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Le vent soufflait avec force dans les rues du village. Renzaburo, pourtant habitué à ce climat, n’était pas dispensé de se plier en deux pour se maintenir en équilibre et avancer à sa guise. Le peu de personnes qu’il rencontra sur son chemin adoptait la même posture. Les bourrasques étaient tellement fortes qu’il fallait au moins ça pour ne pas risquer de s’envoler. Les vêtements claquaient avec force. La progression se faisait lentement mais sûrement. Sa destination ? Le bureau des missions. Il put se détendre lorsqu’il rentra dans l’enceinte du bâtiment. Il se rendit dans la pièce devant lui où quelques Jônins patientaient derrière des bureaux. Il ne connaissait que trop bien celui où il devait se rendre. Celui où l’on confiait les missions de rang B. Le Jônin l’avait vu arrivé de loin. Il avait le bras tendu, parchemin à la main. Renzaburo le saisit, remercia le gradé d’un hochement de tête puis retourna dans le hall pour prendre connaissance de l’ordre de mission. Peu de lignes. Une situation simple. Mais insolite. Un cadavre avait quitté le repos de l’au-delà pour attaquer un village. On lui demandait d’aller élucider cette affaire.

Il partit donc sans plus attendre. La missive mentionnait qu’il s’agissait d’un village près d’une crypte au sud du pays. Il repéra l’endroit sur une carte du pays qu’il réussit à trouver au palais du Conseil souverain. Lorsque ce fut fait, il ressortit pour affronter la tempête qui sévissait dans le village. Le début du voyage fut long car il fallait lutter contre la météo. Lorsque les rafales de vent et de poussière cessèrent, il put adopter une allure plus dynamique. Le changement fut apaisant. Ses oreilles sifflaient encore mais cela s’améliora au fur et à mesure. Le trajet dura plus d’une journée. Le marionnettiste fit une pause à la nuit tombée dans le creux d’un rocher planté de biais dans le sable. Le lendemain sur les coups de midi, la destination se profilait à l’horizon.

Lorsque Renzaburo posa un pied dans le village, il se crut revenu dans le passé lors d’une mission où son frère et lui avaient dû se charger d’une plante aux effets néfastes. Personne dans les rues. Tous les volets fermés. Pas un chat errant. Il faut dire que les évènements avaient dus en traumatiser plus d’un. Et restait-il quelqu’un de vivant pour le renseigner déjà ? Il fit le tour de quelques habitations, frappant aux portes. Sans aucune réponse. Pourtant il lui semblait avoir entendu des bruits étouffés à travers le panneau de bois qui lui faisait face. Au bout d’un moment il en eu marre de se voir refuser systématiquement audience. Il se plaça dans la rue principale, au centre. C’est alors qu’il se rendit compte d’un détail qu’il n’avait pas vu jusque-là. Des pieux ornés de têtes décapités décoraient le toit de certaines maisons. Elles étaient les premières à la lisière de la sortie du village. Plus loin, un lieu ressemblant à un cimetière. Ce devait être là que se trouvait la crypte d’où provenait le cadavre meurtrier. Comme les recherches étaient infructueuses par ici, il se dirigea vers le cimetière.

Lorsqu’il arriva, rien ne semblait clocher. Il circula quelques temps entre les tombes pour trouver ce qu’il cherchait. Un petit escalier descendant vers les entrailles de la Terre. Il descendit pour trouver une pièce unique où trônait un cercueil de pierre au beau milieu. Son couvercle était fermé et vierge d’inscriptions. Il ne s’attarda pas plus dans cet endroit lugubre. Une fois dehors, il se posa à l’ombre d’un mur, dans le village, pour grignoter quelque chose. Il réfléchissait à la situation alors qu’il mâchait nonchalamment une boulette de riz. Tout ceci s’avérait compliqué si personne ne l’aidait. Alors qu’il perdait espoir, une silhouette se profila à l’autre bout de la rue. Sautant sur l’occasion, Renzaburo se mit à courir vers cet homme.

Le type était tout habillé de noir et portait un étrange masque qui lui faisait un nez proéminent. Comme un bec. L’homme marchait calmement et admirait les maisons autour de lui. Il regarda le marionnettiste à travers deux fentes. La seule chose visible sous son accoutrement était ses yeux verts. Renzaburo souffla un peu puis il s’adressa à l’homme :

-Bon…jour…Pardon de…vous…déranger. Renzaburo, Chûnin de Suna. Je suis envoyé ici suite aux mystérieuses attaques que subi le village. Vous êtes d’ici ?

