Festin éducatif

@Yorurai Mikami

J'hésitais entre ici ou à l'Académie. L'Académie ça aurait pu être bien : Presque personne, j'aurais pu être bien tranquille pour faire mes lectures. Mais j'avais faim, terriblement faim, et la nourriture n'était pas acceptée à la bibliothèque. C'est pour cela que je me retrouvai ici, dans une petite Izakaya d'à peine quelques place située sur le campus, assise sur une banquette bien loin dans le fond, où l'on ne viendrait pas me déranger. Enfin, dans mes rêves.

C'était le lendemain de la cérémonie, où mon imbécile de cousin germain habitant lui aussi à Kiri avait décidé de se mesurer au ninja le plus grand et le plus effrayant qu'il m'ait été donné de croiser. Je n'avais pas suivi vraiment le combat à vrai dire : je m'était enfuie dans ma chambre après que Sora eu indirectement déchiré la bordure de mon kimono. De ma fenêtre, j'eus le temps d'apercevoir l'idiot en train d'être enroulé dans une chaine de métal provenant de l'épée du Shinobi balèze. Bien fait pour lui, avais-je songé à ce moment en refermant mes rideaux. Ça lui apprendrai de vouloir se mesurer à n'importe qui. Mais en même temps, je ne pouvais effacer de mes souvenir le regard de frayeur qui avait empli le visage du Kirijin et de cette épée rougeoyante. M'enfin.

La Cérémonie de la Lune n'était pourtant pas le moment le plus important du voyage vers Yuki pour moi. Certes, ce fût un bon prétexte - appartenant désormais à Kiri, il me fallait une permission pour sortir de Mizu- mais pas la finalité. Si vous ne le saviez pas, chers lecteurs, Le pays de la Neige est le siège de la plus importante académie de Médecine du Shukai, si ce n'est du Yuukan au grand complet. Lors de mon apprentissage shinobi, j'eus la chance de suivre quelques cours là-bas avant d'être envoyée au pays de la Brume. Ce dernier, en reconstruction, ne possède malheureusement pas de lieu dédié à l'apprentissage de la biologie et des fondements du corps humain menant à la pratique de la médecine. Bien sûr, l'Hopital de fortune dispensait une formation privée à quelques civils et ninjas, mais sans plus. C'est pourquoi ce voyage était pour moi une occasion de renouveler mon stock de livres de formation. Au sortir de l'académie, j'avais sous le bras deux immenses briques de biologie et quatre autres livres dans mon sac sur divers sujets touchant les bases de la médecine. Et un estomac qui grondait plus fort que le tonnerre.

Parmi les choses qui n'étaient pas tolérées chez une femme de bonne tenue, s'empiffrer était sans doute parmi les pires. Une jeune femme se devait d'être menue, mince, et dénuée de tout surplus de gras, sauf à quelques endroits bien précis. Et pour cela, nous devions nous contenter de manger sous la limite de notre satiété.. ce qui pouvait être des plus frustrants. C'est pourquoi je décidai d'aller dans une Izakaya au beau milieu du secteur de l'académie, là où personne ne me connaissait ou ne me reconnaitrait. Installée bien au fond d'une banquette, je pourrais à loisir manger tout autant de grillades, de takoyaki, de yakitori, et de toutes choses frites et pleines de sauces dont je pourrais me délecter et même m'en lécher les doigts, jusqu'à m'en péter l'estomac. La seule personne qui oserait me jeter un regard déplorable serait le propriétaire du lieu... mais le ferait-il considérant toute la thune que je dépenserais dans son humble établissement ?

Une carafe d'alcool de prune avec moi dont un petit verre déjà englouti et un autre qui viendrait rejoindre le premier des plus rapidement, Une petite assiette de grillades de porc pour m'ouvrir l'appétit convenablement en attendant les pièces maitresses de cette goinfrerie annoncée, j'avais ouvert l'un des livres de biologie que j'avais apportés, prête à me plonger dans les mystères de la machine humaine. Au menu : le système de distribution du chakra dans le corps. J'avais bien l'intention de profiter de cette anonymité au milieu de Yuki pour me défoncer l'estomac et le foie.

Quelle joie de voyager dans un autre pays !

