Son départ avait été si spontané que Mikami arriva bien assez tôt à la dite Kurebasu pour couler quelques jours en exploration dans la mégalopole. Son immersion fut facile, il n'avait pas toujours été ce jeune homme remuant et enclin à la moindre ânerie. La vie de shinobi ne lui avait que rarement laissé assez d'espace pour exprimer ce tempérament disons plus... jovial. Mais passons les descriptions barbantes de l'amnésique qui s'était épanoui sous l'alliance. Le climat se refroidissait, son faciès avec.
Tenue sombre, regard peu accueillant, il aurait pu être n'importe qui. Même son katana était dissimulé, et beaucoup comme lui se baladaient en chaperon. Mais il était sûrement le seul à arborer dans son dos les insignes de l'Empire de Samui Kakeshuou.
Les bâtiments s'élevaient et les ruelles semblaient se creuser au fur et à mesure qu'il avançait. Certains regards se tournaient vers lui. La plupart en biais, surtout parce que leur porteur avait du mal à se tenir droit, même assis. Les enseignes brillaient au sommet des immeubles et à leur pied s'entassaient les corps, à en confondre les vivants et les morts. Sans doute la plupart étaient un peu des deux. Pourquoi rester en léthargie au crochet de ce condensé de misère... La terre était vaste, des champs baignés de lumière se trouvaient à une poignée de kilomètre. Le Yorurai éprouvait plus d'incompréhension que d'empathie envers ces gens qui s'éperdaient à regarder cette ville les aspirer dans une marche à cadence zombifiée dont ils étaient pourtant les seuls maîtres. En soit, cette misère bien qu'amplifiée ici bas ne lui était pas inconnue.
Le cœur de la ville finit par s'offrir à lui, moment qu'il choisit pour retirer sa capuche et dévoiler son bandeau shûkaijin. Sur la plaquette se reflétaient les invitations lumineuses à rejoindre bordels, casinos, bars... Combien d'amis le shûkai avait ici ? Il partait carrément du principe que tous ceux qui ne lui sautaient pas à la gorge pouvaient être considérés comme tels, tant les bagarres éclataient à toutes minutes et tous coins de rue. Cette ambiance avait son charme après tout... c'était tout aussi remuant, actif, rien ne dormait ici et s'en était presque... apaisant. Une fenêtre explosa à sa droite, brisée par une bouteille de rhum qui lui aurait frappé le crâne s'il n'avait pas levé l'avant-bras pour la rattraper. Il en but au goulot, puis finit par la renvoyer dans le cadre d'où elle était venue.
Les plaisirs anodins et furtifs se multipliaient, le temps n'avait d'importance tant tout semblait déjà perdu. On se livrait à la première invitation venue, et ce n'était pas pour lui déplaire. Sûrement vagabonderait-il comme ça encore de longues minutes, voire quelques heures. Allègrement, à écouter chanter la cohue des ruelles perpendiculaire, parallèles même, puis adjacentes. Du cri de panique à la chute du prochain alcoolique. Non toute cette population ne pouvait être comme ça... Non loin devaient se tenir tapis les sous-marins, les observateurs, ces regards haut-perchés que ses propres yeux ne calculaient.
Combien ici étaient aux antipodes de l'image qu'ils avaient de l'empire ? N'allez pas me faire croire qu'un de ses membres peut se balader aussi impunément dans la grande et sordide Kurebasu ! Ce serait cracher au visage de cette vie de déboire que vous livrez ici, là où nos forces voudraient y instaurer l'ordre et sa justice. Parce que laisser un tel bandeau frontal, aussi nickel que celui-ci, slalomer dans votre ville c'est accepter qu'une telle nation puisse prospérer ou qu'elle aille. Quant à Mikami, à l'affût d'une prochaine bouteille de rhum qui lui passerait sous le nez, c'était exactement ce qu'il faisait. Une certaine sérénité commençait même à se faire ressentir.
