Les yeux ouverts sur les ténèbres, l’Opalin ne parvenait pas à trouver le sommeil. Seul dans cette chambre sordide, il ne cessait de ressasser ses songes. Plus tôt dans la journée, il avait croisé le chemin d’une certaine personne qui l’avait profondément troublé. Seigen, déchiré entre la tristesse et l’amertume, ne pouvait s’ôter de la tête l’image de cet individu, qui n’était autre que son père. Ce dernier, ayant pourtant vrillé son regard dans celui de sa progéniture, ne daigna même pas interrompre sa course pour saluer son fils unique. Le Séraphin avait demeuré là, pantois, observant son patriarche s’éloigner sans qui lui eut porté le moindre égare. Tous ses muscles roidis par la fureur, il eut du mal à rester stoïque. Il aurait voulu l’attaquer, déverser sur lui sa rage. Mais il ne pouvait pas. Il ne pouvait pas s’attaquer à un éclopé qui avait même de la peine à maintenir une démarche digne. Alors, couvant cette colère, Seigen avait tourné les talons et était retourné à ses appartements.
Néanmoins, rester alité en ruminant était futile. Peut-être qu’une courte balade au clair de lune l’aiderait à apaiser ses tourments ? Il se leva et sortit.

La voûte céleste avait d’ores et déjà revêtu sa robe ténébreuse, maculée de constellations astrales, baignant les ruelles désertes du Kirigakure no Sato d’une lumière laiteuse. Le Palladium aimait s’enfoncer dans l’obscurité de la nuit, seule âme qui vive, et s’extasier devant la pureté absolue de la sorgue. Son œillade perdue dans l’éternité et ses poumons gorgés d’air frais, il se sentait déjà plus serein. Rien de plus lénifiant que la quiétude des ombres nocturnes. Erratique, il déambulait, le souffle tendre du vent lui caressant sa crinière anarchique. Il se sentait bien. Son parcours l’ayant porté à proximité d’un banc, il se laissa choir sur celui-ci. Il fouilla quelques instants dans sa sacoche afin d’en prélever une cigarette, qu’il calla entre ses lippes pincées. D’un geste nonchalant et bien rôdé, il alluma son tabac. Pratique plus que controversée en vu de ses répercussions sur l’organisme, cette coutume que Seigen avait adopté était sans nul doute son vice favori. Ces émanations fumeuses et pernicieuses calmaient ses appréhensions, apportant un peu de quiétude à au flux tumultueux de ses songes. Lorsqu’il fumait, son esprit se vidait, captivé par la danse presque lascive créée par la consumation de cette substance.
Qui plus est, au vu de la situation politique à l’heure actuelle, des conflits armés risquaient d’éclater, secouant une nouvelle fois le monde Shinobi et le plongeant une nouvelle fois dans l’affliction damnée de la guerre. Guerre dans laquelle il serait inéluctablement impliqué, étant désormais partisan du Village de la Brume. Naguère, lorsqu’il était encore lié à sa lignée, il n’avait qu’à combattre lorsque des renégats s’aventuraient aux abords de la demeure Masayuki. À présent, il était susceptible d’être envoyé dans d’éloignées landes, pour des intérêts le dépassant totalement et pour une cause qui ne serait point nécessairement sienne.
Soudain, un bruissement l’extirpa de sa torpeur songeuse. Il pivota la tête vers la présupposée provenance de cet élément nouveau. Il crut apercevoir une silhouette indécise.

« Qui est là ? »

Articula-t-il d’une voix claire et assurée. De qui pourrait-il bien s’agir à une heure si tardive ? Ne détournant pas le regard du galbe vague qu’il discernait, il attendait que le quidam s’avance et décline son identité.