Il y a des sentiments qui ne peuvent être définis. Des états d’esprit sur lesquels placer des mots devient si difficile qu’on en est paresseux. Inutile de préciser que Suzurane Hakyô était dans un de ces états secondes lorsqu’il vit, de par sa barque, les premiers mètres carrés de terre glacée. Yuki no Kuni, enfin il y voyait de nouveau sa terre promise. Cela représentait énormément, et nul doute que Yamada Kioshi pouvait comprendre cela.

L’ancien Kazekage, derrière celui qui ramait avec une puissance encore plus grande maintenant qu’il voyait la côte au loin, faisait partie du voyage. S’il semblait s’être investi d’une prochaine mission sur le Yuukan, il n’en avait néanmoins pas oublié son engagement auprès de l’Héritier du Nord et l’accompagnait pour le début.

Car c’était justement ce début qui serait capital pour toute l’entreprise de Suzurane Hakyô. Sans en avoir détaillé les étapes, il semblait que pour le guerrier du froid, il eut décidé de s’attaquer à quelque-chose ici.

─ Nous y sommes presque, l’ami…

Et en effet, ils réussirent à se rendre à Dhartsedo sans imprévu. Si le garde qui leur parla se montra respectueux, il ne pouvait bien évidemment pas se douter des intentions de ces deux étrangers, qui ne faisaient que débarquer dans une ville portuaire certes renforcée depuis des mois. Il y avait des gardes, mais y avait-il de vrais shinobis ? Quelques-uns, pensa le Suzurane qui se contenta de marcher et d’humer l’air froid de sa contrée.

─ Il y avait une auberge, au bout de cette allée. J’imagine qu’elle n’est plus là depuis le temps, mais… essaie de trouver un endroit où dormir. J’aimerais être seul, un moment.

Il pouvait sans doute comprendre. Et ce fut ainsi que le Borgne se retrouva à marcher seul dans les rues fraîches de Dhartsedo. Enfin, il était retourné sur ses terres. Enfin, le climat glacial semblait caresser sa peau avec toute la bienveillance du monde.

Se baladait-il par pur plaisir ou afin de faire de premières réflexions sur l’attaque qu’il préparait d’ici deux ou trois jours ? Nul d’autre que lui ne pouvait le savoir. En tout cas, il esquissait parfois un rictus qui se faisait têtu et revenait sans cesse. Une chose était alors sûre : Suzurane Hakyô était en ce moment présent un homme heureux.

Spoiler:

Yuki était mon pays, et il le resterait à jamais. Certes, j'avais été un shinobi de Kiri et du pays de l'eau, j'avais habité là-bas et lors de la destruction du village caché de la Brume, je m'étais réfugié au pays de la Neige comme la majorité des Samui. C'était notre pays de base, il le serait encore dans les années futures. La cohabitation avait été difficile avec les Suzurane, mais ces derniers temps tout semblait allait pour le mieux de ce côté là. L'aide de Ketsuen avait fait beaucoup de bien, il faut l'avouer. En tout cas, un an était passé depuis les attaques de cette organisation et depuis, il s'en était clairement passé des choses.

La guerre contre Kumo était probablement la chose la plus importante à savoir, et c'était sans compter que le Shukai était la cible d'attaques récurrentes. Une menace pour les nations, une menace pour bien grand monde alors que l'équipe dirigeante ne cherchait que la paix. Un rêve fort utopique, malheureusement. En tout cas, penser que l'Empire allait s'effondrer était une grosse erreur.

Je marchais, toujours dans mes pensées, et j'étais content de ce que devenait malgré tout le pays de la Neige. En effet, alors qu'il y a un an, j'étais pessimiste quant à l'idée de la restitution de la Damyo, je trouvais qu'au final tout ceci prenait une bonne route. Le triumvirat, plus le conseil, tout fonctionnait et je ne pouvais en être que plus heureux. J'étais au port de Dhartsedo, un endroit que j'aimais fréquenter pour sa tranquilité et sa simplicité. Les villes de Yuki no kuni étaient généralement toutes simples, et on pouvait y être au calme.

Alors que je marchais, je voyais un homme heureux mais qui semblait un peu perdu, en train de découvrir. J'étais d'humeur joyeuse, et l'aider était pour moi quelque chose à faire.

Bonjour, vous semblez chercher votre chemin ?