Spoiler:

Est-ce qu'un ours blanc a froid toute la journée ? Sa fourrure est épaisse, mais ici la moindre brise est pénétrante et lacérante. C'était comme la plupart des Yukijin. Leurs tenues étaient toutes aussi épaisses que celle des voyageurs même s'il était facile de faire la distinction. Tandis que tous deux arborent un visage mordu par le froid, l'un a la mine emmitouflée dans ses propres plis alors que l'autre est capable de sourire, de se montrer surpris, de rire, de s'exaspérer, de soupirer s'étonner s'intriguer grogner aussi naturellement que s'il avait été en climat tempéré. C'était cette nuance qui était importante à saisir, et je parle de pleines mains. L'habitude, l'accoutumance, la normalisation. Mener une vie "normale", du moins habituelle, pourtant plongé dans les conditions les plus extrêmes, les plus radicales, et souvent les plus aberrantes. Tout ça pour dire que l'habituation peut permettre d'assimiler à peu près tout et n'importe quoi ; sans pour autant préserver d'effets secondaires... mais ouvrait des possibilités de survie là où l'abattement aurait pu prendre racine dans un esprit mal préparé.

C'était conscient de tout ceci que le sabreur arpentait les contrées plus reculées du pays de la neige, endroit le plus glacial parmi l'empire. Cette simple sortie en solitaire devenait un prétexte pour conduire un entrainement, même passif. Prendre l'air revenait à se souvenir de toute ces fois où une lame a traversé son corps et constater qu'il était encore en vie, à chaque fois que le moindre vent semblait vouloir lui déchirer la chaire. Mais c'était surtout une façon de s'occuper pendant que les autres se préparaient. Quant à Mikami, cela faisait déjà plusieurs jours qu'il était prêt. Depuis il avait réuni Van, Seito, puis Ketsuen et une jeune Suzurane du nom de Kemono, déjà répartis en deux équipes qui frapperaient le lendemain matin, autrement dit dans quelques heures.

Ce sentiment était incroyable. Regarder vers le Nord et vers la mer, lui remémorait tous les scénarios envisagés ainsi que le fait qu'il n'aurait aucun contrôle sur la situation une fois sur place. Il s'embarquait pour un voyage qui le dépassait et dont il avait pourtant été à l'impulsion. Néanmoins il avait déjà fait le tour de l'idée et s'il arrivait qu'il soit téléporté à l'instant même au milieu du port où aurait lieu cette bataille, il serait d'ors et déjà prêt. Quelques heures le séparaient de celle du départ, et il fallait tuer le temps. Sortir, prendre l'air, mener des occupations simples, insignifiantes, en bref vivre pleinement dans un état d'insouciance. Le Yorurai était en plein dans cette phase ou tout effort supplémentaire rapprochait de la saturation et où évacuer demeurait la meilleure chose à faire, ferait sa clarté d'esprit lors du moment fatidique.

Ce fut donc en avançant sans destination au milieu des plaines, ruelles, et sentiers enneigés qu'il finit par se retrouver dans une cour cernée de plusieurs bâtiments aussi récents qu'imposants. Le ciel perdait de son éclat car le soleil venait de dépasser l'horizon, les silhouettes des bâtisses se dessinaient alors devant le dégradé de jaune et de bleu, s'assombrissant en même temps que les plus hautes façades. Difficile de dire comment il était arrivé ici, les lieux auraient pu êtres fermés. Cependant un ninja ne voit pas les routes de la même manière qu'un humain lambda. Si à chaque fois qu'il regarde autour de lui, l'Homme envisage sa vie à la surface du sol, s'abrite entre les pierres, il ne voit qu'une zone neutre en traversant la forêt tandis que l'oiseau y envisage sa propre vie, parcours les branchages où il se niche et se nourrit, puis traverse les villes comme un territoire neutre. Le partage d'une seule terre pour deux perceptions du monde bien différentes. Ce devait être la même chose pour un shinobi, discernant des routes sur les toits et entre les branches d'arbres...

