Trouver Kawaguchi Tsukiko était une chose plutôt simple. Du moins c’était ce que le jeune moine avait pensé au premier abord. Après tout, quoi de plus normal ? Membre d’un des clans les plus éminents du village et même de tout le Pays du Vent, il suffisait de se renseigner et de se rendre dans les quartiers réservés aux manipulateurs de sable. Beaucoup de villages procédaient ainsi pour leur architecture. Mais avant de trouver les quartiers des Kawaguchi, il fallait réfléchir à comment procéder une fois là-bas, et voir si effectivement c’était la meilleure façon de faire.

Howaito se mit en route alors que Daini, elle, devait être en train de chercher une auberge. Sur le chemin qui devait le mener aux quartiers tant désirés, il passa devant une bâtisse imposante. L’obscurité gagnait, la soirée commençait à pointer le bout de son nez, mais l’homme reconnut l’hôpital du village. Après tout, il n’y avait qu’à voir le blessé qui venait d’y entrer en urgence et les médecins qui l’avaient immédiatement pris en charge pour en faire une déduction rapide. Mais ce qui intéressa notre homme fut une jeune femme qui attendait dehors. Travaillait-elle pour l’hôpital ? Peut-être, bien qu’elle n’avait pas sur elle des vêtements particuliers. Elle ne semblait pas non plus attendre quelque-chose de particulier. Etait-elle une patiente ? Un médecin en pause ? Ou pire, un membre de la famille d’un patient ?

Sans hésitation, le Gekei s’approcha de la jeune femme. Un physique attrayant de loin, qui se confirma à chaque pas que le Nukenin fit. Mais la Saibogu qu’il avait rencontré plus tôt dans la journée ou même le Kazekage Habashi Zanshi avaient prouvé qu’il ne fallait jamais redouter les femmes. Et même si Howaito le savait très bien, il avait eu suffisamment de rappels pour aujourd’hui.

« Bonsoir, mademoiselle. Attendez-vous quelqu’un ? Je ne suis pas d’ici et à vrai dire, faire la discussion avec quelqu’un me ferait du bien. »

Il lui adressa un sourire amical, ou charmeur selon la convenance de la concernée, avant de reprendre sans atténuer son fin rictus.

« Enfin, c’est comme vous voulez. Je ne voudrais pas vous déranger. »

Et c’était vrai.

Après mes tâches administratives au Kakumeigun en tant qu'intendante de Kioshi, je m'étais rendue à l'hôpital comme à mon habitude pour parfaire ma maîtrise de la médecine et prêter main forte au personnel médical débordé. J'avais moi même été une patiente récurrente de cet établissement depuis mon plus jeune âge et bien que j'avais cet endroit en horreur tant il me renvoyait à des souvenirs que je préférais oublier, je ne pouvais nier que je devais ma vie à cet endroit. C'était pour moi, la façon de remercier l'équipe médicale pour ce qu'elle avait entrepris à mon égard, même encore aujourd'hui. Le service vasculaire me connaissait bien à force d'avoir été admise pour recevoir des transfusions sanguines régulières qui l'était d'autant plus depuis que ma maladie avait progressé.

C'était étrange comme rétrospective que de se dire qu'il n'y avait que deux ans de cela, l'idée même de venir en aide aux autres m'aurait révulsé... Je n'y trouvais pas forcément mon compte non plus mais je pouvais sauver des vies de sunajins, parfaire ma médecine et me forcer au contact du sang sans y succomber. D'ailleurs le pouvoir qui était propre à mon clan m'était parfois bien utile durant les interventions pour éviter les hémorragies. Je pouvais mémoriser les arômes de chacun des patients que je soignais et ainsi retenir le goût de leur hémoglobine : cette action bénévole ne m'apportait donc que du bon.

Je prenais donc un bol d'air frais sous le soleil en déclin, après quelques heures intenses de soutien, m'apprêtant à retourner au manoir du clan pour m'octroyer un peu de repos. Cependant, un visiteur attira mon attention : pour sûr, je ne l'avais jamais vu à Suna. Il portait des apparats traditionnels d'homme de grandes convictions, comme ceux des moines que j'avais rencontré lors d'une mission avec Ogami. Lui aussi semblait m'observer avant de s'approcher de moi. Sur mes gardes, je l'avisais de mes yeux rubis, inquisitrice quant à sa venue. Il fallait dire que les derniers moines que j'avais rencontré avait voulu ma peau, je restais donc méfiante face aux étrangers, comme à mon habitude.

