Plic, ploc, plic, ploc. Métronomes invariables qui rompent ma solitude, ces gouttes d'eau ne finissent de tomber d'un quelconque trou du plafond. Un rappel de la vie extérieur aussi, et de la météo. Mon laboratoire n'est pas en très bon état, je le néglige depuis que j'ai entamé *cette* expérience. J'ai déjà testé sur un ninja vivant la greffe d'un kekkei genkai par le passé. Nai, il s'appelle. J'ai aucune nouvelle de lui. J'avoue que cette greffe là était dans un sentiment d'urgence et de nécessité. Elle n'était pas préparée et par conséquent imparfaite. Mais cela m'a permit de comprendre des choses. Les kaguya... sont plus qu'ils ne laissent croire. Leurs os sont capables dans une certaine mesure de sentience. C'est un véritable organisme en symbiose avec son hôte. Oui, une greffe d'os de ce type là peut permettre de donner à un shinobi les mêmes pouvoirs que ceux du clan kaguya. Mais il y a plusieurs facteurs à prendre en compte. Je passe avec une feuille devant une petite centaine de cages. Dedans ? Des souris. Cobayes par excellence, elles se reproduisent vite.

*Première phase, la survie.*

J'ai cultivé des os de Kaguya, récupéré lors d'un affrontement-entrainement. Une simulation d'attaque. Une petite jonin géniale, c'est le cas de le dire. J'ai évidemment procédé à de légères modifications pour permettre aux cellules d'avoir une plus grande compatibilité. J'ai greffé de ces cellules dans chacune des souris, et je note les résultats après quelques heures. Certaines gisent sur le côté, morte. D'autres deviennent folles, la bave aux lèvres, et se mettent à effectuer des comportements auto destructeurs. Certaines souffrent d'un mal intérieur, avec des piques d'os qui sortent incontrollable. C'est cette dernière catégorie qui m'intéresse. Parce que, sur quelques rares souches, ces souris survivent de leurs blessures et affichent un comportement normal. Signe que la griffe a prit - et été active - mais également qu'elles ont prit le contrôle.

Les souches S-46 et S-387 sont donc exceptionnellement compatibles. Bien, j'élimine tous ces cobayes dans un four avant de répliquer avec exactitude ces deux souches et les implantés sur des cellules osseuses qui viennent de moi. La réaction est positive, ce qui confirme mon diagnostic. J'ai un sourire aux lèvres.

*Deuxième phase, la réactivité.*

Il faut pouvoir activer ce pouvoir à volonté, donc il faut un contrôle nerveux. Je peux simuler cela avec des électrodes de contact. Je vais varier la tension et je note les résultats observables. En fait, la réactivité n'est pas toujours optimale. Je procède donc à attacher une molécule supplémentaire aux souches de bases. Un dérivé de mes drogues ultra réactive, des cellules JENOVAH. Elles ont un autre avantage d'être complètement en phase avec mon métabolisme.

J'ai donc désormais des souches adaptées à mon métabolisme. Compatibles et réactives, je devrais pouvoir garder le contrôle dessus, contrairement à certaines expériences précédentes. Je pense à Nai, évidemment. Le gekei avait dévorer ses os de l'intérieur et remplacé - ce qui était plutôt nécessaire au vu de leurs états - mais également causés des dégâts irréversibles dans son mental. Et s'il est bien une chose que j'estime encore plus importante que ma vie, c'est bien mon cerveau. Je n'ai aucune envie de m'impliquer dans une expérience qui pourrait me faire perdre ne serait-ce qu'une infime partie de mon génie (oui parce que je suis génial !). Mais qu'importe. Je devrais avoir complet contrôle. Il ne reste plus que deux petits problèmes.

Le premier, c'est m'injecter ces cellules. Comme j'ai réduit leurs réactivité pour mieux les controler, une seule greffe ne suffit pas. Non, je dois en faire au moins une par membre, directement dans les tissus qu'on appelle "cellules souches". Ce sont des cellules qui permettent de renouveler en permanence le corps. C'est ainsi que je peux contre-carrer la différence avec ces Kaguya. Ils sont nés avec ces os, et moi pas. Mais mes os seront progressivement remplacés par les leurs par utilisation de ces cellules souches. Je boosterais sans doute leur activité à l'aide de drogues quelconques. Il me faut donc faire au moins deux douzaines de greffes. J'ai les composants pour le faire, et j'ai déjà identifié les endroits clefs.

Ce qui m'amène au deuxième problème. Qui peut me faire la greffe ? A kiri, je ne fais confiance a aucun autre médecin que moi. Un génie comme moi ne peut que mépriser ces vers de terre qui ne m'arrive pas à la cheville. La seule solution passe par un kage bunshin. J'utiliserais des clones du meilleur médecin de tout kiri - moi - pour me charcuter. L'idée est digne de moi. Particulièrement efficace et habile, mais elle souffre d'un inconvénient majeure. Les clones disparaissent lors de la perte de conscience.

Ce qui veut dire que...

Je dois rester éveillé durant chaque greffe.

Les douleurs osseuses comptent parmi les pire douleurs possibles dans le corps humain, à l'exception de certaines migraines particulièrement infâmes qui peuvent pousser au suicide. Bref, moi qui déteste la douleur, je dois supporter tout cela éveillé. Je peux me donner le meilleur anti douleur qui ne touche pas à ma sensation d'éveil, mais... son effet est mineur. Je vais passer un sale quart-d'heure. Je soupire alors que mes bunshins apparaissent autours de moi. Je m'installe sur ma table d'opération et ils ricanent tandis qu'ils m'attachent bien solidement avec des sangles en cuir. L'un d'entre eux me file l'anti douleur par intraveineuse. Je ne sens plus la froideur de la table, signe que ca prend effet.

