─ En bas, fais ça de la forme d’une signature.

─ Il est quasiment midi. Tu agiras à quatorze heures précises. D’ici là, retourne près de l’embarcation.
─ D’accord. Bon courage, Rei.

─ Ne t’inquiètes pas Anami, tout se passera comme prévu.

Spoiler:

J'étais fatigué alors que la journée ne faisait que commencer. Avoir fait la tournée des bars la veille ne fut pas une bonne idée. Encore heureux, je n'avais rien fait en cette matinée des plus ordinaires excepté faire la connaissance d'une gamine empotée et malpolie. Une fillette sympathique néanmoins, à la physionomie enfantine et à l'air innocent. J'espérais la revoir, disons que je l'appréciais. Les autorités du village caché du brouillard ne m'avaient pas sollicité en ce jour de printemps, c'est pourquoi je me pavanais dans les ruelles de la cité dans l'espoir de rencontrer quelqu'un qui saurait me divertir ne serait-ce que quelques heures. D'un ennui cet endroit, je vous jure ... Un dortoir avec des vieux. Après tout, nous étions en période de guerre et j'étais resté ici telle une mauviette, en principe je ne devrais pas avoir le droit de me plaindre.

Allumant une clope, la troisième ce jour, je regardai le ciel quasiment imperceptible dans ce pays. Le brouillard y est si dense que même les rayons du soleil n'éclairent que peu le village. Vivre dans l'obscurité, un bien curieux mode de vie. Soudain, les oiseaux volant dans les cieux vinrent tous d'un endroit bien précis non loin de ma position. À en croire leurs mouvements et leur direction, ils devaient sans doute venir des longs tunnels. Deux éventualités : soit un bon soit un mauvais augure. Les volatiles allant d'où je venais, j'étais bien embêté. C'est pourquoi, je partis vers les entrées du bourg. Et si nos troupes s'étaient faites laminées et que l'ennemi se rendait en ce moment même dans notre nation. Fuir ou affronter le fléau ? Un Homme normal aurait fuit, moi je préférais aller voir ce qu'il se passe. Ce n'est pas comme-ci je n'avais pas eu l'habitude de me faire des films. C'était peut-être une occasion de me foutre encore dans la merde. Je soupirai, j'observai tous ces villageois insouciants vivre. Vivre tout simplement. Ils étaient prisonniers de la spirale invisible appelée routine. Métro, boulot, dodo. Une vie tranquille, s'achevant par la mort de l'individu. Finalement je devrais sans doute suivre leur exemple et finir tué par un shinobi.

Arrivé aux souterrains, mon regard fut attiré par l'arrivée d'un individu que je n'avais jamais croisé. Tiens, une nouvelle tête. Je m'approchais de ce dernier lorsqu'un autre jeune homme dont la couleur de la chevelure était semble à la sienne l'interpella. Un garde. Le pauvre, je compatissais pour lui. J'avais dans le passé eu l'occasion de surveiller les allés et venues des Kirijins. C'était aussi ennuyant que de ne rien faire, en même temps, on ne fait pas grand-chose non plus ! Le jeune ninja aux prunelles rubis avait un visage qui me semblait familier, mais dont je ne pouvais mettre un nom dessus. Je m'approchais d'eux faisant tomber ma clope. Quelle maladresse ! Je suis aussi empoté que la gosse de tout à l'heure.

« Y a-t-il un problème ? » demandai-je.

Étrange que les rapaces fuirent pour si peu ...

Incompréhensible. Yuka regarda le ciel en soupirant. Une rencontre complètement incompréhensible, riche en nombreux rebondissements. Un dialogue toujours plus intéressant, et deux êtres qui se quittent, tout simplement. Petite routine troublée par une douce connerie. Fantasque et amusante. Au moins, il l’avait amusée pendant un petit instant. Juste assez pour qu’elle se décidât à faire autre chose, poussée par un courage éphémère.

