- Tu vas où ? On ne devait pas chasser aujourd’hui ?

Me retournant vers Karyuudo alors que j’étais entrain de partir, je lui lâchai quelques mots avant de fermer la porte.

- Non, j’avais dis demain, je vais boire un coup en centre-ville aujourd’hui.

C’était assez inhabituel de ma part, mais j’avais mes raisons. La principale était une blessure à la jambe datant de quelques jours qui m’empêchait de partir en mission et que donc, je n’avais pas grand chose à faire et cela n’allait pas durer bien longtemps. Aussi étrange que cela pouvait paraitre, j’avais envoyé un message à Hak lui demandant de me rejoindre dans un bar au milieu du village si elle le désirait. J’avais bien précisé que ce n’était lié à notre métier ou un quelconque projet. Cela faisait un moment que je la connaissais et que nous étions plutôt proches, malgré cela, nous n’avions jamais réellement l’occasion de discuter sereinement comme deux personnes civilisées. Bon, en même temps, c’était peut-être normal, puisque je n’avais rien de civilisé et que Hak n’était pas la personne idéale pour avoir une conversation tranquille.

Je marchais donc tranquillement dans les rues de Kumo en direction du lieu de restauration. Le Soleil venait à peine de dépasser son point de culmination et la faim commençait à me gagner petit à petit. Rien n’allait pouvoir me gâcher le plaisir de cette journée tranquille, même pas les regards insistants des passants, toujours obsédés par ma présence. Si j’avais toujours eu l’impression d’être un étranger où que j’aille, j’avais pu compter sur ma discrétion pour passer inaperçu pendant des années. Me poser aussi longtemps à Kumo me valut d’être reconnu de plus en plus, mais ce ne fut qu’avec l’accident que tout changea. Mais bon, l’avis des pauvres villageois ne m’intéressait pas vraiment.

Arrivant à destination, je fis un signe de la main au serveur avant de m’installer à une table libre en terrasse. Demander l’autorisation préalablement signifiait risquer de se faire refuser une place et ce n’était pas mon genre. Lorsqu’il approcha de moi, non sans réticence, je fis un effort particulier pour ne pas aggraver la situation et demande un curry et une bouteille de saké. Ce n’était vraiment pas mon alimentation habituelle, mais un peu d’épice n’allait pas me déranger.

Il veut me voir pour parler ? Je soupire calmement, admettant que c’est plus proche du foutage de gueule qu’autre chose. Comme si nous étions capables de parler calmement. Comme si… Comme s’il ignorait la totalité de ce qu’il s’est passé cette année. J’ai toujours su qu’il avait un problème relationnel, et je suis pareille donc je n’ai pas vraiment de quoi me plaindre, mais. Je soupire une fois de plus et active mon spectre sans visage pour traverser rapidement Kumo sans attirer l’attention. En l’espace de quelques temps, je suis devenue une figure particulièrement reconnaissable du village à cause de ce cadeau, perdant le loisir de mon calme à écouter ce que disent les gens, circuler librement pour faire ma petite garce. Je secoue la tête et frappe du pied contre le sol. De toute façon, l’heure n’est pas à ça aujourd’hui. C’est particulièrement détestable de ressentir autant de choses – contraires de surcroit – en pensant à Otoke. Nous étions amis, nous sommes passés plus puis moins en alternant une relation de pute et connard pendant l’espace d’un an entier.

S’il veut parler, nous parlerons. Soit. Même si je refuse de me l’avouer, j’espère au moins lui arracher la moindre la réaction, le moindre petit quelque chose qui… Je ne sais pas. Me montre que je ne suis pas une salle conne à m’engager dans quelque chose qu’il ne comprendra et ne réciproquera jamais ? Je lui en veux toujours et il ne cherche même pas à s’excuser, obtus comme il est. Réajustant mes cheveux d’un geste de la main, je désactive l’artifice qui me permet de ne pas être reconnue en arrivant au lieu indiqué de rendez-vous. Evidemment, lorsque je m’assois à ses côtés, quelques regards se tournent. Putain de réputation que l’on a méritée tous les deux, entre la porteuse du gène à l’origine d’une guerre et le criminel réhabilité par le Raikage. Sans la moindre hésitation, j’adresse le plus noir de mes regards à ces quelques têtes curieuses pour leur montrer que je ne suis pas là pour plaisanter et que s’ils veulent en découdre, je suis prête. Bande de connards.

« Salut. »

Un peu trop de froideur dans ma salutation – ce n’est pas ma vraiment ma faute. Trop de choses. Il y a trop de choses entre nous pour que l’on puisse parler calmement. Des zones d’ombres, des flous, des… Des secrets oui. Il serait peut-être temps de lui dire ? Bah. Rejetant ma tête en arrière, je croise une jambe sur l’autre me donnant une allure décontractée, tandis que je commande un plat de nouilles. Il voulait parler, très bien. A lui de commencer.