- Les nomades sont de retour.
- Ils auraient de nouveaux produits!
- Ils resteraient une petite semaine.
- Ils habiteraient dans le désert, établir un campement là-bas. Il semblerait qu'ils ne feraient plus confiance à la sécurité de Suna ...
- Ils ont bien raison.

Les habitants de Suna étaient habitués à la visite de ces nomades marchands. Ils vendaient souvent des produits que les dirigeants davantage tournés vers le militaire oubliaient. Par exemple, c'était des tissus, des bijoux, des parfums. Il y avait également des marchands qui amenaient quelques bêtes bonnes en chair. Enfin, si pour eux nomades rimaient avec achat de produits exotiques, pour Tsukiko, c'était avant tout soirée exotique et magique.

Certes, Suna était peut-être en danger mais ces derniers temps, le village semblait paisible. Enfin, elle avait envie de revoir certains nomades avec qui elle avait pu lier des amitiés, et qui la tenait au courant de ce qui se passait dans le désert et aux frontières, lui offrant de temps en temps des histoires merveilleuses.

La soirée avait avancé et sans plus tarder, elle quitta Suna dans ses plus beaux "atours" pour se rendre près du plus "grands" Oasis des abords de Suna. Avant même de s'y rendre, elle voyait au loin les lumières et les ombres se mouvoir. Elle entendait également les rires. Ses pas s'accélèrent pour finir par courir jusqu'au campement.

On la reconnut bien vite - chose non difficile avec sa chevelure originale - et déjà les enfants ou les jeunes s'attelaient autour d'elle pour lui demander de ses nouvelles ou raconter les derniers "exploits". Elle souriait, elle rigolait, elle discutait, elle répondait ... Elle se sentait bien.

- Mes enfants, mes enfants ... asseyez-vous autour de ce feu. J'ai des choses à dire. Aussitôt les nomades s'assirent en rond tout autour du grand feu allumé pour l'occasion. Je suis tant heureux de nous voir tout ensemble, réuni, encore une fois. La journée a été très fructueuse malgré le climat de peur qui règne autour de ce monde ...

Et il continua à parler longuement, dérivant petit à petit sur une histoire, pour finalement clôturer sur une petite leçon de moral. Cependant, à peine avait-il fini de parler que déjà les festivités commençaient. Certains jeunes comme vieux jouaient d'instruments extrêmement basiques - petit tambour avec clochette ... -, les danses collectives se mettaient place et les petits chants s'ensuivirent rapidement, reprises en chœur par tout le monde.

Tsukiko tournait et tournoyait, riant à gorge déployée ou encore en chantant. Elle finit par se détacher du groupe pour danser d'elle-même. Tant de bruits et tant de chants attiraient forcément deux ou trois curieux. Ces derniers étaient accueillis chaleureusement par les nomades, tantôt on offrait à manger, tantôt à boire. Effectivement, si les "ventes" étaient bonnes, ils se savaient montrer très chaleureux. Cependant, même si les "ventes" étaient mauvaises, ils restaient toujours chaleureux ... en offrant un peu moins en quantité.

Cependant, l'un attira l'attention de la jeune Kawaguchi. Elle arrêta totalement de tournoyer, de danser ou de chanter, et fixa avec étonnement l'un des inconnus. Elle avait l'impression de connaître l'un mais ... c'était bien trop impossible. C'était un visage du passé, un visage qui devrait être loin, très loin de la chaleur et de l'aridité du désert. Un visage qu'elle n'avait pas espéré revoir ...

Avait-elle exagéré avec la fumée fruitée des nomades ?

"Non. Il est toujours là ... C'est ... lui" finit-elle par comprendre.

Sans tarder, elle poussa les deux ou trois nomades qui la gênaient et sauta sans aucune honte au cou du nouvel arrivant à la chevelure blanche.

- Kohei ! dit-elle, ou plutôt hurle-t-elle avant de s'étouffer, sanglotant et pleurant ... de joie. Littéralement. C'est toi .. je n'arrive pas à le croire. C'est moi ... Tsuki. Tsukiko ... Tu te ... souviens ? finit-elle par dire en se décollant un tantinet du cou du jeune homme.

Elle ne s'en sépara pour autant. Elle avait l'impression qu'il allait fuir à tout moment.

Elle était heureuse ... heureuse de revoir son cousin.

Une fête. Entre autre. Notre petit voyage avait continué pendant plusieurs jours, après avoir eu notre lot de rencontres. Des bonnes, et des mauvaises. Quoiqu’il en soit, ce voyage dans le désert a été très instructif pour nous. Surtout pour moi, moi qui n’était rarement sorti autant de temps de Konoha, ou du Pays du Feu. Je découvrais de nouveaux horizons, de nouvelles cultures… une nouvelle vie ? Oui, c’était bien ça. Une nouvelle vie. Bien plus plaisante que celle que je vivais autrefois… si seulement je m’en étais rendu compte plus tôt.

