Ainsi donc Ogami m'avait répondu. Je n'étais pas surprise par sa réponse, je m'y attendais même grandement et avais soupiré en lisant son acceptation a condition qu'il m'accompagne. Il ne me facilitait pas la tâche et puisque je n'avais aucune idée de l'avancement des choses concernant les négociations entre le pays du Vent et celui du Feu je me devais de contacter l'autre tête pensante du sauvetage d'Oniri.

C'était ainsi que, depuis l'un de mes bureaux à la Mégalopole, je contactais Nara Natsuki pour lui faire part de la nouvelle à l'aide de la pierre qu'il avait en sa possession et qui était lié a la mienne tout en étant imprégnée de son propre sang.

« C'est votre conscience qui vous parle... »

Commençais-je dans une voix flottante tout en étirant un sourire amusée.
Il n'avait sans doute pas l'habitude qu'une voix s'immisce dans sa tête et encore moins la mienne mais il devait se rassurer par le fait que je n'avais pas vraiment envie de l'entendre lui non plus.

« J'ignore ce que vous êtes en train de faire mais sachez que cela a beaucoup moins d'importance que ce dont nous devons discuter. »

Qu'il n'avise donc pas de me dire de le contacter plus tard ce n'était pas vraiment le genre de la maison.

« Mon contact à Suna m'a répondu et devinez quoi ? Il accepte de mettre tout en ordre pour que je puisse fouler le désert s'il peut m'accompagner en retour pour chercher Heyle. »

Petit silence angoissant juste pour le faire bouillonner un peu.

« C'est pourquoi je vous demande où en sont les négociations entre votre pays et anciennement le mien ? Il est évident que je ne vous ai pas mentionné auprès de lui dans l'équation si bien que je doute qu'il soit ravi de comprendre qui vous êtes ni même de voir quelqu'un d'autre. S'il nous est possible d'attendre dans l'espoir que la guerre cesse cela serait sans doute judicieux puisque votre présence serait plus tolérable mais si cela prend trop de temps j'imagine que nous devrons nous rendre sur le territoire du Vent d'une autre manière, bien que je préférerais éviter... Qu'en pensez-vous ? »

J'avais sans doute d'autres choses plus fâcheuses à évoquer et que j'avais appris dans ce même courrier mais je me contenterais de son avis pour le moment.

Spoiler:

« Je ne te savais pas doté d'un sens de l'humour développé, Setsuki. » répondit mécaniquement Natsuki sans lever les yeux du document qu'il consultait dans son bureau du Septième Ciel.

Puis il tiqua, et fit pivoter son fauteuil pour se lever.

« Non, il manque l'accent chantant qui rend la voix plus agréable à l'oreille. Ou plutôt, dans la tête. Bonjour Yami. »

Dommage qu'elle gâchait tout avec son habituel ton autoritaire et méprisant. Après, il pouvait comprendre : Yami était au plus près du problème, et subissait depuis bien plus longtemps que lui une charge de stress difficilement évaluable avec Oniri. Non pas qu'il ne s'inquiétait pas pour elle non plus, bien au contraire, mais il avait simplement développé des mécanismes de psychodéfense différents de la Ketsueki.

« Oui Maîtresse. Bien Maîtresse. Je vous écoute. » répondit-il d'une voix dont la lassitude ne cachait pas la pointe de sarcasme envoyée avec.

Et il écouta Yami lui faire un résumé de l'avancé de la situation, qui se résumait à '' mon contact m'a répondu, et il est d'accord. "

« Eh bien c'est fantastique qu'il vienne avec nous. Moi qui craignait qu'avec toute cette tension sexuelle qui s'accumule entre nous, elle finisse par éclater au mauvais moment. Là au moins je suis rassuré : à trois, nous saurons peut-être nous tenir. »

En fonction des situations, Natsuki aimait bien meubler les silences. Cela dépendait grandement de la personne qu'il avait en face, et dans le cas de Yami, elle le détestait suffisamment pour lui donner envie de mettre un coup de marteau sur chaque pointe qui se présentait, simplement parce qu'il savait qu'il aura beau faire, elle refusera toujours que cela s'arrange entre eux un jour. Si elle s'était alliée à lui, c'était par nécessité, et non par envie.

