─ La température est idéale. Remarque, je me faisais pas de souci avec un Yamada comme compagnon.

Il jeta un regard amusé à Kioshi tandis qu’il rentrait lui-même dans l’eau chaude. Si le guerrier du nord n’avait que faire de voir – un court instant – quelqu’un nu, il pouvait également compter sur un partenariat qui avait débuté il y a de cela plus d’un an. Ensemble, ils avaient traversé moult épreuves, sans néanmoins rencontrer d’énormes difficultés jusqu’aux fameux assassinat de celui qui était Nidaime Kazekage.

Le Chalet, voilà un nom simple comme les aimait le Borgne. Sans fioritures ou décors extravagants, cet endroit s’était faite une réputation de la meilleure façon qui soit : l’authenticité. C’était un peu comme cela que l’Héritier se voyait reprendre ses terres et son clan : en restant fidèle à lui-même. Il soupira, et retira son cache-œil, révélant alors un œil droit fermé.

─ Je t’ai vu écrire une lettre avec une grande intention toute à l’heure… Il jeta le regard de son unique œil sur le Yamada tandis qu’il profitait de son bain. Tu fais ce que tu veux l’ami, mais j’ai moi aussi quelque-chose à te dire.

Il écarta les bras sur le rebord de la source chaude et laissa sa tête basculer vers l’arrière. Le sentiment qu’offrait la température de l’eau et la caresse de cette dernière était fortement apprécié par le Suzurane, qui espérait ne pas avoir oublié comment vivre dans le froid de Yuki no Kuni.

─ Je suis prêt.

Trois mots simples, et pourtant si forts en sens. L’année qui s’était écoulée avait d’ailleurs permis à Kioshi de se rendre compte de la préparation du Suzurane. Il était devenu plus fort, plus entraîné et surtout, il avait soigné la plupart des blessures de ses précédents affrontements. Mais il n’y avait pas que ça : la reconstruction de Kiri était quelque-chose qui devait sans doute inquiéter l’Héritier des terres du Nord. Cela avait sans doute accéléré le plan du Borgne.

─ Araakoa Aare est mort, j’ai rempli ma part du marché. A toi de remplir la tienne mon ami. Dans sept jours, je partirai à Yuki no Kuni.

Prêt depuis le jour de leur rencontre ? Hakyô sourit à cette idée. Yamada Kioshi n’avait pas totalement tort. Dès lors qu’il avait accompli sa vengeance auprès du Régent de Kiri, il s’était mis à passer à la suite. Mais depuis, les évènements de mauvais augure s’étaient enchaînés : la création de l’Alliance des Pays Neutres et le fait que Yuki no Kuni eut été forcé d’être dans leur joug, puis la prise de pouvoir de Samui Kakeshuou et l’avènement de l’Empire… Et aujourd’hui, il y avait le retour du village caché de la Brume…

─ Non, rien sur cette Oniri ou Ketsueki Yami, répondit-il sachant à quel point la dernière pouvait compter pour son ami.

Il n’avait pas besoin de le dire, mais avoir des nouvelles de ces deux ex-Sunajins était une chose peu probable si loin à l’Est du Yuukan. Mais après tout, peut-être que les actions de ces dernières les avaient amenées dans ces recoins, ne serait-ce que le temps d’un passage ? Mais il fallait aussi avouer que le Suzurane était plus préoccupé par ce qu’il s’apprêtait à faire.

─ C’est de ça dont tu parlais par écrit ? Encore une fois, je suis désolé pour ton oncle. Mais je n’ai plus de temps à perdre.

Ce n’était pas du tout de la méchanceté. Le code d’honneur du guerrier lui imposait de respecter ses engagements, et il en attendait la même chose pour celui qui l’accompagnait depuis plus d’un an maintenant. Hakyô reprit aussitôt la parole, se justifiant une nouvelle fois par les récents faits qui ont agité le monde.

─ Ces chiens de Kiri ont reconstruit leur village grâce à l’appui de l’Empire. Reprendre mon pays en combattant les forces du Shûkai sur place était déjà une entreprise difficile, mais s’ils peuvent désormais compter sur un soutien maritime quasiment permanent…

Il devait se rendre sur Yuki no Kuni au plus tôt. Trop longtemps il avait été tenu éloigné de ses terres. Premièrement retenu et torturé par Kiri, ensuite habité par la vengeance et enfin occupé à remplir la part du contrat qui le liait à l’ancien Kazekage, il n’avait jamais craint de perdre du temps car les forces du Shûkai au nord ne bougeaient pas. Mais maintenant que le village de la Brume refaisait surface, tout avait changé. Tout.

─ Je veux voir de mes propres yeux ce qu’il s’y passe. J’ai certes eu vents de certaines informations sur l’administration de l’Empire, mais je veux me faire ma propre idée. Et il faut avouer que les rumeurs ne sont pas toutes bonnes à entendre : certains disent que mon clan serait presque… soumis et collaborateur. Je ne veux pas y croire, mais il faut que j’ai le cœur net de la situation de mon peuple.