Finalement arrivé à ma hauteur, il me salua en me posant quelques questions, m'expliquant qu'il se complaisait à discuter et avouant qu'il n'était pas d'ici : le contraire m'aurait étonné. Il ajoutait également ne pas vouloir abuser de mon temps tout en me concédant un sourire : au moins avait-il la décence et la politesse que j'imaginais pour les personnes spirituelles.
Je lui adressais moi-même un sourire pour parfaire la politesse avant de lui répondre :

« Bonsoir, monsieur. Bienvenue à Suna dans ce cas. L'astre diurne ne va plus tarder à se coucher mais notre village est tout aussi mirifique sous la clarté lunaire. »

Après tout il était entre les murs du village, c'était donc qu'il avait subit le protocole habituel pour y parvenir et qu'il avait subit un interrogatoire sur ses intentions. J'avais beau faire partie du Kakumeigun, je n'allais pas réitérer ce qui avait déjà été fait : c'était pour cela que je me montrais plus détendue face à l'inconnu, bien que je n'en demeurais pas moi prudente. Mon clan déchu avait tendance à donner des cheveux blancs, quant à ses pratiques, aux moines. Cela avait été le cas de ceux que j'avais rencontré en tout cas, qui m'avait vu comme l'incarnation du démon personnifié...

« Non je n'attends personne : j'ai seulement terminé ma journée. Et vous ? Que faites vous à Suna ? Comment trouvez vous notre village ? Il n'est pas aisé de s’accommoder à son climat lorsque l'on y est pas habitué je suppose ? »

Je lui rendais son sourire. Pour une fois que j'étais de bonne humeur et encline à discuter je n'avais pas de raison de m'en priver.

Un médecin qui venait de terminer sa journée donc, voilà qui expliquait pourquoi elle ne portait pas de blouse ou autre vêtement lié à sa profession. Etait-ce d’ailleurs sa profession première ? Une question peu utile dans le cas présent, mais tout portait à croire que l’homme avait à faire à une kunoïchi qui devait avoir des connaissances médicales et sûrement des aptitudes qui se rapprochaient de ce domaine. A moins qu’elle soit une Saibogu travaillant ici pour la maintenance des outils mis à la disposition de l’hôpital ? Trop de possibilités, le sujet fut envoyé dans un coin de l’esprit d’Howaito, qui écoutait avec délice les quelques mots prononcés par celle qui le surprenait de par son vocabulaire. Une femme qui savait user de poétiques mots à un âge pourtant si jeune. Vingt ans, tout au plus ?

Bien entendu, elle le salua et lui posa quelques questions en retour. Fort heureusement, ce n’était pas à un interrogatoire qu’il allait avoir droit. Deux lui suffisaient pour aujourd’hui, d’ailleurs. La possibilité d’avoir une conversation des plus banales mais néanmoins intéressantes avec cette inconnue était envisageable, très clairement, tout comme l’espoir de pouvoir soutirer la localisation de Kawaguchi Tsukiko.

« Je suis ici pour plusieurs choses à vrai dire comme par exemple avoir une entrevue avec votre Kazekage, et revoir une amie de longue date. »

Ses yeux se détachèrent très tranquillement de son interlocutrice et se mirent à parcourir le paysage que lui offrait docilement le village de Suna. Une base militaire comme l’avait souligné Habashi Zanshi, mais une belle et chaude base. L’architecture y était à la fois commune et originale. Il avait arrêté de compter les habitations faites en sable ou en terre, mais malgré ces matériaux peu conventionnels, tout lui avait paru très sophistiqué.

« Votre village est magnifique. J’avoue avoir été épaté par la Voie Illusionnée. Quant à votre climat… on s’y accoutume. J’aimerais vous inviter à boire un verre, si vous le voulez bien. »

Il fit un pas en avant, mais se ravisa rapidement. Sa main droite placée au niveau de sa poitrine montra des doigts qui se frottèrent, signe de sa volonté de vouloir ajouter une petite précision avant d’éventuellement aller boire quelque-chose.