La sécurité était à son comble, mais c'était compréhensible avec les évenements de la dernière année. J'avais le bandeau de l'Empire accroché à mon épaule, montrant fièrement mon apparteance au Shukai.

Ce port pouvait être à lui seul la clé de toute la possession de ce pays. En effet, les terres glacées de Yuki no Kuni étaient reculées à un point tel que l’aspect maritime était primordial. De fait, le Shûkai ne pouvait se refuser à administrer et sécuriser pleinement la ville. S’il venait à frapper ici, Hakyô savait que ce serait l’action la plus risquée qu’il pourrait entreprendre sur ses terres, mais également celle qui pourrait devenir son plus grand coup d’éclat.

Sans surprise, il fut abordé par un jeune homme. La première chose que l’Héritier analysa fut le bandeau que ce dernier arborait d’une façon plutôt fière. Les initiales de l’Empire ne firent pas frissonner l’homme qui le haïssait. Le Suzurane, donc resté de marbre, salua son nouvel interlocuteur avec un petit geste de la main.

─ Oh ça se voit ? Et bien merci l’ami, je t’avouerai que j’étais venu ici il y a de longues années, et j’ai du mal à m’y retrouver...

Encore une fois il avait appelé quelqu’un « l’ami », une coutume bien du nord. Mais après tout, qui qu’était ce jeune homme, il n’était qu’un soldat au service de l’Empire. Hakyô n’avait aucune raison de s’en prendre à lui. Chacun faisait son devoir, pensait-il. Et cela n’empêcherait aucun camp de faire ce qui lui semblait juste. Et ce même s’il avait du mal à prendre l’Empire du Kamui comme un « camp » légitime.

─ Du coup je visite et redécouvre cette ville qui m’est chère. Et toi, tu es du coin ?

En tant que shinobi de l’Empire des Pays Neutres, il pouvait venir de nombreux pays. En tout cas, son jeune visage ne rappelait rien au Borgne. Difficile d’imaginer qu’il avait à faire à un Suzurane. Mais comme l’avait dit Yamada Kioshi quelques jours plus tôt, cela faisait dix ans que l’Héritier de la Montagne n’était pas revenu sur ses terres...

Spoiler:

J'aimais être au contact de la population, j'aimais savoir que la population de l'Empire se sente en sécurité et soit heureux. Pour l'instant, c'était le cas et malgré le froid du pays, les gens étaient heureux. Quant à la température, ils en étaient habitué tout comme moi. C'était d'ailleurs un joli temps pour la période printanière et j'appréciai toujours autant recevoir cette petite brise fraîche sur mon visage. Encore une fois, j'étais décidé à parler aux nouveaux arrivants. Puisque j'étais sur le port, je pouvais ainsi voir les personnes qui arrivaient. Les membres de l'Empire avaient du mal à voyager et se rendre vers le pays de l'Eau ou de la Neige, la communication était difficile cependant il y avait malgré tout sur Yuki quelques shinobis. Nous n'étions pas nombreux, mais difficile d'imaginer une attaque sur ce beau pays enneigé.

Un homme était arrivé, un borgne. Je l'avais abordé car je le pensais perdu sur cette ville portuaire. L'homme m'expliqua qu'il était venu ici il y a fort longtemps, et qu'il se sentait donc perdu. C'est vrai que s'il était venu ici il y a longtemps, bien des choses avaient maintenant changé. Comme partout ailleurs, en réalité. L'inconnu m'avoue donc redécouvrir cette ville à laquelle il tenait, avant de me demander si j'étais du coin. Je gardais un sourire, répondant rapidement.

Et bien, je suis d'ici, oui. Du moins, j'étais au Pays de l'Eau avant que mon clan ne s'installe ici il y quelques années.

Pour moi, il était évident que les gens connaissaient l'histoire de mon clan. Les Samui avaient établi leur quartier général dans ce pays, avant de s'y installer logiquement à la destruction du village caché de la Brume. Enfin, mon regard azuré se posait sur l'homme, qui était bien plus âgé que moi, et ça se voyait réellement. Après tout, je n'étais âgé que de vingt-deux ans.

Permettez-moi de me présenter, je suis Kirito Samui. Vous êtes ?

Autant faire connaissance, c'était une chose que j'appréciais le plus dans ce pays : la sociabilité des gens. En tout cas, le borgne avait sûrement compris que j'étais un soldat de l'Empire.

