Si les mots ne venaient pas d’eux-mêmes, les gestes dévoileraient la réalité à leur place. Même si, pour cela, il fallait déjà que Yuka fût capable d’agir ce qui, pour le moment, lui semblait impossible. Ses mains se posèrent sur le dos de son ange, et elle le serra contre elle, avant de fermer les yeux. Il était là, et rien ne comptait davantage.
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Message(#) Sujet: Re: Renaître de ses cendres. [Yoru ♥] Renaître de ses cendres. [Yoru ♥] EmptyDim 7 Avr 2013 - 14:47

Jamais Yoru ne s'était auparavant senti aussi vivant. Jamais il n'avait ressenti autant la vie de plein fouet, comme la borée qui remuait les tombes de ce cimetière inerte, noyé sous les flocons. La vie lui souriait, la mort faisait la moue, désappointée de l'énergie nouvelle qui se dégageait du quidam. Enlaçant son astre somatique, il jouissait d'un nouveau statut. Aponie et ataraxie se mêlaient dans une danse inédite aux yeux du cyclope, au coeur de ce cortège de neige platinée. L'impalpable, la chaleur et le tactile, l'algide se combinaient l'espace d'un moment des plus idéal. Autrefois, c'était la folie qui guidait la chair du guerrier, et qui se diffusait dans les éléments, comme une signature du monstre qui résidait impitoyablement dans les tréfonds du corps fantomatique de l'esprit follet. Aujourd'hui, c'était comme si la neige inhibait la présence satanique de cette démence presque vivante. Piégée dans une prison de bise, de neige et de bras, elle était impuissante. Pire encore, sous l'aura séraphine de sa moitié retrouvée, il se sentait comme allégé, presque décapité de cette tête nuisible qui faisait de lui un Orthos de violence. Il était à présent plus que serein. On aurait eu du mal, en comparant les deux psychés avant et pendant les retrouvailles avec Yuka du Ryûzoji, à effectuer une ressemblance. Il y avait comme un grand changement, une alchimie équilibrée entre son passé et sa vie présente. Il gardait ainsi toute son expérience passée, ses efforts de shinobi, et sa conscience endurcie par les évènements tragiques. En revanche, son esprit était plus léger, plus libre, et volait dans les empyrées du libre-arbitre. Yoru revivait véritablement. Et en signe de résurrection, le corps du Ryûzoji s'était harmonisé à son enveloppe psychique pour lui offrir un aria des plus spiritueux.

Tout comme sa moitié, son coeur battait à un rythme effréné. Aucun instrument de musique n'aurait pu reproduire ces frénétiques pulsations cardiaques. Le tempo était des plus vifs, comme une renaissance. La fréquence s'accordait presque sur le pouls de sa moitié, elle aussi sous l'émotion. Son eurythmie semblait vouloir s'exprimer de la sorte : jouer une ballade en l'honneur de leurs retrouvailles. Même dans sa tête, le Ryûzoji sentait son esprit osciller sous l’évènement. Un timbre particulier semblait comprimer sa démence, précédemment absente, pour la soumettre à l'émotion. Dorénavant, dans cette embrassade, la Folie servait d'instrument, et déformée, jouait la mélodie des retrouvailles dans un monde pur. Et ce concert était des plus occultes : pas même la personne avec l'audition la plus fine ne pouvait percevoir ces quelques notes humaines. Même la créature, l'animal le plus doué d'ouïe ne pouvait la comprendre. Il s'agissait d'une mélodie spéciale, que seuls les deux amoureux pouvaient émettre et recevoir. La musique n'était pas du même monde qu'eux : elle était Ailleurs, dans un monde créé par leurs consciences mutuelles, nouées entre elles tout comme leur corps. Ce monde était unique, et exclusivement dédié à leur oaristys naissante.