D’une démarche rapide, la brunette quitta le temple de Sanbi, histoire de se rendre en plein Kiri, bien que ne sachant pas précisément ce qu’elle y ferait.
Sa petite balade, rythmée par le bruit du vent secouant les feuillages, fut brusquement arrêtée. Un groupe d’oiseaux passa à toute vitesse, comme chassés de leur nid par une présence qu’ils n’attendaient pas. Yuka fixa les piafs et la direction qu’ils suivaient. D’où ils venaient ? Des tunnels, à la vue de leur provenance. Quelqu’un ? Dans les tunnels ? Mmmh … En ces temps de guerre ? Mauvais présage. Ou alors, bonne augure. Peut-être que les combattants revenaient victorieux ?
Une lueur d’espoir traversa ses yeux. Poussée par la curiosité, elle suivit la route des tunnels.

Une fois arrivée, Yuka put distinguer trois silhouettes. Deux plus ou moins inconnues et la dernière … Kuraï ?! Impossible … Décidément, ils ne se quittaient plus. Poisse ou Chance, elle n’y fit pas gaffe et avança. Que se passait-il, ici ?

Les deux blondinets se faisaient face. L’un restait pour le moment silencieux, certainement questionné par le premier. Le blond aux boucles d’oreilles, et aux yeux aussi rouges que Yuka, parlait sur un ton qui la surprit tout d’abord, et finit par lui sembler banal. Un noble. Quelque part, la brunette connaissait ce genre de langage, mais d’autre part, elle en avait perdu l’habitude. Livrée à son propre sort, hors de question de faire preuve de manières. Cela ne paraissait pas être l’avis du blond.

Perchée sur le haut d’un arbre, Yuka surveillait la scène d’un œil intrigué. Le nouveau venu ne lui paraissait pas réellement dangereux, bien au contraire. Aucune source puissante de chakra n’émanait de lui, et il ne lui semblait pas vouloir de mal aux kirijins. Cependant, le fait qu’il fût deux à le regarder, et même à le questionner, rendait la kunoichi perplexe. Que se passait-il réellement ?

Silencieuse, elle ne quitta pas son perchoir.
Être à trois sur un seul homme, peut-être était-ce trop ? Se faire discrète lui permettrait de ne pas lui donner l’impression d’être acculé, ou de se trouver en territoire hostile.

─ Cela ne vous re-regarde pas… Dé-désolé…

─ Enfin, bien sûr que si ça vous re-regarde… Désolé, je m'appelle Takanama Aro… En réalité, je suis tombé amoureux d’une femme qui est re-retenue dans votre prison et…

─ J’aurais juste voulu aller lui re-remettre cette lettre, même si c’est qu-quelqu’un d’autre qui lui porte… Elle m’a trahi, et ce qu’elle a fait ici, c’est te-terrible…

─ Et j’aurais aussi voulu vo-voir un ami de mon grand-père, un vieux Jisetsu… Je ne de-demande rien de plus messieurs.

Spoiler:

Finalement, le blondinet ne sortait pas tant que cela de l’ordinaire … Les raisons de sa présence firent sourire Yuka. Une âme en peine venue visiter des gens. Cela sortait de la trivialité de Kiri, où souvent, ils passaient pour de véritables bourrins. Toujours tapie dans l’ombre, la brunette continuait de surveiller les agissements du petit blond. Rien de bien particulier, pas de manières étranges et répréhensibles. Au contraire, il semblait d’une innocence enfantine, avec ses petites histoires de lettre et d’amour. Ah, les idylles impossibles. La kunoichi haussa les épaules. Bah, pourquoi pas.

L’autre blond fit son entrée en scène. Quel être pompeux, ennuyeux. Ses expressions, ses manières, cette fausse supériorité qui émanait de lui … Yuka soupira. Que de mauvais souvenirs. Mais peu importait. Ses tics n’avançaient pas réellement la situation, l’important résidait dans ses dires, et ses futures actions. Il accompagnerait donc le jeune homme chez les Jisetsu. Très bien.

La kunoichi, intriguée par l’histoire de la lettre, finit par sauter de son perchoir et atterrir gracieusement sur ses deux pattes. Un sourire sur les lèvres, elle tira une petite courbette ironique aux deux Kirijins, avant de reporter son attention sur l’étranger.

« Eh bien, j’espère que mes collègues ne vous ont pas trop importuné ! »

Ah, comment se faire détester en une phrase. Yuka, quelle parfaite petite peste.
Très rapidement, elle se détailla le blondin, désormais face à lui, ce qui lui permettait de le voir de manière précise. Rien de physique ne semblait clocher. Il était parfaitement normal, ne semblant pas même porter d’arme particulière. Une simple visite, en somme. Quoique le voyage fut certainement d’une petite difficulté, au vu de son aspect de crevette frêle et maladroite.