Une des plus grandes puissances de ce monde était à nos trousses, et peut-être une seconde selon le développement des relations entre le feu et la foudre. Et pourtant, depuis que nous étions dans ce nouveau pays… je n’avais plus aucune nouvelle de la Feuille. J’avais réussi à les semer. Bien que constamment sur mes gardes, je pouvais relâcher la pression. De temps à autre… comme cette soirée.

D’ailleurs, parlons-en de cette soirée. Je n’en savais pas grand-chose à vrai dire… Non loin de Suna, il y avait un grand oasis qui avait attiré toute mon attention : il n’était pas désert, du moins, pas ce soir là… l’ambiance était festive. Curieux, je m’y suis rendu…

Des chants, des danses. Une musique d’ambiance forte agréable, jouée par des musiciens en tout genre. Des stands de vente, ou de services. Des enfants qui jouaient, et courraient dans tous les sens. De la joie, du partage, de l’ambiance… Du pur plaisir. Une fillette m’attrapa la main, m’incitant à la suivre. Sans un mot, je me fiais à son sourire innocent, et enfantin. D’autres enfants arrivèrent à leur tour, pour me mener devant une femme, qui d’un seul coup d’oeil, compris ma situation.

Oh ! Vous n’êtes pas du coin, je me trompe ?

Acquiesçant d’un simple mouvement de tête, lui rendant son sourire, j’attendais de comprendre ce qui m’arrivait.

Venez, une petite coupe de la région ne vous fera pas de mal ! C’est la maison qui offre ce soir !

Oh… une coiffeuse ? Eh ben, il faut dire que ça ne pouvait pas mieux tomber. Mes cheveux avaient poussé depuis ma désertion, et ceux-ci n’étaient pas non plus sous leur meilleur jour… Et puis, tant qu’à être ici… autant profiter.

La séance dura presque une heure. Une nouvelle coupe, à la façon du pays… Conquis. Je passerai presque plus pour un étranger, en plus de cela. Depuis combien de temps n’avais-je pas pris du temps pour moi ? Dur. C’est dur à définir… mais un bon moment tout de même.

Oh ! C’est parfait, merci beaucoup !
Je vous en prie, profitez-bien de votre soirée, les festivités vont bientôt réellement commencer.

Réellement commencer ? Alors nous n’en étions qu’aux prémices de cette soirée ? Vraiment intéressant… je sens que j’allais bien m’amuser. Les quittant après les remerciements, je m’en allai voir la suite.

Une danse collective attira mon attention, dont quelques danseuses qui se démarquaient du lot. Non, il n’y a aucune pensée décalée là-dedans. Et pour une raison qui m’échappait totalement, ce fut l’une d’entre elle qui captiva le plus de mon attention… J’avais la sensation de l’avoir déjà vu quelque part. Les traits de son visage me parlaient… et cela se confirma lorsqu’elle me vit, et qu’elle me fixa également.

Qui était-elle… ? Serait-ce… non ? Sans une once d’hésitation, elle me sauta dessus, s’agrippant à mon cou.

Kohei !

Sa voix… Tsukiko ? Oui, elle le confirma… La voir en larmes… un déchirement. La gorge nouée par l’émotion… jamais je n’aurais pensé la revoir, surtout ici.

Tsuki… Tsukiko…

Je la pris dans mes bras, la serrant contre moi.

Bien entendu que je m’en souviens…

Elle avait changé. Ses cheveux étaient différents, d’une toute autre teinte. Son visage était plus mature… en même temps, nous n’étions que des enfants. Des enfants vivant au Pays du Feu. Elle était ma cousine, et nous avions autrefois souvent l’occasion de nous voir. Sauf qu’elle avait disparu un jour… du jour au lendemain.

Un court instant… puis je posais mes mains sur ses épaules, la fixant. Bouleversé…

Où étais-tu passée… ? Raconte moi. Je ne pensais pas te revoir un jour...

Elle ne pouvait que l’encourager de la prendre dans ses bras et le montrait bien en le serrant toujours plus fort. Il était bel et bien réel, en chair et en os, et dans ses bras. C’était vraiment son cousin et non un stupide sosie ou un trompeur mirage.

- Où étais-tu passée… ? raconte-moi. Je ne pensais pas te revoir un jour….

La question posée par surpris Tsukiko au plus haut point.

