Spoiler:

Raki avait reçu son nouvel ordre de mission. Elle lui semblait un peu banale. Enfin, c'était la première fois que l'on lui demandait d'enquêter sur quelque chose, généralement, ce n'était pas le travail qui était demandé à un Genin. Sur ce point là, c'était original. Mais franchement, personne n'en avait rien à faire ! Les politiciens voulaient juste se sauver en réussissant à capturer un criminel ! Quoi de plus banal qu'un meurtre dans ce monde de sang et de sueur ? Même si tuer n'était pas son truc, le jeune homme avait parfaitement conscience qu'un jour ce serait peut-être lui ou un autre. L'un devrait mourir, et celui qui hésiterait à tuer, ne serait-ce qu'un instant, mourrait. Même s'il ne voulait pas tuer, ce serait peut-être une obligation.

Il marchait paisiblement dans la rue, sans se presser. On avait même décidé qu'un chaperon lui était nécessaire ! Un cas si facile, il pouvait certainement s'en charger lui-même et sans aucune aide ! Bon, d'accord, ses derniers résultats montraient clairement qu'il n'en avait absolument rien à foutre. Mission ou pas, si cela ne l'intéressait pas, on ne pouvait rien y faire ! Enfin, quand même, une femme en plus ! Il n'avait pas eu une idée plus horrible encore ? Des homicides, un meurtrier, un Genin démotivé, et une Chûnin ? Ce serait réellement le combat secret qui se livrerait dans la rue, sans que quiconque ne le remarque ?

La discrétion. Une qualité essentielle pour cette mission. Heureusement, Raki savait parfaitement y faire sur ce plan. On ne le soupçonnerait jamais d'enquêter sérieusement sur des meurtres. Tout simplement car il comptait laisser tout le travail à son binôme temporaire. Après tout, si cette fille était jolie, ni trop vieille, ni trop jeune, ce serait certainement à elle qu'il s'intéresserait le plus. On l'interrompait dans ses délires pour faire ça, il fallait bien une compensation. La prochaine fois, ordre ou pas, il finirait de tracer un cercle magique. Enfin, ce n'était même pas sûr que ce genre de cercle magique marche. Il l'avait trouvé dans un livre, et cela l'avait intrigué. Bien entendu, ce moment avait été choisi pour lui briser le moral.

Une sucette dans la bouche, Raki s'amusait avec sa langue à faire monter puis descendre le bâtonnets. Il ne savait même pas à quoi cette femme ressemblait, mais si elle était moche, il fondrait en larmes. Enfin, peut-être que les meurtres seraient intéressants. D'après ce qu'il avait lu, cela faisait déjà quatre décès très suspects. Demander de la discrétion dans ces conditions. Par peur que le coupable s'échappe ? Quelle idée simpliste. Le responsable devait bien être conscient que ses crimes ne resteraient pas impunis. S'il continuait à sévir, c'était sans doute parce qu'il pensait pouvoir leur échapper. Cette personne devait être excessivement narcissique, et quelqu'un qui ne serait jamais suspecté ou qui détournerait aisément les soupçons. A moins que cela ne soit un abruti fini, qui ne se rendait même pas compte de ce qu'il commettait comme atrocité. Il y avait encore l'hypothèse que plusieurs personnes puissent être responsables. Dans ce cas, elles auraient encore plus d'yeux pour les observer, et si le duo se rapprochait d'eux, ils disparaîtraient comme si on venait de lancer une alerte tempête.

Ce serait difficile d'agir discrètement. Ils devaient absolument voir les scènes de crimes pour pouvoir en conclure quelque chose, et si on les voyait, la rumeur se propagerait très rapidement dans la ville. Ce devait être un des malheurs du bouche à oreille, même si le coupable ne se trouvait pas directement à côté de la scène pour les observer, il pourrait comprendre qu'on le traquait. Tant qu'on ne s'approchait pas, il ne devrait pas y avoir de problème.

D'un pas lent et mesuré, Raki passa devant l'une des scènes de crime. Une petite ruelle, sombre et isolée. L'accès en avait été barré par des planches. Des ordures traînaient là, ainsi qu'un chat, un rouquin. Il était bien beau d'ailleurs. Malheureusement, ce serait difficile de visiter cette scène avec le monde qui passait autour. Cette rue menait au centre ville, et donc il y avait du passage. Si on les voyait farfouiller dans le coin, leur mission serait un peu en péril.

Parmi les quatre homicides, il y avait trois hommes et une femmes. Raki avait des photos, ils n'avaient visiblement rien de physique en commun, tous bien différents. Il avait également des noms. Aoki Samui, Hamachi Gabu, Sakuretsu Hiro et la femme était Sengotsu Karin. Parmi les scènes de crime, trois seraient difficiles d'accès, car les endroits étaient adjacents à des rues menant au centre-ville.