Ce qui l'avait emmené proche d'une Izakaya débordante de bonnes odeurs. Sûrement ces dernières avaient-elles inconsciemment tracé des panneaux de signalisation pour conduire l'amnésique jusqu'ici. Ne s'y trouvaient que le tenancier et une jeune anonyme. Mikami prit place sur un comptoir non loin, s'emparait de la liste des plats, y accordait un bref regard jusqu'à ce qu'on ne vienne lui demander ce qui lui ferait plaisir. Dans une discrétion rendant ses paroles à peine perceptibles, il ne désignait qu'un seul met au tenancier qui relevait la tête, sa surprise trahie par deux grands yeux écarquillés. Alors que ce dernier retournait vers ses fourneaux dans la précipitation, le Yorurai l'interpellait et désignait de l'index la bouteille d'alcool trônant à côté la jeune femme, dont les saveurs de prunes s'étaient glissées jusqu'à ses propres narines. Renversant son pouce vers le bas, il demandait qu'on lui serve la même chose.

Ce fut quand il le quitta que l'atmosphère changea. Il était assis, la proximité avec les feux de la cuisine rendait les températures agréables. Une quantité d'alcool raisonnable s'offrait à lui et bientôt il pourrait se dire rassasier. L'environnement était particulièrement calme. Les scénarios envisagés pour le lendemain, entre coups de tonnerres, cris dans tous les sens et craquements de bois, disparaissaient derrière la lente chute de quelques flocons de neiges. Le temps d'une soirée, plus de guerre absurde, plus de batailles qu'on ne saurait éviter. Le paysage lui livrait enfin tous ses détails, ses innombrables bruits, ses plus fines ondulations, pour que son esprit ne s'allège au maximum jusqu'à ne devenir qu'un océan d'insouciance.

C'est ainsi qu'il remarqua l'intitulé du livre que lisait sa vis-à-vis, et même le sac où s'entassait bien d'autres viviers de savoir. En communion avec ce qui l'entourait, il se lançait comme si la conversation était devenue chose naturelle sans même se soucier de briser la lecture d'un paragraphe important ou le paroxysme de sa concentration. Et pourtant il lui disait :

- Il faut avoir un esprit bien accroché et à la fois assez ouvert pour assimiler toutes ses connaissances...

Il ne marqua une pause que pour décrocher son katana de la ceinture, chose rare, et déposer l'arme debout contre le bois.

- Ceci dit il faut aussi avoir les épaules solides pour les porter au sein d'un monde comme le notre, n'est-ce pas ?

La lecture allait bon train. Un petit morceau de grillade par-ci, un petit sashimi par-là, bientôt l'emplacement des 361 points de chakra du corps, les tenkentsu, n'eurent (presque) plus de secrets pour moi. Je ne possédais peut-être pas de capacités sensorielles afin de voir de les voir sur un humain, mais grâce à ceux qui avaient ce potentiel, soit les Hyuga, les livres de médecines étaient accompagnés de jolies images. Ici un corps complet, avec vue devant et derrière. Là, un bras, une jambe, agrandis afin de voir les subtilités. Enfin, le tronc, lieu stratégique où la majorité des points se trouvaient, tout autour des organes vitaux. Pour connecter ces points, un réseau circulait à l'intérieur du corps, une espèce d'autoroute afin d'amener le chakra là où on désirait. La majorité des ninjas apprennent à l'amener vers les extrémités : mains, pieds, tête ; tout cela afin de créer des techniques. Plus rarement, d'autres apprennent à mobiliser l'ensemble de leur corps afin de se former une armure. Pour cela, il faut non seulement une connaissance précise des tenkentsu, mais aussi une très grande maitrise de son corps et de son chakra. Puis il y avait ensuite le principe des portes, permettant de libérer l'énergie à plus forte dose : les points servant de barrage, si on ouvre les valves, le chakra peut circuler plus rapidement. Mais alors que l'ouverture d'un barrage détruit tout ce qui se trouve sous lui, il en est de même pour la libération de l'énergie par les portes célestes : À trop vouloir augmenter le niveau de chakra, le corps peut en subir de lourd dommages irréversibles. Tel est le prix à payer pour obtenir de la puissance.

Et hop, un calmar frit en bouche. Puis une gorgée de liqueur de prune.