- Comment cela où je suis passée ? J’ai toujours été à Suna, auprès de mon père … Je vous ai écrit des lettres...

… Des lettres auxquelles personne n’avait répondu.

Elle l’observa avec incompréhension, tentant de comprendre s’il était sincère dans ses propos ou s’il se donnait un genre pour ne pas avouer sa faute de ne pas avoir répondu. Les années pouvaient passer, les visages pouvaient changer mais les habitudes restaient. Il ne mentait en rien et était tout aussi surpris qu’elle de la voir là.

Pourquoi était-il aussi surpris ? Parce qu’il n’avait pas reçu ses lettres. Pourquoi ne les avait-il pas reçus ? Parce que quelqu’un a dû les intercepter. Elle avait envoyé une centaine de lettres et il était impensable que tous se soient perdus ! Il y avait anguille sous roche.

- Mes lettres ont dû s’égarer. Ce n’est guère important. Eh bien … J’ai tant à raconter, et tu as tant à me raconter. Comment va ma tante ? Et ton père ? Et Konoha ? Ca fait environ cinq ans que je suis là, que j’ai quitté Konoha, et j’avoue que j’ai des nouvelles toujours tardivement. C’est presque frustrant ! Et puis … toi, dis-moi ce que tu es devenu. Tu as … tant grandi. Je veux dire, on avait la même taille il y a quelques années, et là tu me dépasses presque d’une tête. Et puis … si tu n’es pas venu me voir, que fais-tu au milieu du désert ?

Elle parlait avec un débit trop rapide. Si sa voix était entraînante au départ, elle s’éteignait crescendo. Elle s’arrêta quelques instants pour encore observer ce visage et puis tout le reste.

Ils étaient encore debout.

Elle fourra son bras dans celui de Kohei pour le traîner dans un lieu calme, un lieu où les adultes et personnes âgées avaient élu domicile. Quelques petites tables rondes basses de fortune étaient disposées là avec un narguilé pour chacun. Tsukiko fit asseoir son cousin autour d’une table vide, et lui tendit aussitôt ce tube d’où émanait une petite fumée fruitée.

- Ce n’est pas addictif, ni toxique, ni dangereux. Testé et prouvé par les nomades, conclut-elle avec un clin d’œil. Je sens qu’on aura une longue nuit et je préfère qu’on la passe dans une bonne ambiance. Après … après … tu …

Pouvait-elle l’héberger chez Kibo ? Actuellement, il n’était pas là, et certes elle avait la politique de n’inviter personne dans la demeure du coéquipier. Cependant, Kohei n’était pas « personne ». C’était son cousin, sa famille, presque un frère de sang.

- Tu viens dormir chez moi, je ne te laisserai pas partir comme ça, aussi facilement. Je commence, tu commences ? demanda-t-elle et attendit quelques secondes. Je vais commencer, c’est toujours comme ça qu’on a fait.

Tsukiko avait toujours été l’ainée qui sermonnait les petits lorsqu’ils voulaient faire une bêtise, ou encore l’aînée apeurée des conséquences de tel ou tel acte puéril. Autant dire, elle avait toujours été celle qui prend la parole en tout premier.

- Je n’arrive même pas à me concentrer, je suis … tellement heureuse. Je … n’arrive pas à le croire. Hyo Kohei, mon cousin, ici, à Kaze même ?

Elle avait tenté d’être heureuse, tenté de paraître énergique mais un flot de souvenirs remontait, et le tout entrainait des sentiments extrêmement forts. Sans pouvoir se maîtriser davantage, elle enlaça encore ce cousin pour enfouir sa tête dans le cou et pleurer tous les larmes de son corps. Toutes ces années de solitude et de galère à Suna lui revinrent à son esprit et s’entrechoquaient avec ses années comblées par les rires d’enfant de Kohei et de sa sœur. Toutes les phrases piquantes de la belle-mère ou le silence du père entraient en conflit avec le sourire bienveillant de la tante et les phrases encourageantes du mari de la dernière.

Elle avait retrouvé un membre de sa famille, un « vrai ». Un membre auprès de qui elle pourrait pleurer pleinement et sans aucune honte, un membre auprès de qui elle pourrait se confier sans craindre une quelconque représailles. Le regret, le chagrin, la solitude, les fatigues, les échecs… tout s’accumula au fur et à mesure et explosa en travers de larmes.

- Vous m’avez manqué. Tu m’as manqué. Toutes ces années, je n’ai rien reçu de vous. Je n’ai rien su de vous. Pourquoi ne pas m’avoir rendu visite ? Je ne pouvais pas venir mais vous, si. Pourquoi… J’ai cru être oublié. Mais je ne vous ai pas oublié.