Il ne restait qu'un lieu, et comme par hasard, la femme y avait tué. Un des rares points communs entre les hommes : ils avaient été tué dans des endroits assez exposés, dangereux pour le criminel. Cela semblait d'ailleurs étonnant que personne n'ait rien remarqué.

Enfin, la femme avait été assassiné dans une réserve un peu à l'écart, où des épices séchaient et étaient conservées. Si sa partenaire n'était pas stupide, elle penserait également que cet endroit serait le plus pratique pour débuter leur travail. Pourvu qu'elle porte une tenue sexy, les cadavres n'étaient pas sa tasse de thé, et il lui faudrait un peu de réconfort !

Lentement mais sûrement, Raki avait marché pour atteindre le fameux lieu. S'arrêter pour le regarder avec insistance serait certainement déplacé. Si sa compère se trouvait dans le coin, elle devait se cacher en l'attendant. Décidément, cette mission serait un jeu de cache-cache ! Un jeu, cela commençait déjà à l'intéresser un peu plus. Enfin, juste la partie jeu, tout ce qui consistait à rechercher le coupable, il laissait la réflexion à quelqu'un d'autre ! Maintenant, il ne lui restait plus qu'à continuer un peu avant de monter sur un toit. Cela serait plus discret en gardant quelque distance, et plus pratique pour une rencontre.

Je n’imaginais pas réellement ça comme ça. Chaque jour, le courrier affluait chez moi. Depuis que j’avais été promue Chûnin, on me demandait partout, dans chacune des missions, pour me les donner, pour que je résolve des trucs insignifiants ou juste pour me demander mon avis. Quand j’étais plus jeune, je voyais le métier comme un moyen pour les gens d’être rempli de gloire. Maîtriser un élément, en faire des techniques, sauver des gens… Sur le papier, la place étant grandiose. Seulement, dans les faits, la majorité du temps était consacrée à de l’administratif, des discussions, des tentatives de persuasions et des enquêtes. La majorité du temps, aucune technique n’a besoin d’être utilisée…

Et aujourd’hui ne dérogerait pas à la règle. Bien loin des missions de haute voltige que certains doivent faire, je devais aujourd’hui me substituer aux autorités locales pour résoudre une étrange affaire de meurtre en série. Quatre personnes, trois hommes et une femme. Pire, je devais faire équipe avec un Genin que je ne connaissais pas. Le fait qu’il soit Genin me dérangeait moins que je ne le connaissais pas. Je n’étais pas une fille très sociable, et récemment, les rencontres s’accumulaient. Je ne dis pas que c’est une mauvaise chose, je pense juste que les sentiments et les relations sont un frein au bon déroulement d’une mission ou d’une quête. Car lors de ces dernières, si elles volent plus haut que « Oh la mère Michelle a perdu son chat », on est souvent confronté à des choix très difficiles, qui peuvent être influencées de manière négative par ce qu’on ressent. L’absence d’émotion est bien souvent synonyme d’efficacité.

Un autre synonyme est, pour moi en tout cas, l’autonomie et l’indépendance. Si l’on doit compter sur personne d’autre que soi, il est bien plus probable que la mission soit une réussite. D’autant plus quand on ne connaît pas la personne avec qui l’on doit travailler. Les chances pour que l’on tombe sur un abruti congénital incapable de compter le nombre de ses doigts de pieds sont à peu près équivalentes aux chances d’obtenir un shinobi doué et utile. Non, définitivement, je préfère travailler en solo. Surtout que le ninja avec qui je devais travailler était en retard. Cela faisait une bonne dizaine de minutes que j’étais allongée sur le toit d’un immeuble près de l’endroit où l’une des victimes avait été tuée. Au vu de l’ordre de mission et des endroits en question, il était évident que seul celui-ci pouvait être intéressant à visiter… Et encore. Nous sommes ceux chargés de l’enquête, pas des recherches. D’autres sont passés avant nous, et ont récolté le plus d’informations possibles pour dénicher les indices des lieux…

Mais j’avais vu juste. Un gamin d’environ seize ans se présenta sur le toit où je m’étais allongée, un ninja au vu de son bandeau apparent. Je me levai, époussetant rapidement ma robe de la poussière qui s’y était incrustée, et lui sourit chaleureusement, comme à mon habitude, pour cacher ce que je ressentais réellement, à savoir ici de l’agacement. Un gamin en retard que je ne connaissais pas… Konoha aimait me causer du souci depuis ma promotion. A croire que c’était Miko qui écrivait les missions.

- Bonjour ! Je m’appelle Krystal, et je serai ta partenaire pour cette mission !

