Sous l'ère du Shodaime...

J'aide le Kakumeigun dans la construction d'un village shinobi car ils me rappellent comme j'étais lorsque j'ai voulu fonder Kumo.
Mais pour vous c'était différent, vous avez toujours été Kadoria Uriô, l'homme le plus puissant et imposant des Kadoria et de tout le Pays de la Foudre. Personne d'autre n'aurait pu devenir Raïkage à votre place. Eux ne sont... qu'un groupe de shinobis qui usent de bassesses rien que pour se faire entendre.

Le Shodaime avait esquissé un sourire.

Tu te trompes, Tsumei. Il est né au sein de mon clan un garçon qui me dépassait dans de nombreux domaines et ce malgré qu'il était plus jeune que moi. Avoir conscience qu'il y a toujours plus fort que toi est une force. Et c'est parce que je sais ça que je peux être le Shodaime, parce qu'au-delà de la puissance, c'est l'amour de ma patrie et de mes compagnons qui me motive.
Et où est-il, monsieur, ce garçon qui vous dépassait dans votre jeunesse ?
Crois-moi, je donnerais ma vie pour le savoir.

***

Le rôle de Raïkage n’était pas de tout repos, aussi bien sur le plan physique que sur le plan spirituel. Si le premier de ces aspects n’était pas très dérageant pour l’informateur qu’était Tsumei, c’était bien la fatigue qu’il accumulait ou plutôt la lassitude quant aux dossiers à regarder, remplir, signer… La paperasse était décidément un domaine qui ne lui plaisait guère. Mais comme il ne cessait de se le répéter, il avait accepté cette charge avec tout ce qui allait avec. Tel avait été le souhait du Daimyô et de ses deux conseillers.

Mais aujourd’hui allait être un jour de paperasse plus significative. En effet, le Yondaime avait décidé de s’intéresser à quelques cas qui lui semblaient importants à la fois pour lui ou pour d’autres membres du Conseil. Et le premier était une kunoïchi : Natsumi Mairu.

En regardant son dossier, Tsumei avait été intéressé de voir les raisons de son état actuel. Sa hiérarchie n’avait pas bougé depuis ses premiers jours. En effet, toujours Genin et ce malgré des capacités toujours croissantes, le Conseil s’était posé la question de savoir où elle en était.

Mais les chiffres et les suggestions ne faisaient pas tout. Ce n’était pas avec de l’entraînement que l’on pouvait arriver à tout, surtout lorsqu’il s’agissait de monter en grade. Le Karasu suivait une logique bien précise, selon laquelle la force était loin de tout faire. Bien au contraire, il avait toujours préféré la réflexion à la force brute.

Est-ce que la jeune Genin était au moins un peu intellectuelle ? Méritait-elle que l’on s’intéresse à sa promotion ? Il y avait des questions auxquelles personne ne pouvait répondre directement ainsi. Et même s’il était Kage et qu’il avait de nombreuses choses à faire, le Yondaime avait fait convoquer l’intéressée dans son bureau, à quatorze heures précises.

D’ailleurs, l’heure du rendez-vous approchait à grand pas. Moins dix, ce qui laissait encore à l’Ombre de la Foudre le temps de signer un ou deux parchemins. Ah, vivement qu’elle soit là, pensa-t-il. Car il avait déjà besoin de faire autre chose. Et vérifier les compétences d’un shinobi lui semblait une occupation des plus intéressantes. Cela restait maintenant une chose à confirmer.

Fidèle à ses habitudes que bien des gens qualifieraient de mauvaises, la Natsumi était en train de vider son troisième bol de nouilles en guise de déjeuner. Tout en mangeant son repas express favori, ses yeux sanguins se fixèrent sur une lettre qui traînait par terre non loin d’elle. Celle-ci était une convocation du nouveau Raïkage en personne. Bien qu’elle n’était pas du genre à s’inquiéter, elle se demandait toujours le motif de cette invitation qu’elle considérait comme de mauvais augure. Était-ce liée à son défunt grand frère ou bien la raison se trouvait dans ses agissements personnels. Elle essaya de se remémorer de ce qu’elle a bien pu faire de travers pour attirer la foudre de l’homme fraîchement niché au pouvoir mais elle ne trouva rien qui méritait cette attention dont elle se serait bien passée. Peut-être que le fondement remontait bien plus loin. Il faut dire qu’à son arrivée à Kumogakure no Satô, ses comportements étaient souvent mal perçus, surtout par les civils car elle essayait toujours de se montrer «exemplaire» face à ses compères shinobi; du moins envers les plus hauts gradés qui ne lui cherchaient pas de noise. Ses comportements ont dû être répertoriés quelque part et pour son malheur, le Yondaime Raïkage était tombé sur son dossier.