-Plus ou moins, répondit l’étranger avec un ton énigmatique.

Un simple haussement de sourcil suffit pour inciter l’homme à développer sa réponse un peu plus. Il poussa un long soupir d’exaspération et ses yeux se levèrent vers le ciel.

-Oui mais c’était il y a longtemps. Je suis ici pour rendre visite à des amis.

-Très bien. Et vous ont-ils révélés quelques informations sur ce qui leur arrive ici ?

-Oui. Ils disent que chaque nuit, le cadavre qui repose dans la crypte se réveille de l’au-delà pour venir fouiller une maison. Il interrogerait les habitants à propos d’un certain type qui se fait appelé le Corbeau. Et lorsqu’il en a fini, il les tue. Car personne n’a d’informations à propos de ce type.

Renzaburo put sentir qu’il n’en saurait pas davantage malgré le sourire chargé de sous-entendus lorsque l’homme avait énoncé le nom de celui que cherchait le cadavre. Il le remercia donc pour le temps qu’il lui avait accordé avant qu’ils prennent congé l’un de l’autre. En une seconde, le mystérieux type avait disparu sans laisser de traces. Un drôle de bonhomme. Mais au moins maintenant, Renzaburo en savait plus sur les raisons de sa venue ici. Le cadavre n’apparaissait qu’à la nuit tombée et il tuait ceux qui n’arrivaient pas à le renseigner. Ce devait être de là d’où provenait les cranes sur les toits. Il ne restait donc qu’une seule solution. Le Sunajin sauta sur l’un des toits proches du cimetière, un où il n’y avait pas de têtes tranchées bien sûr. Puis il attendit. Il attendit que le Soleil disparaisse derrière l’horizon pour laisser le petit village dans une semi pénombre. La Lune vint éclairer la rue principale. Le bruit de verrous se fit entendre un peu partout alors qu’au loin, le crissement de la pierre perçait le silence nocturne.

L’objet de la présence de Renzaburo ne tarda pas à se montrer. Un homme s’avançait depuis le cimetière. Une démarche lente, en partie à cause de l’immense épée qui traînait derrière le nouveau venu. D’une taille considérable, l’arme ne semblait pas pouvoir être portée par un être humain. Pourtant celui qui avançait vers le village paraissait tout ce qu’il y a de plus normal. Sa silhouette ne laissait pas paraître une morphologie différente des autres. Mais il était certain qu’il était doué d’une force prodigieuse pour être équipée d’une lame pareille. Et comme pour démontrer cette force, il leva l’arme bien droite devant lui. Préparait-il un assaut spécial du style ninjutsu ? On ne dirait pas. Il continua d’avancer et il prit la direction de la maison où se tenait le Sunajin. C’était là sa prochaine cible. Renzaburo n’allait pas perdre de temps. La vie d’innocents était en jeu et il fallait neutraliser ce type. La menace était imminente donc il chercherait des réponses à ses questions un peu plus tard.

Sans plus attendre, le pantin Kobura fit son apparition. La lourde tête du serpent géant se dirigea vers l’homme puis sembla s’arrêter comme si elle avait verrouillée sa cible. Ce qui était le cas en fait. La gueule de la marionnette s’ouvrit pour faire déferler sur le mort-vivant une salve de dix senbons. L’homme ne cilla pas. Pourtant tous les projectiles avaient fait mouche ! Renzaburo réitéra plusieurs fois l’opération. Mais rien n’y fait. Le cadavre continuait sa marche macabre. Puis les mots de l’ordre de mission revinrent à l’esprit du Chûnin : « Il est plus résistant qu’un homme normalement constitué ». Les senbons ne seraient pas utiles à moins d’arriver par centaines de milliers. Il fallait revoir la stratégie. Cependant Renzaburo devait faire face à un problème plus important pour le moment.

En plus de n’avoir subi aucun dommage, le macchabée avait été détourné de sa cible principale. Il regardait le Sunajin d’un regard vide. C’était sa nouvelle cible. Renzaburo se pensait à l’abri sur son toit. Grossière erreur. Le revenant exécuta un bon prodigieux, malgré le poids non négligeable de son arme, et arma son bras pour infliger un violent coup au marionnettiste. Ce dernier eut à peine le temps de ramener son fidèle Kobura sur son flanc droit, du côté où allait frapper le cadavre, afin de limiter les dégâts. Il eut tout de même le droit à un beau vol plané. De plus, sa marionnette avait beaucoup souffert de cet assaut. Un deuxième coup porté sur la même zone la fendrait en deux.