Bien, allez-y

Mes clones ne se font pas prier. Ils prennent un plaisir fou à m'enfoncer leurs seringues dans mes os. La douleur... est incroyable. J'ai l'impression que des poignards me transpercent de partout, et au point d'impact central, c'est un éclair de douleur qui se propage dans tout mon corps. Je hurle. Un de mes clones dit "Déjà ?" avant de commencer à injecter les cellules de greffe. Du moins les six premières. La seringue qui traverse mes os, c'est une chose. Oui, ca fait un mal de chien. Le liquide qui s'infilte dans la moelle, c'est autre chose. Une sensation étrange. D'abord, je ne sens rien, si ce n'est une vibration intérieur. Et puis, le liquide s'agite. Me dévore. Je sens des petites vagues de douleurs qui grandissent, petits à petits, rongeant de l'intérieur.

Et je dois vraiment être fou pour que mes clones profitent de ma douleur pour faire la deuxième volée de greffes. J'hurle à perdre poumon. La douleur lancinante se juxtapose avec la douleur des perforations dans un concert infernal. On y retrouve des fréquences, des amplitudes, des sons différents. Et tout s'accorde pour me faire vivre un cauchemard. A la dernière injecte je n'arrive même plus à hurler. J'ai presque perdu connaissance mais un de mes clones bienveillants m'a perfusé de la caféine.

Alors que la dernière greffe est effectuée, je ne tiens plus. Je me laisse tomber dans un sommeil sans rêve sous la trop forte douleur.

Quand je me réveille, la première sensation que j'ai, c'est le froid de la table contre ma peau. Je grelotte et j'ouvre les yeux. J'ai le réflexe de vouloir m'essuyer ma transpiration sur mon front.

Je dis vouloir, parce que j'ai oublié un petit détail, je suis encore attaché aux sangles. Je regarde mes poignets et je sens des brûlures sous le cuir. Sans doute que j'ai tiré dessus lors de l'opération. Tiré et encore tiré. Mes os me démangent encore. Mais plus de souffrance. Je n'ai que l'impression que j'ai mille fourmis sous ma peau. Et quand j'essaie de me concentrer sur l'une d'entre elle, pour la localiser, un fait étrange se produit.

Une épine d'os perfore ma peau à cet endroit précis avant de disparaitre. Je regarde médusé le spectacle alors que je réitère l'opération. Oui, cela à marché. Je ricane et je me concentre sur mes poignets et mes chevilles. Le cuir est déchiré par les os saillants qui en sortent. Je me lève et mes vêtements tombent au sol. Lacérés eux aussi, mais peut-être dans mon sommeil. La table porte également des traces de perforations.

Je me dirige vers mon lavabo le plus proche pour m'asperger d'eau. Boire. La gorge en feu. Mes yeux se lèvent et croisent mon regard dans la glace. Je suis en vie.

Mes yeux vont un peu plus haut alors et contemple mes cheveux. Ils sont devenus tout blancs comme neige. Une marque qu'on dit caractéristique du clan Kaguya. Serait-ce un autre signe de ma réussite ? Cela me vieillit un peu. On me donnerait facilement la cinquantaine désormais. Je rejette mes cheveux en arrière en riant a gorge déployée. Oui, il est temps... De montrer au monde ce qu'Hojo peut faire. Je passe ma journée à tester mes pouvoirs. Ma maitrise est encore faible, mais je compte bien aller demander quelques conseils au clan Kaguya dès demain. Et puis, mon adaptation semble étonnamment rapide, comme si ces os étaient dociles au possible. Peut-être bien que j'aurais une rapide évolution.

Aujourd'hui je teste mes capacités. Oui je suis très content de moi. Mon expérience est particulièrement réussie et il n'y a aucun effet secondaire dans les multiples analyses que je me suis moi même prescrite. Mes os me répondent très bien. Ce n'est pas toujours facile de créer exactement ce que je veux, mais je progresse rapidement.

J'ai commencé par la base. Sortir un os, et le faire réentrer. Aucun problème. Solidifier un autre ? Facile. D'ailleurs mon squelette semble naturellement renforcé. J'ai l'impression de porter une armure sous mes muscles et ma peau. Par la suite je tente des manipulations un peu plus exotiques. J'essaie de propulser mes phalanges sur des pigeons qui viennent m'embêter par un trou dans le plafond. A la première tentative, les phalanges tombent au sol sans aucune vitesse. Au troisième essais, j'arrive finalement à les lancer avec une bonne vitesse et à tuer deux pigeons.

Hm... Intéressant

Ma dernière tentative de la journée consiste à essayer de sortir une arme de mon avant-bras. Une lance pour être précis. Ce n'est pas tout à fait facile, et j'ai beaucoup de mal à y arriver. Finalement, je la tiens en main. Heureux. Elle est tranchante, solide et terrible. Dans mes mains, elle semble devenir encore plus qu'un bout d'os. Elle acquiert une propriété d'arme. Une arme en symbiose avec moi, et ses moulinets deviennent plus maitrisé. Plus en phase avec mon être. C'est décidé, je m'armerais avec mes propres os. Ils sont légers, solides... et gratuits. Pourquoi s'en priver ?