Une nouvelle journée s’annonçait pour le jeune Higeki. Comme chaque jeune homme de son âge, sa routine matinale était assez basique. En se réveillant, il enfila quelques vêtements pour se couvrir un peu plus, préférant usuellement être plus dévêtue lorsqu’il dort. Une fois quelque chose sur le dos, il se dirigea vers son frigo afin de sortir de quoi se faire un petit-déjeuner équilibré, rien de bien prestigieux, juste du lait pour ses céréales et un jus de fruit. Après être installé à table, il discuta avec l’esprit qui était dans son appartement. Il était apparemment mort à cause d’une overdose alors qu’il était membre d’un Trafic de drogue, voulant en prendre une bonne dose suite à un pari. Higeki s’amuse à lui répéter qu’il a été idiot, mais bon, il reste de bonne compagnie, toujours des histoires qui sont incohérentes pour le Mamoru. Une fois qu’il a fini de manger, il se dirigeait vers l’extérieur de son appartement et s’en alla faire sa tâche du jour. Une journée des plus normales pour n’importe qui, quoi.

Usuellement, le vert devrait accomplir ses devoirs de Heishi, en patrouillant dans la ville afin de pouvoir repérer les gens suspects, ou bien aider la population qui était en besoin. Mais aujourd’hui était un jour de repos, il n’avait aucun besoin de répondre à ses devoirs, et donc logiquement, de sortir de chez lui. Et pourtant, le voilà à gambader dans la rue, fredonnant un air d’une chanson qu’il connaît si bien. Il était vrai que parfois, le jeune homme partait à quête d’aventures, aventures s’incarnant par des âmes innocentes ne l’ayant pas rencontré qu’il pourrait épanouir de son savoir, mais aujourd’hui, ce n’était pas la raison de sa sortie. Ce jour-là, il avait été convoqué à venir voir un de ses supérieurs à Itabei, mais pas n’importe quel supérieur : une Mamoru. Cela voulait dire qu’il aurait l’occasion de pouvoir rencontrer quelqu’un qui partageait (selon ses propres suppositions) sa passion avec le monde des esprits, de quoi le mettre de bonne humeur !

Il arriva alors sur le lieu de rendez-vous, une pièce commune à l’intérieur du palais d’Itabei. Il ne semblait pas avoir trop grand monde, les gens étant de manière générale plutôt répartis dans la ville afin de monter la garde, ou alors dans le même cas qu’Higeki à profiter de leur jour de repos. Pendant qu’il patienter dans ce grand salon (si l’on pouvait appeler la pièce ainsi) à discuter avec les esprits locaux (ou du moins, ceux qu’il voyait et qui voulaient bien l’approcher), il se demandait bien à quoi pourrait ressembler sa supérieur. Il n’avait que son nom, Kaya, donc se doutait bien qu’il s’agissait d’une femme. Mais pour le reste, il voulait savoir si son apparence était tout aussi peu conventionnelle que la plupart des Mamoru. Et puis, est-ce qu’elle faisait partie des « Maudits », les membres du clan ayant choisi la voie démoniaque ? Qui sait. Si tel était le cas, difficile de deviner la réaction d’Higeki (enfin, plus que d’habitude).

Il ne fallut pas attendre longtemps alors qu’il put voir quelqu’un se diriger vers lui. Tournant la tête, il put voir une femme avec une longue chevelure noire, des vêtements noirs, des yeux noirs, bref, rien d’inhabi-… Ah si, les yeux avec un scelra noir n’était pas quelque chose de fréquent. Il n’en fallut pas plus pour convaincre l’Heishi de l’identité de la personne. Se redressant droit, il prit la décision de s’avancer lui-même vers elle, tout en levant la main droite pour faire un signe de salut, et en affichant un de ses sourires habituels (autrement dit, pas rassurant du coup).

« - Ohayo, Kaya-onee-san ! Je suis Higeki, heureux de vous rencontrer ! Une fois les présentations faites, il fit redescendre sa main pour rejoindre l’autre dans son dos, avant de pencher légèrement la tête pour continuer la discussion. Alors, pourquoi voulez-vous me voir ? »

Décidément, le jeune homme ne savait pas y faire pour entretenir une conversation, choisissant de passer outre d’éventuelles civilités pour aller directement à l’essentiel. Mais bon, faire plus lui semblait inutile après tout, alors autant passer à la raison principale de sa présence en ces lieux.

HRP:

Kaya aurait préféré trouver un endroit plus discret que le palais d'Itabei. Mais son temps libre s'est drastiquement réduit depuis qu'elle est entrée au service de Hoheinheim. Ses rôles de diplomate et d'élève ainsi que ses obligations au Shozaichi ont fait fondre comme neige au soleil les rares cases libres de son agenda. Les nuits se font de plus en plus courtes et le travail de plus en plus présent. La noiraude mentirait en disant qu'elle s'acclimate facilement avec cette nouvelle vie. Mais le fait qu'elle fasse tout ça dans l'intérêt du clan lui donne force et courage. Et puis il y a tout de même de bons moments...

Un de ces moments, justement, approche à grands pas. Il s'agit plus précisément d'une rencontre avec un jeune Mamoru qu'elle n'a jamais eu le plaisir de rencontrer jusque-là. Mais le fait qu'elle n'arrive pas à mettre un visage sur son nom ne signifie pas pour autant qu'elle ne sait rien de lui. Certains parlent de lui en bien, d'autres en mal. Mais leur avis à tous semble bien tranché lorsqu'il s'agit du jeune homme. Il ne laisse pas indifférent, c'est certain. Reste à savoir pourquoi. Et s'il peut être utile. Le clan a trop souvent eu tendance à rejeter les anticonformistes. Règle déjà mise en avant lors du chiisme entre les manieurs d'esprits et ceux, plus intrépides, ayant décidé d'utiliser leurs capacités pour contrôler les démons. Et il est grand temps que ça cesse!

Accoudée à la rambarde d'un balcon, savourant la vue plongeante ainsi offerte sur Itabei, Kaya attend donc la rencontre avec un mélange de curiosité et d'appréhension. Son regard continue de vagabonder sur les divers bâtiments mais ses pensées sont focalisées sur les prochaines heures. Et lorsque l'un de ses suivants fantomatiques vient lui annoncer que le jeune homme nommé Higeki est arrivé la jeune femme accueille la nouvelle d'un simple mouvement de tête. Les pièces sont en places. Reste à les bouger sur le dangereux échiquier clanique...

Elle rejoint donc son invité dans une petite pièce de l'étage inférieur. Ce dernier prend immédiatement les devants et se présente après lui avoir adressé un sourire qui n'a rien de rassurant. Quelque peu ébranlée par un accueil si... chaleureux, la noiraude reste silencieuse quelques instants. D'autant plus que le jeune homme semble bien décidé à aller droit au but. Une qualité que Kaya apprécie en temps normal. Mais elle n'arrive pas à dire si cet enthousiasme est de bon augure ou s'il représente un danger. Le temps se chargera vraisemblablement de lui apporter une réponse. En attendant elle décide de saisir la main tendue et de la serrer selon les règles de la courtoisie.

