Quelques jours avaient passé. Depuis la tenue du Conseil. Tsukiyo Koémi, la benjamine du Conseil, avait eu l’occasion de suivre les dossiers dont je l’avais chargée. Elle avait dû travailler intensément auprès de chaque chef de clan histoire d’apporter une réponse commune à l’épineuse question de la sécurité. Un sujet sur lequel chaque Kage se devait d’insister. Je n’allais pas déroger à la règle. Même si je ne mettrais pas totalement la main à la patte, il allait de mon devoir de conceptualiser ou de faire conceptualiser les meilleures défenses possible pour le village. J’avais opté pour l’option 2, laissant ce lourd fardeau aux mains des chefs de clans. Et la benjamine coordonnait ces travaux. Quant à moi, je veillerai au grain et j’apposerai mon sceau final à ce projet colossal : mon approbation ou alors un renvoi aux chefs de clan afin que les différents apports et idées soient affinés.

Aujourd’hui, Koémi devait me rencontrer. J’espérais que ce serait entre autres pour ce sujet me tenant à cœur, même si je ne doutais pas un instant qu’elle aborderait à nouveau cette question de l’unité externe. La légion étrangère selon ses propres mots. Une unité qui serait composée d’étrangers ayant foi en l’idéal kumojin. Je haussais un sourcil à cette pensée. L’idée de base pouvait être affinée certes, améliorer au point d’être épurée de toute chose inutile. J’espérais que Koémi le ferait. En serait-elle capable ? Il fallait espérer pour la mise en œuvre de ce projet. Car face à ses idées, j’opposerai la cohésion de Kumo ainsi que son prestige. J’opposerai certainement un zeste de fierté notamment si elle devait aborder certaines pistes que je juge d’ores et déjà hasardeuses.

Être un chef mène à faire face à des situations complexes appelant à des décisions immédiates dont l’impact ne peut être mesuré réellement dans le présent. Mais un chef doit pouvoir faire face à ses convictions profondes et décider ce qu’il croit être le mieux pour ceux qu’il dirige. J’espérais que face aux idées de la Tsukiyo, j’aurais assez de recul sur le moment pour trancher dans le vif et de la meilleure manière possible.

On toquait. Je demandais à la personne d’entrer. Tsukiyo Koémi se présentait à moi avec un lourd dossier et ce que je considérais, du premier coup d’œil, être une sorte de synthèse du premier document. Elle me saluait. Je lui répondais avant de la voir poser son lourd colis sur ma table. Je jetais un dernier coup d’œil dessus, bien déterminer à tout lire dans le détails. Je l'invitais à prendre place, puis je la questionnais amicalement :

« Comment se porte la benjamine du Conseil ? Tu parviens à supporter la charge de travail ? »

Oui, car au-delà de son clan et des nombreux problèmes auxquels elle avait dû faire face, voilà cette Chuunin devenue membre du Conseil de Kumo avant même d’avoir quinze ans. Peut-être lui en demandais-je trop ? À son âge, j’étais encore à l’académie à parfaire ma maître de mes dons héréditaires. Ma nature Seki s’était révélée si tardivement et pourtant, je parvenais à exprimer à la quasi perfection mon pouvoir. Comme quoi les destins sont différents. Chacun sa route !

Koémi était déjà repartie me laissant avec de la lecture. Abondamment. Je soupirais avant de prendre le résumé qu’elle m’avait laissé ; bien conscient qu’elle ne tarderait pas à revenir. Je m’attaquais aux premières pages. Une rapide présentation des clans au sein de Kumo et leurs particularités, le tout, en lien bien entendu avec leurs possibilités d’actions pour la défense de Kumo. Je continuais à parcourir les pages avec grand intérêt, m’arrêtant sur les passages que je jugeais fort intéressants, les surlignant au besoin. La quasi-totalité des informations compilées étaient connues de moi, mais l’enchevêtrement des aptitudes des uns et des autres clans par rapport à ce qu’ils pouvaient apporter était pas mal intéressant.

Je passais à la partie suivante. Celle-ci exposait, chapitre après chapitre, les plans de protection du village avec l’apport de chacun des clans. La première page concernait la détection. Le tout était expliqué en détail. Le système actuel bonifié par Seki Hasaki sous l’ère du Yondaime, l’était à nouveau. Fortifié, la détection par chakra allait être renforcée par l’apport des clans Hakushi et Dentô. Chacun d’eux avait sa pierre à porter à l’édifice. Je tournais les pages. Tout était bien expliqué, bien synthétisé. Le savoir-faire de nos artisans allait nous permettre de mettre sur pied tout ce dont nous avions besoin.

J’avais quelques décisions à prendre par rapport à tout ceci. Déjà mieux équiper la tour principale portant le siège des activités de détections, puis la banaliser. Ensuite revoir les défenses du village et les améliorer. La troisième idée, allait également être matérialisée. Au-delà des services secrets peu connus des villageois, je comptais créer une unité, tout aussi secrète qui serait connue des seuls membres du Conseil et du Daimyo. Une unité chargée des tâches que les membres du Satoru ne pourraient endosser officiellement. J’avais déjà une idée du nom. Ce nom me paraissait d’ailleurs tout à fait adéquat.