J’ignorais les documents qu’il avait en sa possession. J’ignorais même s’il les avait tout simplement lus, mais ils possédaient des informations importantes, et j’avais déjà bien entamé la mission. Je vous l’avais dit, j’aurais pu la faire toute seule. Mais je pense que les hautes instances souhaitaient que les genins s’expérimentent un peu plus. Une fois les présentations terminées, j’expliquai mes découvertes.

- Tu as sans doute pu le voir, à première vue, aucune des quatre victimes n’avait un quelconque lien avec une autre. Milieux différents, noms différents, métiers différents, âges différents. Seulement, Konoha nous a donnés un élément important : leur emploi du temps de ces deux derniers mois. Je lui montrai le parchemin qui avait été joint à mon enveloppe. Tous ont, au cours de ces deux mois, fait au moins un voyage à Ame no Kuni, pays conquit récemment par Konoha. Je me suis donc renseignée un peu plus sur les raisons de leur visite : chacun avait pour projet de déménager du pays du feu pour s’installer à Ame. C’est là qu’est notre rapport.
J’ai donc continué à enquêter, car le seul mobil est la volonté des Amejins de ne pas vouloir des Konohajins chez eux. Il fallait un Amejin fidèle, ayant facilement accès à Konoha, donc par définition, un Amejin résidant actuellement au village de la feuille. Tu me suis ?
Ils sont trois : Sabakyô Seijiro, que j’exclue d’office pour être un ninja d’exception, et parce qu’il était en mission, loin, lors des meurtres, et deux simples villageois d’Ame : Ikaro Miwa et Seto Akira.

Les déductions étaient rapides, mais plutôt simples, et je suis sûre que si Konoha n’y a pas pensé plus tôt, c’est juste parce qu’ils étaient débordés. Je ne suis pas d’une intelligence hautement supérieure non plus, ce que j’ai trouvé, tout Jônin le pouvait. Restait donc à interroger, discrètement, les deux hommes, en prenant garde à ce qu’on dit. Ils ne sont pas Konohajins de base, rien ne les empêche de se rendre à Ame dès ce soir s’ils se sentent en danger. Ils ne seront pas poursuivis, Konoha n’étant pas leur village d’origine.

- Alors, on commence par lequel ?

Un succès. Il le sut dès l'instant où il la vit sur le toit. Cette femme serait sa baby-sitter pour cette stupide mission. Il ne restait plus qu'à savoir qui cela irritait le plus, lui ou elle ? Si cela la gênait, elle n'en montra aucun signe. Calmement, elle se releva, fit sa petite miss proprette en époussetant ses habits. Une maniaque ? Une égocentrique ? Une superficielle ? Pour l'instant, il n'aurait su le dire. En tout cas, elle donnait une belle image, chaleureuse, souriante, accueillante. Un peu trop même. Il n'y avait rien de tel pour mettre mal à l'aise Raki.

« Bonjour ! Je m’appelle Krystal, et je serai ta partenaire pour cette mission ! »

Partenaire, un bien grand mot. Des deux, il n'y en aurait qu'un seul qui travaillerait. Le médecin n'avait absolument aucune intention de se fatiguer à travailler sur cette affaire. Un tueur en série n'était pas de son ressort estimait-il, mais de celui d'un plus haut gradé. On manquait de main d’œuvre, cependant cela ne justifiait pas sa présence. Autant dire que la tête du village l'avait envoyée en mission seule. Un corps sans âme l'accompagnerait, certes, car il n'aurait pas le choix. Cependant, son esprit vagabonderait bien loin, à des préoccupations toutes autres et bien plus intéressantes que des cadavres.

Krystal semblait confiante en ses capacités, et Raki n'avait aucune raison de douter du fait qu'elle puisse résoudre tout cela sans lui. Des deux, il était censé être le moins gradé a priori. Leurs grades pouvaient être identiques, mais dans tous les cas, il n'y avait pas plus bas que Genin. Parmi les Genins, il était même sûr et certain qu'il n'y avait pas plus bas que lui. Le record du nombre de missions ratées par abandon lui appartenait, ou dans le cas où cela se faisait en équipe, le nombre de missions mises en danger par inutilité.

Inutile, un mot qui le qualifiait très bien en général, mais en l’occurrence, il qualifiait encore mieux Krystal. Ou plutôt le petit discours prétentieux de cette dernière. Elle devait avoir hâte de se débarrasser de lui et de cette mission. Il avait l'impression de n'être qu'un stupide gamin à qui l'on donne une sucette pour qu'il arrête de crier. Mais il ne criait pas. Il ne lui en voudrait même pas d'être distante, froide, même violente. Si cela pouvait lui faire passer ses nerfs que de lui coller une baffe, qu'elle le fasse. Tout cela n'avait aucune importance, sa nature trop conciliante lui jouerait des tours... un jour. Pas pour le moment en tout cas.