Les deux ninjas se rapprochèrent davantage. Pas même les éléments de la nature ne pouvaient briser à présent leur lien psychosomatique. Pas même le froid, le vent, la tempête. C'était comme si la nature n'existait plus à leur yeux. Ils vivaient dorénavant ensemble, sur un autre plan, dans leur propre univers. A quelques détails près, ils ne faisaient plus qu'un. Moitié de l'un à l'autre, ils s'était enfin retrouvés pour s'unir. Dans ce microcosme de pureté nivéenne, Yoru leva la tête, contemplant son parangon avec admiration. Son regard de rubis, sa chevelure brune, son minois archangélique… oui, le Ryûzoji avait enfin trouvé son idéal de perfection. Une perle rare, et presque magique. Elle unissait tout chez Yoru. Son corps et son âme s'associaient véritablement. Sa conscience, par la force de l'archange qu'elle incarnait, avait rassemblé les morceaux brisés et éparpillés lors de la Bataille de la Cendre, pour les recoller d'un seul coup; sa démence s'en voyait atténué, impuissante. Elle n'était pas détruite, seulement, ce n'était plus qu'un fauve en cage, un artéfact des émotions négatives de l'oblat. Un artéfact qu'il comptait bien soumettre à sa volonté récemment régénérée…
— Maintenant que nous sommes enfin réunis, je te fais la promesse de ne plus me séparer de toi. Ce serait bien trop douloureux de te perdre une seconde fois.
Et il resserra encore l'étreinte entre les deux êtres, isolant davantage l'ersatz de blizzard loin derrière eux. Il fallait avouer malgré tout que chaque rencontre entre Yuka et Yoru se faisait dans un cadre assez particulier. La première fois, il avait croisé le regard en cellule, ayant tout les deux pêchés. Deux meurtres, deux versions différentes, mais un même châtiment. Et dans ce monde d'horreur et sans couleurs, ils avaient fait connaissance, d'une manière peu prosaïque, plongeant dans l'intimité de l'autre. Aujourd'hui ils se revoyaient dans le cimetière du temple de Sanbi. Un lieu dédié au repos éternel, aux illusions de la religion. Et dans ce même univers, ils renaissaient tout deux de leurs cendres, et brisaient les illusions, les erreurs de leur vie passée.
Leur couple tournait la page pour un nouvel avenir.

Devant le mutisme progressif de sa sublimité, le Cyclope vint sourire, timidement. Lui aussi ressentait ça. Les paroles lui venait difficilement, comme heurtées à une résistance les empêchant de se concrétiser. Dans l'esprit du Lutin Fou, tout était confus sous l'empyrée de la félicité. Le bonheur pleuvait à grandes gouttes, et inondait les terres souillées du meurtre de la paraphrénie. C'était ça, l'émotion. Le fond de l'esprit prenait le dessus sur le corps, empêchant la conscience clairvoyante de s'exprimer. Ainsi donc, le Régent désirait rester du plus profond de son âme aux côtés de la Mitsuharu. Un désir si puissant qu'il n'avait d'oeil que pour elle, dorénavant. Pas même la mort, la folie, l'horreur et son devoir de shinobi ne le ferait flancher devant son ambition : vivre aux côtés de l'apsara. Et sans pour autant en faire un Nindô, comme une mise à jour de son ancien objectif échoué, ce même but altier servait la cause du Shishi Hakutô. Devenir plus fort, c'était la certitude de pouvoir braver la mort, le temps, l'espace, pour continuer de vivre avec Yuka, et de jouir du bonheur à ses côtés. Cette fois-ci, l'émotion ne prit pas le dessus sur sa parole. Il releva une fois encore la tête, contemplant les rubis andrinoples de sa belle avec dévotion. Il désirait finir sa phrase, et rapprocha son visage d'elle, le coeur adoptant un rythme nouveau, une angoisse différente de celle du champ de bataille. Le Lutin perdait dès lors tout son sang-froid d'autocrate.
— Je… je t'aime.
Il scella par la suite ses lèvres à sa princesse, isolé de tout, et pourtant présent avec son Tout : Mitsuharu Yuka. Cela faisait de longues années que le Ryûzoji n'avait pas goûté aux lèvres d'un idéal, d'un univers somatique. Non… c'était la première fois. Comme un premier baiser, totalement parfait, un cadeau sacré de la Providence, pour l'encourager à poursuivre la voie qu'il envisageait aux côtés de sa moitié…
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Message(#) Sujet: Re: Renaître de ses cendres. [Yoru ♥] Renaître de ses cendres. [Yoru ♥] EmptyMer 10 Avr 2013 - 21:14