« Oh, au fait, quoi que vous répondiez, sachez que je suis surveillé par vos forces spéciales. C’est une procédure normale initiée par Habashi Zanshi, mais je préfère vous prévenir. »

L'homme restait courtois et répondait à mes questions sans sourciller, m'apprenant par exemple que sa présence en ces lieux était motivé par la rencontre de ma Kazekage et sensei, ainsi que pour retrouver une amie. Je me demandais de qui s'agissait-il et si je la connaissais mais je n'avais que faire de ce détail pour le moment, me contentant d'écouter ses propos suite à sa contemplation du village.

« J'aime ce village. Il me serait difficile d'en trouver un plus beau. Je n'ai encore jamais eu l'occasion de voyager en dehors de Kaze mais je suppose que le Yuukan regorge de lieux sublimes. »

Cela ne me faisait pas de mal de parler voyage et tourisme pour une fois, alors même que le mien semblait toucher à sa fin... Je ne laissais rien paraître de la peine qui m'assaillit en cet instant, sortie de ma torpeur par la demande inopinée de l'homme pour m'inviter à boire un verre. Je plissais les yeux à son encontre, méfiante toujours, me contentant de me dire que je ne risquais de toute façon pas grand chose à accepter : ce qui se confirmait lorsqu'il évoqua avoir été mis sous surveillance constante après une entrevue avec ma Kazekage. Cette dernière ne lui faisait donc pas entièrement confiance, ce qui renforçait mes doutes à son égard quant à ses véritables objectifs ici. Mais encore une fois, s'il était surveillé par les forces spéciales du village, dont je faisais ironiquement partie, il n'y avait pas de raison qu'il s'écarte du chemin et de la confiance que nous lui avions accordé en le laissant franchir la Voie Illusionnée.

« Je fais moi même partie de l'unité spéciale du village donc ne craignez pas m'intimider. »

Je laissais passer une seconde avant de reprendre :

« J'accepte donc votre proposition mais sachez que vous allez converser aussi bien avec moi-même qu'avec la kunoichi membre de l'unité spéciale : je préfère également vous prévenir. »

Il n'y avait là aucune menace seulement un avertissement. Il avait été clair avec moi et j'en faisais autant pour lui.

Nous nous rendions donc dans un salon de thé / bar à sa demande. Une fois installée et après avoir commandé un thé vert – je ne buvais pas d'alcool - , j'engageais la discussion.

« Peut-être pourriez vous commencer par me dire votre nom ? Pour ma part, je m'appelle Yami. Ketsueki Yami. »

Je ne l'obligeais même pas à révéler son identité mais c'était d'usage dans une conversation non ? J'avais moi même décliné la mienne pour le mettre en confiance : ou pas... Lorsque l'on savait que mon prénom signifiait ténèbres on avait tendance à se méfier... De plus, j'ignorais s'il connaissait mon clan et l'origine de son entrée au village caché du sable mais à vrai dire, je m'attendais à la réaction habituelle. Je ne m'en sentais pas offusquée : j'en avais l'habitude. Mon regard rubis plongeait dans le sien pour intercepter sa réaction. Qu'allait-il penser de tout cela ? Son comportement changerait-il à mon égard ? Voudrait-il une démonstration de ma maîtrise ?
Au fond peu importait...

Quelque-chose en la jeune femme avait changé, un court instant et ce lorsqu’elle avait parlé du Yuukan. Cela avait été à peine perceptible, mais soudainement sans sens défini lorsqu’elle annonça son grade : elle faisait partie de l’unité spéciale de Suna. Etait-ce pour ça que son comportement avait varié, là, un court moment ? Peut-être, peut-être pas, qu’importe ? En tout cas, Howaito était à la fois surpris et satisfait. Il n’aurait pas pu le savoir de toute façon, mais l’idée d’avoir en face de lui un membre éminent du village caché du Sable était une bonne chose, tant pour les renseignements qu’il pourrait éventuellement en retirer que pour prendre le dessus sur ceux qui le surveillaient. Mais il avait le temps d’y réfléchir et de voir comment la situation pourrait évoluer.