Passant son annulaire sur son ancienne cerne, il regarda sans vraiment voir sa pagode d'argile tandis qu'il se concentrait sur la suite ce que lui disait Yami. Et compte tenu de ce que le quatrième mur apportait à Natsuki, ce n'était pas forcément une bonne nouvelle.

« Où en sont les négociations ? Hé bien chronologiquement parlant, elles sont terminées. Mais en terme de narration, elles ont à peine commencé, ce qui bloque un peu tout le monde, pour ainsi dire. Car tant que Mizuki ne sera pas officiellement '' rentrée '' de son entretien avec le régent de Suna, moi, je suis coincé à Konoha. Donc attendre, à moins que vous souhaitiez partir seule avec votre contact, nous n'avons pas vraiment le choix. »

Il était prêt à faire beaucoup de sacrifices pour Oniri, sans même savoir si cela en valait réellement la peine, mais mettre en danger son Village en s'absentant en même temps que le Hokage n'en faisait pas partie. C'était elle qui l'avait abandonné, pas l'inverse.

« Quant à attendre la fin de la guerre, connaissant mon Hokage, si le régent n'est pas trop bête, elle sera proclamée en même temps que le retour de Mizuki. Konoha n'a jamais été autre chose qu'un mur après tout : ce n'est que lorsque l'on lui tape dessus qu'il fait mal. Mais ne nous leurrons pas, même si le Pays du Feu et du Vent cessent les hostilités, il y aura toujours un climat de méfiance, et je doute y être le bienvenu. »

Mais au moins, le commerce reprendra.

« Dans un cas comme dans l'autre, nous n'attendrons donc pas plus que le retour de mon Hokage, ou à défaut, son successeur – sait-on jamais. Et en ce qui concerne ma présence et moi à votre côté lorsque nous rencontrerons votre contact, j'imagine que personne ne sera assez bête pour croire qu'en me rasant bien partout et en mettant un serre-tête avec des oreilles de chat dessus, je suis l'une de vos invocations. »

Dans le fond, le pire était qu'il ne se moquait pas ouvertement d'elle avec sa suggestion, pour une fois. Bon, peut-être un peu avec l'histoire des oreilles de chat – et encore, sur un malentendu, cela pouvait marcher -, mais si Yami savait lire entre les lignes, l'option du déguisement était viable. Et pas avec une vieille métamorphose niveau académique qui le faisait briller comme un phare dans la nuit pour n'importe quel ninja sensoriel. Un vrai déguisement, à l'ancienne. N'importe comment, ce n'est pas comme s'il comptait se pointer au Pays du Vent à visage découvert.

« Comment cela se passe de votre côté avec Oniri ? Vous l'avez revu depuis notre dernière rencontre ? Comment va-t-elle ? »

Cet idiot avait l'air de bonne humeur, répliquant à ma plaisanterie à sa manière sans pour autant se départir d'un certains sarcasme. Sa pointe d'humour concernant cette soit disant tension sexuelle me faisait toutefois imaginer un tableau dont j'aurais préféré me passer... erk...

« Cela fait un bon moment que je n'ai pas goûté au plaisir de la chair mais soyez rassuré : je ne suis pas si désespérée. »

Pour autant il ne voyait visiblement rien à redire à ce qu'Ogami nous accompagne et cela me surprenait grandement. Rencontrer Heyle signifiait lui parler du problème et le Nara allait donc sans doute expliquer à l'entité la part de pulsion qu'Oniri lui avait pris pour lui permettre de nous fournir quelques réponses. Une conversation que je n'avais pas spécialement envie que le Toshiro entende dans le moindre détails et pour l'heure je ne savais pas comment procéder pour l'isoler le moment venu...

Les négociations entre les deux Pays semblaient être en cours ou plus ou moins terminées... La seule chose que j'en retenais c'était qu'il ne pouvait pas s'absenter pour le moment. Avions nous seulement le luxe de pouvoir attendre ?