Vivre. Ce que cela signifiait ? Je n’en savais rien. Jusqu’à lors, j’avais toujours avancé pour m’échapper de mes erreurs, pour en faire des barrières et de bonnes choses. Je m’étais toujours dit que mon monde tournait grâce, ou à cause, de mes actes. Selon mes pensées, mes réactions, je contrôlais mon univers. Je livrais, depuis mon enfance, une bataille interminable contre mes songes les plus terrifiants, contre mes souvenirs que je reniais. Je n’aimais pas mon passé, je le haïssais. J’avais toujours imaginé cela comme étant un poids, quelque chose de mauvais, qui n’existait que dans les mémoires des autres, qui ne survivait pas aux flots incessants de nouveaux souvenirs que j’ajoutais pour ne plus m’en souvenir. Pourtant, ce jour-là, j’ai subitement compris ce que signifiait ce petit mot. Cinq lettres, deux syllabes, et une signification gigantesque. Certains diront que vivre, c’est respirer, se lever le matin, et faire comme tous les jours. Quelque chose de simple, en somme. Mais vivre ne voulait pas amener à cela. Il s’agissait d’une notion abstraite, que peu de personnes étaient aptes à comprendre. Ou alors, à l’instar de la beauté, le mot « vivre » faisait appel à la subjectivité, à la vision de chaque personne. Dans ce cas, si je devais donner ma propre définition de cette notion, je dirais que …

Je dirais que « vivre » est un mot qui, à lui-même, implique plusieurs autres notions. Tout d’abord, celle du Bonheur. Cette chose si complexe à saisir que de nombreuses personnes se tuaient à chercher, tout au long de leur existence, sans se rendre compte que, finalement, le Bonheur ne se trouvait que dans les mains des autres. « Le Bonheur n’est réel que lorsqu’il est partagé ». Je suis d’accord avec cette idée. Si personne n’est là pour aider à se relever, pour montrer une face merveilleuse du monde, comment comprendre ce que c’est, le Bonheur ? Oui, certains diront que c’est juste une histoire de volonté. Pour moi-même, qui aie traversé de très nombreuses épreuves, qui aie pleuré pendant une très longue partie de ma vie, je dirais que le Bonheur est ce qui fait battre notre cœur, ce qui nous fait sourire en permanence. Ce qui nous donne la foi, le courage d’avancer.

Après, « vivre » amène quelque chose de plus complexe encore. S’il s’agissait seulement d’être heureux, cela ne suffirait pas. Être vivant n’a, dans mon cas, jamais signifié être heureux. Cela ne rimerait à rien, dans ce cas-là. Non, il y a la vie à travers d’autres sentiments, tels que la Peur. Personne ne vit vraiment s’il ne craint pas, un jour, de mourir. Cela signifie donc qu’avant cela, je ne vivais pas. Je n’ai jamais réellement craint de mourir. Thanatos pouvait me faucher n’importe quand, je n’avais plus rien à perdre, alors pourquoi lutter ? J’avançais, simplement, parce qu’on me le disait, parce que c’est quelque chose que, nous autres humains, faisons tous les jours. Néanmoins, ce jour-là, je compris que mourir me faisait vraiment peur. Si jamais, je mourais maintenant, oui, je serais heureuse. C’est étrange, mais j’aurais retrouvé le fruit de mes pensées, celui qui faisait battre mon cœur à distance, qui accélérait mon rythme cardiaque sans même être à mes côtés ; alors je pourrais mourir heureuse. Mais cela me frustrerait au plus haut point, parce que je n’aurais pas pu poursuivre, pas pu construire quelque chose. En cela, je craignais la mort. Je craignais qu’elle ne réduise tout à néant. Qu’elle ne détruise tout ce que je venais de bâtir. Qu’elle ne balaie, d’un revers de la main, tout un univers. Un monde fragile, mais merveilleux.