Bien concentrée dans ma lecture, je ne réalisai pas qu'un deuxième client était entré dans l'izakaya. Plus rien n'existait sauf la nourriture, l'alcool et mon livre. Une bande d'étudiants excités aurait pu venir que je ne les aurais pas entendus. Enfin, presque. J'aurais fini par créer un mur de glace grâce à mon Hyôton afin de me prémunir du dérangement. C'était l'ancienne cheffe de mon clan qui avait construit l'académie de Médecine et du Fuinjutsu dans laquelle j'étais venue emprunter ces livres. De plus, mon clan était au pouvoir de Yuki... en plus d'être le clan de provenance du Kamui, l'homme le plus puissant ici. Tout pour dire, le dit mur de glace aurait envoyé ce message pas trop subtil : Un Samui est dans la place, on fait pas chier svp. Mais je n'eus pas à me soucier de tous ces troubles, puisque l'établissement était mort en cette froide soirée d'automne. Il n'y avait que moi en ce moment pour assurer un revenu au vieil homme qui tenait cette izakaya, et j'étais servie comme un charme.

J'entendis des pas légers dans ma direction, le propriétaire venait sans doute s'assurer que j'aie assez à manger. J'avais déjà claqué l'équivalent d'une mission de rang D en nourriture, qu'importait, j'avais déjà fini de manger mes boulettes de pieuvre frite et je n'avais presque plus de grillades de porc. Alors que l'homme était à ma hauteur, sans lever les yeux de mon livre, je lui dis :

« Ramenez moi plus de porc... et des edamame je vous prie. »

Mais ce ne fût pas la vieille voix qui me répondit.

- Il faut avoir un esprit bien accroché et à la fois assez ouvert pour assimiler toutes ses connaissances...

Mon coeur cessa de battre, par panique, et levant les yeux, un jeune homme se trouvait devant moi. Et ce n'était pas un employé du lieu.

- Ceci dit il faut aussi avoir les épaules solides pour les porter au sein d'un monde comme le notre, n'est-ce pas?

Merde. Moi qui était venue ici pour avoir la paix et manger comme une truie sans me faire déranger, voilà qu'un mec venait à ma rencontre. De quoi aurais-je l'air avec toute cette nourriture et cet alcool sur ma table... pour moi toute seule? Rien de mieux pour déshonorer ma famille, mon clan le Village de Kiri et Mizu tout entier. Mais celui qui était devant moi avait détaché son katana, attendant un signe de ma part ? C'était un ninja aussi donc? Voulait-il s'assoir avec moi? Iiiiik, au secours !

Pour seule réponse, je ne pus que froncer les sourcils. Ma marque de commerce sans doute.

Le tenancier, riant sans doute dans sa barbe de me voir désemparée ainsi après avoir fortement désapprouvé du regard tout ce que je consommais, vint me porter encore plus de nourriture... ainsi qu'un deuxième verre pour monsieur shinobi. J'étais prise au piège. Quel monde cruel dans lequel je vivais. Je ne pouvais me défiler face à cette défaite, et un peu à contrecoeur (sans le montrer du moins) j'acceptai cette présence inconnue avec moi, servant l'alcool dans le deuxième verre afin de l'offrir à mon invité. J'étais une jeune femme bien élevée après tout, et je retirais parfois dans cette étiquette et les bonne manières une fierté de savoir bien me comporter, ce qui faisait de moi un être supérieur. Je pouvais être invitée à la table de n'importe quel Daimyo demain matin et je ne serais point une gêne pour personne.

« Vous avez raison... » finis-je par articuler, faisant un signe au Shukajin de s'installer sur la banquette devant moi.

«Si ce n'est trop indiscret, qu'est-ce qui apporte un manieur d'arme létale dans les environs de l'Académie de Médecine de Yuki ? »

Je paraissais souvent froide, mais je n'étais pas méchante. J'étais seulement une Samui, une manieuse du pouvoir de la glace. À l'instar des autres clans, notre pouvoir spécial finissait par déteindre sur nous. Par contre, je savais aussi être d'agréable compagnie, et celui devant moi saurait s'en rendre compte. Le tenancier, lui, se pressa d'apporter baguettes et petit plat au shinobi, et je ne le remerciai pas. Je n'avais pas envie d'être gentille avec ce vieux aujourd'hui.

Spoiler:

Les flocons n'avaient de cesse de s'entasser et les petits plats défilaient sans fin sous le regard du Yorurai telles les pages sous les yeux de la jeune femme. À chaque fois les effluves parvenaient jusqu'à ses narines, les arômes puissants et harmonieux arrivant avec tant d'ampleur et de force qu'il aurait juré pouvoir visualiser les explosions olfactives qu'ils lui prodiguaient. Ce soir tout était plus beau, tout avait plus de saveur, le moindre son semblait apporter sa part éphémère à cette symphonie perpétuelle et infinie qu'était la Vie.