Très rapidement, elle reprit le fil de la discussion pour accepter l’invitation du moine. Une agréable nouvelle, qu’elle agrémenta néanmoins d’un avertissement convenable. Parler avec elle signifiait également parler avec la membre de l’unité spéciale, c’était logique et le Gekei savait qu’à moins de creuser sa personnalité, il avait en face de lui quelqu’un de fidèle aux siens. La précaution était de mise. Mais pour l’heure, ils marchèrent en direction d’un lieu de beuverie.

Une fois assis, l’inconnue demanda à ce qu’on lui apporte du thé vert. Une décision sur laquelle Howaito s’aligna avec un léger sourire adressé à la serveuse. Elle ne voulait pas se risquer à boire de l’alcool ? Alors lui non plus.

Elle se décida à donner son identité en guise de prélude à une discussion sans doute promise à être encore plus amicale. Ketsueki Yami, elle faisait donc partie du clan déchu amené à Suna en grande partie grâce, ou à cause selon les convenances, à Kyoshi Rei, homme que le moine connaissant bien.

« Alors enchanté, Yami. Je m’appelle Howaito. »

Est-ce que le fait que Ketsueki Yami soit désormais avec le moine eut provisoirement enlevé la surveillance à son égard ? Il était difficile d’en juger, mais sûrement était-elle devenue plus souple. Dans tous les cas, il était improbable qu’ils surveillent ce bar. Mais ils pouvaient toujours entendre…

« Puis-je vous poser une question ? Elle est assez délicate j’en conviens. »

L’homme avait sorti une feuille de parchemin attachée à un crayon de bois qu’il s’empressa de prendre pour y gratter quelques mots.

« Que ressentez-vous de faire partie d’un clan ramené ici par l’homme qui, en plus d’avoir été Kazekage, s’est révélé être l’ennemi public numéro un pendant un certain temps ? »

Mais au même instant, il avait tourné la feuille de parchemin et le crayon vers la jeune femme. Et les mots qui y étaient écrits étaient plutôt simples à comprendre.

Je peux tout à fait comprendre que vous ne souhaitiez pas prendre le risque de répondre sincèrement à ma question si on nous écoute, alors si vous en éprouvez le besoin, écrivez.

Le jeune homme adressa un sourire à la Ketsueki.

L'homme me retournait la politesse en déclinant son identité : Howaito. Je n'avais aucune certitude qu'il s'agisse réellement de son vrai nom mais après tout je m'en moquais tant que je pouvais poser une étiquette sur son visage et me souvenir de lui.

Je portais ma tasse a mes lèvres pour en boire son contenu chaud tout en écoutant ce qu'il souhaitait me dire. Il voulait m'interroger sur un sujet visiblement délicat et je hochais la tête pour l'encourager à poursuivre. J'avais tout de même arqué un sourcil à son annonce, me demandant bien ce qu'il pourrait vouloir savoir : finalement, ce n'était pas si étonnant.

Tout en me posant sa question, il griffonnait quelques mots sur un parchemin qu'il me tendait. Il me demandait ce que je ressentais pour appartenir au clan qui avait été emmené à Suna par Kyoshi Rei. C'était étrange... Non pas que je ne pensais pas que cette histoire été méconnue car l'homme masqué avait suffisant fait pour apposer son nom funeste dans l'histoire du Yuukan mais qu'il ait également connaissance de l'arrivée de mon clan grâce à lui me surprenait quelque peu... Après tout, s'il avait toujours été aussi itinérant, il n'était pas si étonnant qu'il possède des connaissances approfondies des différents pays... Avait-il obtenu ces informations seul ? Nul ne pouvait le dire excepté lui même.

La note elle, m'intimait que si je ne voulais pas en parler je pouvais toujours l'écrire. Il pensait donc que nous étions suivi et observés, ce dont je ne doutais pas, et pensait que je ne pouvais pas m'exprimer librement sur ma façon de penser : il se trompait lourdement. Je lui adressais un regard lourd de sous entendus avant de lui répondre.

