Tout paraissait si calme, si apaisant. Cette douce brise qui venait vous caresser le visage, cet oubli total de vous même, absorbé par un silence éternel. Aucun mouvement, statique comme une statue notre protagoniste se trouvait au bord de la falaise, il observait le vide comme on observe un homme qu'on ne connait pas. C'était tout nouveau pour lui cette sensation, cette impression de n'être qu'une fourmi dans ce monde, ne pas se sentir important, c'est à dire n'être qu'un errant que personne ne reconnaît. Dans le fond, c'était comme des vacances loin du Shûkaï, mais sans billet de retour. Du moins ... Pour l'instant. Installé là tel un piquet, l'horizon semblait si loin, le sol en contre bas si proche, sauter pourrait régler peut-être beaucoup de soucis, mais à quoi bon ? Une voix lui disait de ne pas le faire, une autre lui inspirait la délivrance par cette dernière chute. Il n'y avait rien autour de lui, les montagnes de Kumo dévoilaient leur plus beaux paysages sous les yeux ébahies de notre protagoniste. Shio paraissait totalement vide de toute émotions, on aurait même dit une sorte de mort-vivant, un corps qui permet de vivre, mais une énorme qui s'éteint ...

Voilà quelques jours que le Kaguya avait achevé sa formation de Samuraï, il était désormais bien agueri et sa maitrise du Katana était incroyable, si bien qu'il se battait avec deux armes à la fois. Mais, comment cela pourrait-il être possible en si peu de temps d'acquérir une telle puissance ? Surement grâce à un bon maître et pour le coup le sien fut dès plus particulier et inattendu. Cependant ce n'était pas le sujet, il y avait bien plus grave, la remise en question de notre protagoniste, sur lui même, sur son avenir et ce qu'il comptait faire par la suite. Maintenant, il était seul une fois de plus et à qui pouvait-il parler ? Il n'avait personne pour se confier, personne à qui parler, avec qui rire ou même se battre. L'ensemble de ses amis étaient disparus ou considérés comme mort et son amour de toujours ... Il l'avait lui même emprisonné. Alors à quoi bon vivre désormais, à quoi bon se battre si tout s'écroule, il n'était qu'un Kaguya sans pouvoir en recherche d'une issue de secours, mais elles semblaient toutes condamnées. C'est ainsi que par cette brise, cette bourrasque qui commençait à se faire plus sérieuse, une folle envie de sauter se fit ressentir. Ouvrir les bras, sentir l'air contre soi, le plus important c'est l’atterrissage déjà ? Il allait bien voir ça, du moins c'est ce qu'il se disait au fond de lui.

Il ne le fit pas, il ne sauta pas. Manque de courage, peur de mourir ? Et si, il avait une revanche à prendre sur ce monde ? Et si c'était le moment pour lui de réaliser tout ses projets ? Et si sauter ne servait à rien si ce n'est perdre son temps ? Notre homme prit alors son sabre en main et le mit devant moi. Il était d'un noir très sombre, assez fin, même très, c'était une belle lame qu'il avait là. L'autre à sa ceinture était d'un blanc très pur, le bien et le mal comme certains pourraient le penser. Et bien non ... Car pour la logique, les deux servaient à faire du mal, aucune lames ne servaient à faire le bien, ce n'était que mensonge. C'est alors que Shio se mit à faire quelques mouvements, il passa la lame devant lui par une belle rotation du poignet, puis mit des grands coups de lames précis et rapides dans le vent, comme pour le découper, comme pour casser les règles établies. Il défiait la nature. Pensant être seul il continuait ce rituel qui pourrait paraître stupide, mais un homme aguerrit aurait comprit ce qu'il essayait de faire.

- Qui es-tu ?

Les sens de notre homme venait de l'alerter il y avait quelqu'un qui se trouvait non loin de là, une quinzaine de mètres. La concentration de Shio l'avait empêché de le sentir plus tôt, incroyable comment il perdait peu à peu de ses dons. Il fallait qu'il se remette à l'entraînement et vite, car pour le coup si c'était un ennemi la suite pourrait s'annoncer complexe ...

Toujours face à cet homme qui paraissait si calme, lui aussi avait ce quelque chose en lui, il n'y avait pas d'animosité dans sa voix, simplement de la mise en garde. Il désirait savoir ce que Shio faisait là, cela aurait été drôle de lui annoncer qu'il avait envie de mettre fin à sa vie, mais il valait mieux ne pas brusquer sa nouvelle rencontre tout de suite. Et puis après tout, il n'avait pas sauté c'est qu'il y avait une raison. Alors, comment décrire l'homme qu'il avait devant lui ? Et bien assez jeune, les cheveux blonds, un bob dès plus horrible vicé sur la tête et ce regard, assez fourbe et pourtant il paraissait honnête. C'était tout un paradoxe à lui tout seul celui là, bref en tout cas cela fit bien rire notre protagoniste - dans son fort intérieur bien sûr -. Se penchant légèrement, car il était un poil plus grand que lui, le Kaguya joignit ses mains et se baissa par signe de respect. 'est à ce moment qu'on sentait son passage chez les moines de Kiezan, il avait cette notion de respect, ce sang froid qu'il ne possédait pas par le passé. Alors que là, il était prêt à faire des sacrifices, pour ne pas le découper.