Malheureusement, sans elle, Renzaburo ne pouvait espérer infliger le moindre dégât à son adversaire. L’essentiel de ses attaques les plus puissantes s’effectuaient avec sa marionnette. Le mort-vivant ne perdit pas de temps pour se diriger vers eux d’un pas lourd. Il fallait trouver un moyen de le stopper. Renzaburo passa en revue ses techniques. Il n’avait pas une force de frappe suffisante pour arrêter ce zombie. Comment allait-il faire ? A peine avait-il le temps de réfléchir que le mort-vivant chargea de nouveau. Mais il n’était pas très rapide. Le marionnettiste eut le temps de l’esquiver, sentant le vent que remuait sa lame au passage.

Les mouvements du cadavre étaient lents. Assez pour permettre à Renzaburo de les esquiver. C’était une bonne chose déjà. Il allait pouvoir élaborer une stratégie en limitant les dégâts. Les assauts redoublèrent et même si les esquives du Sunajin l’empêchaient de rejoindre le zombie dans l’au-delà, il commençait à se fatiguer doucement. Un coup de la part du macchabée et s’en était fini du Chûnin de Suna. Il fallait l’empêcher de bouger pour commencer. Renzaburo positionna une main devant son visage et il forma une multitude de boules électriques qui se répandirent à quelques centimètres du sol sur toute la zone. Cela allait empêcher le cadavre de bouger. Ce dernier essaya d’avancer mais l’explosion d’une des sphères et la décharge qui s’ensuivit acheva de le convaincre. Il resta donc à sa place. Ce qui laissa le temps au marionnettiste de préparer la suite qui promettait d’être gourmande en chakra. Il forma cinq sphères, plus grosses que les précédentes qu’il pouvait diriger par la pensée. Elles entourèrent le mort-vivant et s’arrêtèrent pour l’enfermer dans un cercle étroit. Ensuite, Kobura revint se placer devant son maître. Il ouvrit la gueule et resta un instant comme ça. Renzaburo allait enfin pouvoir poser les questions :

-Que fais-tu ici, habitant de l’au-delà ? Qui a osé troubler ton repos pour venir te faire accomplir de si basses œuvres ? Réponds à mes questions et je te délivrerais de ce mal qui te tient debout. Je ne doute pas que l’ouvre de tout cela est un nécromancien. Allons parle, épéiste ! Qui t’a fait ça ?

La réplique du marionnettiste n’arracha aucune réaction au cadavre. Ses yeux restèrent d’un blanc terreux. Représentant une menace trop importante pour les habitants de ce village, Renzaburo se devait de le détruire. Il lança ses assauts en même temps. Les cinq boules téléguidées foncèrent sur le macchabée, dix senbons chargés d’électricité quittèrent à toute vitesse la gueule de Kobura. Et dans cette cacophonie de grésillements, le Sunajin perçut un cri. Ou plutôt un râle. Qui semblait provenir des entrailles de la terre. Le son devint plus clair et Renzaburo put distinguer ce qu’il disait :

-Kiriiiiiiiiii !!!

Puis, silence de mort. Le cadavre de l’épéiste reposait au sol, inerte. Il semblait avoir réussi. Renzaburo s’effondra au sol. Il avait accompli sa mission. Pour plus de sécurité, il rassembla ses dernières forces pour ramener le cadavre à sa place dans la crypte. Une fois dehors, il s’assit contre un mur qu’il n’avait pas remarqué jusque-là. Il respira avec difficulté. Il était presque à cours de chakra. Heureusement qu’il n’avait pas eu affaire à trois gars comme ça ! Un combat de plus lui aurait été fatal. Alors qu’il fermait les yeux pour profiter des derniers instants de la nuit, Renzaburo perçut un son étrange. Comme si…le mur bougeait !