Pour une fois de sa misérable vie, la jeune Natsumi s’inquiétait de son sort. Et si le Raïkage décidait de la condamner à mort ? Elle n’aurait aucune chance de sauver ses fesses si elle se rendait sur le lieu où il l’avait convoqué. Il était donc préférable pour sa personne qu’elle lui pose un lapin et s’échapper dès maintenant. Elle pourrait partir du village avant qu’il ne donne l’alerte. Elle serait sans doute traquée par la suite mais au moins elle pourrait survivre encore quelques semaines ou quelques mois et avec un peu de chance, on cesserait peut-être de la poursuivre. Mais voilà, s'il y a quelques mois encore l’exécution de cette initiative suicidaire ne lui aurait posé aucun problème, présentement elle n’avait aucune envie de quitter ce village qu’elle avait fini par apprécier malgré elle avec le temps.

La jeune femme secoua vigoureusement la tête pour tenter de chasser les idées noires qui hantaient sa tête puis elle termina son bol de nouilles avec empressement bien qu’elle avait encore largement le temps pour se rendre au rendez-vous fatidique. Lorsque vint le moment de partir, elle alla se regarder dans l’unique miroir plein pied qui ornait son petit appartement pour se regarder sur tous les angles. Elle ne cherchait pas à savoir si elle était désirable ou autres conneries du genre car loin d’elle l’idée de vouloir séduire l’homme qu’elle allait rencontrer mais elle vérifiait tout de même si elle était minimum présentable. Là était la moindre des choses car après tout elle n’allait pas faire la rencontre de n’importe qui. D’ailleurs pour l’occasion, elle aurait pu faire l’effort de s’habiller autrement, ou plutôt correctement, mais au lieu de cela elle était restée fidèle à son éternel look chemise claire rentrée dans une jupe plissée de couleur sombre tombante jusqu’à mi-cuisse. Elle arborait l’apparence d’une jeune fille plutôt frivole donc loin d’être présentable devant un homme de pouvoir intègre mais elle n’avait aucune envie de se faire passer pour un être qu’elle n’était pas juste pour tenter de faire bonne impression. Elle se rendrait donc ainsi, telle qu’elle était, devant le Raïkage et libre à lui de la juger selon son apparence.

Aucun pli disgracieux sur son haut, aucun bout de sa jupe n’était rentré sous son sous-vêtement et les verres de ses lunettes étaient impeccablement propres. Elle était donc parée pour affronter le regard du nouvel homme de pouvoir. Tout au long du chemin menant vers le palais du Raïkage, ses pas exprimaient une détermination sans failles mais une fois qu’elle se trouva dans le couloir qui menait vers le bureau où elle était surement déjà attendue, ceux-ci ralentirent. Elle hésitait entre poursuivre son chemin et faire demi-tour. Cependant, sa détermination d’abandonner n’était pas assez forte et elle se retrouva à toquer sur la porte sans vraiment s’en rendre compte. Elle attendit qu’on l’invitât à rentrer pour pousser la porte et faire quelques pas vers l’homme qui semblait l'attendre déjà. Elle se courba légèrement pour à la fois le saluer et se présenter comme le voulait la politesse.

- Je suis Natsumi Mairu. J’espère ne pas vous avoir fait attendre Raïkage-sama !

Etant du genre ponctuelle, elle n'était pas arrivée en retard mais elle n'était pas en avance non plus. La jeune femme n’attendit pas qu'il lui réponde pour se redresser. Elle plongea ensuite son regard sanguin dénué d’émotivité dans celui de l’homme qu’elle tentait à présent de sonder …

Ce n’est qu’une fois l’heure arrivée à sa précision que des coups résonnèrent. La porte de son bureau s’ouvrit, et un de ses conseillers lissa la jeune Genin entrer. Natsumi Mairu, elle était donc là, présente à la convocation. La ponctualité était une chose essentielle pour un shinobi, et elle avait marqué un bon point en respectant cette dernière. Mais c’était bien loin de suffire, et de toute façon, c’était surtout pour connaître la kunoïchi et non pas pour lui attribuer une promotion ou non que cette entrevue avait lieu.

Des yeux rouges à peine teintés par des lunettes. Une apparence que l’on pourrait qualifier de trop intelligente, mais selon les rapports qui avaient été faits, c’était plutôt l’inverse de l’intéressée. Du mouvement, elle en avait créé, et on parlait parfois même d’impolitesse. Une chose était sûre : la jeune femme avait du caractère. Mais est-ce que cela devait toujours être sanctionné ? Encore une fois, Tsumei n’en savait rien.

Non, je t’en prie assis-toi.

Que faire de cette kunoïchi ? Il n’en savait rien, il ne savait pas par quoi commencer. La cerner, c’était une chose primordiale. Des questions donc, mais lesquelles ? Fort heureusement pour lui, le Raïkage avait pu y réfléchir un peu avant. C’est donc quelques instants plus tard qu’il reprit.