Alors que je continuais à prendre connaissance du résumé du système de protection produit par les différents chefs de clans du village et synthétisé par Koémi, je l’entendais revenir. Je me levais et lui ouvrais la porte lui laissant la latitude d’entrer avec son plateau et son thé. En revoyant le breuvage, je repensais à Hasaki qui m’avait demandé de m’équiper en la matière ; chose que je n’avais toujours pas faite. J’étais bien trop absorbé dans les dossiers.

« J’ai commencé à parcourir le résumé de l’amélioration du système de protection du village. Vous avez bien travaillé les chefs de clan et toi… »

Je posais un regard sur son thé. J’essayais de voir s’il y avait de la menthe dans ce qu’elle proposait.

« Un thé à la menthe pour moi, sinon je prendrais ce qu’il y a. »

Je faisais mine de me plonger dans ma lecture alors que déjà, trottait dans ma tête la raison pour laquelle j’imaginais que Koémi était venue me voir. Au delà du dépôt de ce rapport bien entendu. Je sais qu’au-delà de cette tâche que je lui avais confié, l’idée de groupe dont elle m’avait parlé au Conseil allait revenir sur le tapis. Je n’étais pas très emballé, à vrai dire, par ce projet, mais j’étais disposé à l’écouter. Je relevais la tête.

« Alors et le projet dont tu parlais lors du Conseil. Où en es-tu ? »

J’attendais. A elle désormais de m’expliquer le fruit de sa réflexion. Je trancherai par rapport à ce qu’il y aurait de mieux pour Kumo et conformément à mes projets pour le village.

Je m’adossais au dossier de mon siège tandis que Koémi passait aux « aveux ». Je sentais qu’elle avait mieux structuré son idée. Elle y avait profondément réfléchi et le concept du Scorpion se déroulait naturellement ; les mots sortants de sa bouche comme s’il lui avait fallu parler d’un sujet la passionnant. C’était d’ailleurs le cas, car ce projet, elle y croyait. Je le sentais. Je croisais les mains, posées sur la table, devant moi. Sans l’interrompre nullement, même pendant ses courtes pauses bruissants de paroles, j’attendais que la machine se relance d’elle-même. Mes propres silences, pour le moment n’étaient qu’une invite à aller de l’avant ; à en dire plus. Même si je notais quelques petits points à modifier ci et là, je restais concentré sur son propos.

Ce n’est que lorsque je compris, au rythme de sa respiration qu’elle avait fini de vider son sac, que je décroisais les bras, les posais sur la table, m’appuyais dessus pour me lever. Ma grande taille devait subitement paraître imposante, surtout face à elle qui était encore si jeune, quoique shinobi pleine de cran. Je marchais vers la fenêtre, bras croisés dans le dos. L’heure était venue de trancher dans le vif. Mais je pouvais m’accorder un moment supplémentaire de réflexion, même si, je dois l’avouer, j’avais déjà pas mal tourné dans tous les sens cette idée lorsque Koémi en avait fait part au Conseil. Au départ, tout ceci me révulsait à vrai dire. Car je suis comme qui dirait… Un homme qui aime un certain ordre apparent. Les forces kumojins devaient être épurées de tout ce qui ne leur fait pas honneur. Plus de shinobis démotivés, plus de shinobis sous-entrainés, inaptes ou de seconde zone. Ils devaient faire le travail attendu : protéger Kaminari et les pays alliés. Pour Kaminari, j’étais assez intransigeant sur l’affaire. Une question de prestige. Les puissants ont leurs lubies… Comprenez.

Je portais ma main au menton que je caressais par deux fois puis je me tournais vers Koémi.

« Je suis d’accord sur le principe. Mais… Les membres de cette unité seront astreints à 1 an et demi de service plein au sein de cette unité basée hors du village. Pendant cette année de service, les bases des valeurs kumojines leur seront inculquées : Soumission au Daimyo, au Raikage ; respect de la hiérarchie militaire kumojine, loyauté et fidélité au village et à ses membres. Ils seront soumis aux mêmes règles que les kumojins et devront respecter le secret des missions et sur toutes les affaires concernant le village. Le Scorpion sera chargée de la protection des populations de Kaminari no Kuni hors la ville où demeure le Daimyo, Kumo bien entendu, et la zone minière de Gashadokuro. Cette unité pourrait aussi être déployée pour des activités hors du pays quand je le déciderai. »

Je la regardais et essayait de deviner dans quel état d’esprit elle se trouvait.

« Tu me transmettras la liste des hommes et femmes que tu comptes intégrer dans cette unité. Je ne veux aucun shinobi de Kumo à l’intérieur. Strictement aucun, hormis un adjoint de ton choix parmi les Chuunins ou Genin de valeur. Les instructeurs qui viendront t’appuyer séjourneront, au sein de la future base, juste le temps de former les membres de cette unité. »

Je la regardais. Probablement qu’elle trouverait tout cela sévère, mais moi, je me devais d’assurer l’avenir du village, sa sécurité et le bien-être des populations de Kaminari no Kuni au sens large. Laisser des étrangers, qui qu’ils soient, séjourner dans le village en tant que force annexe… Non. Impossible. A Kumo seuls devaient résider les kumojins en lesquels l’ont pouvait faire confiance.

« Es-tu OK avec mes suggestions Koémi ? »

En réalité, elle et moi avions bien compris que c’était bien plus que de simples suggestions. Mais par simple courtoisie vis-à-vis d’elle. Maintenant, rester à voir ce qu’elle pensait de tout ceci.