"Enchantée également, Higeki-san. C'est toujours un plaisir de faire la connaissance d'un autre membre du clan." glisse-t'elle en réponse, un sourire en coin. "Particulièrement par les temps qui courent..."

La situation pourrait être meilleure pour les Mamoru à Taki. Les pratiques occultes du clan sont plutôt mal acceptées par une population encore ancrée dans ses croyances et ses peurs. Il y a déjà eu des escarmouches, des morts. Et malgré les efforts de Hoheinheim pour apaiser la situation, les rancoeurs restent présentes d'un côté comme de l'autre. Ces tensions prennent l'allure d'une véritable poudrière. Et le clan doit faire preuve de solidarité s'il entend survivre. De solidarité et de courage. Deux choses qui lui font cruellement défaut à l'heure actuelle...

"J'aimerais te montrer quelque chose..."

Elle l'invite à le suivre d'un signe de la main. Ils quittent ainsi la pièce pour rejoindre un couloir puis un second. Finalement ils se retrouvent à l'air libre, face à l'imposante bâtisse. Gardant le silence, Kaya poursuit son chemin jusqu'à rejoindre les faubourgs de la ville puis le centre-ville. Le tout sans laisser le moindre indice sur leur destination. Finalement c'est sur les flancs d'une fontaine en plein milieu d'Itabei qu'elle décide de s'arrêter. Elle désigne ensuite la foule présente de ses bras écartés. S'en est-il rendu compte?

"Tu as remarqué n'est-ce pas?" questionne-t'elle dans un murmure. "Le comportement des gens! Depuis que nous avons quitté le palais chaque personne ou presque s'écarte sur notre passage, nous décoche des regards haineux ou craintifs. Ces gens ont toujours rejeté ce qu'il n'arrivait pas à comprendre. Et le rejet pousse à la peur. Puis à bien pire encore... La situation des Mamoru dans le pays en est un parfait exemple n'est-ce pas?"

Elle ne cherche pas à obtenir son approbation. La noiraude se contente d'exposer une règle qu'elle considère comme éprouvée et immuable. Son regard se pose sur une fillette qui l'observe avec une curiosité toute enfantine. Du moins jusqu'à ce que sa mère la saisisse avec vigueur pour l'emporter à bonne distance. Ce qui arrache un léger soupire résigné à la jeune femme avant qu'elle se retourne vers Higeki.

"Mais ce n'est pas le véritable problème. Cela fait des décennies voir des siècles que nous composons avec l'hostilité de la population. Et jusqu'à maintenant le clan a toujours réussi à préserver un frêle équilibre, à se protéger de ses ennemis. Mais les temps changent..." glisse-t'elle avec tristesse. "L'isolement du clan l'a souvent protégé, c'est vrai. Mais ce n'est plus une solution viable. Pendant que les Mamoru stagnent sous l'emprise de dirigeants figés dans le passé, nos ennemis, eux, gagnent en puissance. Ce qui est totalement... inacceptable! Pour survivre, nous devons évoluer!"

Le jeu est dangereux. Kaya prépare depuis des semaines la destitution des anciens du clan et sa prise de pouvoir. Mais jusqu'à maintenant elle s'est toujours tournée vers l'extérieur pour trouver du soutien. Et c'est la première fois qu'elle cherche des alliés au sein même des Mamoru. Est-ce une erreur? Peut-être... Ce qui est certain, en revanche, c'est qu'elle ne pourra pas atteindre son objectifs sans le soutien d'une partie des siens. Il s'agit d'un exercice périlleux, certes. Mais nécessaire.

"Et pour évoluer nous devons consentir à faire des sacrifices. Ce n'est qu'à ce prix que le clan perdura..."

Qu'en pense-t'il? A-t'il compris de quels sacrifices elle parle? Elle ne peut décemment pas exposer ses projets à une personne réfractaire au changement ou fidèle aux instances dirigeantes du clan. Elle a besoin de gens tournés vers l'avenir et non enfermés dans le présent. Higeki est-il de ceux-là?

Kaya était une jeune femme guère plus âgée que notre jeune protagoniste, mais elle dégageait une aura beaucoup plus mature que le jeune homme. Elle semblait démontrer d’une plus grande expérience dans son rôle en tant que Soldat de l’empire, chose qu’Higeki ne pouvait qu’admirer. Il pouvait également deviner qu’elle était sans aucun doute une meilleure adepte des arts occultes et ancestraux des Mamoru, de par l’agitation des esprits se trouvant autour d’elle, chose qui prouvait qu’elle n’était point une usurpatrice. Voilà de quoi rassurer Higeki, parce que si jamais il avait appris après leur discussion qu’il s’agissait d’une usurpatrice, il aurait vu rouge et n’aurait pas cherché à savoir le pourquoi avant de l’envoyer dans un genjutsu.

Contre toutes attentes, elle lui demanda de la suivre à l’extérieur du bâtiment. Toujours dans son esprit de fonctionnalité, il avait vraiment du mal à comprendre pourquoi elle l’avait demandé de se retrouver ici et non directement au lieu qu’elle comptait l’amener. Il avait noté l’anxiété dans la voix de Kaya, mais il avait choisi de laisser couler, ne pensant pas avoir une grande importance à y accorder. Les voilà maintenant en train de traverser la ville, se demandant bien quel était objectif de cette ballade. Au cours de sa marche, sa nature curieuse le poussait à regarder un peu autour, la ville, les constructions, le ciel… Et les gens. Comme il y était habitué, les personnes le regardaient bizarrement, alors qu’il était juste en train de les saluer du regard. Il était habitué à force, on lui avait dit que ce n’était pas sa faute, juste sa tête qui ne leur revenait pas. En revanche, il remarquait que le même traitement était lancé sur sa cousine, chose qui l’étonnait.

Une fois qu’ils arrivèrent à la destination prévue par Kaya, elle commença à faire un monologue qu’il eut le respect de la laisser énoncer. Apparemment, le but de la marche n’était pas la destination, mais le trajet en lui-même. Elle annonça ainsi que la situation des Mamoru était égale à celle de Parias, qu’ils étaient complètement rejetés par la population du pays de par leur isolation et leurs liens avec les arts occultes. Elle annonça ensuite ce qui apparut comme une évidence pour Higeki, autrement dit, le fait que les Mamoru vivaient depuis longtemps comme ça, et qu’il n’y avait pas besoin de réparer ce qui n’était pas cassé. Cependant, la solution serait, selon elle, « d’évoluer en faisant des sacrifices ». Comme pour renforcer le débat qui commençait dans la tête du Heishi, la brise se leva pour faire virevolter sa chevelure alors qu’il pesait la force des mots de Kaya.

