Le Kunai. La gorge d'Eichi. L'expression glaciale de Yami et de son compagnon blond. Les pics. Le sang. C'est en sursaut qu'Hasü se réveilla de sa couche. Haletante, la sueur coulait le long de son front. Désormais assise sur son lit, la Koken observa sa chambre d'hôtel comme pour se rassurer. Ces sombres épisodes étaient encore bien présents dans la tête et sur la chair de l'Espionne. Voilà maintenant une semaine que la Belle avait quitté les cellules de l'Ergastule. Elle avait été libéré, sans trop savoir pourquoi. Des gardes l'avaient délivrés de ses chaînes, lui avaient redonnés ses affaires et l'avaient lâchés dans les rues de Suna en lui disant qu'elle ne devait pas quitter le Village. A ce moment, elle n'y avait pas cru. Pourtant au bout d'une demie heure immobile à attendre qu'on vienne la rechercher, la DJ du se rendre à l'évidence : Elle était libre.

Elle marcha à travers les rues du Sable avec une immense incrédulité sur le visage. Elle croyait que c'était une nouvelle épreuve. Une nouvelle séance de torture. Ce n'était pas possible, c'était trop beau pour être vrai... Terrifiée par cette probable vérité, la Belle avait cherché un refuge où elle aurait pu remettre ces idées au clair. Elle s'était donc retrouvée dans cette chambre et ne l'avait pas quittée pendant trois jours. Elle passa son temps à malaxer son chakra et tenta plusieurs fois de dissiper ce décor, qu'elle croyait mirage, par un Kaï. Au bout du troisième jour, la rousse, plus calme, se décida à sortir. Encore sensible mentalement, Hasü ne put s'empêcher de pleurer lorsqu'elle sentit les courants d'air chaud lui caresser les joues. Elle était vraiment libre et il allait falloir qu'elle s'y fasse.

Mais revenons en au moment présent. La Koken était toujours tremblante, suante. Ces cauchemars la pourchassaient chaque soir. Des événements du passé qu'elle n'arrivait pas à oublier et qui l'empêchaient de totalement récupérer. Mains sur le visage, la rousse se frappa le crâne à l'aide d'une de ses dextres.

— Sortez de ma tête...

Le visage d'Eichi sous son meilleur jour réapparut comme un flash. Cette image prenant le pas sur toutes les autres.

— SORS DE MA TÊTE !

La DJ se leva brusquement, s'habilla et quitta sa chambre d'un pas rapide en oubliant de se chausser. La porte claqua violemment sous sa colère.

C'est en courant que la jeune femme s'aventura dans les rues vides du village. Ses pieds nus résonnant sur le sol damé du Sable. Elle voulait fuir. Fuir tous ses souvenirs beaucoup trop douloureux pour qu'elle veuille qu'ils refassent surface. Oublier. Sa course la mena tout droit vers le seul endroit vide dont elle s'était souvenu : Le terrain d'entraînement. Coïncidence ? Sachant que c'était là que l'homme, qu'elle tentait d'ignorer, l'avait emmené avant de l'envoyer en Enfer. Dos contre un des nombreux murs qui quadrillaient la zone, elle se laissa tomber, son postérieur s'enfonçant dans la masse sableuse. Elle resta là, immobile. Son regard se perdant dans le firmament.

Seule. C'est tout ce qu'elle voulait être. Elle espérait pouvoir goûter à cet instant rien qu'entre elle et ses pensées. Pourquoi avait-elle quittée l'Hôtel ? Elle ne pouvait pas dormir, et sa chambre semblait étouffante, un sentiment qu'elle n'avait que trop connu à l'Ergastule. Ses yeux allaient d'étoiles en étoiles, alors que les larmes disparaissaient peu à peu, séchées par les bourrasque du vent de Kaze no Kuni. C'est alors qu'elle entendit un son derrière elle. Tournant la tête, elle vit une petite silhouette se dessiner à travers l'obscurité. Le Soleil n'était pas encore levé, et il faisait beaucoup trop sombre pour que la Belle puisse distinguer quoi que ce soit à travers cette luminosité beaucoup trop basse...

Une voix s'éleva soudain, féminine. Vu le ton plutôt aigu que cette nouvelle arrivante avait, elle était probablement une enfant. Sa taille avouait aussi pour elle. Pas forcément enchantée d'être dérangée dans ce moment intime qui faisait place à la méditation, Hasü ne pouvait qu'être déçue. Elle aurait volontiers virée cette "intruse", mais lorsque ses pupilles de jade se posèrent sur un Kunaï que la gosse s'amusait à faire tournoyer sur l'un de ses doigts, elle ne put que se résoudre à accepter sa présence. N'étant pas forcément d'humeur à la conversation, Hasü resta muette suite aux demandes de son interlocutrice. Qu'allait-elle lui dire ? Qu'elle était une Espionne qui avait lamentablement échouée dans sa mission ? Non. Elle s'était assez affichée comme ça... C'est alors que le ton méfiant de la gamine fit place à une voix plus... compatissante. A l'écoute, ses yeux toujours fixés vers la Voie Lactée, la Sirène entendait les paroles prononcées par l'enfant. Dans la même mouise ? Voilà quelque chose qui l'intéressait. Se retournant, elle regarda la fillette, non sans avoir préalablement essuyée ses larmes d'un revers de l'avant-bras. Un bref reniflement et Hasü se décida à parler. Sa voix était rauque, s'exprimer lui faisait mal aux joues. On avait l'impression qu'elle n'avait pas ouvert la bouche depuis plusieurs jours.

— Oui... Je suis une voyageuse...

Il était temps de rentrer dans le vif du sujet. Après tout, si ce qu'elle avait dit n'avait pas intéressé la Belle, elle ne lui aurait tout simplement pas adressé la parole.

— Que vouliez vous dire par "On est dans la même mouise" ? Vous êtes aussi une touriste ?

Evidemment cette dernière interrogation avait déjà une réponse aux yeux de la Koken. En tout cas une supposition parmi tant d'autres. Cette fillette était une Ninja, le kunaï qu'elle arborait en était la preuve. Aucun détail ne permettait à Hasü de savoir si elle était oui ou non une Sunajin. Au final, plus la Chanteuse observait cette gosse, plus elle se perdait dans ses propos et idées... Qui était cette enfant qui se disait être dans le même pétrin qu'elle ? Une amie de Michiki ?

— Est-ce que vous pouvez ranger ce kunaï ? Je... me sentirais moins stressée...