Et elle pleura longuement, se fichant des regards, se fichant de savoir si son cousin était à l’aise ou pas. Cette odeur, cette chaleur, cette présence … une sensation familière qui lui avait tant manqué, une absence qui avait formé un énième gouffre dans son cœur et une énième incertitude. Cependant, ce soir, elle n’était plus seule. Elle n’était plus oubliée. Ce gouffre se comblait : plus elle pleurait, et plus elle se redécouvrait une énergie nouvelle.

Home sweet home.
Rien ne vaut la maison.

Rien ne valait la famille et les vrais amis. Et ce soir, elle en comprenait et sentait toute l’ampleur.

Des lettres... pourquoi ? Pourquoi je n’ai jamais rien reçu de tel ? Mes parents ? Est-ce que ça serait eux qui m’aurait tenu à l’écart ? Pour quelle raison ? Peut-être pour éviter de me rapprocher d’un autre village que la Feuille... après tout, ça leur irait bien. Surtout toi, Père. Il serait capable d’avoir manigancé tout ça, et intercepter chacune des lettres de Tsukiko. Était-il horrible au point de faire ça ? … Oui, bien sûr que oui. C’était tout à fait son genre d’agir de la sorte.

Désolé Tsukiko... je n’ai jamais reçu tes lettres. Peut-être Père qui... a tenu à m’éloigner de toi, pour ne pas me détourner de Konoha. ‘fin, tu sais comme il est. Ça ne m’étonnerait même pas qu’il soit derrière tout ça, j’en suis désolé. Je ne savais même pas que tu étais à Suna...

Et dire que pendant toutes ses années, jamais elle a eu de mes nouvelles, alors qu’elle a tout fait pour en obtenir. Et moi, je n’ai jamais pu en obtenir, ne sachant pas ce qu’il lui est arrivé. Comment mon père pouvait-il être si horrible envers son fils et sa nièce. N’a t-il vraiment aucun coeur ? C’est ce que je pensais de plus en plus, c’était la seule explication à cela. Cet homme était dénué de toute humanité. J’ai bien fait de m’en défaire, après tout. Le plus compliqué allait être de lui annoncer ça, d’ailleurs.

Elle m’emporta avec elle, me prenant par le bras. Souriant pour l’instant, je la suivis. Il était temps de rattraper le temps perdu, après tout.

Elle nous installa à une table, et m’expliqua brièvement ce qu’était cet engin, à la fumée à l’odeur forte attirante. Non addictif, ni toxique et ni dangereux... intéressant. Quoique l’espace d’une soirée, on aurait pu s’accorder quelques petites folies. Sûrement une spécialité de Kaze no Kuni, je ne connaissais pas du tout ça. Ou alors, je n’ai jamais eu le loisir de découvrir ce simple plaisir de la vie... le plaisir, je ne le connaissais que depuis peu après tout. Que depuis que je suis parti, que je vole de mes propres ailes.

Néanmoins, les choses s’enchaîna vite. Bien trop vite, à tel point qu’elle me plaça dans une situation délicate, ce qui me rappela à l’ordre aussitôt. Il y avait les plaisirs certes, mais actuellement, je ne pouvais pas tout me permettre... la situation était compliquée.

Elle finit par éclater en sanglots, après tout ce temps. Ma gorge était nouée, le coeur déchiré de la voir dans un tel état. C’était dur de voir ça, de l’avoir faite souffrir...

Tsukiko... tu m’as manqué aussi. Si j’avais su que tu étais là, je t’aurais donné des nouvelles. Malheureusement, je ne l’ai jamais appris... j’ai été tenu à l’écart de beaucoup de choses, pour me consacrer à ma formation, sans savoir que tu étais ici. J’aimerais rattraper le temps perdu, et accepter ta proposition...

Malheureusement, on ne fait pas toujours ce que l’on veut. Un soupir s’échappa, alors que je poursuivais.

… mais ce n’est pas possible, désolé. Je ne peux pas me permettre de passer la nuit chez toi, et je devrais me remettre en route bientôt.

Que faire maintenant ? Lui mentir, lui dire la vérité ? Dur choix... mais je ne tenais pas à lui mentir. Elle ne méritait pas ça, pas après tout ce temps.

La dernière fois que j’ai vu mes parents, ils allaient bien oui. Un peu trop pour mon père même, si tu veux tout savoir. Jusqu’au jour où je suis devenu le chef du clan, à sa place. Il n’a jamais digéré ça... mais il a été vengé.

Dur d’aborder le sujet, mais il fallait que je m’y mette. Et lui dire la vérité.