Pour finir … Vivre, en soi, c’est plus compliqué que cela. Vivre, c’est sentir son cœur battre à tout rompre quand un événement nous touche, c’est vouloir se battre pour quelqu’un, c’est être capable d’avancer parmi les ténèbres pour retrouver cette Étoile qui nous a guidé pendant des années ; mais c’est aussi se sentir vraiment présent. C’est avoir un objectif stable et se battre contre vents et marées pour l’atteindre. Mais vivre, avant tout, c’est se savoir exister pour quelqu’un d’autre.

Et dans ses bras, je vivais. J’existais. J’étais simplement là. Je n’étais plus le pantin d’un songe, ou la marionnette de la vie. J’étais simplement moi, Mitsuharu Yuka. Une meurtrière, une kunoichi, mais surtout … Une femme. Un être humain. Une pauvre petite fille qui courait après ses rêves depuis son tour à la prison, et qui venait de retrouver l’essence même de son existence. Je fermais doucement les yeux et me laissais porter contre son torse. Ma respiration était lente, régulière. Je me sentais terriblement bien, mieux que jamais.

Il déposa son saphir sur moi, faisant grimper un frisson le long de mon échine. Je rougis, forçant pour ne pas que mon regard ne dévie. Il était magnifique … Il avait des allures d’ange. Un peu comme cette merveilleuse créature qui descendait pour vous récupérer, quand vous êtes à deux doigts de la mort, et qu’il ne reste plus qu’elle comme espoir. C’était un peu la même chose, finalement. Je m’apprêtais à reprendre une vie normale, dénuée d’intérêt, quand mon célicole m’attrapa la main pour me mener dans un monde incroyable, fantastique. Un monde qui n’avait pas de forme véritable, qui se tapissait simplement dans notre esprit et prenait forme lorsque nous étions ensemble. Comme une bulle, qui n’entourait que nous et mettait tout le reste de côté. Je lui souris, en proie à une sensation inconnue. Une promesse. Celle de ne plus jamais se quitter. De toujours rester … ensemble. Quoi qu’il puisse advenir. Les rougeurs sur mes joues devinrent plus marquées.

    — Oui … Plus rien ne nous séparera, Yoru. Plus rien. Je te le promets, moi aussi …

Je me serrai contre lui, tout en fermant doucement les yeux. Je pouvais me laisser porter, je savais que, désormais, je ne risquais plus rien. Il était là, contre moi, au creux de mes bras. Il ne partirait plus jamais, je n’aurais plus à lui courir après. Il ne serait plus que le songe survivant au travers tous les souvenirs, non. Il serait … Lui. Yoru. Ma moitié. Celui qui me rendait vivante. Qui donnait un véritable sens à ma vie, qui me conférait le courage d’avancer. Celui qui me permettrait de grandir, de ne plus me perdre dans d’immondes cauchemars. Il serait là, tout simplement. Dans mes pas, dans mon ombre, dans mes pensées … Dans mes bras ? Je rougis davantage, un sourire candide sur les lèvres. Nos regards se croisèrent de nouveau.

J’en perdis le souffle. Cette si courte phrase. Ces trois mots, auxquels on s’attend, ceux que l’on espère entendre de la bouche de celui qu’on admire, qu’on aime depuis si longtemps. Ces courtes syllabes qui résonnèrent dans ma tête un nombre incalculable de fois, qui lancèrent mon cœur à une vitesse folle, qui me firent trembler de partout. Il les avait dits. Cela ne me surprenait pas, mais jamais, non, jamais, je ne me serais attendue à ce que cela soit aussi merveilleux de l’entendre les dire. Je n’eus pas le temps de réagir que, déjà, ses propos furent scellés par un baiser. Mon cœur explosa, tout simplement. Je le serrai contre moi, partageant le baiser avec une tendresse nouvelle. Je n’avais jamais ressenti quelque chose de semblable. C’était tout simplement formidable. J’en oubliais tout le reste. Je l’enlaçais doucement, rompant peu à peu le baiser, pour mêler nos regards. Je lui souris, toujours aussi rouge.