« - Est-ce que… Vous êtes en train de suggérer un coup d’état ? »

Toujours dans l’extrême, le jeune Mamoru restait cependant d’un calme olympien, presque trop inquiétant, quand on connaît son attitude joviale. Il n’avait même plus son sourire de Yandere affiché sur son visage, son expression était plutôt neutre il fallait dire… Sauf pour ses yeux. Ses yeux d’émeraude déjà bien grands à la normale étaient maintenant en train de briller d’une teinte assez stressante. Le jeune homme venait tout simplement d’assumer que Kaya était prête à trahir le clan en lançant une opération de destitution des chefs de clan. Toujours sur le même ton monotone, il tourna légèrement la tête sur le côté, presque comme s’il essayait de toucher chacune de ses épaules avec ses oreilles, ses yeux de jade toujours fixé sur Kaya, avant de continuer son exposé.

« - Kaya-Onee-san… Pourquoi vous vous inquiétez de l’opinion des gens ? Le clan Mamoru est certes isolé et effraye la population, mais… En quoi est-ce un problème ? Nous avons vécu en autarcie depuis plusieurs décennies déjà, et nous voilà associé au grand empire. Kamui-sama a bien vu l’utilité de notre clan dans ses desseins, et ceux, sans que nous ayons à aller lui demander de l’aide. »

Curieux, curieux était cette jeune femme devant lui à énoncer des choses qu’il ne comprenait pas. Pour une personne normale, il était évident que rester isolé et entretenir la peur constante au sein de la population de Taki n’était pas bon pour la notoriété du clan, que trouver une solution pour y remédier leur serait plus que bénéfique. Mais Mamoru Higeki n’était pas quelqu’un de normal. Pour lui, les paramètres comme le facteur humain n’étaient pas pris en compte dans ses méthodes de raisonnement. De ce fait, les soucis des personnes extérieures au clan étaient inexistant dans son esprit, il ne voyait pas l’intérêt de gagner la sympathie des gens de Taki. Ce n’était pas qu’il était contre, c’est juste de l’incompréhension la plus pure qui soit. En quête de réponse, le jeune se rapprocha d’elle, fixant toujours son regard stressant dans les yeux d’ébène et de sang de son ainée.

« - De plus, vous vous rendez compte de l’importance d’une telle déclaration ? Vous pourriez causer un important déséquilibre dans le clan en faisant un tel acte. Déjà que les Mamoru sont séparés entre la branche principale et les hérétiques utilisant les démons, entraîner un nouveau conflit ne serait pas des plus avantageux pour notre propre survie. »

Après cette déclaration, Higeki resta silencieux, se contentant que d’observer avec ses grands yeux la jeune femme, comme pour essayer de scruter son âme. Mystères, mystère qu’elle était pour lui. Ses intentions étaient, pour elle, dans le but d’aider le clan, mais les conséquences qu’elle laissait entrevoir n’étaient pas des meilleurs augures. Comprenant la tension mise en place par sa faute, le jeune homme recula en faisant un sourire plus calme que ses usuel, un rire de gamin caché derrière ses lèvres avant de marcher un peu autour d’elle, les mains légèrement derrière lui, paumes pointées vers le sol.

« - Je ne dis pas que c’est forcément une mauvaise idée, loin de là. Si j’entrevois que tuer est la solution la plus simple et bénéfique, moi aussi, je n’aurais aucune hésitation à le faire. J’exprime juste mon incompréhension sur le fait que cela pourrait être bénéfique pour le clan et l’empire. »

Il ne tenait maintenant qu’à elle de voir comment elle pourrait le convaincre de rejoindre sa cause, car le cas échéant, il la considérerait comme une menace pour le clan, et n’hésiterait donc pas à faire tout pour l’éliminer le plus rapidement possible.

Les Mamoru sont étranges, c'est une évidence. Mais ce trait semble particulièrement présent chez Higeki. Puisqu'il a eu la politesse de la laisser terminer elle observe en retour le silence lorsqu'il est temps pour lui d'exprimer son avis. La noiraude le suit du regard jusqu'à ce qu'il commence à rôder autours d'elle comme un prédateur curieux envers une proie. Un brin mal à l'aise, venant à douter de la pertinence de cette conversation, la noiraude écoute ses interrogations et ses remarques. Ces questions, elle se les est elle-même posées par le passé.

Elle note surtout que son interlocuteur ne s'est pas réellement offusqué par ses propos. Alors qu'il aurait pu répondre par la colère ou les menaces, il semble davantage opter pour la curiosité. Est-ce une invitation à le convaincre qu'il lui lance? Peut-être qu'il s'est aussi rendu compte que quelque chose cloche au sein du clan. Et qu'il est également à la recherche d'une solution. En soi c'est plutôt encourageant. Mais le jeune homme reste encore une énigme pour la demoiselle: après tout il n'a pas réellement exposé son avis. Il se contente d'exposer des doutes relevant de la logique tout en l'encourageant à lui en dire plus. C'est malin!

"Un coup d'état?" répète-t'elle sur un ton faussement occulté. "Quel vilaine expression! Je préfère nettement le terme de révolution. Ça garde une certaine connotation positive..."

Elle lui adresse un léger sourire. Kaya ne veut pas renverser les anciens et prendre le pouvoir pour son seul intérêt. Elle a de l'ambition, bien sûr. Mais ce n'est pas cette dernière qui la pousse à s'élever contre les dirigeants Mamoru. C'est l'amour qu'elle porte aux siens. Un amour digne de celui que des parents peuvent éprouver pour leurs enfants. Un amour qui ne la fera pas hésiter une seule seconde lorsqu'il s'agira de séparer le grain de l'ivraie pour assurer un avenir radieux au clan. Ou du moins exempt des dangers qui le menacent depuis trop longtemps. Sacrifier quelques individus pour en sauver un plus grand nombre est un acte de noblesse. Et une nécessité...

"Je te l'accorde, la situation du clan s'est améliorée ces derniers temps. Mais l'alliance avec l'Empire n'est en rien un gage de survie à long terme. Il nous a évité l'extermination, rien de plus. Le Kamui n'aurait jamais toléré un clan dissident sur les terres impériales..." nuance-t'elle. "Mais le Shûkai est semblable à un bouclier sur lequel on aurait dessiné une cible. Les relations avec Kumo sont tendues, Kakeshuou a été la cible d'un attentat à Suna et Konoha n'a jamais compté parmi nos amis. Ce n'est qu'une question de temps avant que le Samui nous entraîne dans la guerre. Et lorsqu'il tombera, il est de notre devoir de faire en sorte que le clan ne tombe pas avec lui!"

Oui, le Shûkai est une solution à court terme. Une solution qui leur a été imposée sous couvert de diplomatie. Mais les Mamoru ne sont pas liés à l'Empire ou à son Kamui. Ils sont liés à Taki. Et on ne leur a jamais imposé quoi que ce soit par le passé. Toujours est-il qu'Higeki a sûrement compris que la situation actuelle ne convient guère à la noiraude. Une alliance solide avec le seigneur de Taki. Voilà ce qu'elle désire. Quant au Shozaichi, il convient de s'en distancer rapidement. Mais avec subtilité. Mais ça reste de la musique d'avenir. Avant d'envisager ce genre de choses il faut déjà se donner les moyens de les mettre en oeuvre...

