Mais qui peut me tester ? Personne. Ahahaha, petit délire de ma part, aussi revenons vite à ce qui nous intéresse vraiment. Voilà quelques jours que je vais, ci et là, dans les entrailles de ce que l'on nomme à présent "Shûkai". Pour un voyageur aussi candide que moi, rien de plus fantastique. Les pays semblent aller mieux, et prêcher ma bonne parole semble plus aisé qu'auparavant. L'âge, peut-être ? Je ne sais pas, mais le fait est que j'aime beaucoup la belle ambiance qui règne dans cette alliance, et le temps n'y est sans doute pas pour rien. J'ai la joie de vivre quand je vois les petits enfants me suivre sur mon chemin en me posant tout un tas de questions, questionnant chapeau, ombrelle, kung-fu, tours de magie. Le sourire illumine mon visage depuis ces quelques jours, donc. Ah, tout ce que j'ai manqué enfermé dans mon temple !

Sinon, me voilà arrivé à Shozaichi, et j'admire la majestueuse forteresse. Ce Shûkai doit être puissant pour se permettre d'aussi belles installations. J'ai entendu parler d'un Triumvirat, est-ce à son effigie que fut construit ce Palais ? Je me le demande. Quoi qu'il en soit, c'est bien dans l'optique de venir en rencontrer un, de Triumvir que j'étais venu jusqu'ici. Dans chaque monde il faut un moine, et ce moine, c'est moi. Connaître le moine, c'est s'inscrire dans le côté des bons, et seuls les bons s'en sortent dans les contes pour enfant. Aussi, car le monde est mené par des enfants, je crois bon d'être celui qui offre sa place aux puissants du bon côté. Les Furyous ne pourraient vaincre une cité ayant reçu la bénédiction d'un moine, de surcroît.

Mon bâton fermement tenu, mon chapeau de paille solidement posé, je crie à qui voudra entendre.

-Kodoku de Maskine vous salue, Shozaichijins ! Pas de réponse de la part du guet. Alors je continue sur ma lancée, histoire de ne pas perdre de temps. Je viens m'entretenir avec l'un des trois Triumvir ! Toujours pas de réponse. Je propose qu'en attendant sa venue, nous échangions quelques passes, qu'en dîtes-vous ?

Ah, cette fois-ci, on m'entend. Sitôt le combat proposé, un gorille avec des airs de "BASTON !" saute du haut des murailles et vient m'accoster. Respectueux envers mon adversaire, je le salue tout d'abord de la tête, puis enlève mon chapeau.

-Maskiiiine... la dernière fois que j'ai entendu ça, ça venait d'un mec maintenant mort. Petit haussement de sourcil. Tu viens en paix, je sais, mais tu as voulu échanger, non ?

Cet accent... celui d'un Kirijin. Je suis indifférent à ces gens-là. Aussi, je salue, poing et paume, et me mets en garde. Pourvue que l'on vienne nous sauver d'un duel amical qui tournera vite au massacre mutuel.

C’est par hasard qu’elle l’entendit. Il fallait dire que c’était une chose rare que Baransu Nora soit amenée à aller jusqu’à l’entrée principale pour y faire un tour. Enfin, le mot « tour » était peut-être exagéré, puisqu’elle y était de son plein gré et pour une tâche assez particulière. Elle voulait s’assurer de tout bien connaître, et cela passait donc par un dressage de la liste des dernières visites. Le Shûkai et plus particulièrement le Shozaichi attirait nombre de visiteurs, aux origines différentes. Il en était probablement pareil pour leurs idéaux, affichés et cachés. Pour Nora, il n’y avait déjà aucun doute : certains membres du Shûkai avaient d’ores et déjà des intentions peu louables à propos de l’Alliance. Des terroristes, traîtres, espions… C’était…

« Oh ? Mais qu’est-ce que vous faites ? »

S’étant suffisamment approchée du bureau où elle se voyait déjà fouiller dans les archives, elle avait donc entendu un nom : Maskine. Et son regard se porta sur un garde qui s’apprêtait à échanger quelques coups avec le nouveau venu. Il était reconnaissable, puisque c’était celui des deux qui ne portait pas l’uniforme du Shozaichi.