J’ai aussi quitté Konoha, il y a un mois de cela. J’ai déserté le village, pour le plus grand plaisir de mon père. J’étais devenu trop imposant pour lui au final, ironie de la chose. Mais ce n’est pas important ça... ce qui l’est plus, c’est que j’ai été trahi par mon village. J’ai tout fait pour son bien, et j’ai subit, avec d’autres, un retour de flammes conséquent…

Ce n’était pas simple à digérer, ça non plus.

Malgré moi, je suis maintenant un déserteur recherché par Konoha. Un criminel. Et j’ignore pour l’instant si ma tête est mise à prix ailleurs, à cause du Hokage. Tu comprendras donc que je ne peux pas me permettre de te suivre, et que je ne peux pas rester indéfiniment au même endroit.

Je la regardais dans les yeux, la mine dévastée. Voilà ce qu’était devenu ma vie. Mon idéal de voir prosterner Konoha avait été brisé en mille morceaux. Il ne me restait plus que le Shôraizen, ma vraie famille.

Je ne suis pas seul dans ce cas. Il y a aussi mon sensei, qui a été le premier impliqué dans cette affaire. Tu te souviens de lui ? Avant ton départ, je te disais qu’il me faisait la misère... haha. Et pourtant, il est l’une des rares personnes sur qui je puisse compter maintenant. Il y en a d’autres encore... Konoha a été divisé à cause de cette affaire, et nous nous sommes regroupés pour se soutenir. J’ignore combien de temps cette situation va durer. Tant demain... ce sera fini.

Je baissais les yeux vers la table.

Mais bon, te revoir me donne une motivation supplémentaire pour ne pas me laisser abattre. Tu peux pas savoir à quel point je suis heureux de te revoir, de te savoir en vie et en bonne santé... je ne t’ai pas oubliée non plus, ne t’en fais pas. Et maintenant que je te sais là, tu peux être assurée que je ne t’oublierais plus. C’est juste que ça va être... compliqué.

Un sourire un peu forcé sur le visage, alors que je lui tendais ma main sur la table, paume tournée sur le ciel. Malgré tout, j’ai besoin d’elle. Et lorsque je repartirai, je ferai tout pour ne plus la perdre... plus jamais.

Spoiler:

Il déclinait son offre, prétendant qu’il devait se remettre en route. Elle ne put s’empêcher de lui lancer deux grands yeux ronds complètement rougis par les larmes, exprimant toute son incompréhension. Cette « route » était-elle donc plus importante que la « Famille » ? Les années étaient passées mais elle n’avait jamais oublié ses valeurs … cependant, peut-être avait-elle la seule à être resté fidèle à certains idéaux.

Comme si cela n’était pas suffisant, le petit cousin enchaîna sur une annonce des plus surprenantes : chef du clan Hyo. Elle le vit soudainement sous un jour nouveau. Il était un « homme » maintenant et non le simple petit cousin qu’elle pouvait traîné où elle désirait. Effectivement, il avait des obligations – sûrement d’ordre militaire – et elles prédominaient sur une ou deux caprices d’une fille aux cheveux roses.

Elle pensait qu’elle avait eu son lot d’émotions pour la soirée mais il semblerait que non. Kohei acheva définitivement Tsukiko avec une annonce choquante : il avait trahi et déserté Konoha. Elle cligna des yeux à plusieurs reprises, écoutant à peine à moitié tout le reste. Au départ, elle ne voulait pas croire, mettant le verbe « partir » sur une notion temporaire – un voyage diplomatique ou quelque chose dans le genre – et non sur une notion définitive. Malheureusement il confirma ses doutes en se nommant clairement comme un « déserteur ».

Il lui tendit la main mais elle ne s’approcha pas, gardant ses distances, le regardant avec un air horrifié. Finalement, elle finit par s’approcher pour poser ses deux paumes sur le visage de son cousin.

- Kohei ? Est-ce … toi ? Qu’est … ce qui s’est passé ?

Que s’était-il passé à Konoha très récemment pour que son si fidèle cousin abandonne tous ses idéaux pour de toutes nouvelles ? Quel événement l’avait-il incité à trahir son village et sa Famille ? Elle avait abandonné pour la Famille – une famille qui ne le mérite pas malheureusement réflexion faîte.

Elle voulait savoir pour quoi il avait abandonné son passé et ses racines. Et jusqu’à ce qu’elle le sache, jusqu’à ce qu’elle comprenne qui lui faisait face, elle ne le lâcherait pas.

- Je n’aurais pas dû te quitter. J’aurais dû rester, se dit-elle en secouant la tête négativement.