« L'idée de partir seule, du moins une première fois, avec mon contact m'a effectivement traversé l'esprit. La recherche de Heyle dans le désert sera sans doute laborieuse et rien ne nous empêcherait d'y retourner une fois qu'elle serait trouvée pour que vous lui faites part de cette pulsion démoniaque qui habite désormais Oniri. Toutefois, il m'est d'avis que d'y aller ensemble sera plus productif au vue des éléments que vous pourrez fournir à l'entité couplé a ce que je sais moi même. »

Nous attendrons donc que sa Hokage soit rentrée avant de partir et cela qu'importe l'issue de cette négociation. Nous ne pourrions pas patienter davantage au risque de voir l'état de la Saibogu se dégrader plus encore.

Je souriais à son idée de se faire passer pour l'une de mes invocations.

« Il ne manquerait plus que la chaîne autour du cou pour vous croire tout droit sorti d'un club de mauvais goût. Retenez vous seulement de m'appeler « maîtresse » cela serait somme tout assez embarrassant. »

Bien que cette humiliation dont il serait la victime me satisfaisait rien qu'à l'imaginer...

« L'idée d'un déguisement est en effet primordial. Choisissez de préférence un apparat passe partout, le plus simple serait de vous faire ressembler à un Ketsueki pour plus de crédibilité auprès de mon contact mais nous sommes à des années lumières d'un résultat convaincant et un mauvais cosplay ne fonctionnerait pas plus alors abstenez vous cela vaudra mieux pour tout le monde. »

L'idée de le voir avec les yeux rouges et les cheveux noirs avait quelque chose de dérangeant. Heureusement elle fut bien vite balayée par sa demande de nouvelle concernant Oniri.

« Elle se trouve actuellement non loin de moi et se fait servir du vin par un homme bien décidé à s'attirer ses faveurs. Elle a l'air d'aller bien. »

J'étirais un sourire narquois tout en le lui apprenant et en imaginant sa réaction. Peut-être qu'il penserait que je mentais bien que ce n'était assurément pas le cas.

« Ce n'est pas le premier qui tente sa chance ni même le dernier. Mais rassurez vous je veille et saurais le dissuader de se montrer trop insistant bien qu'elle est tout a fait a même de se défendre elle même. Je n'aimerais pas être à la place de ce pauvre homme. »

J'imaginais qu'il n'en doutait pas.

« Concernant son état plus sérieusement il y a des hauts et des bas. En ce moment elle est presque telle que nous la connaissons mais ce matin elle était d'une véritable humeur de chien et elle a disparue dieu seul sait où pour ne revenir qu'il y a peu, bien plus détendue. »

Qu'avait-elle pu bien faire pour se défouler ? Mystère mais cela ne devait pas vraiment être beau a voir.

« Le mobilier a tendance a passer un sale instant lors de ses moments impulsifs. Quant à son regard... bien qu'aveugle, il paraît beaucoup plus sauvage, imprévisible et dangereux : comme celui d'un animal... »

Toute forme d'amusement s'était éteint dans le ton de ma voix pour laisser place à l'inquiétude.

« Natsuki... Nous sommes en train de la perdre... Nous devons agir au plus vite avant qu'il ne soit trop tard. »

Mes poings se serrèrent en même temps que ma mâchoire face a ce constat. Elle risquait de se mettre en danger : ces pulsions meurtrières finiraient par la rendre coupable au yeux d'un village shinobi c'était ce que je craignais et qui risquait d'arriver. Le Nara était bien loin de se douter que chaque jour sa soif de puissance s'élevait un peu plus en tant que cheffe de l'organisation criminelle du Kyomu...

« C'est de vivre un peu dont vous semblez avoir désespérément besoin, Yami. Mais maintenant que nous en avons terminé avec les coups de surins de rigueur, venons en au fait. Je suis sûr que vous êtes une Dame très occupée. »

Lui avait cessé de s'amuser à faire de l'esprit avec la Ketsueki.

« Quand vous dites '' les éléments que je pourrai fournir à Heyle couplé à ce que vous savez vous-même '', vous voulez signifier par là qu'il y a des données concernant Oniri et son état dont vous avez préféré ne pas me faire part ? Le genre qui part sans doute d'une bonne intention, pour préserver mon petit cœur en mousse ou parce qu'elles ne me serviront à rien, c'est cela ? »

Il roula des yeux. Collaborer avec Yami allait être vraiment compliqué, et ce n'était pas faute d'y mettre du sien. Il s’apprêta à faire une remarque sur ce que la Ketsueki qualifiait de démoniaque, puis y renonça, se souvenant qu'il lui avait dit que pour la commodité de la discussion, ce sera plus simple pour elle qu'elle lui colle cette étiquette dessus plutôt que d'entrer dans les détails de la réalité. Il garda aussi le silence lorsqu'elle lui conseilla comment s'habiller. Un conseil qui se plaçait à peu près au niveau de répondre à quelqu'un '' Et bien mange. '' lorsqu'il vous fait savoir qu'il a faim.