C’est soudain qu’elle apparut entre les deux énergumènes, l’index flirtant avec sa bouche, démontrant sa curiosité. Peut-être était-elle-même trop proche du visiteur, peut-être allait-elle paraître étrange à le regarder avec insistance. C’est une fois qu’elle eut compris que son comportement n’était peut-être pas adapté qu’elle recula et ricana, main derrière la tête.

« Désolée, j’me suis pas présentée ! Baransu Nora, je suis la Capitaine du Jôhô ! »

Elle ricana une nouvelle fois, se frotta l’arrière du crâne comme gênée, puis regarda le garde, avant de reporter son regard sur celui de l’inconnu. Enfin, il n’était plus tant un inconnu que ça…

« Eh, vous alliez quand même pas vous battre hein ? Déjà que la dernière fois… Ahahahah ! »

Le garde s’était déjà remis droit, face à l’un de ses supérieurs les plus importants. Même si ce dernier souriait comme une idiote, du moins à première vue. Mais le premier avis était souvent le plus important pour la plupart des personnes. Et les shinobis ne faisaient pas exception.

Enfin elle arrive, oui, celle qui sauve. Si elle sait aussi bien le monde qu'elle sait apaiser les conflits alors cette journée me serait une réussite. Un être apparemment empli de simplicité, le genre d'être que nous autres moines ne jugeons pas. Sa bonté n'a d'égale que son originalité. Aussi, alors que les maux anciens s’apaisent, je prends la parole, non sans entrain.

-Nous étions en train d'échanger quelques passes, mais bien qu'elle évitât à votre homme l'apprentissage, votre rapidité me réjouit, merci.

Je suis moine, aussi je joue cartes sur table, je ne me tracasse pas des coups fourrés et autres manigances trop ingénieuses et coûteuses en énergie. Car oui, ce Kirijin aurait beaucoup appris de moi, je pense, tout comme j'aurais appris grâce à lui, voilà pourquoi nous nommons les duels amicaux, sans touches: Echanges. En parlant de jouer cartes sur table, je ne cache pas le petit ressentiment éprouvé envers ce Kirijin qui, j'espère, ne croisera plus ma route.

-Même si la visite de votre citée m'aurait enjoué, je me dois de procéder comme je l'aurais fait avec votre homme de main: vite. Mais avant, j'attire l'attention de Maskine et des Dieux sur vos terres pour qu'ils lui accordent la bénédiction qu'une Alliance de paix mérite en ces temps de guerre. Puissent-ils punir les dieux usurpateurs Furyous et protéger votre industrieux Shûkai des maux, la seule arme que le faible sait manier, qu'ils provoquent.

Notre vie régulée par la prière nous empêche de couper aussi court que nous l'espérons parfois. La prière étant un dialogue avec soi-même et les divinités, et la prière étant longue, nous ne savons pas être concis tant nous avons à dire. Et ces Furyous... Maskine saura les punir, les faire glisser de leur piédestal.

-Si je viens ici c'est pour invoquer votre savoir. Je suis actuellement à la recherche de celui que certains se plaisent à nommer "Maître Ukyô le Prodigieux". Je ne saurais vous le décrire ni même vous donner une quelconque piste de recherche pour que vos services puissent s'atteler à sa recherche, j'en suis navré. Puis, d'un air rêveur... Je le recherche... simplement. Peut-être les espoirs que je place en lui sont trop... je ne saurais dire. J'aimerais lui rappeler que Maskine plaça un jour une confiance immense en lui, et que plus que jamais, ce pour quoi il fut permis de devenir aussi fort, le réclame. Je marque un temps, puis me concentre sur mon interlocutrice. Voyez-vous, Madame Baransu, nous sommes des gardiens, et toujours le monde a compté pour nous. Parfois, les êtres se perdent, et cela est triste. Pour ce qui est des plus exceptionnels, cela l'est encore plus, car voilà que le fardeau du monde pèse sur leurs épaules, et que plus que jamais, la solitude les gagne. "Je suis le moine dans la lumière, celui qui protège et guide."...