Si elle était restée, peut-être les choses auraient-elles été différentes ? Peut-être que sa proximité avec son cousin – et d’une certaine l’influence qu’elle avait sur lui – aurait pu l’empêcher d’embrasser cette carrière « criminelle » ?

- Peut-être … Tu …. N’aurais pas dû. Un criminel ? Toi ? C’est … impossible. Je dois faire un cauchemar. Ca doit être un cauchemar. Te revoir au milieu du désert est déjà un miracle mais te savoir « déserteur », c’est … impossible. C’est inconcevable.

Elle ne put lancer un regard sur l’ombre de Suna au loin.

- Compliqué ? Je ne vais plus te revoir plutôt, finit-elle par dire d’une petite voix. Suna … a une politique implacable envers les déserteurs.

Elle ne put s’empêcher de penser à son clan. Que se passera-t-il lorsqu’ils apprendront que Hyo Kohei, son seul et unique cousin, est devenu un Nukenin ? Leur soupçon à son égard allait-il à nouveau s’éveiller ? Allaient-ils à nouveau agir comme des ennemis à l’égard de Tsukiko ? Etrangement, à cet instant, tout cela lui était égal.

Tout ce qui l’importait se résumait à la question suivante :

- Qui es-tu ?

Evidemment, ce n'était pas facile d'apprendre ça, pour elle. Et je pouvais comprendre sa réaction... moi aussi, avant, je considérais les déserteurs comme étant la pire des espèces. Et pourtant, voilà à quoi j'en suis réduit. À devenir ce que j'ai autrefois chassé. Maintenant que j'y pense, les précédents avaient peut-être des raisons d'avoir déserté. Je ne l'ai jamais pris en compte, alors que d'autres auraient pu se trouver dans des situations similaires à la mienne. Rien que d'y penser, je sentis mes poils se hérisser. Il n'était pas à exclure que je sois réellement un criminel. Mais pour ce que j'ai fait avant. Il fallait me rattraper...

J'ai tout donné à Konoha, et j'ai été chassé, tout simplement.

Les événements étaient récents, et ne me laissaient absolument pas indifférent. Une plaie encore bien trop longue à se résorber complètement.

Malheureusement non, Tsukiko, ce n'est pas un cauchemar... c'est bien la triste réalité. Je peux comprendre que ce soit dur pour toi...

Et comment. Malgré moi, elle se retrouvait dans une situation délicate. Ce n'était pas mon intention, mais je ne pouvais pas lui cacher la tristé vérité. Je n'étais plus qu'un criminel, aux yeux de la feuille. Certain ont essayé de me poursuivre, mais j'ai su les semer. Ici, à Kaze no Kuni. Combien de temps cette situation allait durer ? Je ne sais pas. Peut-être jusqu'à que toutes les pièces du puzzle se mettront en place, et que je comprendrais le degré d'implication de la Foudre dans cette affaire. Nous n'étions pas sots, après tout. Cette situation n'était pas due au hasard. Cela arrangerait trop Kumo pour que ce ne soit qu'une simple coïncidence. Ils ont gagné cette bataille. Mais pas la guerre. Trouver et faire éclater la vérité allait devenir une priorité, dès à présent.

C'est compréhensible, les déserteurs sont considérés comme des êtres dangereux aux yeux de tous, même des miens avant que cela ne m'arrive. C'est normal que Suna s'en méfie, tout comme les autres. Mais maintenant que je sais où tu es, que tu es là, je saurais garder contact avec toi. Même si ça doit être long... peut-être que lorsque justice sera rendue, je pourrais te voir librement.

Justice rendue... c'est bel et bien ça, après tout. Suite à son autre question, j'eus un rire. Bien que nerveux.

Mon nom est Hyô Kôhei, et je suis ton cousin. Enchanté. Bref, tu m'as compris, je suis toujours la même personne, malgré tout. La seule chose qui a changé sont mes motivations, et mes idéaux... rien de plus. Mon but n'est plus de protéger Konoha et de tout donner pour ce village, mais de défendre la liberté, et de me battre pour cette cause. Ce sentiment de se sentir trahi, rejetté... je ne veux pas que d'autres le ressentent.

Je sais que ce que je dis reste flou, et c'est sûr. Néanmoins, il était encore trop tôt pour annoncer, ou dénoncer quoique ce soit. De ce fait, je ne pouvais pas en savoir plus...

Tsukiko, je ne peux pas te dire ce qu'est la vérité dans cette affaire, parce qu'elle m'échappe encore. Pour l'instant, j'en suis réduit à fuire, chaque jour. C'est peut-être dur pour toi, mais je te demande de me faire confiance... ou du moins, de tout garder pour toi. Je peux te demander cette faveur, cousine ?