    — Je…Je t’aime aussi, Yoru…

Mon univers prit une forme différente. Il se modifia du tout au tout, ce n’était plus la même chose. Le mal qui me rongeait avait disparu, je ne le sentais plus remonter au travers de mes songes, il s’était tout simplement tu, vaincu par toutes ces émotions. J’exhalai un long soupir, avant de reposer ma tête contre son torse, sans rien dire. Cette nouveauté lançait des perspectives toutes aussi belles, les unes que les autres, me laissant comme une enfant rêveuse.

Je levais mes prunelles vers le ciel. Le bleu de ce dernier s’en était allé, pour laisser place à un fin manteau violacé, qui s’étendait peu à peu sur les rues de Kiri, et recouvrait jusqu’au temple de Sanbi. Le froid mordait de plus en plus ma peau, et me faisait frissonner. Je lui lançai un nouveau regard, les prunelles pleines de petites étoiles scintillantes. Nous allions nous quitter. Je … Je ne le voulais pas. Non, je voulais qu’il reste là, près de moi, qui rien ne puisse interférer, pas même cette foutue barrière. Le temps. Non. Il ne devait pas nous vaincre. Rien ne devait nous séparer. Absolument rien. Surtout pas quelque chose d’aussi futile. Je me serrai davantage, mes mains tremblant doucement.

    — Je ne veux pas… que tu t’en ailles, que nous nous séparions… Plus maintenant… Je veux rester avec toi mon amour… Rester avec toi malgré le Soleil qui se couche, malgré la nuit qui tombe… Ne pars plus, plus jamais…

Je rougis de nouveau, terriblement gênée de lui demander cela de manière si implicite, mais je ne parvenais pas à m’exprimer différemment … Je me mis alors face à lui, le contemplant un instant, avant de me reprendre.
    — Reste… Reste avec moi, Yoru… Ne nous séparons plus…
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Message(#) Sujet: Re: Renaître de ses cendres. [Yoru ♥] Renaître de ses cendres. [Yoru ♥] EmptySam 20 Avr 2013 - 21:50

Uni par les liens marmoréens de la borée, le couple naissant émergeait d'un endroit particulier. Stérilisé par une prolixe pellicule de neige, le cimetière du temple de Sanbi portait dans ses terres les morts des deux proches. Yûna pour Yoru, Kyurei pour Yuka. Chacun avait une importance capitale dans l’existence du survivant. Si aujourd'hui les deux Kirijins encore en vie pensaient de telle façon, bougeaient, vivaient d'une certaine manière, c'était car leur proche les avait grandement influencés. Aujourd'hui, par un heureux concours de circonstances hasardeuses, les anciens prisonniers se retrouvaient, et s'étaient avoués leur amour. Le lieu dans lequel cet oaristys prenait forme était des plus importants. Au cœur d'un lieu dédié à la mort, les deux êtres se retrouvaient, et renaissant dans les cendres aqueuses du cimetière. Leur couple prenait dès lors les traits d'un phénix, dont les ailes flamboyaient sous l'impulsion de la passion et du bonheur. Ce même phénix brisait toutes les barrières de la vie. Il brisait l'espace-temps, la douleur, la tourmente, l'ennui. Le feu qui l'animait le lui permettait. Il était si fort que même le Soleil se sentait jaloux de son lustre coruscant. Il s'évadait loin des tracas de la vie, et volait, haut, très haut, portée par les vents de la liberté.

