A ma tendre...

Si tu reçois cette lettre d'Hiriko, et d'Hiriko seulement, alors c'est que j'ai échoué. Que je n'ai pas tenu la promesse de toujours revenir. Que mon devoir vis-à-vis du Shôraizen a finis par me prendre. J'ignore qui, j'ignore comment et pourquoi, j'imagine en écrivant ces mots que tu le découvriras bien assez vite. J'aimerais te dire tout ce que je n'ai pu te dire, de peur de te voir partir. De peur de perdre mon dernier fragment de lumière en ce monde. Mais je pense, mon amour, que je dois être honnête avec toi jusqu'à mon dernier souffle.

Toi qui avais les mains de créatrices, et moi les mains de destructeurs, comment avais-je pu avoir la chance de t'avoir à mes côtés ? C'était un mystère que je ne comprenais pas, et que je ne comprends toujours pas aujourd'hui. J'essaye d'apprendre, à tes côtés, ce qu'est l'amour, la tendresse, et les autres sentiments si doux que tu possèdes au naturel. Cette délicatesse, cette finesse, c'est peut-être ça qui m'a séduit chez toi. Tu n'avais pas besoin de me parler, je n'avais pas besoin de te parler. Ton simple regard, ta simple présence suffisait pour apaiser mon âme.

J'ai probablement dû faire beaucoup d'erreurs. Au fond, j'espère que je suis mort en souffrant tout autant que j'ai fait souffrir. Mais je pense que cette souffrance physique n'égalera jamais celle de ne plus jamais voir ton visage, ni sentir ta peau contre la mienne. A défaut de pouvoir passer mes derniers instants avant cette mission avec toi, je peux encore faire ce moindre geste qui est, j'en suis conscient, bien peu par rapport à ce que tu as pu m'apporter, et ce que tu m'apportes chaque jour.

Ma douce, je n'arrive pas à comprendre ta gentillesse envers quelqu'un comme moi. Je ne suis qu'un homme modifié en arme qui n'arrive pas à se défaire du sang qu'il a sur les mains. Alors dans cette réalité où je ne pouvais me racheter, j'ai entrepris de prendre sur moi tout le prix du sang. J'espérai, peut-être naïvement, de payer ces lourds tribus à votre place. Pour me confesser, pour partir dans la conviction que ce que je faisais était juste. Que, peu importe mon acte, ce qui comptait était le résultat à la fin. Que les souffrances présentes que je ressentais, que je faisais ressentir, que je provoquais, étaient nécessaires au bien de tous.

Souvent, je me pose la question mon amour. Et si je t'avais simplement retrouvé, et si j'étais parti avec toi uniquement, loin, très loin de ce monde ? C'était une solution, mais nous aurions dût fuir, nous aurions dû vivre cacher. Mais aujourd'hui, je serai avec toi, peut-être encore vivant... Mais pour combien de temps ?

J'en suis venu a pensé que j'étais une variable parasite. Que, peu importe où j'allais, je finissais indéniablement par mourir. Pour moi, il n'y avait aucune alternative. Au fond, j'étais déjà condamné. Par ce monde, par ces rouages, par mon histoire, par mon essence, par mon pouvoir... Je n'avais aucun salut, hormis toi : ma lumière.

Peut-être dois-tu me haïr aujourd'hui ? C'était ma plus grande peur. Je n'avais peur de rien, peu m'importait d'être aimé ou haï, seulement toi comptais. Je ne pouvais et ne peux aujourd'hui, supporter l'image de te voir me détester, j'en avais peur. Je sentais que tu étais mon attache à cette réalité, celle qui me maintenait, tant bien que mal, sur le droit chemin.

Je ne pouvais pas tout te dire, simplement parce que ce sentiment me paralyser. Je ne savais pas si tu étais tombé amoureuse de ce que j'étais, ou simplement de l'image que je dégageais. J'ignorai tout de cet amour, qui m'était obscur. Son origine, sa nature, son étendue. Tout... Je savais simplement que tu m'aimais, et cela m'était suffisant.

Mais aujourd'hui, je ne suis plus là. Quelqu'un a mis fin à ma vie... Mais tout ce que j'aurai accompli ne sera pas inutile : tu n'es plus seule. Tu as une famille. Je crois en toi, et je crois à l'intégrité du Shôraizen. Je sais que tu prendras soin d'eux à ma place, tout simplement parce que je t'ai choisie pour être l'Uma, et que, plus que jamais, ils auront besoin de toi. Je te connais mon Ange, je sais que je peux placer ma confiance en toi. Car tu es tout ce qui me reste...

Sache que je t'aime, et que, ou que je sois, je t'aimerai toujours.