« Quelque chose de passe partout, vous êtes sûre ? » finit-il par lâcher tout de même, l'arrête du nez pincée entre son pouce et son index. « Je laisse tomber la chemise bleue à motif en fleur de lys du coup ? Idem pour le bermuda rouge et les sandales qui font de la lumière à chaque pas ? »

C'était impressionnant : il avait beau essayer, il ne pouvait s'empêcher d'entrer en confrontation avec Yami chaque fois qu'elle en ouvrait l'opportunité. A croire qu'ils étaient nés pour ne pas s'apprécier. Il inspira grandement. Il fallait qu'il coupe court à cela, sans quoi ils ne s'en sortiront jamais.

« Écoutez Yami, je ne sais pas jusqu'à quel point vous m'imaginez stupide, mais je vous garanti que je suis loin de l'être autant. Et je serais aussi probablement moins désinvolte et sarcastique si vous cessiez d'être aussi méprisable cinq minutes. Vous pouvez d'ailleurs me rappeler pourquoi vous me détestez ? Je veux dire, avant que vous me considériez comme coupable pour le mal dont s'est atteint Oniri ? »

La scène, il s'en souvenait parfaitement. Mais le pourquoi, il l'ignorait encore, faute d'avoir toutes les cartes en main. Las de cette discussion qui tournait au ridicule, il se laissa tomber dans son fauteuil. Le parfait moment pour apprendre qu'Oniri avait des prétendants.

« Le pauvre homme. » répondit-il sans conviction. « A votre avis, il se rendra compte de quoi en premier ? Qu'il n'arrivera à rien avec de l'alcool, ou qu'il va se faire dévorer tout cru dans un sens qui ne lui plaira guère ? »

Mais oui, il savait que Yami veillait au grain : il l'avait vécu à l'hôpital, il connaissait la longueur de ses dents. N'importe comment, si la Saibogu était réellement comme elle le lui avait décrit, se faire remplacer par un autre ne figurait pas au palmarès de ses inquiétudes : la jalousie, c'était bon pour les autres. Le ton des piques acerbes et des tacles dans les rotules tomba après ce constat, la Ketsueki avouant à demi-mots sa détresse devant l'état d'Oniri.

« Je sais que le temps presse. » répondit-il d'un ton plus résigné que calme. « Mais ce n'est pas parce que je suis bloqué à Konoha que je ne fais rien de mon côté. Je continue de travailler sur un sceau un peu particulier, le genre qui donnera du fil à retordre même à elle. Même s'il ne canalise ses pulsions qu'une dizaine de secondes, ce sera déjà cela de gagner. »

Oniri partageait un fragment de sa souche après tout, aussi il n'y avait pas de raison que six ans de recherches et d'études sur son propre cas échouent entièrement.

« Le chronomètre ne joue clairement pas en notre faveur, c'est un fait, mais ce n'est pas le moment de sombrer dans le désespoir Yami. »

Il la préférait limite sarcastique et cruelle.

« Paniquer devant une situation, qu'elle ait de solution ou non, cela revient au même : cela ne sert à rien. Je sais que vous en avez conscience. Alors nous en restons à ce que nous avons prévu pour le moment, qui est le mieux de ce que puissions faire. Nous continuons de nous préparer, d'avancer tout ce qui peut l'être en prévision de la suite, et dès que j'ai le feu vert, nous y allons. Mais encore une fois, si le temps manque, vous n'avez pas besoin de moi pour commencer pour retourner du sable. Comme vous me l'avez bien fait comprendre, je ne sers qu'à fournir des éléments à Heyle. Alors qui que soit votre contact, vous êtes une femme intelligente : vous saurez lui mentir sur pourquoi je ne viens qu'après, et combien je suis '' indispensable '' pour la rencontre. »

Aucun ressentiment dans la voix, Natsuki était le pragmatisme incarné.