"Quant au clan... Les problèmes et les déséquilibres existent déjà!" soupire-t'elle, amère. "Nous ne sommes plus unis depuis que ceux qui se sont tournés vers les démons ont été bannis. Pourtant nous sommes tous les branches d'un même arbre. C'est le rejet d'une partie des nôtres qui nous a affaiblis. Je ne compte pas diviser le clan. Je veux le réunir, gommer les différents qui nous éloignent depuis trop longtemps maintenant!"

Les démons et les esprits sont les deux facettes d'une même pièce. L'ignorer est un déni de réalité. Pour peu qu'elle s'empare des plus hautes fonctions du clan, Kaya lèvera le bannissement qui frappe une partie des siens. La forteresse qu'elle a obtenue de Hoheinheim donnera les moyens au clan de se protéger efficacement. Et ils feront face. Ils ne se cacheront plus dans les forêts ou les grottes de Taki. La population devra accepter leur présence. Ou aura tout le loisir de la regretter...

"Et je me fiche pas mal de l'intérêt de l'Empire pour être honnête. Seul le nôtre et celui de Taki m'intéresse. Les Mamoru sont liés à ces terres. C'est chez nous, ici! Et il fut un temps où la bannière du Shûkai ne flottait pas sur le pays. Je regrette qu'autant de gens l'aient oublié..." glisse-t'elle avec amertume. "Je suis toutefois consciente que nous ne pouvons pas nous mettre le Kamui a dos et qu'il vaut mieux jouer la carte de la docilité pour le moment. Mais nous ne devons rien à l'Empire. En fait ce serait même plutôt l'inverse."

Le Shûkai a privé un peuple autrefois fier de sa liberté. Sa liberté de choisir son dirigeant ou de présider à sa destinée. L'Alliance avait un objectif noble. L'empire n'existe que pour contenter un seul homme... Cette nuance a rendu nombre de nations prisonnières du Kamui. Tôt ou tard les étendards du Seigneur de Taki et ceux des Mamoru flotteront côte à côte. Car c'est tout simplement ainsi qu'il doit en être.

"Écoutes... Les anciens du clan nous figent dans le passé. La population a pris les armes dans certains coins du pays pour nous donner la chasse. Setsuko m'a confié avoir affronté une bande de shinobis - des shinobis, Higeki! - qui voulaient nous exterminer. Juste avant qu'elle ne donne sa vie pour les intérêts d'un homme assis à des centaines de lieues d'ici et qui se fiche pas mal de ceux qui tombent en son nom. Et que font nos dirigeants pendant que les nôtres meurent et se heurtent à une haine grandissante? Rien. Absolument rien! Ils se contentent de nous isoler davantage, ignorant le problème au lieu de lui faire face. Ils nous mènent à l'abattoir. Et il est hors de question que je les suive les yeux fermés!" s'irrite-t'elle. "Alors... Est-ce que redonner au clan sa fierté, son honneur et sa force est une raison suffisante pour tuer à tes yeux?"

Elle laisse son regard vagabonder sur les personnes présentes. Ces dernières peuvent les voir mais l'écran formé par les esprits de Kaya les empêchent d'entendre leur conversation. La noiraude saisit à la volée les regards désapprobateurs ou craintif des gens qui osent lever les yeux dans leur direction. L'envie de leur lâcher une meute de démons dessus pour leur donner une réelle raison de les craindre lui effleure l'esprit. Mais ça n'aurait évidemment rien de constructif. Kaya reporte donc son attention sur son frère de clan et lui décoche un regard lourd de sens.

"Parce qu'aux miens, ça l'est!"

Et plutôt deux fois qu'une. Les Mamoru ne peuvent plus se permettre le luxe de l'attente. Les choses doivent bouger. Et vite. Reste à savoir si Higeki partage son point de vue ou s'il représente une menace...

Dès l’emploi du terme « Révolution » par la jeune Kaya devant Higeki, l’aura de ce dernier avait complètement changé. En effet, alors qu’il dégageait auparavant plutôt une ambiance de curiosité enfantine, dans le cas présent, il se présentait plutôt comme un juge. Son éternel sourire, bien qu’inquiétant empli d’une apparence juvénile, laissait place pour une bouille empreinte de neutralité. Ses yeux habituellement grands ouverts pour montrer son intérêt et ses attentes étaient beaucoup moins expressifs, plus ennuyés, alors que le discours de la brune s’enchaînait. Ce terme était, en quelque sorte, tabou au sein de l’empire, car il était symbole de la rumeur qui circulait ici et là, comme quoi, des gens seraient contre l’idéologie de l’empire, chose qu’Higeki ne pouvait purement pas comprendre. Lui qui trouvait la forme de gouvernance idéale comme il comprendrait que l’eau est vital pour la survie, avait du mal à envisager une raison valable pour vouloir s’y opposer.

Mais là n’était pas directement question de l’empire (enfin en parti), mais seulement du mode de vie des Mamoru et du système mis en place pour garder un équilibre. Le clan n’était lié qu’à son pays selon elle, et non au Shûkai qui avait choisi de le prendre sous son aile afin de le faire grandir, chose que la noiraude semblait oubliée. Higeki avait fait ses classes, et savait que ce n’était qu’uniquement grâce au développement du commerce entre les nations de l’Empire, ainsi que l’instauration d’une monnaie unique, que l’ensemble avait réussi à faire en sorte de ne pas s’écrouler. Il admettait cependant le fait que l’empire était devenu la cible de plusieurs nations était problématique pour le bien-être du clan, mais le fait qu’elle veuille s’opposer à l’empire était quelque chose qu’il ne pouvait pas accepter.

L’autre point de son argumentation était lié au fait que les Mamoru étaient divisés de par leurs croyances. Elle faisait naturellement allusion à ceux qui étaient cachés derrière la cascade, qui avaient choisi d’embrasser la voie des démons. Pour ceci, Higeki était plus sceptique que méfiant. En effet, bien qu’il fût éduqué à révulser les membres reclus du clan, il ne pouvait s’empêcher de s’interroger sur les raisons. En effet, il n’était pas adepte des conventions sociales usuelles, donc le fait qu’on lui disent « que c’est malsain » n’était pas un argument valide pour Higeki. Suggérer d’unifier le clan avec eux n’était donc pas une véritable aversion. Mais pour cela, il aurait fallu évidemment qu’il parte à la rencontre de ces derniers. Le discours de la noiraude fini, c’était donc au tour d’Higeki de reprendre la joute verbale. Prenant une posture plus méfiante, une main dans la poche et l’autre en train de se frotter l’arrière du crâne, il reprit.