Deux bras aux allures mortuaires saisirent le Sunajin et l’immobilisèrent contre le mur. Il ne pouvait plus bouger. Sa marionnette était rangée depuis un moment et de toute façon sans chakra il ne pouvait se défaire de ses liens. Un bruit de pas lui indiqua une présence au-dessus de lui. Peu de temps après, un homme vêtu d’un manteau se présenta devant lui. Il portait un étrange masque comme ceux des unités spéciales. Il semblait regarder Renzaburo. Difficile à dire avec le masque sur la tronche. Le marionnettiste était trop affaibli pour forcer sur ses liens. Il laissa le soin au type devant lui de parler en premier. Ce qui finit par arriver :

-Qui es-tu marionnettiste ?

-Celui chargé d’arrêter le cadavre qui provoquait des dégâts ici. J’étais fier de moi jusqu’à ce que vous interveniez. Et vous qu’est-ce que vous faites là à part me souler à la fin de ma mission ?

Le ton de sa voix témoignait un peu trop de son énervement. Il ne le voulait pas. Les réponses à ses questions étaient détenues par le gars qui était là devant lui. Il ne faisait aucun doute que c’était lui l’auteur de cet emprisonnement qui entravait les mouvements de Renzaburo. Mais pourquoi ? Quel intérêt ? L’inconnu n’avait pas bougé d’un poil. Il semblait scruter le Sunajin. Ce dernier aurait aimé lui crier d’en finir mais cela aurait été faire preuve de faiblesse. Il serra les dents en attendant une réponse. Qui finit par venir :

-Je suis à la recherche d'un homme. Il se fait appeler le Corbeau.

-C’est ce que j’ai cru comprendre. Tu as tué de pauvres innocents juste parce qu’ils ignoraient comment t’aider. Quel genre de monstre es-tu ? Des femmes et des enfants innocents morts pour le désir d’un homme. Leurs vies valaient-t-elles cette information ?

La fatigue et la hargne dominaient les paroles du marionnettiste. Mais, sans qu’il puisse l’expliquer, il crut percevoir un changement chez celui qui lui faisait face. Comme si les mots du Sunajin l’atteignaient. Le masque aux couleurs violettes ne laissait rien paraître. L’intuition poussait Renzaburo à croire que l’homme réfléchissait à ces mots. Après un moment de silence, le gars repris la parole.

-Je ne suis pas responsable de ça. C’est le cadavre que j’ai ramené à la vie qui a fait ça. Je lui avait juste demandé d’enquêter pour moi. Et ensuite il a fait selon ses propres manières. J’étais là pour intervenir mais tu m’as devancé. Tu es fort et tu réfléchis bien. Tu m’as l’air d’être un shinobi vertueux. C’est pour cela que je vais te laisser en vie. Et comme j’aimerais en savoir plus sur toi, je vais également te laisser ça.

L’homme masqué s’approcha et déposa sa main sur l’avant-bras de Renzaburo. Au bout de quelques minutes, un étrange sceau apparut. Il était rayonnant d’une lumière vive qui semblait émaner de l’organisme du Chûnin. Puis quand l’homme s’éloigna, la lumière s’affaiblit. Le Sunajin était un simple spectateur et ne comprenait pas ce qui se passait. Il allait demander des explications lorsque le masqué s’adressa de nouveau à lui.

-Ce sceau demande une certaine connaissance en Fuinjutsu pour être utilisé. Apprend cet art et quand tu seras devenu assez bon dans le domaine, ce sceau te permettra de me retrouver. Je veux voir qui tu es véritablement. Viens me trouver quand tu seras plus expérimenté. Et tâche de survivre jusqu’à notre prochaine rencontre.

-C’est ça ! Et je peux connaître ton nom au moins ?

-Tu peux m’appeler Mogura, dit-il après un moment.

Suite à cela, Renzaburo ne put retracer le fil de ses pensées. Un voile noir recouvrait sa mémoire entre ce moment et son arrivée à Suna. Il ignorait comment il y était arrivé. Il s’était retrouvé allongé sur le sable à quelques mètres des remparts du village. Ces évènements le troublaient mais il était trop épuisé pour s’y intéresser sur le moment. Ce gars avait le pouvoir de ressusciter les morts et il avait utilisé cette capacité pour envoyer un cadavre récolté des informations. C’était suffisant pour son rapport. Il partit le faire et couru chez lui pour se remettre de ses émotions. Les paroles de Mogura le guidèrent jusqu’au pays des rêves. Dès demain il repenserait à tout cela. Mais pour l’instant, le sommeil l’emportait sur tout le reste.