« Et du côté de Satoshi Saibogu ? Vous avez trouvé le temps d'entrer en contact avec lui ou son assistant ? Il me semblait avoir comprit qu'il nous sera d'une grande aide pour localiser la cachette de Heyle. »

Parce que le désert était un peu immense, et qu'ils n'étaient pas les premiers à vouloir retourner chaque grain de sable pour y trouver d'anciennes fondations. Donc si le temple était simple à débusquer, il l'aurait déjà été depuis longtemps. A supposer, encore une fois, que Heyle était bien là bas, dans un temple enfoui, et pas ailleurs... Tout reposait sur des paris incertains.

Et cela ne convenait guère au Nara tatoué.

« Rien de tout cela. Je voulais simplement souligner qu'auprès de Heyle vous serez plus à même de lui parler de ce fragment de pulsion qu'Oniri semble avoir parfaitement assimilée malgré son entité démoniaque alors que je pourrais davantage lui fournir des informations sur la manière dont elle agit au quotidien tout en interprétant les dires de l'entité puisque je connais l'histoire de l'origine de Yorn et qu'il vous manquera peut-être certains éléments pour accéder à une bonne compréhension de ce que Heyle pourra nous dire. »

Je ne lui avais rien caché sur l'état d'Oniri : il était légèrement paranoïaque. Même s'il était vrai qu'il y avait beaucoup de choses qu'il ignorait sur celle qu'elle était devenue depuis sa désertion mais ce n'était certainement pas moi qui lui en divulguerait quoi que ce soit.

Je soupirais cependant d'exaspération en l'entendant se prendre au sarcasme et a la condescendance une nouvelle fois.

« Je ne soulignais aucunement votre degré d’imbécillité sur la question mais voulais vous ôter l'idée de vous faire passer pour un Kazejin par exemple, car a trop vouloir imiter quelque chose on fini par être complètement à côté de la plaque au point que cela en devient presque un mauvais cliché. Je n'ai pas pour prétention de vous connaître suffisamment pour évaluer votre degré d'intelligence cependant vous l'êtes au moins assez pour maintenir en place une jambe cassée avec une rampe d'escalier ce qui, vous en conviendrez, n'est pas donné a tout le monde. »

Il était débrouillard au moins.

« Pourquoi je vous déteste ? C'est maintenant que la question effleure votre esprit ? Vous êtes peut-être débrouillard mais pas vraiment une lumière. J'imagine que cela est normal lorsque l'on passe son temps à s'amuser avec des ombres. J'ai eu beau retourner la chose sous tous les angles je ne vois absolument pas ce que Oniri vous trouve mais j'ai finalement obtenu ma réponse en apprenant votre secret : c'est vos part démoniaques qui vous ont attiré l'un a l'autre, il s'agit là de la seule explication possible. »

Il était inconcevable qu'elle lui ai trouvé quelque chose d'intéressant ou alors il s'était présenté sous un jour bien différent auprès d'elle.

« Toujours est-il que ma raison est la même que celle qui nous fait travailler en collaboration aujourd'hui : Oniri. Vous êtes entré dans sa vie sans crier gare alors qu'elle n'avait que moi comme seul soutien et cela depuis quelques années déjà. On peut dire qu'elle m'a montré la vie sous un jour nouveau. Le lien qui m'unit à elle est pour le moins particulier... J'aime la qualifié de meilleure amie, elle utilise parfois quant à elle le terme d'âmes sœurs dans le sens où notre lien est aussi fusionnel que si nous étions véritablement des sœurs : sauf que nous avons déjà partagé le même lit. »

Plus d'une fois. Mais cela il s'en doutait peut-être déjà.

« Oniri avait des sentiments pour moi par le passé mais je ne l'ai jamais vu de cette manière. Sachez seulement qu'elle est l'une des personnes les plus importantes de ma vie. Un point de repère m'ayant sorti de ma solitude et de ma vision de la vie dénuée de tout affect. Si elle est avec vous, un shinobi d'un autre pays de surcroît, elle finira inévitablement par me laisser de côté. »

Ce que je ne pouvais supporter.