Quatre victimes, une femme, trois hommes. Aucun lien apparent que ce soit dans leurs familles, leurs métiers, leurs physiques, leurs âges, leurs origines. Par on ne sait quel miracle, elle avait obtenu un emploi du temps de ces quatre là, et il semblait finalement y avoir un lien : le pays de la Pluie ? Quelle tristesse d'habiter dans un pays sans Soleil. Ils voulaient tous y déménager ? Un Amejin extrémiste qui élimine ceux qui veulent déménager là-bas ? Quelle plaisanterie. Tuer des gens parce qu'ils apprécient notre magnifique pays ? C'est un peu extrême, surtout si l'on n'y habite plus, c'est comme combattre à l'autre bout du monde pour son pays, il n'en a pas besoin, et on ne le quitte pas si l'on l'aime tant que ça. Non, cela ne collait pas. Mais il y avait encore un détail qui faisait sans aucun doute s'écrouler toute cette belle théorie. Hamachi Gabu, l'un des hommes, était également originaire de ce village. D'après les informations, sa famille avait déménagé lorsqu'il avait cinq ans, soit il y a de cela vingt-trois ans. Qu'un fanatique tue l'un des siens qui souhaitait retourner à ses racines, cela ne semblait guère plausible.

Cependant, même dans le raisonnement de Raki, il y avait deux failles qui pouvait être exploitées. Déjà, rien ne disait que le meurtrier ait été au courant pour Hamachi Gabu. Il pouvait très bien ignorer que celui-ci fut un des siens dans le cas où le tueur se trouvait être un Amejin comme Krystal le supposait. De plus, des fanatiques, on pouvait en trouver de toute sorte et pour tous les goûts, à la limite, un Amejin qui défend sa patrie à l'étranger contre des intrus qu'il ne verra jamais... C'est excentrique, mais pas impossible non plus. Peu probable, 2% à peu près. Mais cela restait suffisant pour que Krystal puisse continuer à s'avancer là-dessus.

Raki ne s'était pas intéressé aux rapports, il avait juste lu les fiches des victimes, et les informations sur elles, afin de savoir où il devrait se rendre en premier en imaginant que son binôme serait suffisamment intelligent pour l'y trouver. Cela s'avérait être le cas. Mais dans son empressement, elle avait oublié qu'un d'eux venait du même village. Une fissure dans un mur solide.

« Alors, on commence par lequel ? »

Que répondre ? Devait-il la contrarier en remettant en doute toute sa théorie ? Elle se tenait toujours, même si cela ne tenait qu'à 1,5% au final selon Raki. 2% que ce soit un excentrique fanatique de son pays, et il fallait rajouter à cela qu'il n'ait pas été au courant qu'il tuait l'un des siens. Deux grosses coïncidences. Non, Raki devait trouver quelque chose. Ikaro Miwa ou Seto Akira. Un dilemme. Aucun des deux ne correspondait à son propre profil. Enfin, il n'avait pas encore de profil, mais il avait un anti-profil, et les deux pouvaient s'y inscrire.

Mettant une sucette dans sa bouche, Raki commença à poser les rapports qu'il avait reçu sur le sol. Ces victimes n'avaient aucun lien apparent. Le seul lien lui semblait déboucher dans un cul de sac.

Les unes après les autres, il alignait les feuilles, sans dire le moindre mot. Un emploi du temps des deux derniers mois ? Sur les deux derniers mois on pouvait s'assurer que ces quatre personnes n'avaient rien d'autre en commun ? Pure folie.

Le bruissement des feuilles au vent, luttant pour se défaire des cailloux qu'il posait dessus, l'apaisait. Non, ils vivaient dans une beau gros village, mais de là à dire que quatre personnes ne pouvaient pas se retrouver, ni se croiser pendant deux mois, c'était utopique.

Avec calme, le jeune homme plaça la dernière feuille et posa un caillou dessus. Ils pouvaient s'être croisés dans un magasin, dans un bar, au restaurant, à la bibliothèque, en voyage...

Oui, durant leurs voyages à Ame, ils pouvaient s'être croisés, avoir été hébergé au même endroit, ou autre. Ce n'était pas forcément un psychopathe de la pluie.

La pluie ? Bien sûr. Pourquoi n'y avait-il pas pensé plus tôt. D'un rapide coup d’œil, il vérifia l'information sur les décès des trois hommes.