Mais ce n'était pas tout. Il y avait quelque chose d'autre que je souhaitais lui dire... ou du moins, l'avertir de quelque chose qui me chagrinait réellement.

Si jamais tu as à faire à elle, méfie toi de la Foudre. Sans elle, je n'en serais pas là.

Tsukiko n’était que des plus perdues. Kohei prétendait que Konoha, la belle, verdoyante et chaleureuse Feuille, l’avait chassé. Il ne cessait de dire qu’il défendait non plus un village mais une liberté. Il disait être son cousin encore et toujours mais avec des idéaux et motivations différentes. Comme si tout ceci ne suffisait, il parlait de la Foudre – qui ne pouvait être que Kumo dans ces circonstances – mettant son état de nukenins sur leur compte.

En une seule nuit, c’était bien trop d’informations. Elle avait des nausées soudaines, des palpitations au niveau de la poitrine, des gouttelettes de sueurs tout le long du corps, une respiration de plus en plus saccadée et une migraine intense. Etait-ce le brouhaha environnant qui semblait s’intensifier de minutes en minutes ? Etait-ce les fumées qui montaient à la cervelle ? Ou alors était-ce une simple panique passagère ?

Tremblante, elle se releva pour se diriger vers la première source d’eau possible, isolée de l’attroupement, et s’aspergea longuement le visage de cette eau fraîche. Entre deux jets d’eau, elle ne cessait d’inspirer et respirer profondément pour se « calmer ».

« Pourquoi ne puis-je pas rêver d’une vie simple, d’une famille simple et d’un métier simple ? Une maman, un papa, des grands parents séniles, des cousins amusants ou chiants … ».

Pourquoi ? Une question qu’elle ne cessait de se répéter et qu’elle ne cesserait de se répéter. Lorsqu’elle sentit la présence de son cousin à ses côtés, un excès de rage – ou de frustration – s’empara d’elle et elle le gifla. A deux reprises. Aussitôt après, à nouveau, elle l’enlaça, le collant à lui, enfonçant sa petite tête dans le creux de ses épaules.

- Je ne dirais rien. Mais je ne resterai pas à ne rien faire. Je veux savoir ce qui s’est passé. Si tu ne me le dis, j’irais voir la Foudre et la Feuille s’il le faut. Je me fiche de ce qui m’arrivera. Je n’ai plus rien à perdre.

A ces mots la figure de certaines personnes s’imposa dans son esprit. Elle avait peut-être à perdre. Elle avait à perdre. Cependant, seule, il ne se passera rien. Personne n’aura mal. Et personne ne regrettera longtemps la disparition de la bâtarde. Le monde continuera à tourner.

- Je veux l’entendre de toi. Et ne me mens pas. Pas toi, s’il te plaît.

Elle avait assez des cachotteries et faux-semblants. Elle espérait plus que jamais que son seul lien du passé accepterait d’être sincère.

- Ce que tu me diras, je ne le dirais à personne. Mais je ne promets pas que je ne dise pas ma relation avec toi. On le saura tôt ou tard, peut-être. Si j’ai à l’annoncer à une autorité, un jour, je dirais que j’ai un cousin déserteur. Mais voilà tout ce que je dirais.

Elle mettra sous silence toutes les autres révélations, quitte à les emporter dans sa tombe. Elle ne révélerait que si elle avait l’assurance d’avoir droit à une toute autre révélation plus juteuse, plus intéressante, plus « cruciale ». Mais voilà la seule raison.

- Tu dis que tu es Hyo Kohei … Toujours. Encore. Mais, ce sont les manières, les us et coutumes, les pensées et les motivations qui font un homme Kohei. Si tu changes cela, tu n’es plus … mon Kohei. Tu es un autre. Je veux savoir qui tu es maintenant.

Elle avait changé.
Il avait changé.

Et plus important …

- Je ne pourrais pas communiquer avec toi. Suna … a une politique de zéro tolérance pour les déserteurs.

Et des rumeurs courraient qu’une alliance allait bientôt se former entre la Feuille et le Sable. Est-ce que cela signifiait « ennemis communs » ? Elle espérait que non. Elle serait incapable de traquer celui qu’elle considérait comme un frère. Entre temps, elle s'en était libérée, se contentant maintenant de le regarder avec un air décidé. Elle ne comptait pas le lâcher sans comprendre, sans savoir.