« Mais bref, passons. Je cherche également de mon côté un moyen d'user de mon lien écarlate avec elle de manière utile pour notre entreprise. Étant donné que je n'ai pas la possibilité de m'entraîner auprès de la personne avec laquelle je possède un lien d'une puissance similaire cela n'est pas aisé mais le moment venu, je pourrais toujours ingérer de son sang récolté à l'avance pour l'immobiliser le temps de lui placer des sceaux ou de parvenir a pénétrer son esprit ou qu'importe comment on peut appeler ce procédé. »

Le temps... cette notion bien complexe que Méphisto s'amusait a narrer a travers des tic tac incessant tout en se targuant de son éternel sourire et sa queue en métronome. Mon regard assassin avait suffit à le faire disparaître de ma vue.

« Je sais que cela ne sert à rien de céder à la panique, vous ne m'apprenez rien, mais vous ne vivez pas avec le problème quasiment en permanence sous les yeux contrairement à moi. Je la connais depuis bien plus longtemps que vous et je l'ai déjà vu changer au fil des années mais là c'est d'une toute autre dimension. J'ai de la peine à la reconnaître et vous aussi vous en auriez je vous l'assure. »

J'avais mes propres affaires a mener mais je me retrouvais souvent avec elle et nous nous étions même affrontées dernièrement dans le cadre d'un tournoi d’entraînement au sein de l'organisation et il s'était dégagé d'elle une folie meurtrière et sauvageonne... c'était complètement déroutant.

« Concernant Satoshi, j'attendais la réponse de mon contact et d'avoir un ordre d'idée sur quand nous nous présenterions à Kaze pour lui faire parvenir ma demande. Je vais m'atteler au courrier après notre discussion. Il nous fera sans doute rencontrer son assistant dans un village plus isolé et praticable que la capitale. Il est en effet le seul capable de nous fournir des informations tant par les fouilles des Saibogu que par sa propre connaissance de l'histoire de Yorn sur la position de Heyle. »

Voilà où en étaient les choses...

Natsuki ne comprenait toujours pas pourquoi Yami jugeait indispensable sa présence pour chercher un temple, alors qu'il avait juste besoin d'être là pour rencontrer Heyle. Peut-être parce qu'une fois qu'ils l'auront trouvé, ils n'auront droit qu'à une seule entrevue, ou peut-être parce que le Nara tatoué s'exprimait et/ou comprenait mal. C'était sans importance au final. Il ne pouvait rien faire de plus de là où il était, alors il attendait. Attendait, et écoutait la suite.

« Chiche. » répondit Natsuki, que Yami avait réussit à pousser au point de détachement total.

Vautré dans son fauteuil, il afficha une expression morne, que la Ketsueki animait autant qu'elle tuait.

« Vous vous méprenez. La question m'a plus d'une fois effleuré l'esprit, mais comme je n'avais pas pour projet dans la vie de vous rencontrer à nouveau, je dois vous avouer que je me fichais royalement de votre ressenti : j'étais en paix pour ma part. Puis j'ai dû vous voir à nouveau, mais sur le coup des nouvelles, j'avais autre chose à penser que cela. »

Plus Yami parlait, et plus Natsuki se sentait debout sur des rails, observant un train lui fonçant dessus à vive allure. Et lui ne pouvait qu'attendre l'impact, silencieux et immobile, comme s'il n'attendait que cela autant qu'il le redoutait. Mais juste avant le choc, son impressionnante capacité à ne prendre en considération que les faits dénués du moindre affecte changea l'aiguillage, et la locomotive le frôla. Le regard dans le vague, les yeux vides de tout, il ne fit qu'attendre encore que les échos des wagons se perdent dans le lointain.

« Je pense avoir comprit. » dit-il après quelques secondes. « Corrigez-moi si je me trompe, mais dans les grandes lignes, vous me détestez parce que je suis entré dans sa vie alors qu'elle n'avait que vous jusqu'à présent, et dans un désire purement égoïste de votre part, vous préfériez que cela ne change jamais, que vous soyez le seul phare dans son obscurité, la seule personne qui ai besoin de compter dans son entourage. »

L'on inspire juste assez pour ne pas se faire couper la parole, et l'on repart.