« Ils ont tous été tué un jour de pluie, sauf la femme. C'est pour ça que personne n'a rien vu. Les gens se pressaient, ou avaient des parapluie. Qu'est-ce que c'est bête de ne pas l'avoir vu avant... »

Raki se parlait à lui-même, peut-être même pas assez fort pour qu'elle ne l'entende, à vrai dire, il s'en fichait éperdument. Son mystère à lui avait été résolu. Après, la femme avait été tué dans une réserve. Les enquêteurs qui avaient débuté le travail n'avait pas fait mention de pluie parce que cela n'avait a priori rien à voir. Mais vu que c'était la dernière tuée, et que cela remontait à huit jours, peut-être qu'il pouvait sans rappeler...

« Jour un, je ne mangeai rien, juste un peu de pin. »

Oui, il avait étudié des conifères. Beau temps, un peu frisquet, légère brise.

« Jour deux, je mangeai des œufs, en regardant les cieux. »

Étude des étoiles, les constellations, il en avait appris une dizaine et s'était arrêté pour faire des calculs de distance. Ciel totalement dégagé.

« Jour trois, j'ai failli y laisser un doigt, quand ce poisson m'attrapa. »

Entraînement aux techniques médicales. A l'extérieur, temps humides du à la veille. Le jour quatre était donc pluvieux, oui, il s'en rappelait. Il s'était enfermé à la bibliothèque trois jours de suite car il pleuvait ou pleuvotait de temps à autre. Donc les jours quatre cinq et six... de la pluie. Mais le septième ? Non, il ne pleuvait pas le septième, sinon il aurait passé son temps à la bibliothèque également.

« Le huitième en mission, j'ai tondu le gazon. »

Pas de pluie. Il en était certain. Aku l'avait d'ailleurs engueulé parce qu'il se la coulait douce couché en l'herbe en train de l'arracher brin par brin. Chacun avait ses propres préoccupations après tout, lui ne se souciait pas de la réussite de la mission.

Donc il avait plus pour les trois hommes, et ils avaient été tué par jour de pluie, sans doute pour couvrir le crime plutôt que pour avoir un modus operandi. La femme avait été tuée dans une réserve par une journée plutôt belle, un peu nuageuse, mais pas humide pour un sou.

« Je ne pense pas que ce soit un Amejin. Hamachi Gabu était également originaire d'Ame. C'est possible que le tueur ne l'ait pas su, mais ce serait une drôle de coïncidence. »

Raki préféra garder pour lui le deuxième argument qui le lui faisait penser. Il fallait éviter de fâcher la princesse poussière autant que possible. Et la contredire une fois lui vaudrait certainement quelques froideurs, surtout qu'il l'avait ignoré pendant un bon moment pour réfléchir.

« Tu peux toujours aller les interroger si ça t'amuse, c'est possible que ta théorie soit correcte, mais je me pencherai plutôt sur la dernière victime. C'est la seule qui soit vraiment à l'écart et tué à l'abri. On peut imaginer que les autres meurtres n'ont aucun lien avec celui-là également. Ou que les autres servaient à couvrir celui-là, ou que celui-là nous mène sur une fausse piste. »

C'était la deuxième fois qu'il allait vraiment contre elle. La première, il reniait la belle théorie toute faite par un cas d'école de la jeune femme. Maintenant, il montrait quelle avait vraiment négligé de penser à autre chose dans sa hâte -sinon elle aurait vu que son tueur tuait un de ses camarades.

A vrai dire, Raki ne savait pas par où commencer. Pour l'instant, il préférait penser à deux affaires de meurtres. Oui, il valait mieux partir du fait qu'ils avaient affaire à deux tueur plutôt qu'un, sinon à un moment ils pouvaient arriver à une fausse conclusion. Il nommait le premier cas : le manteau noir de la pluie. Ça sonnait bien dans sa tête, peut-être moins à l'oral, mais Krystal n'avait pas besoin de le savoir. Le second aurait donc été l'épicier enragé. Plutôt pas mal. Il ne restait plus qu'à voir la scène du crime principal.

Il se moquait éperdument que des gens compétent soient passés avant lui. Le but d'une équipe était de confronter les idées, et d'arriver à de meilleurs solutions par l'union. Il avait trouver des failles chez Krystal, elle en trouverait chez lui, ou elle apporterait des solutions. Pour l'instant, lui n'avait aucun indice. Ces papiers avaient beau contenir toutes sortes d'informations, cela ne suffisait pas à Raki. Il devait voir avec ses yeux, sentir avec son nez, et toucher avec ses doigts.