EDIT : Une technique cachée, oublié de préciser désolé ^^'
Perdu dans mes pensées j’errais à travers les ruelles de la Mégalopole. J’éprouvais le besoin de faire le vide. J’étais encore sens dessus dessous par rapport à une série de questionnements intérieurs qui actuellement me taraudait l’esprit. J’avais beau boire, me saouler, me promener seul, me faire plaisir auprès des plus belles filles de joie que compte cette ville, je ne parvenais pas à retrouver mon équilibre intérieur. La dernière once de bonté en moi resurgissait à nouveau, hantant mes principes d’aujourd’hui, principes que je croyais désormais résolument ancrés en moi. Mais il faut croire que non. Mon côté loyal et fidèle se heurtait depuis quelques jours déjà à cette partie je m’en foutiste, anti valeurs en moi. Le combat du bien contre le mal, à cette précision près que le mal en moi était, il faut bien le reconnaître, encore en position dominante. Gros trouble pour quelqu’un qui se croyait totalement insensibles aux choses de la vie…
Je venais de quitter la cache où nous avions élu repaire, Kurasa, ses gars et moi. A nouveau j’étais de sortie. Cette fois-ci dans le but de faire le vide. Errer, marcher sans but, et réfléchir tout simplement. Faire la part des choses entre ce que je veux désormais et comment je dois considérer les choses me parait important. Faire le deuil de mon passé. Encore perdu dans mes pensées, je déboulais sur une ruelle qui grouillait de monde. La voie était assez fréquentée, dans un sens comme dans l’autre et les frottements et contacts entre gens assez réguliers. On aurait presque dit une rue d’une des grandes villes chinoise, le vieux cliché ! Et pourtant ! Nous étions bien à Kurebasu, la Mégalopole. Le lieu de rencontre d’individus de tout bord et de tout acabit. Le lieu des rencontres improbables. Ici, il y avait du tout. Un beau regroupement de personnes de toutes conditions et de tous bords, venus de tous les horizons imaginables. Kurebasu n’aurait rien à envier à la Cour des miracles. Mais cette belle mixité commençait à devenir normale pour moi. Je commençais à m’y faire.
Je venais de heurter l’épaule de quelqu’un. Par simple réflexe, je me retournais. La première chose qui me frappa la vue, fut cet insigne dans son dos ou sur sa cape. L’écusson impérial. Le régime politico-militaire s’étant substitué à l’Alliance des pays neutres. Mon regard, lentement remonta le haut du corps jusqu’à tomber sur ce visage. Inconnu au bataillon.
_ Un impérial ici ? Qui plus est seul ? Mêmes les shinobis des villages restent plus ou moins discrets en venant ici mais enfin…
Je haussais des épaules et je m’apprêtais à m’en aller. Après tout Kurebasu est la ville carrefour. Si l’Empire s’intéresse désormais à Kawa no Kuni, qui pouvait y faire quelque chose ? L’on raconte que Samui Kakeshuou, l’Empereur, est un homme surpuissant au pouvoir presque sans limites. Peut-être aurait-il réussi à mettre dans sa poche la Grande Grue ? Cette vieille folle qui serait capable de livrer la ville pour quelques avantages économiques…
Alors que je m’apprêtais à partir, je fus sorti de mes interrogations par un souvenir fugace. L’Empire… Kurasa semblait récemment attiré par cet agrégat d’Etats soumis à la domination de celui qui se faisait appeler le Kamui. Une lueur passa dans mon regard.
La foule continuait son petit bonhomme de chemin, même si instinctivement, plus personne ne passait entre les deux hommes. Une bataille est vite déclenchée et dès lors que deux personnes se font face à Kurebasu, il est prudent de ne pas s’intercaler entre elles. Peut-être que l’impérial continuerait son petit bonhomme de chemin. Peut-être qu’il rétorquera quelque chose, quoi qu’il en soit, j’aviserai. S’il était porteur d’un marché, sa voix pourrait être bonne à entendre. Après tout, j’avais des affaires à faire fonctionner.
YO !! Désolé pour le retard, il s'en est passé des choses entre-temps ^^' Mais on peut y aller maintenant !