« Toujours pour satisfaire votre égo, vous déduisez qu'il ne peut rien exister entre Oniri et quelqu'un d'autre, et que la seule raison qui explique qu'elle ai eu des sentiments pour moi, c'est parce que mon corps était l'incarnation de la haine et de la destruction, une masse de nerfs et de muscles qui ne peut éprouver rien d'autre qu'une ardente colère et une soif sanglante inextinguible. Elle a éprouvé des sentiments pour vous par le passé, vous les avez rejeté, mais vous avez continué de coucher avec elle par plaisir là où d'autres ne conçoivent pouvoir le faire que par amour. Une sorte de jeu donc, ou un moyen de la garder à votre crochet '' au cas où ''. N'importe comment, un moyen de rester dans sa vie, et de la garder dans la votre, puisque après tout, elle vous a aidé autant que l'inverse à vous en sortir. Une relation fusionnelle dans laquelle vous souhaitez qu'il n'y ai que vous deux au monde et dans laquelle vous refusez qu'un autre pénètre de son côté. Faîtes-vous preuve d'autant de rigueur en ce qui vous concerne ? »

Qu'elle essaie seulement de l'interrompre, et ils seront deux à parler en même temps : ce n'est pas cela qui le fera se taire le premier.

« Ce n'est pas une question. Car au final, à vous entendre, j'ai l'impression que ce qui vous dérange le plus, ce n'est pas tant qu'Oniri vous laisse de côté de temps à autre : c'est de ne pas être l'unique soleil de son existence. Sauf que le monde n'est pas comme vous, Yami. Personne ne cherche à s'accaparer maladivement une personne et à la garder prisonnière rien que pour soi. Et c'est ce que vous cherchez à faire. Je ne doute à aucun moment que sitôt que l'affaire sera classée, vous essayerez me tuer pour éliminer la concurrence. Vous refusez d'admettre que je peux lui apporter l'amour que vous n'avez pu ou su lui donner, car vous vous fichez de ses sentiments, tout comme vous fichiez de ses sentiments par le passé. Le monde doit correspondre à vos standards et à vos attentes, peu importe ceux des autres. Tout ce qui compte, c'est vous, et si vous avez fait appel à moi, ce n'est pas pour Oniri. C'est pour la ramener telle qu'elle était et pouvoir continuer de briller dans ses yeux, parce qu'actuellement, ce n'est que l'obscurité et le sang que vous y voyez, pas la reconnaissance que vous désirez y trouver. Vous me traitez de démon Yami, de monstre, mais si en tant que vampire vous y parvenez, je vous invite à regarder votre reflet dans une glace pour changer. »

Un soupire, et une conclusion, sans laisser de temps de parole à qui que ce soit d'autre que lui-même.

« J'ai essayé de faire des efforts, mais cela ne rime rien s'ils sont unilatéraux. Nous en avons fini pour aujourd'hui Yami. Inutile de me rappeler avant demain. Et si c'est juste pour me parler de cela, inutile de me rappeler tout court. »

Il ôta le collier muni de la pierre de communication, et la jeta dans son tiroir qu'il fit claquer.

Cette discussion était terminée.

Il ne comprenait pas. Il ne pouvait pas comprendre. Oniri était tantôt ma meilleure amie tantôt ma meilleure ennemie : nous pouvions passer d'un affrontement acharné l'une envers l'autre a siroter un verre en terrasse le lendemain malgré nos blessures causées respectivement. Nous possédions chacune une cicatrice infligée par l'autre. Pour autant nous savions que nous pouvions nous confier notre vie.
Nous avions vécu bien des choses et nous étions toujours soutenues lorsqu'il y avait des bas. Mon lien avec elle était puissant au point où j'avais quitté mon village pour suivre la voie qu'elle s'offrait dans le but de l'aider dans son entreprise.
Kioshi avait eu beau m'ordonner de ne pas partir à Yuki no Kuni la secourir je m'y étais rendue tout de même car qui d'autre que moi aurait eu une volonté suffisante pour risquer jusqu'à sa propre vie pour aller la sauver. Ma vie m'était précieuse et les personnes pour lesquelles je pourrais y renoncer se comptaient sur les doigts d'une main.