« Moi je préfère vérifier que rien a été laissé dans l’entrepôt. Que tu trouves ça inutile de jeter un œil pour aller interroger quelqu'un me laisse dubitatif sur tes capacités. Et moi, c'est Raki. »

Il dit cela subitement en se relevant, jusqu'à présent perdu dans ses pensées, il n'avait pas du tout fait attention à sa supérieure. Cela faisait déjà trois fois qu'il faisait une remarque pouvant l'irriter, mais en même temps, s'il la suivait sur une fausse piste, cela prendrait encore plus de temps. Il n'en avait pas à perdre. Autant il pourrait aisément la supporter, autant elle aurait beaucoup de mal.

Spoiler:

Je le regardais faire sa tambouille dans son coin, sans vraiment comprendre ce qu’il se passait. On m’avait parlé de ce jeune ninja. Insolent, égoïste, personnel et impertinent. Il s’avéra qu’on ne m’avait pas menti. Loin d’être stupide, il avait cependant cette petite chose dans le regard et dans la voix qui nous donnait envie de lui ouvrir le ventre et de lui faire manger ses intestins. Car oui, ce qu’il disait avait du sens : si les causes de ces meurtres étaient réellement liées à la conquête d’Ame, alors pourquoi est-ce que l’assassin aurait pris pour cible un Amejin de base ?

La raison est pourtant simple, et aurait été trouvée par notre jeune genin s’il s’était donné la peine de lire les rapports que nous avions sur les victimes. Hamachi Gabu, la victime originaire d’Ame, donc, était un fervent défenseur de… La conquête, justement. Il est l’un de ceux qui a fait que Konoha n’a pas eu trop de problèmes lors de la réunion en l’Hokage et le chef des Sabakyo, prêchant la parole de la nation du feu à qui voulait l’entendre, et affirmant à tout va qu’être conquis serait la meilleure chose qu’il pouvait leur arriver. Récoltant beaucoup d’amis, et de partisans par la même occasion, il s’est également fait haïr par nombre d’opposants à la domination Konohajin. Et c’est pourquoi il habitait au village, d’ailleurs, pour éviter que les Amejins lui causent trop de problèmes sur place.

Puis, autre chose me tourmentait dans ce qu’il proposait et disait. Il voulait inspecter une zone déjà inspectée par des gens dont c’est le métier. Sa confiance envers Konoha était-elle si peu forte ? pensait-il réellement que des gens choisis et formés pour cela seraient moins compétents qu’un simple Genin qui n’a jamais eu la moindre idée de comment procéder lors d’une enquête policière ? Oh certes, nous avons, nous autres les ninjas, des bases dans ce qui est l’enquête, mais plus dans un rôle d’espionnage et militaire. Les affaires judiciaires ne nous concernent pas, et nous ne sommes ici que parce qu’il ne reste, au fond, que nous. L’excès de zèle ne serait que préjudiciable. Je souris donc à mon vis-à-vis après sa proposition qui, sans être ridicule, se révélait inutile.

- Des gens qualifiés ont déjà exploré la zone au peigne fin. Nous ne le sommes pas plus, il est inutile de refaire ce qui a déjà été fait, Raki. Ce n’est que perdre du temps… A moins que tu ne penses que ceux que Konoha forment ne sont pas assez qualifiés ?

Je souriais encore, mais la façon dont je lui dis tendait à montrer que je lui conseillais de ne pas me contredire sur ce point. D’autant que critiquer de la sorte les instances du village de la Feuille pourraient être très mal perçus, même si nous jouissions d’une liberté de pensée et d’expression plutôt conséquente au sein du village. Je tournai les talons, et pris la direction de la sortie de la zone.

- Si tu avais pris la peine de lire les rapports, tu aurais vu que Gabu était certes un Amejin, mais un Amejin pro-Konoha. Si la personne ayant perpétré ces meurtres était réellement l’une des deux que j’ai citées tout à l’heure, le mobile est également tout trouvé. Et puisque tu n’as pas répondu à ma question, je vais d’abord m’intéresser à Seto Akira. Reste là si ça te chante, je vais faire avancer notre mission.

Je pris donc la direction de la rue adjacente. Il pourrait retourner cette zone autant de fois qu’il le veut, il ne trouvera rien. J’en suis sûre et certaine. Il se compliquait bien trop la vie, alors que la réponse était évidente. Il faut également qu’il se souvienne du rang de notre mission. C. Ce n’est pas un dangereux criminel en série dont nous avons à nous occuper. Je doute qu’il ait pris des mesures disproportionnées pour faire ce qu’il a fait.

La route vers le dénommé Akira fut plutôt longue, habitant à l’opposé du village. Une bonne vingtaine de minutes de marche, me permettant d’apprendre, par exemple, que la fermeture d’un de mes restaurants préférés, « La feuille d’argent », qui avait débuté il y a deux semaines, se terminerait dans quelques jours. Ou encore qu’un tournoi de tir à l’arc se déroulerait dans la semaine. Ou encore que certains artistes peintres exposaient leurs tableaux dans une galerie non-loin du centre-ville. Bref, tout un tas de détails qui rendaient Konoha si accueillant : car le village était vivant, et surtout plein d’activités.