« Je n'ai rien à cacher à mon village, pas même pas façon de penser. Je suis fière d'appartenir à mon clan, aussi déchu soit-il, et Kyoshi Rei à certes bien permis aux miens d'être accueillis par Suna, mais que nous ne sommes absolument pas reliés à lui. Certains membres de mon clan avaient juré allégeance à l'homme masqué et l'ont payé de leur vie. Des traîtres, il y en a partout, cela ne signifie pas que tout mon clan est à blâmer... »

Mes yeux se faisaient plus pénétrants à ma dernière phrase comme si je cherchais à lui transmettre un avertissement. Rien ne me prouvait qu'il n'était pas là pour nuire à mon village et de ce fait, je me montrais toujours méfiante à son égard bien que je me prenais à répondre à ses interrogations comme si j'étais en face d'un journaliste un peu trop curieux qui cherchaient à obtenir des détails croustillants ou obtenir des propos compromettants sur ma personne. Je tentais justement de dissiper ces idées reçues et redorer le blason de mon clan en prouvant que Suna pouvait lui faire confiance. En cela je m'évertuais à agir pour le bien de village et à orchestrer un projet qui serait bénéfique pour mon village et ma nation.

Lui aussi pensait-il comme tous les autres ? Croyait-il vraiment que mon clan était constitué de traîtres prêts à nuire au village qui les avaient accueilli et qui, dans mon cas, m'avait vu grandir ? J'avais appris par mon père il y a peu que j'étais arrivée a Suna avant même que mon clan n'y entre. En effet, j'avais été placée en orphelinat puis transférée à celui du village caché du sable dès lors qu'il fut construit et j'étais donc la première Ketsueki a y pénétrer, encore enfant.

Je lui adressais un nouveau sourire, inversant la tendance alors que je l'interrogeais à mon tour :

« Et vous ? Que pensez-vous de mon clan puisque vous semblez le connaître je me trompe ? Et quand est-il de cette amie que vous souhaitez retrouver ? Peut-être que je la connais et que je pourrais vous guider pour la trouver. »

Et peut-être que savoir de qui il s'agit me permettra d'imaginer la véritable raison de votre venue...

Elle comprenait, mais dès qu’elle vit le parchemin, son regard changea. L’atmosphère de la conversation se transforma également. La froideur, la noirceur des yeux qu’avait alors la jeune femme étaient si explicites que Howaito vit en elle une femme blessée. Elle était emplie de haine envers Kyoshi Rei. Ca se voyait, ça se ressentait. N’importe quel idiot en serait venu à la même conclusion.

Néanmoins son appartenance prétendue à l’unité spéciale du village de Suna représentait un avertissement à plusieurs facettes. Elle était sûrement plus intelligente qu’elle voulait le laisser croire. Ou du moins – et elle l’avait prouvé – elle faisait preuve d’une grande rigidité. Mais non, c’était inimaginable pour l’ancien Kiezan de considérer que cette femme jouait la comédie. Elle en voulait à celui qui avait été Yondaime Kazekage. Elle en voulait à l’Homme Masqué. Elle en voulait à Kyoshi Rei.

Le clan Ketsueki n’était pour elle en rien responsable de ce qui avait pu être commis par celui qui les avait ralliés à Suna. Mais elle avait fait preuve d’une sympathie retrouvée, même si elle devait continuer d’être méfiante, et avait demandé à son interlocuteur ce que lui, pensait de tout ça.

« L’amie que je cherche s’appelle Kawaguchi Tsukiko. Quant à votre clan… »

La pauvre Sunajin, elle ne s’imaginait pas tout ce qui était actuellement en jeu. Et malheureusement, elle n’en avait nullement le pouvoir. Mais Howaito était bien décidé à agir et à faire ce qui lui semblait juste. C’était une partie d’échecs qui avait débuté dès qu’il avait eu l’intention de venir à Suna. Et maintenant, il avançait ses pions.

« C’est un clan noble, considéré par certains comme déchu, qui fait partie de l’histoire de Kaze no Kuni. Encore considérer ses membres comme liés d’une façon ou d’une autre à Kyoshi Rei est une bêtise. »

Il avait repris sa feuille de parchemin ainsi que son crayon de bois. Mais il se remit à y gratter quelque-chose. Mais cette fois c’était plus rapide.

« Car tout le monde sait que Kyoshi Rei n’est rien qu’un terroriste et qu’il s’est servi des Ketsueki, qui sont eux des shinobis pour la plupart pleins de mérite. »

L’homme avait retourné le parchemin tout en adressant un sourire à la jeune femme.

Je suis Kyoshi Rei. Si vous bougez, je vous tue.