Dis-moi, que penses-tu de la guerre que nous vivons actuellement ?

C’était une question très simple et à la fois très complexe. La Guerre pour l’Indépendance était sans nul doute l’évènement le plus marquant que le village subissait en ce moment et depuis quelques temps… Au moins depuis la bataille finale contre Gogyou Makka.

Pourquoi parler de ça ? Non seulement c’était d’actualité, mais l’origine même de ce conflit et le ressenti que chacun pouvait avoir n’étaient pas des choses simples. Certains auraient des avis positifs, d’autres négatifs… Et l’important était de voir ce que pensait réellement la jeune Natsumi.

Partir de là était quelque-chose de bien plus malin qu’on ne pouvait le penser. Et le Karasu avait donc jugé que c’était un bon départ, pour cette entrevue d’une importance certaine, surtout pour l’intéressée Natsumi Mairu, jeune Genin de Kumo.

La face-à-face qu’elle avait un peu redoutée eut finalement lieu et étrangement l’appréhension l’avait totalement désertée bien qu’elle se retrouvait face à un raïkage qui imposait le respect et devait faire flipper bien de ses semblables. Il émanait du nouvel homme de pouvoir une assurance qui reflétait sa puissance et qui aurait poussé la kunoichi à une grande méfiance comme si elle se retrouvait face à la peste s’il ne s'agissait pas là de son kage. Debout fièrement face à l’homme qu’elle reluquait à présent sans la moindre discrétion, elle était restée silencieuse après sa salutation tel un gentil toutou attendant qu’on lui jette son os. «Plutôt bel homme» se disait-elle tout en arrangeant inutilement ses lunettes, qui n’avaient pas pourtant bougé de leur place, par le milieu de la monture avec l’index de sa main droite comme pour tenter de cacher cette pensée qui n’avait pas lieu d’être dans une telle circonstance. Un tic qui trahissait plutôt le fond de ses pensées mais on ne peut changer une habitude même traîtresse.

Après un silence qui sembla au genin une éternité, bien qu’en réalité il n’avait duré que quelques secondes, le raïkage ouvrit enfin la bouche pour laisser échapper une phrase qui résonna telle une berceuse aux oreilles de la jeune femme. Ce n’était qu’une invitation à s’asseoir mais exprimée avec une telle politesse que cela la déboussola un tantinet. Elle qui était habituée à entendre que des propos durs et parfois rabaissants venant des êtres dont elle était au service ne s’attendait pas à une telle courtoisie venant d’un kage, pas même de celui qu’elle obéissait. Là était sans doute la façon naturelle du raïkage de s’exprimer mais la Natsumi n’arrivait pas à croire qu’il s’adressait à elle. Malgré le léger ébranlement intérieur que cette simple phrase avait provoqué en elle qui était pourtant passée maîtresse dans l’inémotivité, elle ne laissa rien transparaître à l’extérieur. Cependant elle eut recours pour la seconde fois en seulement quelques minutes à son tic habituel avec ses lunettes avant de lâcher d’une voix flegmatique :

- si vous permettez, je préférerais rester debout !

La règle de la bienséance lui dictait peut-être d’accepter l’invitation à s’asseoir mais elle se sentait plus à son aise en restant ainsi debout. Ainsi donc, elle resta sur sa position, tout en continuant de fixer l’homme qui lui faisait face.

Puis vint le moment fatidique de l’interrogatoire mais à la grande surprise de la kunoichi, ce ne fut pas son défunt grand frère le sujet de la conversation, comme ça été le cas pendant son entretien avec l'ex-raïkage lors de son arrivée dans le village, mais il lui demandait son avis sur la guerre qu’ils vivaient en ce moment. Très bonne question mais à laquelle elle n’avait jamais réfléchi à la réponse. Cependant elle ne mit pas longtemps avant de répondre sur un ton placide qui lui était habituel.

- Je pense que nous avons raison de nous battre afin de préserver la confiance que le Pays du Fer nous a accordée. Il est de notre devoir de faire abdiquer ceux qui veulent nous arracher cette confiance.

Une discussion qui tournait autour de la guerre. Cette Guerre pour l’Indépendance dans laquelle Tsumei était arrivé. En tant que Kage, son devoir allait être employé dans cet évènement, et chaque décision qu’il aurait à prendre se révélerait d’une importance capitale et mondiale. Il avait toujours baigné dans la politique, l’information et la désinformation ; mais être le chef de Kumo était une chose toute récente pour lui. Il voulait prendre le temps de réfléchir. Il le devait.