Mais si c’était pour sa douce … Une amoureuse incarcérée, quelle poisse. Cependant … Le laisser aller seul en prison ? Même pour une petite lettre de rien du tout ? Impossible. Si le noble s’en fichait et préférait le récupérer au moment de la visite chez les Jisetsu, Yuka préférait s’assurer de la première missive. Le lieu, en soi, lui paraissait suspect de base. Et puis, en tant qu’ancienne taularde, elle avait l’expérience de ce trou à rats.

Presque avenante, elle lui afficha un sourire dénué de toute méfiance. Le pauvre. Voir débouler trois kirijins seulement pour sa tête devait le gêner quelque peu. Surtout au vu de son caractère de soumis. Ah, bienvenue à Kiri, hein.

« Mmh … Si cela ne vous gêne pas, j’aimerai être présente le temps que vous remettiez la lettre. Ne vous en faîtes pas, vous ne risquez rien, c’est juste histoire de m’assurer du bon fonctionnement de la chose. Et puis, je ne vais pas vous empêcher de voir votre aimée, vous avez dû faire un long chemin. »

Rien de plus simple, et de plus évident. Évidemment, s’il se reprochait quelque chose, il refuserait. Mais … Il n’était absolument pas suspect, non ?

HRP:

Un simple contrôle de routine. Fort bien, un contrôle très simple à vrai dire. Le blondinet était seul à surveiller les longs tunnels menant vers Kiri. Auparavant, un senseur coordonnait toujours les opérations. En période de guerre, on doit surement se contenter du strict minimum. Pour un individu malintentionné, entrer dans le bourg serait donc chose aisée. On passe vraiment pour des amateurs ici ... Pourvu que personne n'ait l'idée d'infiltrer le village : dans ce cas, on serait vraiment dans la merde ... À en croire les dires du jeune homme, il était ici pour une lettre, une simple missive où le blondinet avait écrit pour son amante. Une taularde, quelle indignation. Comment un homme peut-il donner son amour à une pauvre prisonnière, une criminelle. Cependant, il était doué d'une qualité dont je ne disposais pas. En effet, il savait mettre son orgueil de côté, chose inconcevable pour une personne de mon rang social.

Enfin, il était ici également pour aller à la rencontre d'un vieil homme dont le nom n'était inconnu pour aucun de mes interlocuteurs : Jisetsu. Clan proche du mien, avec le nom de l'individu je pourrais surement savoir de qui il s'agissait. Le gardien des portes était donc un membre de ce clan de fous d'où son visage me paraissant connu. Oui, à mes yeux, ils sont fous. Comment appelleriez-vous un groupe d'illuminés observant étoles et astres par le biais d'un Dojutsu ? Le fil de mes pensées fut interrompu à l'arrivée de Yuka ... Hein Yuka ? Certes, je voulais la revoir, mais pas si vite.

« Tu m'as suivis ? » demandai-je à ma nouvelle connaissance.

Cette petite peste usa encore de son hypocrisie afin d'interpeler un nouvel individu. Pour le coup, elle était vraiment forte ... pour foutre la merde. Elle m'agaçait, mais c'est pour ça que je l'appréciais. Je suis maso, sans doute. Peu importe, mon intention se porta une nouvelle fois sur l'arrivant à l'air faiblard. Chétif, il bégaya en parlant de son âme soeur. La faiblesse humaine dans toute sa splendeur, c'est dégoutant. Il se rongeait les ongles. Exemple type de la tête à claque que je ne pouvais absolument pas supporter. Un tel individu ne pouvait être que dangereux pour lui-même et non pas pour notre village.

Le garde fit signer au gringalet qu'il pouvait y aller. Yuka se proposa donc pour l'accompagner à l'ergastule du village. Endroit où je n'avais mis les pieds et dans lequel on m'avait toujours interdit d'aller. Personne à l'horizon pour brider ma liberté, je décidai sans consulter Yuka, ni même l'autre jeune homme. La gamine n'avait rien à dire, ni même le jeune adulte. Après tout, il était ici chez moi; c'était à prendre ou à laisser. Une nouvelle occasion de tuer le temps.

« Cette fois-ci, c'est moi qui te suis. » affirmai-je d'un ton enjoué.