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Onze ans. Cela remonte déjà à onze ans. On ne dirait pas. Comme quoi, le temps passe vite. Tu te souviens de ce voyage que tu avais fait à Ame. Tu avais laissé Kaido au bons soins de ton camarade Kaguya pendant quelques jours. Tu savais bien que Masaru ne serait pas très sérieux, mais tu l'avais prévenu. Tu avais déjà réglé quelques unes de ses dettes de boisson. Alors il te devait au moins ça. Sinon, tu irais lui remettre quelques créanciers sur le dos. Ainsi qu'une paire de baffes dans la figure. Un bon moyen de t'assurer que Kaido serait en sûreté et bien traité durant ton absence. Et puis, malgré ses airs débonnaires, tu sais bien que ton camarade Kaguya n'est pas si empoté que ça... Quand à toi, tu étais parti en voyage d'affaires, pour réapprovisionner quelques marchandises que le convoi régulier n'avait pas pu te trouver.

Tu étais parti seul, avec ton chariot, embarquant quelques marchandises au cas où tu pourrais vendre un peu. Tu n'étais pas encore expert en commerce, mais tu commençais à t'y connaître. Après tout, depuis la perte de ta femme, c'est toi qui devait gérer le magasin. Alors tu t'es formé sur le tas. Repérer les bonnes affaires, négocier les prix, faire fluctuer les valeurs des marchandises et sentir les arnaques. C'est d'ailleurs sur ce dernier point que tu étais particulièrement doué. Les contrefaçons et les tentatives de vol ne t’échappaient pas. Et encore aujourd'hui, tu sais les repérer.

Ce jour là... Tu pensais que tout se passerai bien, qu'il n'y aurait pas de problèmes. Et pourtant. Pourtant, les ennuis ont pointé leur nez. Tu étais tranquillement installé à ton étal, à attendre les clients. C'est alors que tu sens une pression sur ta bourse. Tu jettes un coup d'oeil, voyant une jeune femme tenter de te voler tes ryos. Hum. Tu souris légèrement, avant de te tourner, changeant de position, remuant pour l'empêcher de parvenir à ses moyens. Tu vas t'amuser un peu avec ses nerfs. Tu vois un agent de police passer. Les choses vont bouger. Tu appréhendes ce qui risque de se passer si tu continues. Tu commences alors à t'éloigner, pour attirer la jeune fille, ne serait-ce que pour la mettre en garde. Et lui donner une petite leçon. Mais tu n'en as pas le temps. Tu entends des éclats de voix derrière toi. Elle s'est fait attraper. La main dans le sac. Tu soupires, avant de t'avancer vers l'agent.

Hep. Arrêtez ça. Vous n'allez pas arrêter ma fille quand même...

Tout en parlant, tu lui as attrapé le poignet, le forçant à lâcher la jeune femme. Dans le même mouvement, tu lui glisses un billet dans la main, avant de prendre la jeune fille par l'épaule, l'emmenant plus loin avec toi.

Bon, et je t'ai déjà dit de me demander ton argent de poche, plutôt que de te servir !

Tu espères qu'elle fera rien de stupide. Après tout, tu viens de lui sauver la mise... Mais elle devoir te fournir quelques explications...

On venait de me prendre le ma in dans le sac, ni plus ni moins ; un milicien me serrait le poignet, voulant m'entraîner. Je voyais déjà se profiler devant moi mon avenir proche, un séjour en prison, ou peut être pire. Je connaissais les risques, je savais ce que je faisais, et ce n'était pas innocent non plus. Je n'acceptais jamais l'aide des autres, je préférais me débrouiller seule en général, puis de toute façon ce n'est pas comme si on me prêter un quelconque intérêt valable pour qu'on m'aide. On me considérait comme un nuisible, sans qu'on me le dise, je le sentais, les regards, les chuchotements, parfois une forme de pitié mais rien de plus.. J'avais appris à me protéger. Alors, quand ma victime devint quelque part mon sauveur, pour commencer je ne sus comment réagir, rejeter ou accepter ?

J'acceptais alors cette aide, cela pouvait quand même m'éviter de passer un sale, très très sale moment dans une prison lugubre, sombre ; je savais que, peut être étais je brutale, violente, dur, sans éducation, mais de là à mériter de voir mon destin réduit en cendres, de voir mon corps réduit à l'état de simple objet, car je savais parfaitement que c'est ce qui m'arriverait si on me jetais au fond des geôles d'un centre d'Ame. Je jouais le jeu de ce marchand. J'observais chacun de ses gestes, la poignée de main avec le garde, le billet glissé, le pot de vin versé. Il payait même pour m'éviter d'être ''arrêtée'' ? J'avais du mal à comprendre pour le coup. Le garde s'éloigne, baragouinant, se plaignant. Il était pourtant sûr d'avoir arrêté le pick pocket auteur de plusieurs vols dans les rues de la ptite ville.

Maintenant seule avec ce samaritain, enfin, sans compter la foule grouillant tout autour ; je me demandais ce que je devais faire. Je restais plantée là, silencieuse. L'observant toujours. L semblait attendre quelque chose.. Hum, que je le remercie, que je me tourne vers la lumière ? Et bien non, y a de la lumière partout, et je lui ai pas demandé de m'aider, à la base il fait partie de ceux que je dépouille. Était il stupide ou alors trop gentil ? Je ne pouvais le dire, cet homme était un mystère, et j'aimais les mystères, j'étais curieuse. Alors du coup je n'allais pas m'éclipser comme une voleuse après son méfait, puisqu'au final, je n'avais rien fait.

« J'avais pas besoin de ton aide, je sais me débrouiller toute seule ! » Dis-je sur un ton plutôt brusque. La mine renfrognée je repris la parole après un soupir évocateur.
« Rhaa... Désolée d'avoir essayé de te dépouiller. » M'excusais-je à contre cœur.

Je n'avais pas l'habitude des excuses, et même si je faisais celle qui s'en fout, et bien au plus profond de moi je lui en étais reconnaissante. Je n'avais pas envie, mais alors vraiment pas, de tomber dans une cellule crasseuse avec la compagnie d'un vrai criminel. Je me passai la main sur le ventre, je devais trouver autre chose à voler à quelqu'un d'autre, pour au moins remplir mon estomac marqué par plusieurs jours ''creux''.

« Je peux partir maintenant ? Ou t'as aut'chose à ajouter ? » achevais-je sur un ton toujours aussi agressif.