« - Dooooooonc, laissez-moi résumer la chose. Vous comptez donc faire un coup d’état, car oui, qu’importe les appellations, s’en est un, afin d’unifier le clan avec les rejets de notre société, les parias qui sont considérés comme des bannis, ce qui fait que votre échec pourrait vous coûter non seulement la mort, mais aussi des années et des années de souffrance sous la forme d’un esprit, à errer dans le monde et subir mille tortures par les Mamoru… »

Durant son discours, il s’était rapproché, de sort à ce que son regard ne soit qu’à une cinquantaine de centimètres du siens. Ses yeux étaient toujours dans la même émotion qu’auparavant, entre la neutralité et le dégout, alors qu’il restait dans cette position. Il fermi alors rapidement les yeux avant de faire à nouveau un grand sourire, et de s’écarter après le premier mot.

« - D’accord ! Je dois avouer que je suis très curieux de ces fameux manipulateurs de démons. Après tout, nous sommes une grande famille, il est évident que l’on devrait se réunir. J’accepte de voir ce que ça pourrait donner. Cependant… »

Et c’est là que le Genjutsu qu’il avait lancé fit son œuvre. À peine avait-il prononcé son dernier mot que les fantômes avaient agrippé ses jambes et ses bras, donnant l’impression qu’ils les avaient brisés, et qu’elle ne pouvait plus s’en servir. La laissant s’effondrer sur elle-même, il s’approcha alors et prit son visage entre ses mains, et approcha sa bouche de son oreille pour lui susurrer la suite de son discours.

« - Je ne saurais tolérer la moindre menace envers notre très cher Kamui-sama, O-nee-san. Il est notre bien aimé maître protecteur qui gouverne son peuple avec sagesse et fermeté. Et quiconque s’oppose à lui devrait-être exécuté sur le champ… »

Pour accompagner ses propos, ses fantômes commençaient à s’agripper à elle, passant leurs mains au niveau de son cou, sans rien faire, juste lui donner la sensation d’un bras crochu autour de ce dernier. Ses mains caressaient ses joues, laissant ses ongles laisser une légère trace sur ces dernières, sans pousser jusqu’au sang. Il releva la tête, les yeux fermés, avec un sourire empli de sympathie à l’égard de la Mamoru, se tenant droit devant elle.

« - J’espère très franchement ne pas devoir recourir à cette éventualité, donc je compte sur vous pour ne plus y penser, d’accord ? »

Comme pour signaler qu’il pensait qu’il n’y avait plus besoin d’en parler, il la libéra des illusions qui la tenaient immobile, faisant disparaître les fantômes. Il savait pertinemment qu’il serait sans doute mis à mal par elle, mais il se laisserait faire, il a commencé les hostilités après tout. Il avait jute besoin de laisser ses pulsions s’exprimer afin de lui faire comprendre qu’il ne fallait pas fermenter la moindre menace envers Kakeshuou, ou du moins, pas en sa présence. Comme si de rien n’était, il fit de nouveau des tours sur lui-même, une jambe levée, les mains en l’air comme un enfant prêt à partir à l’aventure.

« - Maintenant que les choses sont aux claires, dites-m ’en plus sur ce que vous comptez faire pour le clan, Kaya-Onee-San ! »

Bizarre, le jeune homme l'est incontestablement. C'est ce qui empêche d'ailleurs Kaya de se décider sur son sort. Son... originalité l'enveloppe d'un mystère qu'elle n'arrive pas réellement à percer. Tantôt absolu, tantôt ouvert d'esprit, menaçant et conciliant à la fois, son cadet réagi tout autrement que ce qu'elle avait escompté. Espéré? Elle décide de le laisser terminer et même de faire abstraction des esprits qu'il utilise pour appuyer ses propos. Finalement c'est du bout des doigts qu'elle effleure l'endroit ou la griffe l'a touchée, par réflexe plus que par réel désir de s'assurer qu'elle n'y trouverait pas de sang. Puis c'est à son tour de faire un pas en direction de l'adolescent et de rétablir cette promiscuité dérangeante.

"Je sais pertinemment à quelles représailles je m'expose si je venais à échouer. Et j'ai choisi de prendre le risque. Cela fait bien longtemps maintenant que j'ai pris ma décision. Rien ne me fera changer d'avis." indique-t'elle avec fermeté. "Et il devrait en être de même pour tous les Mamoru qui ont un tant soit peu de respect pour leur nom."

Ou qui accordent le respect dû au pays qui les a vus grandir. Du moins la plupart d'entre eux. Ce n'est pas l'hésitation dont Higeki fait preuve pour rejoindre sa cause - la cause - qui l'irrite. Mais bien l'adoration teintée de naïveté qu'il accorde à l'Empire, à son Kamui ou aux idéaux qui les ont tout deux forgés. Comment peut-il? Non, comment ose-t'il? Elle retient un soupire de mépris et s'écarte de l'adolescent pour reprendre place sur le bord de la fontaine. Comment convaincre quelqu'un qu'on n'arrive pas vraiment à comprendre? Il va falloir se montrer un brin... innovant.

"Je ne te dirai rien de plus pour l'instant Higeki. Tout simplement parce que je ne sais pas si c'est le désir d'être convaincu qui t'anime ou l'espoir de retourner mes plans contre moi. Et vu ta réaction tu comprendras aisément ma prudence, j'en suis certaine. Pour l'instant c'est ta parole contre la mienne. Et j'aime autant que ça reste ainsi tant que tu représentes une menace. Ou que tu m'en adresses..." il a été très clair quelques secondes plus tôt. Ce n'est que justice qu'elle fasse de même. "Limitons-nous à un simple échange d'idées, donc. Permets moi alors de répondre à ta question par une autre question!"

La dialectique. C'est grâce à cette méthode et à son mentor qu'elle en est venue à se questionner sur les dirigeants du clan et leur capacité à faire face au présent. Peut-être en sera-t'il ainsi pour Higeki. Dur à dire tant il est étrange. Mais qui ne risque rien n'a rien pas vrai?

"J'aimerais comprendre... Pourquoi accordes-tu une telle fidélité à l'Empereur? Qu'a-t'il fait pour toi! Ou même pour notre clan ou Taki no Kuni? Il nous apporte la stabilité, soit! Mais est-ce suffisant pour lui offrir les rennes de nos destinées en retour? Tu le suivrais réellement les yeux fermés?" s'indigne-t'elle. "Tu préférerais aux tiens un homme qui se mur dans ses illusions et nous mènera tôt ou tard à la perte? Pourquoi?"

Elle jette un regard aux esprits du jeune homme, leur faisant comprendre d'un regard qu'ils n'ont pas intérêt à recommencer leur petit manège de tout à l'heure. Si Higeki est curieux de voir de ses propres yeux l'utilisation de démons alors il aura tout le loisir de le regretter si d'aventure il la prenait encore pour une... chose dont il peut disposer à ses souhaits. Et dire qu'elle avait tant d'espoirs en invitant le jeune homme à Itabei. Brisera-t'il ceux qui lui restent encore? Elle continue de l'observer avec un mélange de curiosité et de méfiance. Qui sait quelle forme pourrait prendre la réponse de ce... fanatique impérial?