En fait Shio avait changé, peut-être en bien, certains diront qu'il s'est assagi, d'autre qu'il n'est plus bon pour la guerre. Mais, l'erreur était là. Il était bien plus puissant que par le passé, il savait juste comment dissimulé sa force désormais. Et une question restait importante ... Jouait-il un rôle ? N'était-il pas un homme qui se faisait passer pour ce qu'il n'était pas, allez savoir. En tout cas, il restait toujours là face à son interlocuteur, qu'allait-il se passer maintenant ? Il valait mieux pour notre homme qu'il se présente et s'explique sur sa venue dans ces montagnes, cela éviterait un conflit, la violence n'était plus vraiment au goût du jour pour le Kaguya. Ou plutôt qu'il n'avait pas envie de se battre pour rien, surtout en ce moment ... Regardant l'homme dans les yeux il essaya de paraître le plus sincère possible, car là, il allait dire la vérité. Son interlocuteur allait juger s'il disait vrai ou non, dans le pire des cas, les lames savaient parler de temps en temps :

- Je me nomme Kaguya Shio, je suis venu dans vos montagnes pour trouver un paysage de paix, de quoi me ressourcer. Tu n'as jamais eut ce sentiment ? Ce besoin d'être seul, face à soi-même ...

Voilà, au moins c'était dit et maintenant il ne restait plus qu'à l'homme de le croire ou non. Dans tout les cas Shio était là et ne comptait pas partir de si tôt. Le paysage était bien trop beau, le cadre était parfait, le vent qui caressait sa joue semblait le bercer. C'était un moment qu'il appréciait, un lieu qu'il respectait et donc le bon endroit pour se ressourcer. Son regard se porta alors sur la lame de son interlocuteur, lui aussi serait un manieur de sabre ? Allez savoir ... Surtout qu'à Kumo se trouve désormais une grande partie des Samuraï, de quoi se poser de nombreuses questions. Et si dans le fond il était tombé sur la bonne personne ? C'était peut-être le moment d'en apprendre plus sur l'homme qui se trouvait face à lui, car dans le fond il ne savait rien sur cet homme, allez il se lance !

- Et toi ? Tu t'appelles comment ? Et puis c'est rare de croiser quelqu'un dans les montagnes, qu'es-tu venu chercher ici ?

Les mots étaient prononcés, les questions posées. Maintenant c'était à l'homme de parler surtout que Shio avait horreur des monologues, espérons que celui-ci se montre bavard, étrangement le Kaguya avait envie de parler. Qui sait, c'était peut-être l'occasion de faire une connaissance, voir même un ami.

Il n'aimait pas être seul ? Pourtant il l'était actuellement et comment ne pouvait-il pas accepter la solitude ? C'était bien d'être seul de temps à autre, en tout cas Shio ne comprenait pas ce jeune homme, du moins pas encore. Il avait du mal à le cerner, surtout que rares sont les samouraï qui se déplacent en bande, il y en avait bien quelques un par le passé, d'ailleurs le Kaguya s'en souviens ... L'espace d'un instant il chercha pendant un moment le nom de ce Samouraï ou plutôt de ce groupe de mercenaire, il n'avait pas aimé leur groupe. Ils étaient bien trop sur d'eux, hautain et surtout ... Ils n'avaient pas vraiment de coeur et ne respectaient en aucun cas le Bushido. En bref c'était des minables que notre homme espérait ne pas recroiser, sous peine de devoir leur couper la tête. Notre protagoniste porta alors un bref coup d'oeil à son interlocuteur, celui-ci était en train de faire quelques mouvements avec son Katana, impressionnant, au moins les deux hommes avaient déjà un bon point commun. Notre homme prit soin alors de prendre la parole l'espace d'un instant, toujours d'une voix aussi calme : :

- Attention, souvent quand tu es trop entouré tu finis par être vite déçu, crois moi si je suis là c'est que beaucoup de personnes m'ont poussé à suivre ce chemin ...

Regardant son interlocuteur, ce fameux Eiko il semblait être un jeune samouraï son niveau ne devait pas être élevé pour le moment et pourtant il avait reproduit presque les mêmes geste que notre homme. C'était incroyable pour un néophyte comme lui. Mais, Shio avait envie de voir plus loin, de montrer lui aussi de quoi il était capable, souvent les samouraïs se montrent le respect de cette manière. Le Kaguya plongea alors son regard dans les yeux de son interlocuteur, sa voix était un peu plus sérieuse cette fois, même le ton était monté, non pas pour faire peur, mais pour montrer une certaine assurance :

- Je vois que tu manipules bien le sabre, mais laisse moi te montrer quelque chose ...

Faisant un bon en arrière le Kaguya fit face à plusieurs rochers hauts de plusieurs mètres, ces derniers constituaient un bon bloc. Notre homme dégaina alors ses deux sabres, d'un seul coup il fit une rotation de son corps, tel une toupie et un geste brusque avec ses Katanas. D'un seul coup deux lames d'air en sortirent, la vitesse était prodigieuse comme la violence du coup. Le choc fut terrible et la pierre vola en éclats dans de grand fracas, il avait frappé fort et il en était conscient, il était temps pour lui de se calmer. Rangeant ses sabres comme si de rien n'était il se tourna vers Eiko et continua la discussion :

- Les maîtres m'ont beaucoup apprit, c'est à moi de transmettre leur savoir désormais. Toi qui connais les règles, toi qui connais notre code dis moi ce qu'un Samouraï se doit d'être dans un monde où le respect se perd ?

Aallait-il comprendre la question ou même le sens des mots de notre homme ? Shio ne le savait pas, mais dans le fond il s'en fichait, il jaugeait simplement la capacité de réflexion de son interlocuteur. Un bon samouraï n'est pas seulement fort, mais il réfléchit avec discernement et sait répondre à ce genre de questions. Eiko était maintenant au centre de l'attention, c'est lui qui déciderait de la suite de la conversation ...