Cette utile exploration me fit vite oublier le temps du chemin, et sans m’en rendre compte, je me trouvais déjà devant le lieu où Akira résidait lorsqu’il était à Konoha. Une petite bâtisse aux pierres rouges, dont le jardin devant le porche était verdoyant. Je m’avançai, sans vraiment prêter attention à la présence ou à l’absence de Raki, et je frappai à la porte.

Un homme plutôt frêle et grand, aux cheveux noirs ébouriffés et à la peau pâle se présenta devant moi, semblant exténué. Je lui souris innocemment, m’inclinant légèrement pour le saluer. Je ne devais surtout pas l’effrayer.

- Bonjour, Akira-San ! Je m’appelle Krystal, et je suis Chûnin de Konoha. Nous avons appris récemment qu’un Amejin résident à Konoha a été tué, et sans vouloir créer de panique inutile, nous voulons nous assurer que tous nos ressortissants du pays de la pluie sont en sécurité. Vous voulez bien répondre à quelques questions ?

Cette affaire n'avait qu'un intérêt pour Raki, l'écarter de choses bien plus importantes. Les morts étaient morts. Ils ne reviendraient pas simplement parce qu'on trouvait leur assassin. Certes, ils méritaient que Justice soit faite. Mais ce n'était pas son rôle. Son rôle à lui consistait à maintenir ses gens en vie. Les cadavres le mettaient légèrement mal à l'aise. Une impression amer d'avoir fait une bêtise envahissait sa bouche à chaque fois.

Les gens sans émotion tels sa coéquipière ne pouvaient sans doute pas comprendre. Ils avaient perdu toute idée de définition du terme « humanité » après en avoir si souvent bafoué les règles. Combien de fois pouvaient-elles déjà avoir tué ? Combien de fois avait-elle été contre la moral dans des conditions qui ne s'y prêtaient pas ? Après tout, une fois un opposant vaincu, on avait toujours deux choix. L'éliminer, ou le laisser vivre. Lequel était le plus courageux ? Lequel était le plus lâche ? Ces questions devaient être éternelles. En ce qui le concernait, il préférait penser que laisser un ennemi en vie était plus courageux et noble. Mais d'un autre côté, il fallait du courage pour prendre une vie. Il ne l'avait certainement pas. Il choisissait la facilité. Tout comme les autres.

Il n'y avait pas grand chose à faire, pas grand chose à dire. La jeune femme avait une très forte personnalité. Autant dire que ce serait difficile de lutter contre elle sans volonté. Elle ne tarda d'ailleurs pas à le lui faire comprendre. Trouvait-il le personnel de Konoha incompétent ? Sincèrement ? Non. Leur travail était la base de sa position actuelle. Est-ce qu'il pensait pouvoir les surclasser dans leurs domaines ? Non. Est-ce qu'il les surclasserait ? Sans le moindre doute. Le problème ne venait pas des rapports, ni des compétences. Si ces gens avaient pu trouver le meurtrier, cela serait déjà terminé. La raison pour laquelle on faisait appel à eux était justement pour surclasser ces personnes. Pour réussir à tirer une vérité. Raki ne voulait pas entrer pour vérifier ce qu'ils avaient avancé, il avait suffisamment confiance. Ce qui l'intéressait, c'était ce qu'ils avaient manqué. Il avait déjà une petite graine qui commençait à germer. Bientôt, elle donnerait une fleur. De cette fleur naîtrait deux autres fleurs, et ainsi de suite, jusqu'à ce qu'un champ entier en soit couvert à perte de vue.

Krystal se montrait hostile. Et à vrai dire, l'hostilité n'allait que dans un sens. Elle ne valait pas grand chose à la base à ses yeux. Chacun avait ses idées, ses hypothèses, chacune cohérente. Des gens voulaient déménager à Ame, et on les tuait pour ça. Ou bien pour soutenir ce mouvement. Crédible. Très crédible. Elle n'avait pas forcément tort. Cela ne lui donnait pas non plus raison pour autant.

Sans doute vexée de se faire contredire par quelqu'un comme lui, la jeune femme commençait à monter rapidement. La discussion semblait légèrement unidirectionnelle. Elle commençait déjà à partir, assez remontée contre lui. A ses yeux, il était insolent, et insupportable. C'était une corvée de garderie. Cela devait l'énerver depuis le début de devoir travailler avec lui.