La tension avait sérieusement grimpé depuis qu’Higeki avait montré cette partie de lui qui faisait si facilement fuir les personnes les moins tolérantes du monde. Enfin, bien évidemment, quelqu’un de normal n’aurait pas non plus apprécié se faire menacer de mort alors qu’il se retrouvait incapable d’utiliser le moindre de ces membres, mais tout de même. Le jeune Mamoru avait ses propres idées fixes, et il n’était pas du genre à aimer quand quelqu’un essayait d’aller contre son sens. Il pouvait comprendre que ses réflexions n’étaient pas forcément des plus adaptées et compréhensibles pour la plupart du commun des mortels, mais lorsque ces dernières allaient directement entraver les plans qu’il mettait en place, ce n’était pas forcément un bon signe pour le futur état du rebelle.

Toujours était-il que bien qu’il montrât un visage d’enfant face à son ainée, le mal avait été fait, et n’importe quel masque d’innocence ne pourrait camoufler l’esprit calculateur qu’était le sien. Maintenant, Kaya voyait en lui non plus un potentiel allié qui aurait pu l’idée, mais plutôt un obstacle supplémentaire qui s’est mis en travers de sa route. Mais bon, elle ne semblait pour autant pas le prendre pour une cause perdue. Certes, elle lui avait fait clairement comprendre qu’elle ne lui ferait pas confiance dans l’immédiat, mais elle cherchait néanmoins à comprendre les raisons de son acte. Les raisons pour lesquelles il adore l’empereur ? Ce n’était pas vraiment lui qu’il voulait idolâtrer, mais le rôle plutôt en lui-même. Une main dans le dos, l’autre avec un doigt sur son menton, il regarda le ciel pour essayer de trouver les bons mots.

« - Hmmmm… Ce n’est pas tant Kamui-sama que je souhaite prospérité, que ce soit lui ou un autre, j’en ai que très peu à faire. »

Il venait de dire tout simplement qu’il n’en avait rien à faire de l’empereur. Déjà que cela venait tout simplement de contredire son discours précédent, qui se remplissait de plus en plus de contradiction, il venait tout simplement de profaner Samui Kakeshuou, chose qui n’est pas aisément pardonnable devant le public. Mais bon, Higeki n’avait que faire des règles d’éthique après tout, et il savait que Kaya ne tenterait pas de le mettre dans une situation délicate, car sinon, elle se mettrait dans une situation délicate également. Tournant le dos à Kaya, les mains croisées derrière sa tête, il reprit avec un ton beaucoup moins enjoué, plus neutre… Plus réfléchi ?

« - Les hommes ne feront que se battre tant qu’ils auront de l’avarice en eux, ou, tant qu’il y aura quelque chose à convoiter. Je ne peux que croire qu’un conflit qui pourrait éclater tant que plusieurs pays indépendants, ou même, des villages Shinobis, puissent exister. »

Faisant demi-tour, il montra enfin son visage à nouveau en direction de Kaya, et comme d’habitude, un sourire était affiché dessus, mais beaucoup moins malsains il fallait dire, plus… Moqueur ? On pourrait croire que la situation l’amusait, ce qui était le cas en réalité. Beaucoup avaient du mal à envisager son plan, de ce fait, il ne voyait pas réellement l’utilité de l’exposer. Mais bon… Kaya envisageait en réalité une chose similaire à lui, donc pourquoi pas.

« - Dans ce cas, que se passerait-il si toutes les nations du monde étaient unis sous un même drapeau ? Si tous n’étaient dirigés que par une seule et unique entité ? Plus personne n’aurait quelque chose à convoiter, mis à part la position d’Empereur, mais c’est le rôle des soldats de le protéger après tout. De ce fait, les chances qu’une paix puisse exister augmenter considérablement… »

À la fin de sa tirade, il replongea ses mains dans ses poches et se dirigea vers la brune pour s’arrêter à une distance raisonnable face à elle. Il allait terminer avec son exposé avec cette phrase, qui était son objectif depuis le début.

« - En somme, je veux que l’empereur face la même chose que vous. Vous voulez unir le clan Mamoru, avec les exclus manipulant les démons, dans le but de lui donner une vie tranquille, et le rendre plus fort. Donc si vous me reprochez le fait qu’agir comme je l’ai fait est peu respectable et contre la prospérité du clan… Vous n’êtes pas mieux que moi, pour vous en prendre directement à ce dernier. »

Tenant son regard avec ces mêmes yeux mesquins qui le caractérisaient, espérant avoir eu l’effet qu’il voulut. Il y avait peu de chances, car vraiment, il n’y avait rien à reprocher. Il aimait juste faire en sorte de jouer avec les émotions des gens, c’était comme ça qu’il avait trouvé sa passion pour les histoires d’horreur après tout. Cependant, le jeu était terminé, maintenant, il reprenait son visage enfantin avec son sourire à pleine dent, et son aura d’enfant, alors qu’il tournait autour de lui-même en riant innocemment.

« - Voilà pourquoi je ne ferais rien, Kaya-onee-san. Je veux bien voir ce que vous avez en tête pour agir comme moi je le ferais. »

Le changement dans l'attitude et les propos d'Higeki est notable. L'espace d'un instant Kaya a l'impression qu'elle ne discute plus avec un adolescent mais bien un adulte qui est parfaitement conscient du monde qui l'entoure. Son argumentaire n'est pas seulement solide: il est également ambitieux et visionnaire. À tel point que le noiraude reste silencieuse de longues secondes, un brin irritée par le fait d'avoir été surprise ainsi par son interlocuteur. Higeki est bien plus que ce qu'il laisse penser aux autres. Et c'est un avantage d'une valeur inestimable. Bien peu de gens sont capables de donner le change avec une telle... aisance?

Et le fond est tout aussi intéressant que la forme. Les ambitions de Kaya se sont souvent limitées aux Mamoru et à Taki. Ces étapes lui semblaient déjà suffisamment éloignées pour ne pas avoir à se préoccuper davantage du futur. Higeki ne s'embarrasse visiblement pas de telles limites. Si certains pourraient qualifier les objectifs de la noiraudes de risqués, ils jugeraient alors utopique celui de l'adolescent. Mais ce dernier s'est contenté de lui exposer sa vision du monde. Difficile d'imaginer la place qu'il se donne dans tout ceci. Ni même s'il est prêt à se battre pour ses convictions...

Quoi qu'il en soit il vient de lui donner la clef de ses pensées. Maintenant que Kaya sait comment son cadet raisonne il sera plus aisé de le comprendre. Ou de le manipuler. Mais elle se montre optimiste. Leurs routes ne se croiseront peut-être jamais totalement mais il semble évident qu'elles progressent en parallèle. Il y a des raisons de croire que cette discussion se révélera plus productive qu'elle ne l'a été quand les faux-semblants étaient de rigueur.