Dorénavant inondé par le Bonheur, l'oblat désirait vivre le plus longtemps possible auprès de Yuka. Il voulait que ce phénix, encore à l'état d'oisillon fragile grandisse, et que le feu qui investissait son plumage brûle davantage, avec autant d'ardeur possible. Il aspirait à faire voler aussi haut et loin que possible cet oiseau, et que ses plumes luisent de milles et une couleur. Autant de couleurs pour autant de projets dans l'avenir aux côtés de sa moitié à l’œillade de rubis incarnate, autant de couleurs que d'espoirs avec elle, que de rêves, et de déclarations à son égard. La première, je t'aime, était le pilier central de leur union tout juste sortie de l’œuf. Yoru désirait que ce phénix touche les nuages de la félicité et de la pérennité. Et même après sa mort, le Ryûzoji désirait surtout que ce phénix continue de vivre, dans l'esprit des gens, à travers les souvenirs. Car pour lui, c'était dans l'expérience, réfugiée dans l'esprit à travers la mémoire, que résidait l'essence des liens qui pouvaient l'unir à la Mitsuharu. Si par malheur, ils venaient à être séparés pour une raison alpha, le Ryûzoji savait que tôt ou tard, il pourrait subvenir à ses pensées avec les souvenirs qu'il avait vécu aux côtés de la belle demoiselle. Et si jamais elle venait à périr dans l'exercice de ses fonctions, alors les souvenirs lui donneraient encore et encore la force de continuer à vivre pour elle, à vivre pour deux, pour que le phénix, amputé d'une aile, ne s'écrase pas au sol, aptère.

Le pacte de la proximité scellée par leurs lèvres, Yoru se rapprocha davantage de sa célicole, autant qu'il put, tout comme elle tenta de réduire la distance, dorénavant microscopique. À présent, le seul moyen pour éliminer de façon éphémère cette distance presque imperceptible, c'était de tendre vers une union somatique proche de la débauche. Et pour l'heure, il n'était pas question d'en arriver là dans un lieu aussi peu adéquat à cette démarche ardente. Le phénix n'avait pas besoin de percer le septième ciel dans la cité des morts. Il devait attendre le moment opportun, plus exactement lorsque les deux amoureux verraient leur intimité cernée par quatre murs et rien d'autre. Pour l'heure, il fallait finir d'écrire la page de cette journée. Le rideau de la sorgue s'étendait sur la scène céleste, et de par cette apparition mystique, le Lutin Pourpre se sentit investi d'une énergie nouvelle. Comme un alignement stellaire idéal, l'amour et la nuit se mêlaient dans une harmonie propice à la transe du quidam. Yoru était un Lutin de la Nuit, comme l'induisait son prénom. Vivre le crépuscule aux côtés de sa moitié pour lui était une façon de vivre avec plus d'intensité qu'auparavant. Ainsi, avant de répondre à sa dulcinée, le tsar de la brume noctulescente scella à nouveau ses lippes à celles de sa princesse. Le baiser créé fut d'une amplitude supérieure à la norme, tant le borgnon accentuait le moment. Il décrocha par la suite son visage du sien, plongea l'espace d'un instant son saphir dans ses rubis, avant de reprendre la discussion.

✗ Yuka… maintenant que nous sommes enfin réunis, maintenant que nous nous sommes promis de ne plus nous séparer, sache que dorénavant, pas même la Nuit ne nous éloignera. Tout comme Kiri est mon domaine, la Nuit est mon territoire. Dedans, je suis chez moi, et donc par conséquent, puisque tu es ma moitié, toi aussi.
Le quidam manqua de rougir, face à la réponse qu'il formula face à sa moitié en question. Elle aussi désirait que le phénix possède son propre nid. Le Lutin Fou serait ainsi ravi de vivre ses nuits avec Yuka, de s'endormir à ses côtés, et de se réveiller contre elle.
✗ Et pour rester ensemble, partager le domaine de la Nuit, ensemble, et bien… le mieux serait que tu viennes avec moi. Rentrons chez moi, nous verrons demain pour le reste de tes affaires.
Finissant de formuler maladroitement son invitation à dormir avec lui, il quitta alors le cimetière aux côtés de sa moitié, manquant de rougir encore. Un nouveau chapitre venait de s'ouvrir pour les deux jeunes Kirijins. Le chapitre du renouveau, marqué sous le signe du phénix. Tandis que le couple gagna l'appartement du Ryûzoji, pour qu'ils puissent se reposer, Yoru leva la tête pendant le trajet, son œil de cyclope visant l'empyrée nocturne. Haut dans les sommets stellaires, une étoile commençait à luire avec intensité. Elle veillait sur le couple, avec une intensité rassurante, flamboyante, à la manière d'un phénix touchant les cieux…
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