Howaito me confiait que l'ami qu'il cherchait n'était autre que Tsukiko. J'étais surprise de l'apprendre. Je connaissais bien la Kawaguchi et je l'imaginais mal traîner dans des affaires louches ce qui m'intimait une certaine estime pour cet homme envers lequel j'étais méfiante. Si la Sunajin le connaissait, il ne devait pas être ici pour de mauvaises raisons... C'était dû moins ce que j'espérais croire.

Il avait cependant la décence d'avoir son propre jugement sur mon clan qu'il ne jugeait pas lié à l'homme masqué. J'appréciais son honnêteté et sa vision des choses : au moins ne me voyait-il pas comme une nuisance pour mon village comme bon nombre d'autres personnes le faisait... Il en faisait l'éloge, allant même jusqu'à dire que Rei s'était servi des miens pour parvenir à ses fins. Je ne pouvais qu'être d'accord avec son discours et cela faisait plaisir à entendre alors que c'était le message que je souhaitais véhiculer à travers ma servitude et ma loyauté pour mon village.

Howaito écrivait de nouveau sur son papier. Il me le tendait tandis que je m'étais détendue suite à ses paroles précédentes et pourtant, le message qui y était inscrit me faisait me raidir... Cet homme prétendait être Kyoshi Rei … L'homme masqué ? Non... Ce n'était pas possible... Je nageais en plein cauchemar.
Je ne devais pas m'emballer et garder mon calme. Il avait menacé de me tuer si je bougeais. Je n'avais pas peur pour ma vie mais bien pour celles des civils tout autour de nous. Mon rôle était de les protégés et de réfléchir judicieusement pour ne pas attenter à leurs vies. De plus, je savais que nous étions surveillés même s'ils ne pouvaient pas savoir à l'extérieur ce que je venais de lire. Etait-il sincère ? Etait-ce vraiment lui ? Si tel était le cas comment s'y était-il pris pour passer malgré les interrogatoires et les procédures d'entrées au village ?

Je toisais l'homme de mes pupilles écarlate, prenant doucement le crayon à mon tour pour lui répondre.

Si vous êtes vraiment l'homme masqué : prouvez le.

Je lui tendais dès lors le parchemin, attendant sa réaction sans rien dire, me contenant de toiser cet homme qui jurait être le plus grand traître de l'histoire de Suna. Me préparant à toute éventualité, j'observais le moindre de ses gestes, prête à riposter s'il tentait quoique ce soit.

Elle semblait plus froide que jamais, preuve qu’elle prenait au sérieux ce que le moine avait pu lui dire, ou plutôt lui écrire. Hésitait-elle sur la manière selon laquelle elle devait agir ? Probablement. Quel Sunajin pourrait ne pas hésiter ou rester perplexe face à un ancien Kage, qui plus est quand c’était un traitre expert en manipulation ? Fort heureusement, elle s’empressa de prendre le bout de parchemin qu’on lui avait tendu. Elle n’allait pas faire n’importe quoi, du moins pour l’instant. Et c’était tant mieux, car si ça avait été l’inverse, la situation aurait pu dégénérer, ce qui aurait gêné la suite des évènements.

Ketsueki Yami voulait une preuve. Elle l’avait écrit sans précipitation et semblait démontrer qu’elle était une personne assez réfléchie. De toute façon, c’était ce que l’on pouvait attendre de l’unité spéciale de Suna. Mais ce qu’elle avait oublié de faire, c’était de poursuivre la conversation. Si jamais des membres du Kakumeigun les écoutaient, il fallait éviter d’avoir des trous invraisemblables dans la discussion. Howaito rattrapa cela.

« Vous semblez perturbée… Je vous ai peut-être rappelé de mauvais souvenirs. »

Il lui adressa un regard assez soutenu, avant de reprendre le crayon et le parchemin. Sur quoi il y écrit quelques mots rapidement pour un message au final plus long que les précédents, avant de retourner la feuille vers les yeux de son interlocutrice.

C’était une plaisanterie, ou plutôt un test. Mais désormais, je suis sûr que vous mourrez d’envie de prendre part à ma surveillance. Ne vous gênez pas : être surveillé, c’est ce que je veux. Je vous expliquerai tout demain, si jamais vous venez me trouver. Et ne vous inquiétez pas, vous saurez où me trouver, vous verrez.