Soit, elle préférait travailler seule ? Cela ne le gênait pas. Qu'elle parte, s'il n'était pas désiré, il ne s'imposerait pas. A quoi bon obliger quelqu'un à faire une chose qui le répugne ?Ce n'était pas vraiment respectueux à l'égard de la personne. Et puis, il valait mieux la laisser réfléchir un peu. Si elle trouvait ses réponses, cela allait. Dans le cas contraire, ce ne serait pas excessivement difficile de la trouver.

Le travail d'équipe était indispensable, un jour, chacun d'eux le découvrirait, peut-être avec un drame à la clé. En attendant, tout ce que Raki pouvait faire, c'était de faire son propre travail. Reprenant une à une les feuilles, il s'attardait parfois sur un mot qu'il lisait. Quelque chose le gênait, même si lui-même n'aurait pas su dire quoi.

A ses yeux, il y avait toujours cet endroit étrange. Pourquoi cette réserve ? Les autres avaient été tué en pleine rue, mais la femme non. Il devait bien y avoir une raison. Peut-être était-ce l'oeuvre d'un autre ? Les blessures correspondaient aux autres. C'était peu probable que ce soit l'affaire d'un autre. C'était intriguant. Et en plus, quelque chose continuait de lui murmurer à l'oreille.

Un Amejin ferait tout ce chemin pour tuer les Konohajins ? Pourquoi ne restait-il pas dans son pays à le défendre ? Oui, il y avait de la haine dans une telle personne. Une envie de tuer, d'éradiquer cette menace pour lui et sa famille. Oui, une tellement personne tuerait. Il tuerait pour protéger les siens. Logique. Il devait donc avoir de la famille, des amis, des proches, une fierté. Parmi lesdeux suspects de Krystal, un seul des deux avaient de la famille, l'autre était célibataire, sans enfant. Ikaro Miwa. Autrement dit, celui qu'elle verrait en second. Deux filles, sa femme était malade, l'une de ses filles vivaient avec sa femme à Ame, l'autre avec lui. Si Krystal avait raison, elle avait mal choisi son premier suspect. Enfin, cela la concernait.

Dans tous les cas, Raki ne croyait pas à cette histoire.

Discrètement et par derrière, Raki s'engouffra avec ses papiers dans la réserve, prenant garde à ne pas se faire voir. Il y avait du sang par terre, séché, il n'y en avait pas beaucoup. C'était tout ce qui restait d'un meurtre. Un peu de sang qui disparaissait lentement. A quoi avait tenu cette si frêle vie ?

« Je te hais. Je te hais tellement. Je veux ta mort, ta destruction, que tout ce qui se rapporte à toi ne soit que cauchemar. Et c'est tout ce que je laisse derrière moi ? Une petite flaque ? Non. Je veux te dépecer, étaler ta crasse sur ce sol. Ici, je ne te hais point. Je t'élimine, purement, simplement, proprement. »

Ce n'était pas de la haine. Quelqu'un tuant pour chasser le mal de ses terres créeraient un plus gros carnage, pas cette mascarade. La personne ayant fait ça se contentait du minimum. Tuer pour tuer. Une nécessité ? Empêcher quelqu'un de parler peut-être ? Ce n'était pas une vendetta. En tout cas, pas ici.

Patiemment, Raki posa ses feuilles sur le sol. Une à une. Les autres victimes étaient loin d'être aussi propres. Elles étaient sales. Épargnées car c'était une femme ? Une possibilité. Pourtant, il n'y croyait pas. Elle était morte ici car quelque chose s'y trouvait. L'assassin l'avait trouvé, et s'était débarrassé de la femme après. Les autres avaient sans doute été tué un peu plus lentement pour obtenir l'information. En pleine rue ? Pourquoi torturer quelqu'un en pleine rue?

Des raisons, il pouvait y en avoir beaucoup. Le tueur avait du prendre ses précautions pour ne pas être pris. Il devait avoir une certaine méthode. Mais si ses hypothèses s'avéraient correctes, qu'avaient-ils bien pu chercher auprès de ces cinq personnes ? Finalement, Krystal n'avait pas foncièrement tort. Il devait y avoir un lien avec Ame. Tous y faisaient des voyages, mais la vendetta ne tenait pas à ses yeux. On cherchait quelque chose dont ces personnes connaissaient la position. Et l'endroit où elles avaient déposé l'objet se trouvait être cette réserve d'épice.

Impossible à première vu de savoir de quoi il s'agissait. Peut-être n'était-ce même pas ici à l'origine. Dans ce cas, le tueur chercherait une autre personne liée qui saurait où se trouve son bien. Comment savoir ?

Raki mit lentement une nouvelle sucette dans sa bouche. Il voulait savoir ce qui avait plus de valeur que cinq vies humaines.

« Je vais trouver mes réponses, quand bien-même elles n'existeraient pas. »