Ce soir il lui semblait que la sienne, pas moins fragile que celle d'un autre après tout, prenait fin ici. Dans quelques heures il prenait la mer pour une mission périlleuse, et bien que le sabreur ait déjà encouru bien plus de risques que ne présentaient cette opération de sabotage, malgré la différence de donne en temps de guerre, il ne pouvait se défaire de cette intime conviction qui lui disait que cet aller ne connaîtrait de retour. Était-ce le fait de retourner dans son pays natal qui le chamboulait ainsi ? Était-ce à cause de ces nombreux bandeaux aux nuages qui apparaissaient de plus en plus souvent dans les brides de souvenirs remontant à la surface ? Était-ce une peur liée aux vérités que dissimulaient son amnésie ?

Difficile à dire… Les terres affiliées au shûkai et traversées ces derniers jours ne savaient quitter son esprit. Comme s'il les gravait dans sa mémoire, avec leur paysages, leurs bruits, leurs odeurs, leur atmosphère… Ce n'était pas l'ombre de la Mort qui jetait un froid sur ses épaules, c'était le sentiment cruel d'avoir laissé derrière lui une chose qu'il ne reverrait jamais dans une telle splendeur. Ces soirs là, on ne se refuse rien et laisse le chaos du cours des évènements guider ses pas vers les jours à venir. Ce fut pourquoi quand la Samui lui proposa de se joindre à elle il s'approcha sans plus de mondanités, avec la déférence d'une personne se rendant à un rendez-vous routinier.

Il s'installa donc sur la banquette et s'inclina néanmoins légèrement de sa vis-à-vis comme pour lui souhaiter bon appétit. Se nourrir, c'est sacré. Il fut interpellé et relevait légèrement la tête. Une de ses oreilles se soulevait, ses narines s'épataient… La porte battante venait de s'ouvrir et les parfums précédaient le retour du tenancier. Les yeux pétillants, la bave aux lèvres, Mikami devinait la viande de porc. Un plat alléchant qui ne lui était en fait pas destiné, mais qui pourtant le narguait insolemment en trônant à la table à laquelle il était assis. C'était quand même pas si compliqué de préparer sa commande ! Il n'avait désigné qu'une seule chose sur la carte, dans la mesure où c'était le seul plat dont il avait l'intention de se passer (le doublon d'un autre plat plus consistant en vérité), ils n'avaient cas le mettre de côté, disposer tout ce qui se trouvait d'autre en cuisine sur un grand plateau et le lui apporter, non ? Non ?! NON?!

- Si ce n'est trop indiscret, qu'est-ce qui apporte un manieur d'arme létale dans les environs de l'Académie de Médecine de Yuki ?
- Hum… Pour faire simple… ... Je suis celui qui offre des corps à la science.

Finit-il par choisir comme meilleure réponse en désignant l'académie du regard, conscient qu'ils étudiaient parfois en s'appuyant sur de vrais corps humains. Enfin des anciens. Ainsi il levait son verre comme pour trinquer et buvait une gorgée avant de le reposer. Entre-temps son regard avait pu loucher sur le livre ouvert. Lorsque l'on sent venir une telle Fin, on ne perd pas une miette de ce qui nous entoure. Était-ce des faisceaux chakratiques ?

- Que voudrais-tu faire de ce savoir ?

Il avait accompagné sa question d'une inclinaison de la tête soulignant l'expression interrogative de son visage aux yeux plissés qui cherchaient à atteindre les autres titres. Après avoir un temps hésité, il ajoutait :

- Est-ce que ça t'aiderait de pouvoir écouter leur activité en temps réel ?

Il faudrait bien qu'elle passe à la pratique, un jour où l'autre. Une approche par le son lui permettrait peut-être d'ouvrir les yeux sur ce qu'une image fixe ne pourrait lui montrer, du moins mieux appréhender le mouvements des choses qu'elle étudiait, dans tous les cas apporter un nouvel appui sur lequelle bâtir ses connaissances. C'était proposé de bon cœur, pour la remercier de l'avoir invité à sa table. Des edamame s'adjoignaient au porc, et toujours aucune trace de ce qui lui était destiné tandis que ses traces de pas s'effaçaient peu à peu sous les nouvelles couches de neiges...

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