Pas à pas, Mikami s'engouffrait dans le cœur de la ville et petit à petit, le shûkaijin s'effaçait dans les artère de Kurebasu. Ce fut surprenant de voir que l'écusson impérial avait encore sa place dans un lieu dont la réputation se voulait aux antipodes. Peut-être que les deux contrées ne l'étaient pas tant, finalement. Mais ç'avait surtout été frustrant pour un sabreur qui se tenait prêt à en découdre avec le premier venu. Ce premier venu qui l'aurait agressé, à lui, shinobi derrière le blason tant critiqué plutôt que jeune âme innocente "au service" du drapeau porté par le kamui, dernier rempart devant les contrées sous le feu des...
L'amnésique se heurta, épaule contre épaule, avec un passant. Et pas n'importe lequel, tant le choc et sa réaction furent plus forts et virulents.
- Un impérial ici ? Qui plus est seul ? Mêmes les shinobis des villages restent plus ou moins discrets en venant ici mais enfin…
Jusqu'ici, le Yorurai en était venu à se dire qu'il s'était fait des idées, fondées seulement à partir de ce qu'il avait entendu de cette mégalopole. Qu'il avait été dans l'erreur en considérant cette cité comme la fière libertine qui cracherait au visage de l'impérialisme, lui tendrait le tranchant d'une lame au moment même où il poserait un pied chez elle comme s'il avait été chez lui, tous signes d'appartenance ostentatoirement arborés. Attirant grâce à ces derniers ceux qui s'en prendraient à des symboles et des "patries", marchant sur toute réalité. Finalement, peut-être avait-il été le seul, ici, à se baser sur les représentations flottant à la surface des faits. Néanmoins, à en juger par l'intervention de la personne qu'il venait de percuter, cette logique semblait planer comme une ombre invisible au-dessus de chaque esprit qui un jour vagabondait.
- Je me demande justement pourquoi les shinobi n'auraient pas leur place ici. Qu'en est-il d'un shûkaijin esseulé alors ?
Ayant entendu la remarque de cet homme précédemment croisé, Mikami s'était retourné, d'un quart de tour seulement, n'offrant de face que son visage à celui qui l'avait interpellé. Tout dans sa position montrait qu'il était prêt à repartir et pourtant, il s'était fermement arrêté. Un flegme dans le regard qui n'avait rien pour rendre la situation plus chaleureuse, les pas des manants s'accéléraient alors en les croisant, s'écartant un peu plus, dégageant un espace plus large autour des deux shinobis qui ne s'affrontaient que du regard et bénéficiaient alors d'un angle de vue plus ouvert pour s'observer et se sonder, discuter et disputer.
Je regardais d’un œil circonspect l’impérial. Il avait fière allure quoi qu’on dise. Quelque chose de détaché, quelque chose de presque hautain tant il semblait neutre, loin de tout ce brouhaha autour de nous. Il semblait à la fois présent et absent, plongé dans son esprit et probablement perdu dans les méandres de ses réflexions. Habituellement, les villageois –quel autre terme pouvais-je utiliser pour parler globalement de tous les habitants des villages ninjas ? – qui venaient ici se faisaient plus discrets. Pourquoi ? Pour la simple et bonne raison que généralement trois choses pouvaient mener leurs pas jusqu’à la turbulente mégalopole : des affaires douteuses, l’espionnage de cette cité ou alors l’errance. Je regardais le bonhomme en face de moi. Il n’avait pas l’air d’être en vacances ici. Je miserai plutôt sur l’espionnage ou l’errance malgré les apparences ; malgré les airs détachés et sa mise rappelant ostensiblement qui le paye. Je notais que l’individu insistait curieusement sur le Shukai. Il venait de prononcer ce nom et son habillement en disait déjà assez sur ses supposées origines. Comment dire… Tout pour faire le contraire de ce qu’aurait fait un ninja du Shukai en mission ici.