Ces retrouvailles avec ma cousine était une très bonne nouvelle. Oui, mais... elles sont arrivées au mauvais moment. J’aurais préféré la retrouver dans d’autres circonstances. Sans cette peur d’être retrouvé, chassé, traqué. Sans être en fuite. Sans toute cette histoire. C’était dur pour moi, tout comme c’était dur pour elle. Je ne voulais pas lui mentir, lui cacher la vérité. Tout comme je ne voulais pas l’impliquer dans cette histoire. Et aussi, je voulais tout faire pour préserver notre lien, maintenant que je la savais en vie, à Suna. Et malheureusement, ce n’était pas aussi simple que ça en avait l’air.

Elle tenait à savoir, à comprendre et à m’aider. C’était impossible. Elle disait d’elle même qu’elle irait voir la Feuille et la Foudre. À ces paroles, mon regard s’est obscurci. La mêler à cette histoire ? C’était une pure folie, impensable. Jamais je ne tolérerai qu’il lui arrive quoique ce soit. Cette histoire n’est pas la sienne. Même si elle promettait de garder tout ce que je pouvais lui dire pour elle.

Ne plus être son Kôhei... était-ce le prix nécessaire à sa préservation ? Peut-être. Si je devais devenir un monstre sans coeur ni âme pour l’éloigner de tout danger, je le ferai. Même s’il me fallait mourir. Mon avis ne changea pas sur ce point... d’autant plus qu’elle voulait la vérité. Et dans cette histoire... quelle est la vérité ? Je n’en savais rien moi-même. Tout ce qui s’est tramé dans l’ombre m’est encore inconnu, et ce même aujourd’hui, après tous ces jours de recul sur les évènements. Comment le sort s’est retourné contre nous ? Pourquoi de telles décisions ? Je ne comprenais pas. Peut-être qu’un jour, j’en saurais plus... et là je pourrais lui parler, du moment qu’elle ne s’immisce pas dans cette affaire.

Mon regard se baissa vers la table, les mains jointes sur mon cuir chevelu. Doucement, discrètement, une larme coula sur ma joue, emportant avec elle quelques grains de sable présents sur mon faciès.

Tu as à perdre beaucoup plus que tu ne le penses, comme l’espoir de me revoir un jour, Tsukiko.

Inspirant un grand coup, mon regard se retourna vers elle.

Je ne veux pas te mêler à cette histoire, pas maintenant. Je ne tiens pas à ce que tu te retrouves en danger, par ma faute. Même s’il faut que tu m’en veuilles. Désolé, mais je ne peux pas t’en dire plus...

Je me levais de ma chaise, sans un bruit, la regardant toujours. C’était court... mais nos routes devaient encore se séparer. Mais pas définitivement, je pouvais le lui promettre.

Si tu penses que je ne suis plus ton Kôhei, alors soit. J’ai grandi, enfermé dans mon village, avant d’en être éjecté. J’ai changé, tout comme tout être, tout comme toi même. Tu me demandes la vérité, de ne pas te mentir, sauf que je ne peux pas te l’apporter. Pas encore. Mais lorsque je l’aurais, et que tu ne courras aucun danger, je t’en informerai. Sois-en sûre. Je te demanderai juste une chose : ne te mêle pas de cette histoire, c’est encore trop tôt... et trop dangereux pour toi. Si notre lien devient connu, tu ne seras plus en sécurité, le moment où les recherches sur moi vont s’accélérer. Te mêler à cette histoire est bien la dernière chose que je souhaite... pour ton bien, pour le nôtre.

Me revêtant de ma veste, et du sac que je me trimballais avec de quoi survivre dans un environnement pareil, je tournais le dos à ma chère cousine, sur le départ. Un pas. Puis deux... puis un arrêt. Je tournai la tête vers sa direction... une dernière fois, avant un long moment.

J’estime que tu es en droit de savoir, et de comprendre... je peux comprendre ce que tu ressens. Je ne suis peut-être un criminel à tes yeux, et aux yeux des autres, mais je suis toujours ton cousin, quoique je devienne. Rien ne le changera. Je te demande juste de supporter ce manque de réponse pendant quelques temps encore... combien de temps cela durera ? Un mois ? Un an ? Je n’en sais rien... mais lorsque j’aurais toutes les réponses, quoiqu’il en coûte, je reviendrai vers toi. J’ai juste besoin de me faire oublier pour quelques temps, mais je trouverai un moyen pour te contacter. C’est une promesse... Tsukiko.

Un sourire gêné, alors que je me remis en route, allant chercher les deux femmes avec qui j’étais pour cette mission. Ne lui laissant pas l’occasion de me suivre, j’allais me perdre dans la foule pour les retrouver, en suivant mes sens les plus aiguisés. Il était grand temps de partir.

Un mal naissait. Une douleur au coeur, de la laisser ainsi. Malheureusement, je n’avais pas le choix. Tel était la vie que je menais, dès à présent.

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