Car si tout se passait bien, demain, Howaito serait enfermé quelque-part, sur sa propre demande. Il adressa un nouveau regard, cette fois plus bienveillant à l’égard de la kunoïchi.

« Bref, je ne dois pas trop tarder. Kawaguchi Tsukiko n’est même pas au courant que je suis là. D’ailleurs… vous sauriez m’indiquer où elle vit ? »

Howaito avait parcouru les quelques mots que j'avais griffonné sur le papier mais il s'empressa de poursuivre la discussion naturellement : je fronçais dès lors les sourcils tout en comprenant qu'il voulait meubler la conversation puisque nous étions sur écoute. Il était vrai que des temps morts auraient pu être nuisible même pour moi et je ne tenais pas à ce que mes collègues s'introduisent dans l'établissement pour avoir confirmation de leur doute alors même que ce prétendu Rei avait menacé de me tuer si je bougeais. Je lui répondais donc alors qu'il écrivait sur le morceau de parchemin.

« En effet. Je n'aime pas vraiment me souvenir de l’asservissions de mon clan pour ce traître... »

Lui soutenais-je. S'il était vraiment Kyoshi Rei, je voulais qu'il sache qu'il avait eu mon clan mais pas deux. Il pouvait d'ores et déjà faire une croix sur ma participation à ses plans malsains.
Finalement, le papier m'était retourné et je relevais la tête en fronçant de plus belle les sourcils à son encontre. Il s'agissait donc d'une plaisanterie... Etait-ce hilarant ? Pas vraiment. Avait-il de sincère raisons de me jauger de la sorte ? Probablement. Il semblait vouloir que je m'affaire personnellement à sa surveillance sans que je ne comprennes vraiment pourquoi... Pourquoi voulait-il être surveillé constamment ? Craignait-il pour sa vie ? Voulait-il un moyen de se disculper de quelque chose de plus grave qui pourrait survenir ? Je n'en savais rien mais je savais déjà que sitôt cette entrevue terminée, je m’attellerais à la rédaction d'un rapport complet sur cette rencontre inopinée et intrigante.
Howaito poursuivait son discours mystérieux en m'annonçant que je comprendrais tout le lendemain si je le retrouvais car il me l'expliquerait et que je saurais où le trouver... Bien des énigmes donc. Je n'avais pas vraiment d'autre choix que de faire un tant soit pu confiance à cet homme dont je ne pouvais pas décemment pas ignorer l'appel sous-jacent. Si la menace, quelle qu'elle soit, était réelle, il me fallait réagir et prendre des mesures pour la sécurité du village. J'allais en informer mon supérieur et demander expressément la charge de ce dossier, m'assurant de gérer cette affaire dans sa globalité et n'hésitant pas pas à demander des renforts si nécessaire.

Finalement, l'homme m'adressa un regard bien plus chaleureux tout en me parlant une nouvelle fois de Tsukiko tout en me disant qu'il ne devait pas traîner et que la Kawaguchi n'était pas encore mise au courant de sa présence entre ces murs. Je me demandais quelle genre de relation ils entretenaient. Cependant, je l'avisais d'un air neutre pour répondre à sa question :

« Je ne suis pas tenue de vous indiquer cette information : vous saurez la trouver sans moi. »

Je n'avais surtout aucune envie de lui indiquer son logement. Il me parlait d'une surveillance rapprochée et voilà qu'ensuite il me demandait où habitait mon amie ?! C'était hors de question que je lui offre le moindre renseignement à ce sujet.
Je me redressais dès lors, saluant l'homme avant de lui adresser de dernières paroles qui sonnaient comme une entrevue habituelle et qui sauraient convaincre mes collègues espions à l'extérieur.

« Ravie d'avoir partagé cette discussion avec vous, aussi brève soit-elle, mais le devoir m'appelle. »

J'attrapais le morceau de papier et y écrivais simplement :

Soyez assuré que je tiendrais mes engagements à votre égards.

Là dessus, je quittais l'endroit, laissant à l'homme le libre loisir de payée ma consommation qu'il m'avait offerte selon ses propres mots.
Toute cette histoire était étrange... Je devais m'empresser de faire un rapport et de suivre mes motivations sur cet homme avant de me mêler à sa surveillance constante.