Questionner des shinobis, même de bas rang ou sans réelle qualification stratégique ou militaire, n’était pas une mauvaise chose pour lui. Après tout, lui qui devait représenter le village de Kumo, se devait sûrement d’écouter et de récolter le plus d’avis possible. Même si les décisions à prendre revenaient au Conseil et inévitablement à lui.

Tant de pouvoirs impliquant tant de responsabilités. Karasu Tsumei ne voulait pas échouer, et il savait qu’une toute petite erreur pouvait l’entraîner dans des malheurs pour lui ou pour Kumo. La guerre avait élargi tout ça. Une erreur de sa part pouvait provoquer le chaos.

Se battre pour le pays qui est notre allié ? Je vois.

Il se leva. Ce n’était pas forcément parce que la jeune kunoïchi était restée debout, mais aussi parce qu’il aimait regarder le village dont il était désormais le gardien. C’est pourquoi il tourna le dos à son interlocutrice.

Mais n’est-il pas vrai que d’un côté, cette guerre affecte nos alliés alors que si nous les avions laissés indépendants, ils seraient aujourd’hui en paix ?

Le sujet et la question qui étaient au cœur de ce conflit. Au cœur de cette Guerre… pour l’Indépendance.

Il était curieux de se faire l’avocat du diable à chaque fois. Si Konoha et Kumo semblaient être contres cette idée, réfléchir et se mettre à la place d’autrui portait toujours de bons fruits. C’était d’ailleurs monnaie courante dans les missions secrètes que Karasu Tsumei avait faites avant d’être Raïkage, dans l’information et la désinformation. Comprendre l’ennemi, l’analyser, s’introduire en lui, appréhender ses mouvements… et l’utiliser. En n’oubliant jamais sa mission. En n’oubliant jamais pour qui on se bat.

Le Raïkage aurait sans doute souhaité plus de développements de la part de la Kunoichi mais cette dernière n’était pas du genre à s’étaler sur ce genre de sujet qui en général, elle préférait ne pas aborder. Elle se considérait comme un simple soldat dont le rôle se limitait à exécuter les ordres donnés sans se demander le pourquoi du comment. N’étant pas une kunoichi dont l’éducation avait débuté au sein de Kumogakure no Sato mais sur île qui avait été dominée par une des plus effrayantes créatures qu’avaient engendrées ce monde, la binoclarde avait reçu une éducation de plus rude qui ne lui avait pas octroyé le pouvoir de libre expression. Un mot de travers pouvait occasionner la mort du maladroit alors faire taire ses opinions, même face à l’injustice dont on subissait, était la meilleure option à adopter si on tenait un tantinet à la vie. Elle avait eu de la chance d’avoir été sous l’aile d’une personne qui s’était contentée de la punir sévèrement à chacun de ses nombreux écarts car sinon elle ne serait pas là aujourd’hui, en train de faire face à l’homme le plus puissant du village qu’elle servait actuellement et qui lui demandait ses jugements sur un sujet très important pour leur Nation, voire le monde. Effacer des années d’éducation n’était pas une chose aisée voire impossible. La Natsumi était alors peut-être condamnée à rester une kunoichi à part qui ne deviendrait jamais un bon exemple pour les générations à venir. Elle avait bien changé depuis son arrivée dans le village caché de Kaminari no Kuni mais le chemin vers la perfection était encore bien long. Et puis, sa personnalité actuelle avait-il réellement besoin d’être remodelée entièrement pour en faire une kunoichi digne de ce nom ?

L’homme se leva et sans pudeur la jeune femme le suivit des yeux et non pas parce qu’il était bel homme mais là était une chose naturelle qu’elle aurait accordée à quiconque. Le dos tourné à son interlocutrice, il poursuivit sa récolte de points de vue auprès de la genin qui ne l’avait pas quitté des yeux. Tenait-il sérieusement à savoir le fond de ses pensées ou bien là n’était qu’un test pour sonder sa personne ? Le Raïkage aurait-il un doute quant à sa loyauté envers Kumogakure no Satô ? Elle pourrait lui poser la dernière question mais elle ne le fera pas, du moins pas tout de suite, car là n’était pas le sujet de sa présence. Puisqu’il souhaitait l’entendre alors elle allait s'exprimer et avec sincérité car elle jugeait que les mensonges n’avaient point sa place dans la situation présente.

- S'ils désiraient réellement cette paix dont vous parlez, je pense qu’ils n’hésiteraient pas à l’exprimer d’une façon ou d'une autre. Hors, sauf si je suis dans l’erreur, ils semblent s’accrocher à l’alliance qu’ils pourraient pourtant rompre à tout moment.

Sans plus de développement une fois de plus, la jeune femme se tut tout en gardant ses yeux sanguins rivés sur les épaules de cet homme qui devaient supporter bien des responsabilités. Chose dont elle ne lui enviait aucunement ...