Spoiler:

─ Ton clan ? Tu es donc bien un shinobi.

Il lui proposa un sourire rapide. S’il était effectivement un citoyen du Pays de la Neige depuis quelques années et que c’était lié par un mouvement de sa famille Ninja, il ne pouvait être qu’un Samui. Et forcément, le clan important de l’Empire et de l’ancienne Kiri représentait ce que le Suzurane haïssait le plus en ce bas monde : les opportunistes qui piétinaient coutumes et étrangers pour leurs propres intérêts.

C’était là toute une philosophie de vie que le Nukenin avait cultivé tout le long de sa vie. Pourquoi le Shûkai, s’étant tout d’abord auto-proclamé Alliance des Pays Neutres, s’était permis de profiter de la faiblesse de Yuki no Kuni pour le mettre sous son égide ? Pourquoi ce même Shûkai s’était transformé en Empire, marchant sur tous les principes fondateurs de société et de liberté ? Aujourd’hui, le Kamui pouvait se satisfaire de posséder Yuki no Kuni uniquement parce que l’ancienne Kiri la Sanglante avait joué aux barbares inconscients. Il n’avait aucune bataille à remporter, aucun pourparlers à effectuer : il n’avait rien mérité.

Le mérite, quelque-chose que nombre d’hommes confondait avec l’honneur. C’était faux, seul l’un pouvait impliquer l’autre. Il y avait mille façons de mériter un bien : par un acte écrit, par une descendance, par de l’or, par l’honneur. L’Honneur avec un grand « H », comme Hakyô. Samui Kirito était son nom. L’homme qui lui faisait face ne pouvait répondre en lui mentant.

─ Je suis Suzurane Hakyô, fils de la Montagne, le dernier grand chef de ces terres, dit-il simplement.

Ils avaient beau être dans un coin de la ville portuaire, l’homme à l’unique œil voyait bien que si le jeune Kirito criait, d’autres gardes viendraient dans les minutes.

─ Vous n’avez aucun droit sur ces terres, vous autres du Shûkai. Mais je n’ai rien de personnel contre toi. Tu agis selon tes ordres, j’agis selon les miens, il esquissa un rictus. Quoique mes ordres viennent directement de moi...

Personne ne pouvait les entendre. Qu’importe où les deux hommes avaient marchés, il était évident que l’Héritier n’aurait pas commencé à parler ainsi devant un auditoire. Mais pourtant, il semblait qu’il prenait un risque considérable en s’adressant ainsi à celui qui, simple soldat ou pas, restait l’un de ses ennemis.

─ Si tu cris, je te tue, et toute l’assistance que j’ai sur place prendra les armes et cette ville sera mise à feu et à sang. Ce n’est ni ce que je veux ni ce que tu veux, n’est-ce pas ? Un regard inquisiteur sur le Samui. Si tu parles de notre discussion à quiconque, ta vie sera sauve et tu auras nombre d’alliés à tes côtés. Mais crois-tu que je veuille attaquer une ville que je réclame par légitimité ? Pire encore, tu n’auras que ta parole pour preuve et aucun motif ne serait valable pour m’arrêter.

Quoi de plus vrai, Yamada Kioshi avait prêté allégeance au prétendu Roi jusqu’à ce que ce dernier soit perçu comme tel. Quant aux renforts, sur quel motif le jeune Kirito se baserait-il ? Oserait-il dire « un étranger se réclamant l’héritier de Yuki no Kuni est en ville » et si oui, que lui arriverait-il en cas d’inaction totale du concerné ?

─ Tu as tort de penser que ta maison est ici, Samui. Ton clan a vécu à Mizu no Kuni et a servi Kiri durant des années. De quel droit vous êtes-vous installés ici ? Est-ce ta famille qui a conquis ces terres ? Non. Est-ce ton Empire qui l’a assiégé ? Non.

Il adressa un regard pour la première fois enclin à la haine au jeune homme.

─ Ton clan n’a fait que pleurer la perte de son village de barbares et au lieu de chercher à le reconstruire ou à continuer de vivre sur ses terres de l’Eau, a préféré se prostituer auprès des plus offrants.

Difficile pour quiconque pourrait être spectateur de cette scène de savoir ce que le Suzurane avait derrière la tête. Et la tâche serait encore plus compliquée pour connaître le ressenti ou l’envie du Samui. Qu’allait-il faire en entendant l’Héritier ?