Il ne savait rien, il se trompait. Penser que je m'étais donnée à elle simplement pour le plaisir alors qu'il y avait toujours eu beaucoup de tendresse entre nous... En effet, ce n'était pas de l'amour que je ressentais pour elle mais cela ne m'empêchait pas d'éprouver de l'affection alors que lui songeait à de simples coucheries. Il n'avait pas connaissance de tout ce que nous avions traversé et surmonté : c'était bien trop facile de coller une étiquette en se basant sur le peu qu'il avait.

Il y avait néanmoins des points sur lesquels il avait raison : oui j'étais égoïste et oui je voulais la garder pour moi seule car il était hors de question qu'elle me mette à l'écart même si elle m'avait assurée que cela ne serait pas le cas lorsque nous avions eu cette discussion concernant le Nara.
Elle n'avait en effet besoin que de moi et pas de quelqu'un susceptible de la trahir comme elle en avait déjà connu et dont elle avait souffert. Jamais je ne pourrais pardonner à ceux lui ayant fait du mal et bien heureusement la mort les avaient tous rattrapé...

Cependant il se fourvoyait en pensant que j'avais toujours pour conviction de l'éliminer. Si le tuer attristait Oniri alors je ne le ferais pas car je voulais avant tout la voir heureuse même si je n'approuvais pas leur relation. J'avais beau centrer les choses sur ma personne je ne pouvais pas me résoudre à nuire au bonheur d'Oniri et cela je l'avais compris récemment, justement après notre discussion à toutes les deux sur le sujet.

Je voulais la ramener pour la faire redevenir telle qu'elle était, telle que je la connaissais et non pas pour qu'elle me regarde à nouveau ou pour n'importe quelle autre idiotie le cervidé pouvait formuler. J'avais peur pour elle. Je craignais qu'elle ne commette l'irréparable et qu'elle finisse exécuter par ses agissements sanguinaires.

Je me crispais toujours plus en l'entendant cracher son venin jusqu'à ce qu'il me traite de monstre : cela me faisait au contraire esquisser un sourire acerbe. Un monstre ? En voilà un doux compliment. Combien de fois pensait-il que j'avais entendu cela depuis mon existence ? J'étais une Ketsueki. Une buveuse de sang se complaisant a rendre exsangue ses victimes et a jouer de manipulation pour parvenir à ses fins, lorgnant sur le pouvoir et la puissance comme mes ancêtres dont je ne voulais cependant pas reproduire les erreurs. Alors peut-être étais-je un monstre pour le commun des mortels mais j'étais fière de mon sang et d'en être un.
S'était-il demandé pourquoi mon lien avec Oniri était réciproque malgré le fait que je sois un « monstre » ? Non. Bien sûr que non. C'était moi la méchante qui la forçait a rester auprès de moi... Elle tenait à moi au moins autant que je tenais à elle.

Pensait-il donc que je n'avais pas fait d'efforts de mon côté pour parvenir a le supporter ? J'avais finalement quémander son aide pour ramener Oniri en laissant ma fierté de côté dans le seul but d'obtenir plus de chance de réussite pour la sortir de là. Il ne fallait pas qu'il attende que je finisse par l'apprécier, je le tolérais c'était déjà plus que suffisant.

Mais bien entendu il s'éclipsa comme un lâche après avoir déversé ses paroles sans même attendre de connaître mon propre avis sur la question. Je n'en avais que faire. Après tout il pouvait bien penser ce qu'il voulait de moi tant qu'il m'aidait a ramener Oniri. Ma hargne en cet instant aurait pu me faire prendre des décisions hâtives comme j'aurais pu le faire autrefois, ne réagissant que sous le coup de l'émotion mais non je n'allais pas aller à cette expédition seule avec Ogami : il allait venir aussi. Nous n'irions sur les lieux qu'une seule fois car je craignais qu'une fois l'endroit où se cachait Heyle trouvé, elle se déplacerait ailleurs ou d'autres s'y rendraient avant nous.

Pestant intérieurement, je me relevais pour aller boire un verre avec Oniri et Nihilem, mettant de côté cette discussion détestable tout en profitant allègrement de la présence de la Saibogu que le Nara ne pouvait pas se vanter d'avoir. Un sourire s'esquissa sur mes lèvres alors que je portais le verre de vin à ma bouche sur cette simple pensée...