"Tu es plus malin que je ne le pensais..." avoue-t'elle finalement avec un sourire. "Il semblerait que je t'aie plutôt mal jugé tout comptes faits!"

Les esprits de la noiraude recule lorsqu'elle lève une main apaisante. Ils ont sûrement interprété le silence de leur maîtresse comme une menace à l'encontre de l'adolescent. Maintenant que c'est corrigé les deux Mamoru vont pouvoir se concentrer sur les véritables intérêts qui sont en jeu aujourd'hui. D'ennemi probable, Higeki vient de passer au statut d'allié potentiel.

"Je respecte ta vision du Yuukan. Et je la partage..." concède-t'elle. "Je comprends mieux le... respect que tu portes à l'Empire et à sa plus haute fonction. Cependant l'homme qui l'occupe actuellement n'apportera jamais la stabilité au Yuukan. Il dit rassembler. Mais il tire son pouvoir de la division. Il est bien loin d'être digne de ton idéal, crois-moi..."

Mais qui peut se montrer digne d'un tel pouvoir? Plus on monte vers le sommet et plus on s'éloigne de la réalité qui définit le monde. Un dirigeant avisé peut faire des miracles. Mais un dictateur peut se montrer destructeur. Que faire lorsque le pouvoir absolu est confié à une personne qui confond altruisme et intérêt personnels?

"Mais je suis loin de me préoccuper du sort de l'Empire... Les seules choses qui m'importent sont le clan et les Cascades. Je vais réunir le premier. Et m'assurer que les Mamoru deviennent indissociable de Taki. Pour y parvenir j'ai besoin de visionnaires. De gens comme... toi! Mes ambitions sont peut-être loin d'égaler celles que tu as pour le monde. Mais il semble évident qu'elles se complètent." glisse-t'elle, regard entendu à l'appui. "Et comme tu as conscience que le Conseil prône la division au sein même des nôtres je suppose que nous sommes ce que nous pourrions appeler des... alliés naturels?"

L'emploi du subjonctif n'est pas un hasard. Car si une vision commune est suffisante pour rapprocher deux êtres, la confiance est nécessaire pour cimenter un accord. Et la confiance s'installe avec le temps. La méfiance et la prudence restent les deux principaux obstacles qui se dressent entre eux. Fort heureusement la noiraude croit avoir une solution.

"J'aimerais beaucoup t'avoir à mes côtés. Malheureusement je ne te fais pas confiance. Et la réciproque est sûrement vraie. Je me trompe?" questionne-t'elle avec curiosité. "Ce n'est pas une fatalité. C'est même normal. Mais je suis persuadée que nous arriverons à surmonter ce... détail. Seulement pour ça il va falloir qu'on apprenne à se connaître. Alors je te le demande: veux-tu devenir mon élève?"

Higeki avait apparemment fait mouche en exposant lui-même sa façon de voir les choses. Oui, tout ceci pour lui n'était pas un vrai objectif, et encore moins un rêve. Il s'agissait purement et simplement de la façon dont il observait les choses dans ce monde actuellement. Il comprenait aisément le fait que la guerre était constante, et que si jamais les hommes voulaient un jour envisager la tranquillité, il faudrait concevoir l'idée d'un étendard unique, une seule et unique nation dominante partout. Plus d'opposants, plus de conflits, c'était une vérité simple comme bonjour, que peu de personnes avaient du mal à comprendre. Cependant, doutant également des capacités d'acceptation de l'autre de l'espèce humaine, il n'avait guère d'autres choix que de prendre la voix de l'oblitération. S'ils refusent de se joindre à nous, ils devraient être éliminés. Voilà pourquoi Higeki aimait bien la façon de procéder de l'empereur : il ne s'embarrassait pas de choix moraux, il agissait, et c'était tout.

« - Hi hi, vous ne comprenez pas ? Un Empereur avide de pouvoir sera plus que motivé à avoir tous sous sa coupe, et agira ainsi plus rapidement pour atteindre son objectif. Je n'ai jamais dit que je voulais un dirigeant qui soit au service de son peuple. Il faut une main de fer pour maintenir les rebelles en laisse... »

Il ne savait pas à quel point ses mots sonnaient d'ironie. En effet, une révolution était bien en train de se former, pour essayer de renverser l'empereur, mais il n'était que peu au courant sur le sujet (sinon, il aurait que trop rapidement mis tout en œuvre pour les éradiquer). Mais il n'en restait pas moins sûr de ses convictions : un chef laissant trop de liberté ne ferait que laisser à d'autres l'opportunité de prendre sa place, donnerait plus facilement l'envie à quelqu'un de se lever pour prétendre qu'il serait meilleur à sa position. Mais, un dictateur, lui, même s'il attisait encore plus de convoitise pour le voir partir, il n'hésiterait pas à se débarrasser du problème, non pas en l'enfermant, mais bel et bien en l'exécutant sur place public, lui et sa famille, pour en faire un exemple. Soit bon, et personne ne te fera de mal. Soit mauvais et assumes les conséquences. Tel était un des nombreux crédos qu'Higeki put voir dans les livres.

Mais, il était inutile de se lancer encore une fois dans cette discussion. Les deux ne seraient jamais d'accord, car s'il fallait relever un autre point commun qui rappelait leur lien de parenté, en plus de leur maîtrise de pouvoirs chamaniques, c'était leur entêtement pour leurs convictions, et leur refus d'accepter une autre vision que la leur. Elle mettait en avant seulement le pays de Taki, et cela se voyait qu'elle allait aller en opposition à sa vision des choses sur un point. Elle voulait la sécurité du clan, mais il ne la voulait qu'au sein du pays, pas du Yuukan en entier, ce qui était problématique. On a besoin de créer une forteresse que s'il y a des ennemis autour, certes, mais l'existence d'une telle bâtisse revenait à faire naître au sein de ce qui se trouvait en dehors une question : que se cache-t-il à l'intérieur ? Tout ou tard, quelqu'un verra en Taki un objet de convoitise, et encore plus de conflits éclaterons. Higeki aurait pu l'éclaircir de son savoir, mais il n'en fit rien, car elle ne restait pas moins quelqu'un qui avait apporté une idée intéressante : unifier le clan Mamoru. Elle en est même venue à recueillir son aide, et en faire son disciple. Une demande qui sonnerait toute droite sortie d'une œuvre intemporelle se baladant au coffin même d'un autre univers... Mais Higeki n'était pas du genre à suivre des histoires, ou du moins, des autres qu'il n'a pas écrit lui-même.