─ Ecris au chien que l’Empereur a choisi pour gouverner ici et demande-lui de venir ici le plus vite possible. Je ne me fais pas de souci pour que les bruits de sa venue viennent jusqu’à moi, ainsi je saurai quand il viendra. Et n’oublie pas, si tu tentes quoi que ce soit d’autre, je ne me montrerai pas et si je meurs sans l’avoir mérité, tu sais bien comment les Suzurane réagiront...

Que préférerait le Shûkai ? Tuer un homme sans procès avec la voix d’un jeune soldat comme seule preuve et se risquer une révolte conséquente contre le clan le plus barbare du monde shinobi ou l’écouter en sachant que l’Empire aurait tout le loisir de se placer en a engagé numérique ou matériel ?

─ Ah au fait, si jamais aucun autre chien depuis Samui Yuki n’a été désigné, que l’Empereur lui-même vienne. Nous verrons bien qui de nous deux mérite le Nord.

Il fit un discret hochement de tête à l’encontre de son interlocuteur. Pas à pas sans se retourner, il commença à s’éloigner de lui. Si tel était le souhait du Samui, il pouvait l’en empêcher.

─ Votre pouvoir est la création de la glace et de la neige, n’est-ce pas ? Alors Kirito, penses-tu que mon pays ait attendu l’arrivée des tiens pour qu’il se mette à neiger sur ses montagnes ?

Spoiler:

C'était en toute sympathique je me présentais en tant que Samui Kirito avant de lui demander à son tour de se présenter. Savoir à qui j'avais à faire était mieux pour continuer une éventuelle discussion. Et son nom était Suzurane Hakyô, et il se présentait comme le fils de la Montagne, dernier chef du pays des Neiges et du clan Suzurane. Mon regard se posait sur l'homme borgne, ne comprenant pas ce qu'il me déclarait là. Tout d'abord, la relation entre Suzurane et Samui s'était grandement apaisée, et puis il y avait un tout nouveau chef de clan désormais. Il avait dû s'absenter durant un long moment.

Pardonnez-moi, mais votre clan possède un nouveau chef. Son nom est Shuugyou.

Mais, je ne pus continuer ma phrase. D'après l'homme, le Shukai n'avait aucun droit sur ce pays. Mais, qui était-il ? La question tournait dans ma tête, mais je ne me souvenais pas d'un Suzurane Hakyô pas même dans les nombreux livres que j'avais pu lire sur le pays de la Neige. D'ailleurs, même le nom de la Montagne ne me disait pas grand chose. Tellement que je réfléchissais, l'homme continua de parler ce qui me sortit un peu de ma rêverie.

Il était effrayant dans ses propos, prêt à mettre le feu à la ville portuaire et à me tuer. Bien sûr, je n'avais pas peur, loin de là mais éviter de mettre la ville dans le sang était évident. De plus, nous n'étions que peu de shinobis présent sur Dhartsedo et les seuls gardes présent ne feraient pas le poids face à l'homme (je sentais une certaine aura autour de lui) et selon ses dires, il n'était pas seul. D'ailleurs, je n'étais pas même sur que je puisse faire quelque chose contre lui. Le Suzurane se mit à parler de mon clan, chose qu'il ne faut pas faire en ma présence.

Vous me faîtes plus rire qu'autre chose. Vous ne connaissez pas même l'histoire de Yuki, ou même des Samui. Nos plus lointains ancêtres étaient déjà originaire de ce pays, sachez-le. De plus, laissez moi vous dire que Mizu no Kuni, qui a conquis Yuki no Kuni, a été conquis par le Shukai, et donc Yuki fait parti entière de l'Alliance.

Et, je préférais ne plus rien dire mais s'attaquer à mon clan était quelque chose de grave pour moi. Cet homme avait de la chance que je ne veuille pas faire de sacrifices des villageois de la ville portuaire.

Et, sachez bien que le pays de la Neige est dirigé par un Triumvirat. Vous attaquez à l'Empire, c'est la mort en conséquence des actes que vous ferez.

Une menace ? C'est exactement ça. J'allais de suite devoir en informer les autorités compétentes, je n'avais plus du tout le choix à présent. Je n'écoutais pas la pique du Suzurane, le laissant s'en aller. Je partis à mon tour pour prévenir l'Empereur, et le Triumvirat.

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