_ Réveilles toi jeune homme ! Tu es dans la Mégalopole, le lieu parfait pour tous types de rencontres et d’affaires… Tout le monde a sa place ici…
Je le regardais en me tournant totalement vers lui. J’analysais sans en donner l’impression, la gestuelle et le langage corporel de mon vis-à-vis. Le fait que je me tourne vers lui, visait à l’encourager à en faire de même. Désormais, je validais par ce mouvement que j’étais intéressé à échanger un minimum avec cette curiosité venu d’ailleurs. A moins d’être réellement un errant sans but, il était probable qu’il y ait quelque chose à tirer de la discussion qui pourrait suivre. Ne sommes-nous pas dans la Mégalopole, ville de surprise…
_ Il est plutôt rare de croiser des ninjas des grandes nations avec leur uniforme et tout le tintouin. Vois-tu habituellement les gens se veulent plus discret…
Comme pour dire, ils se veulent plus discrets car ils viennent ici pour espionner ou plutôt tenter d’espionner les affaires de la Grande Grue ou encore le pays lui-même. Kawa no Kuni n’est-il pas à mi-chemin entre Ki no Kuni et Kaze no Kuni ? Qui a dit pays stratégique ? D’un autre côté certains grands seigneurs envoyaient par moments leurs sbires dans ces contrées pour tenter, par le biais de nukenins, de mener des actions subversives envers d’autres groupes, pays, nations. Dès lors, se promener avec son uniforme au complet pouvait se révéler assez particulier.
_ Cherches-tu quelque chose de spécifique ici l’impérial ? Je saurai peut-être te conseiller quelques lieux intéressants pour certains types d’affaires, même si je ne pourrais avoir meilleur conseil que de te suggérer de retirer tes insignes.
Je regardais chacun des coins et recoins de sa mise, des choses qu’ils portait sur lui afin de lui faire prendre conscience de tous les signes visibles. Il était détectable à mille lieux et à bien des égards, pour ne pas insister davantage, c’était bien plus une mauvaise affaire qu’autre chose. Du moins tant qu’il se trouvait en ce lieu. Après, à lui de décider, selon ses objectifs.
- À vrai dire je cherchais quelques ennemis, ç'aurait pu être utile. Mais je crois que j'ai surestimé l'hostilité des gens d'ici envers notre écusson, ou sous-estimé leur retenue je ne sais pas... dit-il en détachant les boutons qui maintenaient le chaperon à son cou. D'un mouvement de bras volèrent blason impérial, sigle des pays neutres, les kanji arborant "Paix Universelle" et les quelques motifs qui rappelaient à l'imaginaire l'assise du shûkai sur le Nord-Ouest du monde connu. Puis ils disparurent sous quelques plis longeant le dos du sabreur, découvrant son katana ainsi qu'une véritable tenue se voulant bien plus modeste en signes d'appartenance. En fait, aucun ne subsistait. Dans son mouvement, le Yorurai s'était à son tour orienté vers son vis-à-vis en logeant de sa main gauche le col de l'habit enlevé sur son épaule.
- Le lieu parfait pour tout type de rencontres et d'affaires ?
Mikami considérait la Terre ainsi, mais la Mégalopole semblait disposer de quelque chose de supplémentaire. Une concentration de moyens et de personnes des plus denses, semblant à première vue pouvoir rivaliser avec les villages shinobi, en plus d'un rythme bien plus soutenu qu'autre part sur les campagnes du globe. Le temps et la foule semblaient ici accélérés, "l'économie" allait bon train et son lot de commission avec. Quelques minutes de vagabondages et d'observations couplées avec l'association de « rencontre » et « affaires » au nom de Kurebasu en disait bien assez long. L'amnésique sourit, curieux de savoir vers où s'évadaient la plupart des flux de pouvoir ainsi créés, puis enchaîna sur sa question laissée en suspens.
- J'imagine que vous devez avoir pas mal d'anecdotes à raconter. Vous semblez habitué à cette ville.
Entendre parler du monde extérieur ne lui ferait que du bien. Ce devait faire... trois, ou quatre ans, qu'il avait fait escale au shûkai et dans les pays affiliés. Peu importe les histoires que cet homme serait susceptible de lui raconter si par la suite il venait à le suivre, la narration d'une personne nourries aux aventures extra-muros lui donnerait sûrement un peu d'air, en plus de lui permettre de se rafraîchir les idées.
- Quitte à me conseiller un endroit... j'aimerais avoir la chance de trouver un lieu où finir une bouteille avant qu'elle ne finisse dans une baston.
Non pas qu'il soit réticent à l'idée de se jeter dans les réjouissances d'une bagarre générale, mais tant qu'à faire, autant éviter d'y sacrifier un bon alcool et que sa chaise reste une chaise avant qu'une rotation des deux bras ne la transforme en arme.