« - Comme vous l'avez dit, nous sommes pour le moment tous les deux ennemis. Cette demande est un peu trop osée pour l'heure. Mais ne soyez pas triste, Kaya-Onee-san, je ne vous boude pas ! Je dis juste que pour l'heure, faisons juste en sorte de collaborer pour l'avenir du clan. Et si vous arrivez à me plaire avec ce que vous envisagez, j'accepterais de devenir votre homme... De main, Hi hi. »

Des phrases curieuses que voilà, mais au moins, ses intentions étaient claires. Pour l'heure, il ne voulait pas promettre son allégeance à quelqu'un qui n'était fait que de parole. Il lui faudrait pour l'heure observer, à ses côtés ou dans son ombre, les résultats qu'elle pourrait mettre en avant. Après tout, Higeki ne pouvait mettre de côté sa curiosité montante, il devait répondre à cette soif insatiable de connaissance en accompagnant la source de curiosité qu'était Kaya. Elle parlait de grandes choses, bonnes ou mauvaises, en partant de la réunification avec les bannis du clan tout en exposant, sans le prononcer, son aversion pour l'empire. Il le voyait qu'elle serait sans doute plus tard un problème pour lui, mais vous connaissez le dicton : garde tes amis près de toi, et tes ennemis encore plus près. En restant auprès d'elle, au moins, il serait aux premières loges lors de son faux pas, qui lui sera fatale si Higeki le considère comme tel. Mais pour l'heure, il ne pouvait s'empêcher de cacher son excitation montante, à l'idée des évènements à venir. Son sourire discret, son teint blanchâtre virant au rose, et ses yeux brillants de malice, il attendrait ce jour avec impatience. Cependant, toute bonne chose à une fin, et il considérait que la rencontre d'aujourd'hui arrivait à la sienne.

« - Sur ce, je pense que nous en avons assez pour aujourd'hui. Il ne faudrait pas rajouter plus d'émotions fortes, ou mon petit cœur ne pourrait trop en supporter ! Dans ce cas, je vous laisse m'appeler quand vous jugez nécessaire. N'hésitez surtout pas, car si nous devions devenir amis, il nous faudra faire plus amples connaissance ! A une prochaine fois donc, Kaya-Onee-san ! »

Ses paroles prononcées, il termina par une révérence plus qu’exagérée, avant de se redresser et de partir en courant, comme un enfant, en direction de la ville. Il était content d'avoir trouvé quelqu'un qui saurait éveiller son intérêt, quelqu'un qu'il pourrait à la fois apprendre et enseigner, quelqu'un qui pourrait devenir sa plus fidèle amie, ou un nouveau jouer à torturer. Oh oui, la rencontre d'aujourd'hui était une magnifique journée.

HRP:

Elle tente de masquer sa déception derrière un habituel masque de neutralité. Kaya finit par acquiescer et accepter la réponde d'Higeki pour ce qu'elle est: un refus. Poli, certes. Mais un refus tout de même. Ce n'est jamais agréable de voir une personne décliner ce qu'elle considère comme un honneur. Mais... soit. Elle ne peut pas le forcer à vrai dire. Et il se peut que l'idée fasse son chemin dans l'esprit du jeune Mamoru et qu'il revienne sur sa décision. Il saura la retrouver si tel est le cas. Et pour l'instant la porte lui encore ouverte. La jeune femme finit donc par acquiescer, résignée.

Mais ce qui l'ennuie davantage encore que le refus de l'adolescent, c'est la façon dont il la perçoit. Une ennemie? Peut-être qu'elle devrait agir en tant que telle avant qu'il quitte la ville et puisse retourner les informations obtenues contre elle. Ce serait logique. Et prudent. Elle comprend sans doute mieux son frère de clan que depuis le début de cette rencontre. Mais pas encore assez pour être certaine qu'il ne représentera pas une menace dans les jours à suivre. Entre ce que les gens disent, prévoient de faire et font, il y a souvent un monde de différence. Le choix qu'il lui a laissé? Croire en lui ou s'assurer qu'il ne puisse lui mettre des bâtons dans les roues.

"Tu as une part de mon destin - et de celui du clan - entre tes mains et je sais que tu en es conscient!" relève-t'elle sur le ton de la discussion. "Ça ne me plaît pas, tu t'en doutes. Mais avant d'obtenir ta confiance je crois nécessaire de t'offrir la mienne. C'est un risque que je prends. Et une forme d'honneur que je te fais. Souviens-t'en lorsque tu seras amené à prendre une décision!"

Qu'il prenne la bonne. Les spectres de la noiraude s'agitent à nouveau, conscients de l'indécision qui la domine. Elle les calme en insufflant du chakra dans ses sceaux de commandement pour s'assurer qu'ils restent calmes. Pour l'heure une bataille entre Mamoru en plein centre d'Itabei apporterait plus de problèmes qu'elle n'en résoudrait. Les questions soulevées seraient bien plus gênantes que la solution apportée. Et puis Kaya n'est pas vraiment encline à priver le clan d'un élément qui pourrait se révéler précieux à l'avenir. Aussi décide-t'elle donc de poursuivre sur la voie de la conciliation. Un pari dangereux doublé d'un risque calculé.

L'essentiel est néanmoins dit. Et il n'est guère utile, en effet, de prolonger plus que de raison une discussion que des oreilles un peu trop indiscrètes pourraient surprendre. Lorsqu'elle aura besoin d'Higeki il lui suffira alors de reprendre contact avec lui. Et voir s'il répond présent. C'est peut-être ainsi qu'elle pourra juger de son réel intérêt pour l'avenir des Mamoru tel qu'elle le conçoit. Et savoir ainsi si les paroles échangées aujourd'hui n'étaient que de la poudre aux yeux ou placées sous le sceau de la sincérité.

"Je te ne retiens pas davantage!" indique-t'elle donc. "Je rentrerai à nouveau en contact avec toi lorsque le temps sera venu de donner à notre clan une nouvelle orientation. Que les esprits guident tes pas!"

Une phrase qui est souvent échangée entre manieurs de spectres. Une manière de lui rappeler que quels que soient leurs différents, ils restent avant tout des Mamoru. Et que ce lien devrait sûrement primer sur tout le reste. C'est ainsi qu'elle voit les choses. Qu'en est-il de lui? Dur de deviner les pensées qui se cachent derrière le regard de l'adolescent. L'un des serviteurs de la noiraude lui demande s'il convient de suivre Higeki. Elle hésite puis hoche la tête de droite à gauche.

*Non, laissons-le! S'il se rend compte qu'il est suivi les choses je me couperai sans doute de son soutien. Laissons-le agir à sa guise jusqu'à ce que nous ayons besoin de lui. Et voyons s'il répond présent ou s'il se pose en ennemi!*

Kaya est parfaitement consciente que des Mamoru devront tomber pour permettre au clan d'avancer. Elle compose avec cette évidence mais ne s'en réjouit pas vraiment. Elle fera simplement ce qui doit être fait dans l'intérêt du plus grand nombre. Mais elle ne fera pas couler le sang de son clan inutilement. L'adolescent lui a donné une impression qui joue en sa faveur. Pour le moment tout du moins. Et à ce titre il convient de le laisser vivre. Pour le meilleur ou pour le pire. Il faut savoir prendre des risques malheureusement.

Elle jette un dernier regard au Mamoru qui disparaît peu à peu dans la foule puis tourne à son tour les talons pour quitter la cité. Il est temps de rentrer au Temple d'Ao...

clik: